Contrats d'affaires

Aux termes de l'alinéa 1er de l'article 1186,  inséré dans le Code civil par la réforme du droit des obligations, un contrat valablement formé devient caduc si l’un de ses éléments essentiels disparaît. Sanction du contrat régulièrement formé qui perd, postérieurement à sa formation, un élément essentiel à sa validité,  la caducité se distingue ainsi d'une part, de la nullité qui sanctionne la formation du contrat dont un élément essentiel manque - le contrat n'est pas formé - et d'autre part, de la résolution, qui est une sanction de l'exécution fautive du contrat.

L'article 1186 dispose par ailleurs : “Lorsque l’exécution de plusieurs contrats est nécessaire à la réalisation d’une même opération et que l’un d’eux disparaît, sont caducs les contrats dont l’exécution est rendue impossible par cette disparition et ceux pour lesquels l’exécution du contrat disparu était une condition déterminante du consentement d’une partie. La caducité n’intervient toutefois que si le contractant contre lequel elle est invoquée connaissait l’existence de l’opération d’ensemble lorsqu’il a donné son consentement”. En outre, aux termes de l’article 1187, la caducité met fin au contrat et peut donner lieu à restitution selon les modalités prévues aux articles 1352 à 1352-9.

Il résulte de ces textes, qui codifient en partie la jurisprudence, qu'une vente peut être caduque, soit parce que le contrat de vente, régulièrement formé, a vu disparaître un élément essentiel à sa validité (ex: défaillance de la condition suspensive ) ou à son contenu (ex : disparition du prix  ou de la cause ou de l'objet du contrat, avant la réforme du droit des contrats), soit parce qu'il est interdépendant avec un autre contrat dont la disparition fait obstacle à son exécution. Dans ce dernier cas, les juges cherchent à caractériser l'indivisibilité entre les contrats en cause pour déclarer la caducité du second à la suite de la disparition du premier . La résiliation d'un contrat d’exploitation entraîne ainsi la caducité d'un contrat d'approvisionnement, dès lors que ces  contrats concourent à la même opération économique et constituent un ensemble contractuel indivisible . La Cour d'appel de Paris a récemment rappelé qu'en présence d'un groupe de contrats liés, pour apprécier leur interdépendance, il convient de déterminer si l'opération d'ensemble a été voulue indivisible, mais aussi si elle a été connue comme telle par celui qui subit la caducité .  En cas de caducité du contrat de vente, l'acquéreur doit restituer le bien vendu et le vendeur, son prix, éventuellement diminué d'une indemnité qui correspond à la dépréciation subie par la chose en raison de l'utilisation qu'en a faite l'acquéreur en tenant compte du préjudice résultant pour ce dernier de l’anéantissement de l’ensemble contractuel .

Cass. 3e civ., 21 mars 2019, LawLex202300006660JBJ : l’acte de vente dont la condition suspensive ne s’est pas réalisée est caduc. - V. égal. Cass. 3e civ., 16 juin 1999, LawLex202200003448JBJ, Defrénois 1999, 1329, obs. MAZEAUD ; RDI 1999, 473, obs. DERRUPPE ; Gaz. Pal. 8-9 février 2002, 37, obs. BARBIER ; AJDI 2002, 372, obs. BLATTER ; JCP G 2000, II. 10239, obs. BOCCARA : est caduque, la vente consentie à une société sous la condition suspensive du  non-exercice par le bénéficiaire d’un pacte de préférence de son droit  de préférence au prix fixé dans l’acte, dès lors que la  condition suspensive n’a pas été levée avant la date prévue et que le  bénéficiaire a déclaré accepter expressément la vente aux conditions  figurant dans la notification.

Cass. com., 2 novembre 1993, LawLex202200003287JBJ, RTD civ. 1994, 599, obs. MESTRE ; D. 1995, 73, obs. FERRIER : le contrat d’approvisionnement exclusif de bières conclu pour une  période de dix ans devient caduc lorsque le salaire de l’ouvrier  brasseur n’est plus fixé paritairement au niveau départemental et fait l’objet de négociations au niveau de l’entreprise entre les  représentants syndicaux et l’employeur, de sorte que, depuis cette  modification, le prix des bières dépend pour partie de la seule volonté  du fournisseur. - V. déjà, Cass. com., 30 juin 1980, LawLex202300006610JBJ, RTD civ. 1982, 142, obs. CHABAS, pour un contrat de fourniture de butane et de propane.

Cass. 3e .civ., 15 avril 2015, LawLex202200003279JBJ, Loyers et copr. 2015, 145, obs. BRAULT, rejetant l'indivisibilité entre un contrat de cession de lots d’une résidence hôtelière et le contrat de bail assorti et partant la caducité du premier par la suite de la résiliation du second, dès lors que l’opération qui permet la réalisation d’un avantage fiscal moyennant l'acquisition d'un lot et la conclusion simultanée d'un bail commercial d’une durée ferme de onze années avec une société de gestion, a été causée en l'espèce, puisque les acquéreurs ont été mis en possession du bien acquis et qu'ils ont conclu un bail commercial ouvrant leur droit à un avantage  fiscal, le fait que le loyer du bail proposé par le repreneur de  ladite société soit moins avantageux que dans le précédent bail ne  pouvant être analysé comme une absence de contrat.

Cass. 1re civ., 4 avril 2006, LawLex202300006604JBJ, RTD civ. 2007, 105, obs. MESTRE et FAGES ; D. 2006, 2656, obs. BOFFA ; Defrénois 2006, 1194, obs. AUBERT ; D. 2006, 2638, obs. AMRANI-MEKKI et FAUVARQUE-CAUSSON ; RDC 2006, 700, obs. MAZEAUD ; 13 mars 2019, LawLex202300006602JBJ : la caducité d’un contrat de vente pour non-réalisation de l’une des  conditions suspensives entraîne nécessairement la caducité de la  convention de cession des parts sociales du même jour, dès lors que les  différents contrats conclus par les parties constituent un ensemble.

Paris, 8 avril 2022, LawLex202200003234JBJ, retenant que la caducité d'un contrat de construction de maison n'entraîne pas la caducité d'un contrat de vente de terrain, dès lors que ces deux contrats ne sont pas indivisibles.

Cass. com. 5 juin 2007, LawLex202200003276JBJ, Dr. et patrimoine septembre 2007, 89, obs. STOFFEL-MUNCK ; JCP G 2007, II, 10184, obs. SERINET ; RTD civ. 2007, 569, obs. FAGES ; D. 2007, 1723, obs. DELPECH ; RTD com. 2008, 173, BOULOC ; RLDC 2008/45, n° 2802, obs. MARTIAL-BRAZ :  insistant sur le fait que la résiliation de contrats de location et de maintenance n’entraîne  pas, lorsque ces contrats constituent un ensemble contractuel complexe et indivisible, la résolution du contrat de vente mais seulement sa  caducité. - V. aussi Paris, 8 avril 2022, LawLex202200003234JBJ : lorsque des contrats sont interdépendants, l'anéantissement de l'un  quelconque d'entre eux entraîne la caducité, par voie de conséquence,  des autres, sauf pour la partie à l'origine de l'anéantissement de cet ensemble contractuel à indemniser le préjudice causé par sa faute.

253. Caducité.