Tout le droit des sociétés : droit commun des sociétés et régime propre aux différents types de sociétés

Droit des sociétés

L'un des tempéraments admis à la libre négociabilité des actions de SA consiste dans la stipulation de clauses d'agrément dans les statuts de la société. Pour une partie de la doctrine, la clause d'agrément permet de réintroduire un soupçon d'intuitus personae dans une société qui par essence en est dépourvue . Pour des raisons pratiques évidentes, elle ne peut être stipulée que dans des sociétés  …

Mécanisme

L'un des tempéraments admis à la libre négociabilité des actions de SA consiste dans la stipulation de clauses d'agrément dans les statuts de la société. Pour une partie de la doctrine, la clause d'agrément permet de réintroduire un soupçon d'intuitus personae dans une société qui par essence en est dépourvue . Pour des raisons pratiques évidentes, elle ne peut être stipulée que dans des sociétés non cotées. 

Avant l'adoption de l'ordonnance du 24 juin 2004 , les clauses d'agrément ne pouvaient s'appliquer aux cessions entre actionnaires . Une telle solution ne correspondant pas aux nécessités de la pratique, les textes ont été modifiés pour qu'elles puissent couvrir tant les cessions à des tiers qu'entre associés. La jurisprudence considère désormais que l'article L. 228-23 du Code de commerce permet, mais n'impose pas, de soumettre à agrément les cessions d'actions entre actionnaires .

La clause d'agrément implique qu'un éventuel cessionnaire d'actions doit, préalablement à son entrée dans la société, être autorisé par les autres associés . S'agissant du champ de la clause, il convient de souligner qu'il s'étend à la fusion-absorption d’une société, dès lors que celle-ci entraîne le transfert de ses actions à la société bénéficiaire . En revanche, la procédure d'agrément instituée par le Code de commerce pour les cessions d'actions dans les SA ne concerne que la cession des actions de la société elle-même et non de celles des actionnaires qui en composent le capital . Pour autant, les tentatives de contournement de la clause, par le recours à des cessions successives, ne sont pas autorisées. De fait, la cession d’actions d’une société holding à un actionnaire, dont l'intégralité du capital est ensuite rachetée par un tiers, est inopposable à la société dès lors qu'un tel montage vise à échapper, dans un but frauduleux, à l’obligation d’agrément instaurée par les statuts en cas de cession d'actions à des tiers . La clause d'agrément s'applique même en cas de procédure collective de la société dont les actions sont cédées. Dès lors, l'administrateur judiciaire, chargé de passer tous les actes nécessaires à la réalisation de la cession de l’entreprise du débiteur, est tenu de respecter la clause des statuts de la société qui soumet à l'agrément préalable du conseil d'administration la cession des actions de l’entreprise . 

Lorsqu'une clause d'agrément est stipulée, la demande d'agrément, qui indique les nom, prénoms et adresse du cessionnaire, le nombre des titres de capital ou valeurs mobilières donnant accès au capital dont la cession est envisagée et le prix offert, doit être notifiée à la société. La notification à une SA d’une demande d'agrément est valable même si elle ne mentionne qu'un prix provisoire, dès lors que l'agrément porte principalement sur la personne du cessionnaire et non sur le prix, que celui-ci est réel et sincère et que la clause de révision figurant dans le protocole, fondée sur des données comptables étrangères à la volonté des parties, rend le prix définitif objectivement déterminable à la date de la cession . De même, les mentions, dans une demande d'agrément, de la forme et de la dénomination de la société cessionnaire ainsi que de l'adresse de son siège social, sont suffisantes, sans que le cédant ait en outre à apporter des précisions sur la situation économique de celle-ci . 

L'organe compétent pour délivrer l'agrément est désigné dans les statuts. Il s'agit généralement du conseil d'administration  et, plus rarement, de l'assemblée . L'agrément d'un cessionnaire par l'organe désigné doit être pur et simple. Les conditions posées par le conseil d'administration habilité à autoriser la cession sont dès lors réputées non écrites .

