Contrats d'affaires

Outre son caractère déterminé ou déterminable, le prix de de la chose vendue doit être réel et sérieux. Aux termes de l'article 1169 du Code civil, issu de la réforme du droit des obligations, “ un contrat à titre onéreux est nul lorsque, au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui s'engage est illusoire ou dérisoire ”. 

Or, il peut être tentant pour les parties à u …

Prix réel et sérieux

FREYRIA, Le prix de vente symbolique, D. 1997, 51 ;

Outre son caractère déterminé ou déterminable, le prix de de la chose vendue doit être réel et sérieux. Aux termes de l'article 1169 du Code civil, issu de la réforme du droit des obligations, “ un contrat à titre onéreux est nul lorsque, au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui s'engage est illusoire ou dérisoire ”. 

Or, il peut être tentant pour les parties à une vente de dissimuler une partie du prix réel pour des raisons fiscales en violation des dispositions du nouvel article 1202, alinéa 2, du Code civil  qui déclare “ nul tout contrat ayant pour but de dissimuler une partie du prix, lorsqu'elle porte sur une vente d'immeubles, une cession de fonds de commerce ou de clientèle, une cession d'un droit à un bail, ou le bénéfice d'une promesse de bail portant sur tout ou partie d'un immeuble et tout ou partie de la soulte d'un échange ou d'un partage comprenant des biens immeubles, un fonds de commerce ou une clientèle ”. Encourt ainsi la nullité la lettre de change prétendument tirée en règlement de travaux supplémentaires mais qui représente en réalité la partie dissimulée du prix de vente d'une maison . Dans une telle hypothèse, selon la Haute juridiction, la dissimulation d’une partie du prix de vente d’un immeuble entraîne la nullité de la convention secrète sans affecter la validité de l’acte ostensible, que les deux conventions soient ou non indivisibles . Afin de masquer une donation, un vendeur peut également fixer un prix de vente dérisoire : le vendeur apparent, en réalité donateur, est animé d'une intention libérale à l'égard de l'acheteur apparent, en réalité donataire. L'animus donandi peut, notamment, se déduire tant de la modicité du prix que, par exemple, du maintien dans les lieux jusqu'au décès du vendeur apparent . Dans un tel cas, la vente ne peut être annulée pour défaut de prix sérieux, mais peut être requalifiée en donation déguisée si l’acte respecte les conditions de forme légalement requises pour la vente dont elle emprunte l’apparence .

En principe, est nulle la vente réalisée pour un montant symbolique . Une cession d’actions pour un euro symbolique ne saurait être valide, au motif que les parties ont choisi dans un cadre contractuel non contesté un mode de détermination de la valeur des actions à l'issue duquel celles-ci se sont révélées d'une valeur négative, dès lors qu’il appartient au juge de rechercher si le prix de vente des titres déterminé par application de ladite méthode revêt un caractère sérieux . Toutefois, selon la jurisprudence, le faible montant du prix de vente ne suffit pas à entraîner la nullité de l'acte de cession et il convient de s'assurer que l'acte ou l'ensemble contractuel dans lequel celui-ci s'insère, ne contient pas d'autres contreparties ou avantages institués au profit du vendeur, ni n'exige de l'acquéreur qu'il accomplisse des prestations plus substantielles . La Cour de cassation se montre moins rigoriste dans l’appréciation du prix de cessions intervenant dans un contexte de procédure collective, lorsqu’il s’accompagne d’autres engagements de la part de cessionnaire . Elle considère dans ce cas que le caractère sérieux du prix de vente d’un terrain qui s’insère dans un ensemble contractuel indivisible composé de la vente des locaux, du matériel et de la reprise des dettes doit être apprécié au regard de l'économie générale du contrat . 

La vente d'une chose à prix très bas n’est cependant pas nécessairement synonyme de prix dérisoire ou illusoire. Ainsi, le prix de cession de parts sociales fixé à leur valeur nominale n’est pas vil lorsque l’activité de la société reposait, à la date de la cession, uniquement sur le réseau d’affaires du cessionnaire et dépendait d’un très fort intuitus personae, le cessionnaire ayant externalisé des tâches administratives des cabinets d’expertise-comptable qu’il co-dirigeait en les lui sous-traitant . Le caractère réel et sérieux du prix de vente ne doit pas se confondre avec la valeur du bien vendu, de sorte que le juge n'est aucunement obligé de rechercher la valeur réelle de la chose vendue, dès lors qu'elle l'a été en contrepartie d'un prix qui n'est pas dérisoire .

