Le Droit de la concurrence, premier tome du Traité de droit économique, expose, en deux livres (Tome 1/2. Droit européen ; Tome 2/2. Droit français) l’ensemble des règles de concurrence : ententes et abus de domination, procédure de concurrence, concentrations, aides d’État, négociation commerciale, et concurrence déloyale.

Droit français de la concurrence

La loi du 2 août 2005 (dite loi Dutreil) a consacré la possibilité de prévoir des conditions particulières de vente (CPV) au sein d'une même catégorie d'acheteurs : “Tout producteur, prestataire de service, grossiste ou importateur peut, par ailleurs, convenir avec un acheteur de produits ou un demandeur de prestation de services des conditions particulières de vente justifiées par la spécificité  …

Conditions particulières de vente.

V. NOURISSAT, Retour sur les CGV catégorielles et les CPV : différenciation et discrimination tarifaire, un an après, RLC, 2006/9, 36 ; VILMART et LEGUIN, La loi de modernisation de l'économie : une tentative encore inachevée de modernisation du droit français de la concurrence, JCP E, 2008, 1997, 17.

La loi du 2 août 2005 (dite loi Dutreil) a consacré la possibilité de prévoir des conditions particulières de vente (CPV) au sein d'une même catégorie d'acheteurs : “Tout producteur, prestataire de service, grossiste ou importateur peut, par ailleurs, convenir avec un acheteur de produits ou un demandeur de prestation de services des conditions particulières de vente justifiées par la spécificité des services rendus qui ne sont pas soumises à cette obligation de communication”. Le législateur a ainsi défini une zone de liberté de négociation des conditions tarifaires du vendeur, qui échappe au champ d'application de la transparence tarifaire.

Sous l'empire de la loi Dutreil, les parties pouvaient donc négocier des conditions particulières de vente, dès lors qu'elles étaient justifiées par la spécificité des services rendus et n'étaient pas manifestement disproportionnées. Les critères objectifs qui président à la négociation des conditions particulières devaient être communicables à tout client sollicitant le bénéfice de conditions comparables. Les accords restaient secrets. Les réductions de prix accordées étaient portées sur la facture, dès lors qu'elles étaient acquises et directement liées à l'opération de vente, même si leur règlement était différé.

Pour favoriser la liberté de négociation entre les parties, la loi LME a supprimé du texte de l'article L. 441-6 l'obligation de justifier les conditions particulières de vente par des services spécifiquement rendus. L’ordonnance du 24 avril 2019 conserve ce régime (art. L. 441-1, III, al. 1er).

Est-ce à dire que les conditions particulières de vente pourraient être fixées librement, de façon totalement dérogatoire aux conditions générales, sans limite ni justification ? La prudence impose de prévoir une contrepartie aux CPV. D'abord, il apparaît  préférable que les CPV soient justifiées de façon générale par une contrepartie dès lors que toute convention doit, pour être valable, avoir une cause au sens du droit civil (pour les contrats antérieurs au 1er octobre 2016) ou un contenu licite et certain (depuis la réforme du droit des contrats applicable aux contrats conclus à compter du 1er octobre 2016) et qu'en outre, des accords dérogatoires dépourvus de justification peuvent caractériser un abus de dépendance . Ensuite, la loi Hamon  a précisé, à l'ancien article L. 441-7 du Code de commerce, que “la rémunération des obligations relevant des 2° et 3° [services de coopération commerciale et autres services] ainsi que, le cas échéant, la réduction de prix globale afférente aux obligations relevant du 3° ne doivent pas être manifestement disproportionnées par rapport à la valeur de ces obligations”. Le nouvel article L. 441-3 reprend en substance cette obligation mais dans une version allégée en exigeant que soient mentionnées “la rémunération des obligations ainsi que les produits ou services auxquels elle se rapporte et la rémunération globale afférente à l’ensemble de ces obligations”.