L'agrément résulte, soit d'une notification, soit du défaut de réponse dans un délai de trois mois à compter de la demande. Si la société n'agrée pas le cessionnaire proposé, le conseil d'administration, le directoire ou les gérants, selon le cas, sont tenus, dans le délai de trois mois à compter de la notification du refus, de faire acquérir les titres de capital ou valeurs mobilières donnant accès au capital, soit par un actionnaire ou un tiers, soit, avec le consentement du cédant, par la société en vue d'une réduction du capital . A défaut d'accord entre les parties, le prix des titres de capital ou valeurs mobilières donnant accès au capital est déterminé dans le cadre de l'expertise prévue par l'article 1843-4 du Code civil . Le cédant peut à tout moment renoncer à la cession de ses titres de capital ou valeurs mobilières donnant accès au capital. Si, à l'expiration du délai de trois mois, l'achat n'est pas réalisé, l'agrément est considéré comme donné .  Le délai de trois mois pour l’exercice du droit de préemption des actionnaires court à compter de la notification du refus d'agrément et non de la date de l'assemblée générale qui décide de ce refus . Il peut être prolongé par décision de justice à la demande de la société  et porté par exemple de trois à huit mois . L'ordonnance de référé désignant un expert chargé de déterminer le prix d’une cession d’actions et qui, faisant droit à la demande des parties sollicitant l’agrément, prolonge la mission de celui-ci, en omettant de prononcer concurremment la prorogation du délai prévu, à défaut d’agrément, pour le rachat des actions, doit être considérée, en raison de son ambigüité, comme prolongeant les deux délais . L'abus du droit d'agrément est sanctionné : une société anonyme, qui, par ses atermoiements dans la délivrance de l'agrément, accordé plus de quatre ans après la cession des actions, prive le cédant, pendant toute cette période, de la rémunération du capital produit par la cession, commet une faute dont elle lui doit réparation . 

Le dernier alinéa de l'article L. 228-23 du Code de commerce prévoit que toute cession effectuée en violation d'une clause d'agrément figurant dans les statuts est nulle. Il convient cependant de préciser que seuls la société ou les actionnaires dont l'agrément est requis pour autoriser une cession d'actions peuvent s'en prévaloir, à l'exclusion du cessionnaire . Mais, dans certains cas, la cession est réputée conclue même en l'absence de l'agrément pourtant exigé. De fait, le dirigeant qui s’est engagé à céder ses actions sous condition de l'agrément du cessionnaire par la société, ne peut ultérieurement se prévaloir de l'absence d'agrément pour remettre en cause la cession, dès lors qu'il s'est lui-même abstenu de notifier l’opération à la société .

CACHIA, Le déclin de l'anonymat dans les sociétés anonymes, Mélanges Kayser, PUAM, 1979, t. 1, 213 ; ROBLOT, L'agrément des nouveaux actionnaires, Mélanges Bastian, Librairies techniques, 1974, t. 1, 283.

Ord. 2004-604 du 24 juin 2004 portant réforme du régime des valeurs mobilières émises par les sociétés commerciales et extension à l'outre-mer de dispositions ayant modifié la législation commerciale.

Cass. com., 26 avril 1994, LawLex202300005584JBJ.

Cass. com., 24 février 1975, LawLex202300012001JBJ, retenant qu'aucune incompatibilité ou incapacité ne s'oppose à ce qu'un membre du conseil d'administration participe à la décision d'agrément de la cession d'actions de la société anonyme lorsque celle-ci concerne la vente de ses propres titres.

Cass. com., 12 mai 2004, LawLex202300003363JBJ, estimant que le pouvoir d'agréer les cessions d'actions, lorsqu'il était dévolu au conseil d’administration, relève nécessairement de l'assemblée générale des actionnaires après la dissolution de la société, qui a mis fins aux fonctions du conseil, et non au liquidateur.

Cass. com., 17 janvier 2012, LawLex202200002708JBJ, RTD civ. 2012, 334, obs. GAUTIER ; BJS 2012, 310, obs. DONDERO ; D. 2012, 2688, obs. HALLOUIN, LAMAZEROLLES et RABREAU ; RTD com. 2012, 141, obs. LE CANNU et DONDERO ; RTD civ. 2012, 312, obs. FAGES ; Rev. sociétés 2012, 370, obs. LE CANNU ; RLDA 2012/69, n° 3899, obs. PARACHKEVOVA ; D. 2012, 719, obs. MOURY ; Dr. sociétés 2012, 64 , obs. GALLOIS-COCHET ; D. 2012, 279, obs. LIENHARD ; JCP E 2012, 1777, n° 3, obs. DEBOISSY et WICKER ; Dr. et patr. mai 2013, 93, obs. PORACCHIA ; Banque et Droit mars-avril 2012, 45, obs. RIASSETTO.

Cass. com., 17 octobre 1989, LawLex202300012002JBJ, considérant que le rachat des actions du cédant par la société, lorsque celle-ci a refusé d'agréer le cessionnaire proposé, est réalisé dans les trois mois lorsqu'un accord sur la chose et le prix intervient au cours de ce délai, même si l'autorisation formelle de rachat n'est donnée par l'assemblée générale extraordinaire de la société qu'après l'expiration de celui-ci.

