Le Droit de la concurrence, premier tome du Traité de droit économique, expose, en deux livres (Tome 1/2. Droit européen ; Tome 2/2. Droit français) l’ensemble des règles de concurrence : ententes et abus de domination, procédure de concurrence, concentrations, aides d’État, négociation commerciale, et concurrence déloyale.

Droit européen de la concurrence

1) Service d'intérêt économique général (SIEG)
L'entreprise bénéficiaire de la compensation doit être chargée d'un service public et ses obligations clairement définies. Le service public correspond au service d'intérêt économique général mentionné à l'article 106 TFUE. Cette notion, qui n'est pas définie par les textes, se réfère aux “services de nature économique que les États membres ou la Comm …

Conditions.

BUENDIA SIERRA, Enforcement of Article 106(1) TFEU by the European Commission and the EU Courts, in European Competition Law Annual 2013, Hart Publishinh, 2016, 279 ; LOWE, Philip; MONTI, Giorgio (2016)Table of contents ; GUINARD, La notion de bénéfice raisonnable dans le contentieux des aides d'Etat : entre précisions techniques et imprécisions conceptuelles, RLC 2016, n° 2907.

1) Service d'intérêt économique général (SIEG)

L'entreprise bénéficiaire de la compensation doit être chargée d'un service public et ses obligations clairement définies. Le service public correspond au service d'intérêt économique général mentionné à l'article 106 TFUE. Cette notion, qui n'est pas définie par les textes, se réfère aux “services de nature économique que les États membres ou la Communauté soumettent à des obligations spécifiques de service public en vertu d'un critère d'intérêt général” . Elle couvre plus particulièrement certains services fournis par les grandes industries de réseau - transport, poste, énergie, communications. La qualification d'un service de SIEG n'a pas à inclure la technologie au moyen de laquelle le service est fourni . En outre, selon le juge de l'Union, même si les recettes d'activités secondaires sont étroitement liées à la mission d'intérêt général d'une activité principale et visent à en couvrir une partie des coûts, ces éléments ne permettent pas de conclure qu'elles sont nécessaires au fonctionnement du SIEG ou revêtent un intérêt économique général . 

Si les États membres disposent d'un large pouvoir d'appréciation pour définir un service d'intérêt économique général (SIEG), ce pouvoir peut être limité par l'existence de règles spécifiques du droit de l'Union . En tout état de cause, l'État membre doit démontrer que le périmètre du SIEG est nécessaire et proportionné par rapport à un besoin réel de service public. Lorsqu'un objectif de continuité territoriale peut être atteint à la fois par les forces du marché et par le service public, la création d'un SIEG n'est justifiée que dans la mesure où elle répond à la carence correspondante du marché . 

L'État qui invoque l'existence et la nécessité d'un service d'intérêt économique général doit démontrer que les critères minimaux communs à toute mission de service public sont remplis, notamment par la présence d'un acte de puissance publique qui investit les opérateurs en cause d'une telle mission et la preuve du caractère universel et obligatoire de celle-ci . Le caractère universel du service ne dépend ni de l'étendue du champ d'application territorial ou matériel ni du nombre d'utilisateurs . Le caractère obligatoire d'une mission n'exclut pas l'existence d'une certaine liberté des opérateurs quant au contenu et à la fixation du prix des services et n'est pas conditionné par une obligation réciproque des utilisateurs de contracter . En outre, le fait qu'un service soit désigné comme étant d'intérêt général en droit national n'implique pas que tout opérateur qui l'effectue est chargé de l'exécution d'obligations de service public au sens de l'arrêt Altmark . Selon le juge de l'Union, l'appréciation de l'existence d'une défaillance du marché constitue un préalable à la qualification d'une activité de SIEG et, par conséquent, à la constatation de l'absence d'aide d'État . L'appréciation de la défaillance de marché s'effectue au moment où le SIEG est institué et doit comporter une analyse prospective de la situation du marché pour toute la durée d'application du SIEG, pendant laquelle l'échec de marché doit également être vérifié . Il y a défaillance du marché susceptible de donner lieu à l'établissement d'un SIEG lorsqu'il peut être démontré que des investisseurs privés pourraient ne pas être en mesure d'assurer dans un avenir proche, c'est-à-dire à l'issue d'une période de trois ans, une couverture adaptée pour l'ensemble des citoyens ou des utilisateurs et qu'ils risquent ainsi de priver de connexion une partie importante de la population .