L'essor du contrôle des clauses qui créent un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties depuis la loi LME de 2008 doit également conduire à une prudence renforcée en matière de CPV. En pratique, il faut d'autant plus prévoir une contrepartie que la jurisprudence autorise désormais les juges à contrôler le caractère abusif des clauses relatives à la détermination du prix puisqu'elle considère que “le principe de la libre négociabilité n'est pas sans limite et que l'absence de contrepartie ou de justification aux obligations prises par les cocontractants, même lorsque ces obligations n'entrent pas dans la catégorie des services de coopération commerciale, peut être sanctionnée au titre de l'article L. 442-6, I, 2° devenu L. 442-1, I, 2° du Code de commerce, dès lors qu'elle procède d'une soumission ou tentative de soumission et conduit à un déséquilibre significatif” . La Cour de cassation requiert clairement dans ses décisions les plus récentes une contrepartie à toute réduction de prix . Cette interprétation a été validée par le Conseil constitutionnel . En outre, la jurisprudence procède déjà depuis des années à un contrôle des contreparties aux réductions de prix  au-delà du seul contrôle de la coopération sur le fondement d’une interprétation extensive des dispositions de l’ancien article L. 442-6, I, 1° du Code de commerce validée par le nouvel article L. 442-1, dans sa rédaction issue de l’ordonnance 2019-359, qui sanctionne l’obtention ou la tentative d’obtention “de l’autre partie (d’)un avantage ne correspondant à aucune contrepartie ou manifestement disproportionné au regard de la valeur de la contrepartie consentie”.

Enfin, les pratiques discriminatoires mises en œuvre par des entreprises titulaires d'une part de marché située au-delà du seuil d'exemption de 30 % fixé par le règlement 330-2010 (qui sert de guide d'analyse en droit interne) peuvent tomber sous le coup de la prohibition des ententes, voire constituer un abus de position dominante.

En ce sens, VILMART et LEGUIN, La loi de modernisation de l'économie : une tentative encore inachevée de modernisation du droit français de la concurrence, JCP E, 2008, 1997, 17, spéc. nº 13-15.

L. 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation.

Cass. com., 25 janvier 2017, LawLex201700000176JBJ, LD février 2017, 1, obs. ERÉSÉO ; AJ Contrat 2017, 132, obs. FERRE et PIHERY ; JCP E, 2017, n° 1135, obs. LE GAC-PECH ; RLC 2017, n° 3147, obs. VANNI et MARTIN ; Gaz. Pal. 18 avril 2017, p. 37, obs. HOUTCIEFF ; Contrats Conc. Consom. 2017, n° 77, obs. MATHEY ; LEDICO mars 2017, 1, obs. BÉHAR-TOUCHAIS ; D. 2017, 481 et Concurrences 2/2017, 115, obs. BUY ; RLDA 2017, n° 6186, obs. LEROY et BEAUMONT ; D. 2017, 1076, obs. TRÉARD ; LPA 19 mai 2017, 10, obs. VOISSET ; LPA 5/6 juin 2017, 8, obs. ARHEL ; RJDA 2017, n° 286. - V. aussi Paris, 16 mai 2018, LawLex201800000727JBJ, RLC 2018, n° 3425, obs. VERTUT ; AJ Contrat 2018, 385, obs. AUGAGNEUR ; LEDICO septembre 2018, 5, obs. BÉHAR-TOUCHAIS ; Contrats Conc. Consom. 2018, n° 175, obs. MATHEY ; Concurrences, 2018/4, 132, obs. BUY ; D. 2019, 786, obs. N. FERRIER.

Cons. constit., 30 novembre 2018, n° 2018-749 QPC, LawLex201800001830JBJ, JCP 2018, n° 1638 et RDC 2019, 68, obs. BÉHAR-TOUCHAIS ; LD décembre 2018, 1, obs. ERÉSÉO ; LEDICO janvier 2019, 4, obs. GRIMALDI ; AJ Contrat 2019, 29, obs. BUY ; D. 2019, 285, obs. MEKKI ; RLC 2019, n° 3540, obs. LEROY et BEAUMONT ; D. 2019, 787, obs. N. FERRIER ; Concurrences 2/2019, 110, obs. FOURGOUX ; RJDA 2019, n° 139.

Paris, 13 septembre 2017, LawLex201700001459JBJ, LEDICO novembre 2017, 2, obs. GRIMALDI ; LD novembre 2017, 3, obs. ERESEO ; 28 mars 2018, LawLex201800000543JBJ, LD mai 2018, 5, obs. MOULY-GUILLEMAUD ; CEPC, avis n° 18-2, du 12 avril 2018.

Droit français de la concurrence

135. Conditions particulières de vente.(1)

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