Tout le droit des sociétés : droit commun des sociétés et régime propre aux différents types de sociétés

Droit des sociétés

En vertu de l'article 1843-3, alinéa 2, du Code civil, l'apport en propriété se caractérise par le transfert à la société de la propriété du bien apporté et par sa mise à disposition effective de cette dernière. Le transfert de propriété du bien à la société implique qu'elle devient titulaire de l'ensemble des droits dont disposait l'apporteur, qui n'en est plus titulaire. C'est d'ailleurs en cela que l'apport en propriété se distingue d'autres type d'apports, tels que l'apport en jouissance . 

En revanche, cette forme d'apport se rapproche singulièrement de la vente. En effet, comme dans celle-ci, en cas d'apport en propriété, l'apporteur est tenu envers la société de certaines garanties, telles que la garantie d'éviction ou la garantie des vices cachés . Il lui transmet également, comme dans la vente, les accessoires de la chose, de sorte qu'une société à laquelle est fait un apport d'immeuble est recevable à intenter une action en garantie, contre l'ingénieur en charge de sa construction . 

Cependant, dans le cas de la vente, le vendeur perçoit en contrepartie de son bien une somme en numéraire   alors que dans le cadre de l'apport en propriété, il perçoit des droits sociaux, dont la valeur peut fluctuer . En outre, l'apporteur, qui ne revêt pas la qualité de vendeur, ne peut bénéficier des privilèges du vendeur telle qu'une éventuelle rescision pour lésion  .

L'apport en propriété peut constituer une voie détournée de l'apporteur pour dissimuler des éléments de son patrimoine et les faire échapper à ses créanciers. Dans ce cas de figure, les créanciers disposent d'une action visant à obtenir la nullité de l'apport ainsi que sa réintégration dans le patrimoine de leur débiteur. Il a été considéré que l'apport à une SCI d'un immeuble commun à des époux après la date de cessation des paiements encourt la nullité lorsqu'il est démontré que l'époux soumis à la procédure collective n'a pas reçu, en contrepartie, de droits sociaux proportionnels .

Enfin, le transfert de propriété du bien apporté n'est effectif qu'à compter de la date d'immatriculation de la société au registre du commerce et des sociétés. C'est en effet à compter de cette date qu'elle acquiert la personnalité morale lui permettant de détenir son propre patrimoine .

Cass. com., 6 décembre 1982, LawLex202200003092JBJ, jugeant que l'apport d'un fonds de commerce à une SARL créée avec des tiers, en contrepartie de la prise en charge par cette dernière des dettes existantes envers la banque, s'analyse en un apport en propriété et non en jouissance lorsque l'apporteur a procédé à la radiation de son activité du registre de commerce afin de devenir employé de la société, tandis que celle-ci s'est inscrite en qualité de propriétaire du fonds.

Cass. 3e civ., 23 mars 1968, LawLex202200003639JBJ.

Cass. com., 9 mars 2022, LawLex202200003639JBJ, considérant que l'apport en propriété, par les associés d'une première société, de l'intégralité de leurs parts sociales en contrepartie de bons de souscription d'actions et d'obligations convertibles dans une deuxième, ne s'analyse pas en une vente.

Cass. req., 12 juin 1945, LawLex202200006674JBJ, concernant le refus d'appliquer à l'apporteur d'un immeuble le bénéfice de la rescision pour lésion de plus des sept douzièmes.

Cass. com., 3 mai 2011, LawLex202100003695JBJ.

CAMBASSEDES, La nature et le régime juridique de l'opération d'apport, Rev. sociétés 1976, 43.

21. Modalités de l'apport en propriété