2) Caractère préalable, objectif et transparent du calcul de la compensation

La compensation doit s'opérer selon des paramètres établis préalablement, de façon objective et transparente , sans qu'il soit nécessaire qu'ils assurent l'efficacité de la gestion de service public  . Tel est le cas de la mesure qui prévoit le versement, en compensation de l'exécution du service public d'assistance des contribuables lors de l'élaboration et de la transmission des déclarations, d'une somme d'environ 14 euro pour chaque déclaration élaborée et transmise . À l'inverse, des mesures de soutien ponctuelles accordées a posteriori pour faire face à une situation imprévue  ne remplissent pas la condition d'antériorité, expressément posée par l'arrêt Altmark. Lorsque le choix de l'entreprise chargée de l'exécution d'obligations de service public, dans un cas concret, n'est pas effectué dans le cadre d'une procédure de marché public permettant de sélectionner le candidat capable de fournir ces services au moindre coût pour la collectivité, le niveau de la compensation nécessaire doit être déterminé sur la base d'une analyse des coûts qu'une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée afin de pouvoir satisfaire aux exigences de service public requises, aurait encourus pour exécuter ces obligations, en tenant compte des recettes s'y rapportant ainsi que d'un bénéfice raisonnable pour l'exécution de ces obligations  .

La compensation ne doit pas, enfin, dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l'exécution des obligations de service public , en tenant compte des recettes afférentes ainsi que d'un bénéfice raisonnable pour l'exécution de ces obligations. Dans certains secteurs, le recours obligatoire à une procédure d'appel d'offres est considéré comme suffisant pour exclure que l'État membre cherche à octroyer un avantage à une entreprise .

Si la contrepartie couvre tous les coûts variables supplémentaires occasionnés par le service rendu, une contribution adéquate aux coûts fixes consécutifs, ainsi qu'une rémunération appropriée des capitaux propres, dans la mesure où ils sont affectés à l'activité concurrentielle de la filiale, et si aucun indice ne laisse à penser que ces éléments ont été sous-estimés ou fixés de manière arbitraire, il n'y a pas aide d'État . À l'inverse, les mesures qui ne présentent pas de caractère purement compensatoire  ou les surcoûts résultant d'une politique de rabais agressive non imposée par la loi, qui procèdent d'une volonté de se maintenir sur le marché concurrentiel , constituent des aides d'État soumises à l'obligation de notification préalable.

Le caractère disproportionné des ressources étatiques octroyées ne se présume pas . Il est nécessaire de démontrer que les subventions en cause n'excèdent pas les charges résultant des obligations de service public imposées au bénéficiaire.

Le calcul de la compensation doit être fondé sur des éléments objectifs concrets, clairement identifiables et contrôlables . À défaut de méthode de calcul alternative plus précise, les surcoûts du service public peuvent être calculés sur l'ensemble des activités de l'entreprise publique lorsque sa comptabilité analytique ne permet pas d'établir une distinction entre les charges et les dépenses affectées aux activités de service public et celles affectées aux activités concurrentielles .

La Commission a depuis adopté une Communication 2012-C 8-02 qui rappelle les notions fondamentales sur lesquelles repose l'application des règles en matière d'aides d'État aux compensations de services publics et consolide la pratique décisionnelle des autorités européennes en la matière . Parmi les dispositions générales relatives à la notion d'aide d'État, elle revient sur les principes généraux fixés par la jurisprudence relatifs aux notions d'entreprise et d'activité économique, essentielles à l'application des règles relatives aux aides d'État. Elle énonce également les conditions auxquelles les compensations de service public ne constituent pas une aide d'État telles qu'établies par la Cour de justice dans l'arrêt Altmark : existence d'un service d'intérêt général, mandat, paramètres de la compensation, nécessité d'éviter toute surcompensation, sélection du prestataire de services.

Livre blanc sur les SIG de la Commission européenne, COM (2004) 0374 final, 23.

CJUE, 26 avril 2018, Cellnex Telecom (SA), Telecom Castilla-La Mancha (SA) c. Commission européenne, SES Astra (SA), aff. C-91-17 P ; C-92-17 P, LawLex201800000632JBJ.

TUE, 16 mars 2013, Orange c. Commission européenne, République française, Département des Hauts-de-Seine (France), Sequalum SAS, T-258-10, LawLex201300001310JBJ, Europe 2013, n° 474, obs. IDOT ; Contrats Conc. Consom. 2013, n° 61, obs. BINET ; Concurrences 2014/1, 157, obs. DERENNE ; LPA 9 avril 2014, 12, obs. ARHEL.

TUE, 16 mars 2013, Iliad ; Free infrastructure, Free c. Commission européenne, République française, République de Pologne, Département des Hauts-de-Seine, aff. T-325-10, LawLex201300001346JBJ, Europe 2013, n° 474, obs. IDOT ; RLC 2013, n° 2412, obs. CHEYNEL ; Derenne, Concurrences 2014/1, 157, obs. DERENNE ; LPA 9 avril 2014, 12, obs. ARHEL ; JDE 2014, 208, obs. DONY.

