Tout le droit des sociétés : droit commun des sociétés et régime propre aux différents types de sociétés

Droit des sociétés

L'associé d'une société civile peut disposer de ses parts sociales en les cédant ou en les nantissant. 

Contrairement aux actions, les parts sociales ne constituent pas des titres négociables. L'article 34 du décret 78-704 du 3 juillet 1978 prévoit en effet que les “certificats représentatifs de parts” établis au nom de chaque associé par part ou multiple de parts ou pour le total des parts déten …

Cessions et nantissements

L'associé d'une société civile peut disposer de ses parts sociales en les cédant ou en les nantissant. 

Contrairement aux actions, les parts sociales ne constituent pas des titres négociables. L'article 34 du décret 78-704 du 3 juillet 1978 prévoit en effet que les “certificats représentatifs de parts” établis au nom de chaque associé par part ou multiple de parts ou pour le total des parts détenues par  lui, doivent être très lisiblement barrés de la mention “non négociable”. Il en résulte que l'épouse mariée sous le régime de la communauté légale ne peut céder, sans l'accord de son mari, les parts sociales d'une société civile immobilière . En outre, l'article 1861 du Code civil prévoit qu'elles ne peuvent être cédées qu'avec l'agrément de tous les associés , étant entendu que seuls les associés dont le consentement est requis pour la cession de parts sociales et la société civile, peuvent invoquer les dispositions de l'article 1861 du Code civil relatives à la procédure d’agrément . Le cédant lui-même  ou le cessionnaire  ne peuvent par conséquent se prévaloir rétrospectivement de l'absence d'agrément pour revenir sur leur engagement. 

Les statuts peuvent déroger à la règle de l'unanimité et prévoir que l'agrément sera obtenu à une majorité qu'ils déterminent, ou qu'il peut être accordé non pas par les associés, mais par les gérants. Ils peuvent aussi dispenser d'agrément les cessions consenties à des associés ou au conjoint de l'un d'eux. Sauf dispositions contraires des statuts, ne sont pas soumises à agrément les cessions consenties à des ascendants ou descendants du cédant. Selon la Cour de cassation, la dispense d'agrément s'applique également au légataire de l’associé décédé . 

Les associés ne sont jamais contraints d'accorder l'agrément. En effet, l'article 1862 dispose que ces derniers peuvent décider d'acquérir eux-mêmes les parts que l'associé souhaite céder . Cette faculté ne confère cependant aux autres associés aucun droit de préemption : en cas de refus d'agrément, et de proposition de rachat par les associés, le cédant conserve le droit de renoncer à la cession et de conserver ses parts . 

Si aucun des associés ne se porte acquéreur, la société peut faire acquérir les parts par un tiers désigné à l'unanimité des autres associés ou suivant les modalités prévues par les statuts. Elle peut également procéder au rachat des parts en vue de leur annulation. L'article 1863 conclut en indiquant que si aucune offre d'achat n'est faite au cédant dans un délai de six mois à compter de la dernière des notifications du projet de cession, l'agrément est réputé acquis, à moins que les autres associés ne décident, dans le même délai, la dissolution anticipée de la société. 

La cession de parts sociales est également soumise aux conditions de fond applicables à tout contrat, à savoir l'exigence de bonne foi, le devoir de loyauté, l'absence de vices du consentement et enfin la fixation d'un prix déterminé ou déterminable qui en outre ne doit pas être dérisoire.

Enfin, elle n'est définitive que sous réserve du respect de ses formalités d'opposabilité. Conformément à l'article 1865, la cession de parts sociales, qui doit être constatée par écrit, est rendue opposable à la société dans les formes prévues à l'article 1690 ou, si les statuts le stipulent, par transfert sur les registres de la société. Aucune autre modalité, telle que la signature de l'acte notarié de cession par le représentant légal de la société , ou la publication de l'acte au RCS , n'est admise. A l'égard des tiers, la cession n'est opposable qu'après accomplissement de ces formalités et après publication au registre du commerce et des sociétés. La jurisprudence estime cependant que la cession des parts sociales d'une SCI peut leur être rendue opposable, même si l'acte de cession n'a pas été déposé au greffe du tribunal de commerce, dès lors qu'ont été publiés les statuts mis à jour constatant cette cession . 

