Le Droit de la concurrence, premier tome du Traité de droit économique, expose, en deux livres (Tome 1/2. Droit européen ; Tome 2/2. Droit français) l’ensemble des règles de concurrence : ententes et abus de domination, procédure de concurrence, concentrations, aides d’État, négociation commerciale, et concurrence déloyale.

Droit français de la concurrence

Un fournisseur peut établir plusieurs types de conditions générales de vente si chacun est destiné à des catégories différentes d'acheteurs potentiels. Il paraît en effet opportun d'autoriser l'établissement de conditions de vente différentes selon qu'elles s'adressent à des grossistes ou à des petits distributeurs, ou selon qu'elles concernent des distributeurs situés dans des zones de chalandise …

Conditions de vente différenciées.

V. FABRE, Les nouvelles conditions générales de vente et d'achat, Cah. dr. entr., novembre-décembre 2005, 40 ; ANDRÉ, En attendant le décret : Les conditions générales de vente catégorielles sont licites dès lors que les catégories ont été objectivement déterminées, LD, mai 2006, 1 ; BÉHAR-TOUCHAIS, Les conditions de vente : conditions générales et conditions particulières, in Le nouveau régime des relations industrie-commerce (loi du 2 août 2005), Litec, 2006, nº 24, 25 ; FERRIER, La transparence à l'épreuve du nouveau régime des conditions de vente, in Le nouveau droit des pratiques restrictives de concurrence, Dalloz, 2006, 41 ; NOURISSAT, Retour sur les CGV catégorielles et les CPV : différenciation et discrimination tarifaire, un an après, RLC, 2006/9, 36 ; DANY et SERSIRON, La loi de modernisation de l'économie : Nouvelle pierre à l'édifice inachevé des négociations commerciales, Concurrences, 3/2008, n° 20365 ; FERRIER et FERRÉ, La réforme des pratiques commerciales (loi nº 2008-776 du 4 août 2008), D. 2008, 2234 ; VILMART et LEGUIN, La loi de modernisation de l'économie : une tentative encore inachevée de modernisation du droit français de la concurrence, JCP E, 2008, 1997, 17 ; GRALL, LAMY, KOUCHNIR-CARGILL, Loi de modernisation de l'économie, An I, RLC, 2009/20, nº 1383, 129 ; VILLEY-DESMESERETS, DAUBA, GAUVRY, La différenciation de traitement par un fournisseur de ses clients-distributeurs : apports des arrêts "Pyxis" de la cour d'appel de Paris, de 2019 et 2021, RLC 2021, n° 4154.

Un fournisseur peut établir plusieurs types de conditions générales de vente si chacun est destiné à des catégories différentes d'acheteurs potentiels. Il paraît en effet opportun d'autoriser l'établissement de conditions de vente différentes selon qu'elles s'adressent à des grossistes ou à des petits distributeurs, ou selon qu'elles concernent des distributeurs situés dans des zones de chalandise différentes ou n'exerçant pas la même activité. En conséquence, sous l'empire du droit applicable avant la loi LME, il avait été jugé que le fait de réserver un traitement différencié à des entreprises situées sur des marchés distincts ne tombait pas sous le coup de la prohibition des pratiques discriminatoires .

La loi Dutreil a conféré valeur législative à une segmentation plus poussée : “les conditions générales de vente peuvent être différenciées selon les catégories d'acheteurs de produits ou de demandeurs de prestation de services, et notamment entre grossistes et détaillants. Les conditions dans lesquelles sont définies ces catégories sont fixées par voie réglementaire en fonction notamment du chiffre d'affaires, de la nature de la clientèle et du mode de distribution”. Le législateur a ainsi consacré le marché comme critère de différenciation, car depuis de nombreuses années, la pratique recourait à des CGV différenciées par circuits. Il ne faut pas minimiser l'impact de la loi qui ne se contente pas de codifier la circulaire Dutreil I. La jurisprudence antérieure relative aux CGV considérait en effet que l'obligation de communication des CGV était générale. La Cour de cassation avait ainsi estimé qu'en admettant un refus de communication de la partie des CGV qui ne concernait que la grande distribution , une cour d'appel a ajouté une condition d'appartenance à un circuit de distribution, non prévue par la loi . En réalité, la doctrine administrative avait adopté une position contra legem. La pratique décisionnelle de l'Autorité de la concurrence qui, en l'absence de discrimination, reconnaît le droit de faire coexister au sein d'un réseau de distribution plusieurs catégories de distributeurs , n'était que de peu de secours : rendue sur le fondement du droit des pratiques anticoncurrentielles, elle ne pouvait avoir d'incidence sur l'obligation de communication des CGV, disposition autonome du droit des pratiques restrictives, faisant l'objet de sanctions spécifiques (anciennement pénales, civiles depuis 2008, et aujourd'hui administratives), et dont l'objet est différent. Bien que la décision concerne des faits antérieurs aux nouvelles dispositions, le juge a ultérieurement validé le principe de la différenciation tarifaire en retenant qu'un fournisseur pouvait légitimement distinguer entre les acheteurs négociants revendeurs de produits en l'état et les industriels transformateurs du produit et refuser en conséquence de communiquer les barèmes “industrie” à un négociant .