Cass. com., 8 avril 2008, LawLex202200006510JBJ, estimant que la seule désignation d'un expert pour évaluer le prix de rachat des actions du cédant qui s'est vu opposer un refus d'agrément ne rend pas la cession parfaite dès lors que les actions n'ont pas été rachetées dans le délai de trois mois.

Cass. com., 6 mai 2003, LawLex202200006220JBJ, retenant que le cessionnaire a intérêt et qualité à faire juger que la cession intervenue entre lui et l’actionnaire cédant est parfaite en raison de l'absence de concrétisation du rachat des actions en cause par la société dans le délai de trois mois à compter du refus d'agrément qui leur a été notifié, et à en requérir les suites qui s'imposent ; 24 février 1975, LawLex202300012001JBJ, considérant que la cession des actions d’une SA à un tiers ne peut être critiquée sur le fondement de l’abus de majorité, en l’absence de fraude, dès lors que le conseil d’administration a, dans les limites de ses pouvoirs et en conformité avec ceux-ci, régulièrement accordé son agrément à celle-ci, sans compromettre l’intérêt social, et que l’offre d’achat du cessionnaire a été faite aux mêmes conditions à tous les actionnaires.

Cass. com., 18 mai 1993, LawLex202300005586JBJ.

Cass. com., 8 avril 2008, LawLex202200006510JBJ, considérant que l'accord donné par le cédant à la prorogation du délai accordé à l’expert pour évaluer le prix de rachat de ses actions ne dispense pas la société de saisir le juge pour obtenir un allongement du délai pour procéder à ce rachat.

Cass. com., 6 mai 2003, LawLex202200006220JBJ.

V. cep., Cass. com., 22 octobre 1956, LawLex202300002867JBJ, retenant qu'une modification des statuts de la SA pour soumettre toute cession d’actions,y compris entre actionnaires, à l’agrément du conseil d’administration est valable, dès lors qu’elle n’a ni pour effet d’apporter une limitation au nombre de voix proportionnel à la possession de certaines actions, ni d’entacher l’affectio societatis, ni d’entraver le principe de libre révocabilité des administrateurs

Cass. com., 7 mars 1995, LawLex202300012003JBJ.

Cass. com., 26 mai 2004, LawLex202300012000JBJ ; 25 février 1992, LawLex202300012004JBJ.

Cass. com., 14 décembre 2004, LawLex202300000010JBJ.

Cass. com., 27 mars 1990, LawLex202300005583JBJ.

Cass. com., 15 mars 2023, LawLex202300005899JBJ, RJDA 2023, n° 380.

Cass. com., 26 avril 1994, LawLex202300005584JBJ, retenant que l'existence d'un pacte de préférence, qui ne rend pas incessibles les actions sur lesquelles il porte, n'empêche pas l’actionnaire d’une SA de présenter à l'agrément de la société une offre qui émane d'un tiers.

Cass. com., 6 mai 2003, LawLex202200006220JBJ, estimant que les statuts d’une société qui stipulent que “la transmission de toute action ou certificat d'investissement à un tiers non actionnaire est soumise au droit d'agrément du conseil d'administration”, doivent s’analyser comme soumettant à l'agrément toute forme de transfert des titres, comme la fusion-absorption, et non seulement la cession entre vifs. - V. égal. Cass. com., 15 mai 2007, LawLex202300005582JBJ, estimant que l'application d'une clause d'agrément peut être étendue, au-delà des cessions d'actions, à des opérations de fusion.

Cass. com., 13 décembre 1994, LawLex202300001684JBJ. 

Cass. com., 27 juin 1989, LawLex202200008485JBJ, Defrénois 1990, 1223, obs. HONORAT; BJS 1989, 815, obs. LE CANNU; D. 1990, 314, obs. BONNARD; RTD com. 1990, 50, obs. REINHARD; RTD civ. 1989, 530, obs. MESTRE; RDBB 1989, 176, obs. VIANDIER et JEANTIN.

Cass. com., 31 janvier 1995, LawLex202200008534JBJ, Rev. sociétés 1995, 320, obs. LE NABASQUE; Defrénois 1995, 696, obs. HOVASSE; D. 1995, 426, obs. PARLEANI; LPA 2 août 1995, 24, obs. COURTIER; BJS 1995, 342, obs. COURET; RPC 1995, 163, obs. SOINNE; JCP G 1995, II, 22460, obs. GUYON; JCP E 1995, I, 455, n° 6, obs. PETEL; JCP E 1995, II, 678, obs. GUYON; Bull. Joly 1995, 953, obs. DAIGRE.

Cass. com., 11 janvier 2017, LawLex202200006221JBJ.

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