De façon générale, le prix s’apprécie au regard du montant stipulé par les parties, indépendamment des modalités particulières de versement. Selon la Haute juridiction , le caractère dérisoire du prix doit être écarté, lorsque la vente a été consentie pour un montant non négligeable, même si le prix peut s’avérer lésionnaire . En d’autres termes, le prix lésionnaire existe, même s’il est insuffisant, contrairement au prix dérisoire, qui équivaut à une absence de prix . Dès lors, la vente ne peut être annulée pour absence de prix, mais peut être résolue pour autant qu’elle relève du domaine de la lésion. Par ailleurs, une cession portant sur des droits sociaux et consentie moyennant un prix inférieur à la valeur des titres peut faire l’objet d’une annulation, si le prix est dérisoire, dès lors que le principe de la libre fixation par les parties ne s’oppose pas à la nullité pour vil prix . En revanche, un prix ne saurait présenter un caractère dérisoire lorsque quatre experts-comptables différents l'ont estimé sérieux .

Comme l’indétermination du prix, le défaut de prix sérieux est sanctionné par la nullité relative .

L'article 1202, alinéa 2, du Code civil reprend en substance l’ancien article 1840 du Code général des impôts, désormais abrogé.

Cass., 3e civ., 25 juin 1985, LawLex202200000097JBJ, D. 1986, 212, obs. AGOSTINI.

Cass. com., 24 janvier 2024, LawLex202400002090JBJ.

Angers, 26 septembre 2023, LawLex202300012418JBJ.

Cass., 3e civ., 29 avril 1998, LawLex202200000103JBJ, D. 2000. 504, obs. CAUCHY-PSAUME ; D. 1999, somm. 14, obs. PAISANT.

Cass., 1re civ., 20 février 2008, LawLex202200001623JBJ, D. 2009, 276, obs. SAENKO ; Defrénois 2008, 1350, obs. SAVAUX, estimant que la convention qui, prévoyant que “ la vente est consentie et acceptée moyennant un prix [9150 euro] environ, qui a été converti, d'un commun accord entre les parties en l'obligation que prend l'acquéreur envers le vendeur, de lui assurer deux promenades hebdomadaires sur le département de l'Ardèche, de lui fournir l'habillement nécessaire, et généralement lui assurer le suivi de sa correspondance, étant entendu qu'en cas d’admission en hospice ou à l'hôpital, cette obligation cesserait uniquement en ce qui concerne les deux promenades hebdomadaires ” , constitue un contrat de vente, qui peut dès lors être résolu pour vileté du prix, et non un bail à nourriture, car elle ne met pas à la charge de l'acquéreur l'obligation d'assumer la subsistance du vendeur.

Limoges, 11 avril 2024, LawLex202400003249JBJ.

Cass. com., 13 décembre 2011, LawLex202200000118JBJ.

Cass. com., 22 mars 2016, LawLex202200000811JBJ, D. 2016. 1037, chron. TREARD, ARBELLO, Le BRAS et GAUTIER. Avant la réforme du droit des obligations, la vente à prix dérisoire était traditionnellement sanctionnée par la nullité absolue, V. Cass. com., 23 octobre 2007, LawLex202200000096JBJ, RDC 2008/2, 234, obs. GENICON : la vente consentie sans prix sérieux est affectée d'une nullité qui, étant fondée sur l'absence d'un élément essentiel de ce contrat, est une nullité absolue.

Cass. mixt., 12 juin 1981, LawLex202200000937JBJ, D. 1981, 413, obs. CABANNES ; RTD civ. 1982, 141, obs. CHABAS.

Cass., 3e civ., 7 avril 1976, LawLex202200000936JBJ.

Cass., 1re civ., 27 octobre 1993, LawLex202200000100JBJ, RTD civ. 1996. 218, obs. PATARIN, énonçant que les libéralités faites sous le couvert d'actes à titre onéreux sont valables lorsqu'elles réunissent les conditions de forme requises pour la constitution des actes dont elles empruntent l'apparence, les règles auxquelles elles sont assujetties quant au fond étant celles propres aux actes à titre gratuit.

Cass. com., 23 octobre 2007, LawLex202200000096JBJ, RDC 2008/2, 234, obs. GENICON ; 22 mars 2016, LawLex202200000811JBJ, D. 2016. 1037, chron. TREARD, ARBELLO, Le BRAS et GAUTIER.

Cass. com., 7 juin 2011, LawLex202200000935JBJ. - Comp. Cass. com., 3 janvier 1985, LawLex202200000933JBJ : il en va différemment lorsque la cession de titres a été consentie pour un prix laissé à l'arbitrage d'un tiers, qui a estimé que les actions étaient sans valeur, et que le prix payé en conséquence en a été symbolique ; 24 janvier 2024, LawLex202400002090JBJ : le prix de cession de parts sociales fixé à leur valeur nominale n’est pas vil lorsque l’activité de la société reposait, à la date de la cession, uniquement sur le réseau d’affaires du cessionnaire et dépendait d’un très fort intuitu personae, le cessionnaire ayant externalisé des tâches administratives des cabinets d’expertise-comptable qu’il co-dirigeait en les lui sous-traitant.

Cass. com., 16 juin 1998, LawLex202200000934JBJ, Defrénois 1998. 1458, obs. BENABENT.

Cass., 3e civ., 3 mars 1993, LawLex202200000104JBJ, JCP 1994. I. 3744, obs. FABRE-MAGNAN.

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