Par ailleurs, l'article 1866 du Code civil consacre expressément le droit des associés de donner leurs parts sociales en nantissement, en garantie d'une obligation. Pour être valable, le nantissement doit être constaté par écrit . Autrefois soumis à signification à la société ou à acceptation par cette dernière par acte authentique, le nantissement de parts de sociétés civiles était soumis à un régime particulier qui le distinguait fortement de celui du nantissement des parts de SNC ou de SARL. En effet, il devait être inscrit sur un registre spécifique et bénéficiait d'une validité indéfinie, qui dispensait son auteur de toute nécessité de renouvellement. Depuis la réforme du droit des sûretés réalisée par l'ordonnance 2021-1192 du 15 septembre 2021, dont les dispositions concernées sont entrées en vigueur le 1er janvier 2022, le nantissement de parts de sociétés civiles est désormais soumis, comme celui des parts de SARL et de SNC, à inscription au registre des gages sans dépossession du greffe du tribunal de commerce du lieu d’immatriculation de la société. L'inscription n'est désormais valable que pour cinq ans et doit être renouvelée. Si l'associé qui concède le nantissement n'est plus tenu de le signifier à la société, il dispose désormais de la faculté de le notifier aux associés et à la société afin d'obtenir l'agrément du cessionnaire en cas de réalisation forcée des parts sociales . Chaque associé peut néanmoins se substituer à l'acquéreur dans un délai de cinq jours francs à compter de la vente. Si plusieurs associés exercent cette faculté, ils sont, sauf clause ou convention contraire, réputés acquéreurs à proportion du nombre de parts qu'ils détenaient antérieurement. Si aucun associé n'exerce cette faculté, la société peut racheter les parts elle-même, en vue de leur annulation .

Cass. 1re civ., 9 novembre 2011, LawLex202300009757JBJ.

La nécessité d’obtenir un agrément s'impose aussi bien en cas de cession volontaire que forcée : l'adjudicataire des parts sociales d’une SCI n'est pas recevable à contester les clauses et conditions du cahier des charges relatif à l'adjudication, qui précise que celle-ci ne sera réalisée au profit d'un  tiers que sous la condition résolutoire d'obtention d'agrément dans les conditions prévues aux statuts et qu'il est loisible aux associés d'acquérir les parts comme à la société de procéder à leur rachat, V. Cass. 3e civ., 14 janvier 2009, LawLex202200006530JBJ.

Cass. com., 18 décembre 2007, LawLex202200009637JBJ ; Cass. 3e civ., 25 avril 2007, LawLex202300009758JBJ.

C. civ., art. 1867, al. 2 : la notification doit avoir lieu au moins un mois avant la vente.

Cass. 3e civ., 9 novembre 2005, LawLex202300009809JBJ, retenant que l'apport des parts d'une SCI à une autre société est inopposable à la  première lorsque l'agrément des cessionnaires n'a pas été demandé.

Cass. 3e civ., 6 décembre 2000, LawLex202300009755JBJ;

Cass. 3e civ., 19 juillet 2000, LawLex202200008533JBJ, D. 2002, 480, obs.HALLOUIN ; BJS 2000, 1083, obs. LE CANNU ; Dr. sociétés 2000, n° 168, obs. BONNEAU ; Rev. sociétés 2000, 437, obs. BARBIERI.

Cass. com., 5 avril 2018, LawLex202200006512JBJ, considérant que les statuts d’une société civile agricole qui prévoient la continuation de la société en cas de décès d’un associé, entre ceux survivants et ses héritiers et ayants droit, en les dispensant d'agrément, s’appliquent également au légataire de l’associé décédé.

Cass. com., 29 septembre 2015, LawLex202300010444JBJ, retenant que les associés d’une SCEA prennent une décision régulière de refus d’agrément des ayants droit d’un associé défunt, même  si celle-ci est intervenue hors du cadre d'une assemblée générale extraordinaire, dès lors qu’ils ont décidé unanimement de reprendre ses parts ou de les faire reprendre par la société pour les annuler, choisi un expert pour les évaluer et, à défaut, habilité le gérant à engager une procédure judiciaire pour obtenir la fixation de leur valeur.

Cass. com., 7 décembre 2010, LawLex202300004005JBJ.

Cass. 3e civ., 11 octobre 2000, LawLex202300000341JBJ.

Cass. 3e civ., 25 mai 2022, LawLex202200010135JBJ, D. 2022, 1882, obs. LAMAZEROLLES, soulignant que la publication de l'acte de cession de parts sociales au RCS est uniquement destinée à assurer son opposabilité aux tiers, de sorte la présomption de connaissance de l'acte qui résulte de l'accomplissement de cette formalité ne s'applique pas dans les rapports entre les associés.

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