V. Cons. d'Ét., 29 mars 2006, Centre d'exportation du livre français, LawLex200600002455JBJ, RLC, 2006/9, nº 651, obs. CHEYNEL : en l'absence de définition préalable et transparente des bases d'une éventuelle compensation entre des subventions et des charges résultant d'obligations de service public, les mesures constituent des aides d'État soumises à l'obligation de notification préalable. - Aj. : Décision Comm. CE nº 2004-339 du 15 octobre 2003, Mesures en faveur de la RAI SpA, LawLex200400000879JBJ : l'exonération des impôts sur la réévaluation des biens et l'augmentation de capital d'une entreprise, afin de compenser les coûts nets supportés pour remplir sa mission de service public de radiodiffusion, ne peuvent échapper à la qualification d'aide d'État lorsque les paramètres sur la base desquels ont été calculés ces soutiens financiers n'ont pas été préalablement définis d'une manière objective et transparente.

TUE, 24 septembre 2015, TV2 Danmark A/S, Royaume de Danemark c. Commission européenne, Viasat Broadcasting UK Ltd, aff. T-674-11, LawLex201500001138JBJ, Europe 2015, n° 441, obs. IDOT ; LPA, 12 février 2016, 11, obs. ARHEL ; Concurrences 4-2015, 169, obs. DERENNE.

CJCE, 30 mars 2006, Servizi Ausiliari Dottori Commercialisti Srl c. Giuseppe Calafiori, aff. C-451-03, LawLex200600001031JBJ, Concurrences, 2/2006, 125, obs. DERENNE ; Contrats Conc. Consom., 2006, chron. n° 2, 18, obs. VIALENS ; LPA, 16 octobre 2006, 14, obs. ARHEL ; Gaz. Pal., 21-22 février 2007, 32, obs. GHAZI et MASCOLO ; JCP E, 2006, 2184, 1372-1375, obs. PRIETO ; Europe, 2006, nº 152, obs. IDOT.

Décision Comm. CE nº 2004-838 du 10 décembre 2003, Aides en faveur de France 2 et de France 3, LawLex200400003309JBJ, Europe, 2005, nº 52, obs. IDOT ; Communic. com. électr., 2005, nº 52, obs. DECOCQ : les aides octroyées à des opérateurs publics de télévision chargés de l'exécution d'une obligation de service public ne constituent pas des financements octroyés en fonction de paramètres établis préalablement de façon objective et transparente dès lors qu'il s'agit de mesures de soutien ponctuelles accordées a posteriori pour faire face à une situation imprévue.

TUE, 26 novembre 2015, aff. T-541-13, Navarra de Servicios y Tecnologías (SA) c. Commission européenne, SES Astra, LawLex201500001540JBJ.

CJCE, 7 février 1985, Procureur de la République c. Association de défense des brûleurs d'huiles usagées (ADBHU), aff. 240-83, LawLex200300003767JBJ, Gaz. Pal,. 1986, 740-741, obs. LAURENT ; Cah. dr. eur., 2003, 650, note MEROLA et MEDINA : une indemnité accordée à des entreprises en contrepartie d'obligations de collecte et/ou d'élimination des déchets imposées par l'État, et qui ne dépasse pas leurs coûts annuels réels, ne constitue pas une aide d'État ; TPICE, 27 février 1997, FFSA, aff. T-106-95, LawLex200300003981JBJ, Gaz. Pal., 1997, 294-295 ; Europe, 1997, nº 120, obs. IDOT : les allègements fiscaux octroyés à une entreprise publique chargée d'un service d'intérêt économique général ne constituent pas des aides d'État dès lors qu'ils ne vont pas au-delà de ce qui est justifié pour l'accomplissement des missions d'intérêt public au sens de l'article 106 TFUE, paragraphe 2 ; Décision Comm. CE nº 2002-782 du 12 mars 2002, Poste Italiane SpA, LawLex200400004616JBJ, Europe, 2002, nº 426, obs. IDOT : les concours financiers octroyés par un État membre à une entreprise publique chargée d'une mission d'intérêt général assortie d'un droit exclusif ne constituent pas des aides d'État, au sens de l'article [107 TFUE], lorsqu'ils compensent le coût net supplémentaire généré par l'exécution de cette mission.

Décision Comm. CE nº 2005-351 du 20 octobre 2004, Intermediación Aérea SL, LawLex200500005597JBJ : lorsqu'une aide publique est versée en compensation de charges publiques dans le secteur de l'aviation, le critère de la proportionnalité de l'avantage au coût de l'exécution des obligations de service public ne peut être rempli si la procédure d'appel d'offres établie à l'article 4 du règlement 2408-92 n'a pas été utilisée.