La loi LME a consacré la libre négociabilité des conditions générales de vente. Depuis, les conditions générales de vente peuvent être différenciées selon les catégories d'acheteurs de produits ou de prestations de services (actuel art. L. 441-1, II, al. 2). L'obligation de communication ne concerne, dans cette hypothèse, que les acheteurs ou demandeurs d'une même catégorie , à condition toutefois que le fournisseur soit en mesure de justifier des critères objectifs selon lesquels il a défini ses catégories d'acheteurs  et établisse, selon ces critères, que le demandeur n'appartient pas à la catégorie concernée . Le recours aux conditions catégorielles de vente ne doit naturellement pas être abusif. Tel serait le cas si des CGV catégorielles étaient rédigées pour une enseigne ou un client. Une catégorie ne saurait être constituée d'un opérateur particulier. En revanche, il est possible de prévoir des CGV catégorielles même si le fournisseur n'a qu'un seul client de cette catégorie . Il est par ailleurs admis d'appliquer, pour un même groupe, des CGV catégorielles différentes selon l'appartenance des différentes entités de ce groupe à des catégories différentes, par exemple des CGV Grandes et moyennes surfaces et des CGV Magasins de proximité . Selon la Cour d'appel de Paris le chiffre d'affaires réalisé avec une catégorie d'acheteurs, la nature de leur clientèle, le mode de distribution, le secteur d'activité et la destination finale du produit  peuvent justifier une différenciation des conditions de vente. 

La différenciation des conditions générales rencontre encore aujourd'hui certaines limites. Ainsi, sa reconnaissance par le droit des pratiques restrictives n'entraîne pas nécessairement sa légitimité au regard du droit des pratiques anticoncurrentielles. 

Cass. com., 12 mars 1996, LawLex200200000202JBJ ; D. Aff., 1996, 608 ; Lettre de la DGCCRF du 27 décembre 1994, BID, 1995, nº 2, 47 ; Contrats Conc. Consom., 1995, nº 70, obs. VOGEL ; BRDA, 1995, nº 6, 13.

Cass. com, 24 octobre 2000, LawLex200200000133JBJ, LPA, 20 juillet 2001, 9, obs. ETNER ; Contrats Conc. Consom., 2001, nº 8, obs. MALAURIE-VIGNAL.

Paris, 4 juillet 2019, LawLex201900000886JBJ, préc.

Versailles, 8 janvier 1998, LawLex200200000403JBJ, LPA, 4 septembre 1998, 11, obs. MALAURIE-VIGNAL.

Décision Cons. conc. nº 00-D-72 du 16 janvier 2001, LawLex200200002704JBJ, BOCC, 23 février 2001, approuvée par Paris, 26 juin 2001, LawLex200200002337JBJ, BOCC, 27 mars 2002.

T. com. Paris, 11 mai 2006, LawLex200600001302JBJ, JCP E 2007, 1386, obs. MAINGUY ; RLC 2006/8, nº 573, obs. BÉHAR-TOUCHAIS ; Concurrences 3/2006, 112, obs. de la LAURENCIE ; LD, mai 2006, 1, obs. ANDRÉ.

Les questions/réponses relatives au formalisme de la convention unique et questions de facturation publiées par la DGCCRF le 28 novembre 2008 précisent que les catégories doivent répondre à des critères objectifs. Une catégorie ne peut être créée pour un seul opérateur. - Pour une application, V. Paris, 2 juin 2021, LawLex202100003577JBJ, LD juillet-août 2021, 7, obs. BIANCONE, approuvé par Cass. com., 28 septembre 2022, LawLex202200007978JBJ, RLC 2023, n° 4364, obs. RAMONE, DAUBA, VILLET DESMESERETS ; LEDICO décembre 2022, 4, obs. BEHAR-TOUCHAIS, estimant qu'un commissionnaire à l'achat ne peut se prévaloir des CGV applicables aux officines même si les transferts de propriété des produits qu'il commande pour le compte de ses clients s'effectuent  directement dans leur patrimoine, dès lors qu'il agit en son propre nom. - Comp., Cass. com., 28 septembre 2022, LawLex202200007639JBJ, LD octobre 2022, 8, obs. BIANCONE ; Contrats Conc. Consom. 2022, n° 191, obs. MALAURIE-VIGNAL ; JCP E 2022, n° 1415, obs. LOIR ; RJDA 2023, n° 54 ; RLC 2023, n° 4364, obs. RAMONE, DAUBA, VILLET DESMESERETS ; LEDICO décembre 2022, 3, obs. BEHAR-TOUCHAIS ; Concurrences 4/2022, 94, obs. FOURGOUX, admettant que l'entreprise, qui agit en tant qu'intermédiaire dans le cadre de la  passation de commandes entre un fournisseur et des officines de  pharmacie, puisse solliciter la communication des conditions générales de vente que le fournisseur accorde aux officines indépendantes, dès lors que ses mandantes supportent, comme ces dernières, des charges de stockage.

Cass. com., 29 mars 2017, LawLex201700000599JBJ, LD avril 2017, 9, obs. VERTUT ; Contrats Conc. Consom. 2017, n° 103, obs. MATHEY ; RJDA 2017, n° 435.

Paris, 4 juillet 2019, LawLex201900000886JBJ, LD septembre 2019, 9, obs. BIANCONE ; LEDICO septembre 2019, 3, obs. L. et J. VOGEL ; Concurrences 4/2019, 114, obs. FOURGOUX, sur renvoi de Cass. com., 29 mars 2017, LawLex201700000599JBJ, préc.

Avis de la CEPC du 22 décembre 2008, CEPC 08121902 et CEPC 08121903.

Avis de la CEPC du 22 décembre 2008, CEPC 08121901.

Droit français de la concurrence

134. Conditions de vente différenciées.(1)

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