CJCE, 3 juillet 2003, Chronopost (SA) c. Union française de l'express, aff. C-83-01 P, LawLex200300003454JBJ, Europe, 2003, nº 285, obs. IDOT ; RLDA, 2003/64, nº 4000, obs. DAVID ; AJDA, 19 janvier 2004, 76, obs. CHARBIT ; LPA, 29 septembre 2003, 6, obs. ARHEL ; JCP E, 2004, 1734, obs. PARLÉANI.

TUE, 15 octobre 2018, Vereniging Gelijkberechtiging Grondbezitters c. Commission européenne, aff. T-79-16, LawLex201800001528JBJ : la qualification par la Commission de SIEG " global " ou " atypique " de la mesure d'aide en cause révèle l'existence d'une difficulté sérieuse qui porte sur les activités qui peuvent être considérées comme faisant partie intégrante du SIEG, et, in fine, du degré de connexité entre les activités économiques secondaires et l'activité principale, dès lors que la rentabilité et le caractère accessoire de ces activités ne suffisent pas à exclure leur nature économique d'offre de biens ou de services sur un marché concerné, ni l'existence d'une concurrence sur ce marché.

Cons. d'Ét., 29 mars 2006, Centre d'exportation du livre français, LawLex200600002455JBJ, RLC, 2006/9, nº 651, obs. CHEYNEL.

Décision Comm. CE nº 2002-753 du 19 juin 2002, Deutsche Post AG, LawLex200400004615JBJ, Europe, 2002, nº 379, obs. IDOT.

TPICE, 1er juillet 2008, Deutsche Post AG, aff. T-266-02, LawLex200800001074JBJ : la qualification d'aide d'État ne peut être déduite du caractère prétendument disproportionné de ressources étatiques octroyées en compensation des coûts liés à l'accomplissement d'un service d'intérêt économique général, à défaut d'examen d'informations rendant plausible l'absence de surcoûts non réellement liés à l'accomplissement de ces obligations.

TPICE, 12 février 2008, British United Provident Association Ltd, aff. T-289-03, LawLex200800000179JBJ.

TPICE, 27 février 1997, FFSA, aff. T-106-95, LawLex200300003981JBJ, Gaz. Pal., 1997, 294-295 ; Europe, 1997, nº 120, obs. IDOT.

Communic. Comm. eur. 2012-C 8-02 du 11 janvier 2012, relative à l'application des règles de l'Union européenne en matière d'aides d'État aux compensations octroyées pour la prestation de services d'intérêt économique général, JOUE C 008 du 11 janvier 2012, 4 s.

TUE, 1er mars 2017, aff. T-366-13, République française c. Commission européenne, LawLex201700000399JBJ.

Tel n'est pas le cas du service complémentaire de transport de passagers vers la Corse, dès lors que la continuité territoriale entre la Corse et le continent est déja assurée par le service de base - qui concerne le transport maritime de passagers et de fret -, complété par les forces du marché, de sorte que c'est à bon droit que la Commission a analysé la qualification de service d'intérêt économique général de manière distincte pour ces deux services, TUE, 1er mars 2017, aff. T-366-13, République française c. Commission européenne, LawLex201700000399JBJ. 

TPICE, 12 février 2008, British United Provident Association Ltd, aff. T-289-03, LawLex200800000179JBJ, Concurrences, 2/2008, 144, obs. CHÉROT ; Concurrences, 2/2008, 178, obs. RODRIGUES ; Contrats Conc. Consom., 2008, chron. n° 4, 17, obs. BALTA.

TUE, 26 novembre 2015, Navarra de Servicios y Tecnologías (SA) c. Commission européenne, SES Astra, aff. T-487-13, LawLex201500001539JBJ, RLDA 2016/112, n° 5849, obs. CRAVAREZZA ; Concurrences 1-2016, 168, obs. VUITTON ; CJUE, 20 septembre 2018, Royaume d'Espagne c. Commission européenne, aff. C-114-17 P, LawLex201800001364JBJ, précisant que le mandat qui confère aux entreprises concernées la mission de service public peut être défini dans plusieurs actes de puissance publique distincts

TUE, 16 septembre 2013, Colt Télécommunications France (Sté) c. Commission européenne, République française, Sequalum SAS, Département des Hauts-de-Seine (France), aff. T-79-10, LawLex201300001308JBJ, Europe 2013, n° 474, obs. IDOT ; Contrats Conc. Consom. 2013, n° 61, obs. BINET ; Concurrences 2014/1, 157, obs. DERENNE ; LPA 9 avril 2014, 12, obs. ARHEL.

Droit européen de la concurrence

388. Conditions.(1)

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