Le Droit de la concurrence, premier tome du Traité de droit économique, expose, en deux livres (Tome 1/2. Droit européen ; Tome 2/2. Droit français) l’ensemble des règles de concurrence : ententes et abus de domination, procédure de concurrence, concentrations, aides d’État, négociation commerciale, et concurrence déloyale.

Droit français de la concurrence

Pour diverses raisons (différenciation de l'offre de produits, concurrence inter-marques, exigence de traçabilité de certains produits pour des motifs de qualité), la commercialisation d'un produit peut requérir la fourniture de services que le distributeur est le plus à même de rendre et pour lesquels il peut se faire rémunérer par ses fournisseurs. Cette pratique a été qualifiée de “coopération commerciale” par la circulaire Delors du 22 mai 1984 , remplacée par la circulaire Dutreil du 16 mai 2003 . Les services de coopération commerciale sont placés sous le signe de la liberté contractuelle. Ils se distinguent des conditions générales de vente dans la mesure où ils échappent à l'obligation de communication de l'article L. 441-6 ; ils n'ont pas à être publiés et n'ont pas à être communiqués à tout acheteur professionnel qui en fait la demande. Ils sont couverts par le secret des affaires.

La coopération commerciale a, d'abord, été définie par l'ancien article L. 441-7, I, créé par l'article 42 de la loi Dutreil, comme “une convention par laquelle un distributeur ou un prestataire de services s'oblige envers un fournisseur à lui rendre, à l'occasion de la revente de ses produits ou services aux consommateurs, des services propres à favoriser leur commercialisation qui ne relèvent pas des obligations d'achat et de vente”. Jusqu'alors, il n'existait aucune définition légale de la coopération commerciale. Assez curieusement, cette définition circonscrivait le domaine de la coopération commerciale aux seuls services fournis “à l'occasion de la revente... aux consommateurs”, de sorte que les grossistes en étaient en principe exclus alors qu'ils étaient considérés comme rendant de tels services par la doctrine administrative et la jurisprudence antérieures à la loi Dutreil . Les grossistes se sont donc vus contraints d'abandonner les services de coopération commerciale et de se tourner vers la nouvelle catégorie de “services distincts”. 

Avant la loi Chatel du 3 janvier 2008, les opérateurs avaient recours, en dehors des conditions générales de vente, différenciées le cas échéant, à des conditions particulières de vente (CPV), convenues avec certains acheteurs en fonction des contreparties offertes au titre des obligations relevant de l'opération d'achat-vente, et à des contrats de services allant au-delà des opérations d'achat-vente : services de coopération commerciale et services distincts. Dans certains cas, à l'initiative d'entreprises de la grande distribution, l'ensemble de ces documents ou une partie d'entre eux étaient fondus dans un accord unique censé regrouper les différents accords des parties pour l'année. Cette pratique a vraisemblablement inspiré le législateur lors de la réforme des relations commerciales par la loi Chatel.

La loi Chatel du 3 janvier 2008 a, en effet, institué un contrat unique écrit de commercialisation d'une très large portée puisqu'il s'impose aux fournisseurs (producteurs, prestataires de services, grossistes ou importateurs) dans leurs relations avec tout distributeur (ou prestataire de services) et concerne non seulement les conditions de vente, mais aussi les services ne relevant pas des obligations d'achat et de vente ou les autres obligations destinées à favoriser la relation commerciale . 

La loi LME du 4 août 2008 a modifié la portée de l'article L. 441-7 du Code de commerce en imposant de prévoir dans un document unique les conditions de l’opération de vente, les conditions dans lesquelles les services de commercialisation seront rendus, ainsi que les autres obligations destinées à favoriser la relation commerciale. Elle a également élargi le champ d’application de la coopération commerciale en ajoutant qu’il peut s’agir de services rendus à l’occasion de la revente aux professionnels. Puis, dans sa rédaction issue de la loi Hamon , qui a sensiblement enrichi le contenu de la convention, l’ancien article L. 441-7 a obligé à prévoir dans un document unique :

1°) les conditions de l'opération de vente des produits ou des prestations de services telles qu'elles résultent de la négociation commerciale, dans le respect de l'article L. 441-6, y compris les réductions de prix ;

2°) les conditions dans lesquelles le distributeur ou le prestataire de services rend au fournisseur, à l'occasion de la revente de ses produits ou services aux consommateurs ou en vue de leur revente aux professionnels, tout service propre à favoriser leur commercialisation ne relevant pas des obligations d'achat et de vente, en précisant l'objet, la date prévue, les modalités d'exécution, la rémunération des obligations ainsi que les produits ou services auxquels ils se rapportent ;

3°) les autres obligations destinées à favoriser la relation commerciale entre le fournisseur et le distributeur ou le prestataire de services, en précisant la rémunération ou la réduction de prix globale afférente à ces obligations.

Le texte précisait que la convention écrite a pour objet d'indiquer les obligations des parties afin de fixer le prix au terme de la négociation commerciale. Pour s'assurer que cette négociation avait bien été menée à partir des conditions générales de vente du fournisseur, l'ancien article L. 441-7 du Code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi Hamon, disposait que la convention “indique le barème de prix tel qu'il a été préalablement communiqué par le fournisseur, avec ses conditions générales de vente, ou les modalités de consultation de ce barème dans la version ayant servi de base à la négociation”. Tout en préservant le principe de négociabilité, le législateur visait ainsi à permettre une traçabilité de la formation du prix.

La loi Sapin II du 9 décembre 2016  a autorisé la conclusion de conventions pluriannuelles d'une durée de deux ou trois ans. Dans une telle hypothèse, les parties devaient prévoir les modalités de révision du prix convenu.

L’ordonnance du 24 avril 2019 n'a conservé que deux régimes pour la convention : un régime général simplifié applicable à toute relation entre fournisseurs et distributeurs, y compris les grossistes (art. L. 441-3) et un régime plus strict propre aux produits de grande consommation (PGC), non applicable aux grossistes (art. L. 441-4). Des dispositions spécifiques ont également été consacrées à la sous-traitance comme c'était déjà le cas auparavant, et aux produits alimentaires vendus sous marque distributeur (art. L. 441-7). Selon le rapport au Président de la République sur l’ordonnance 2019-359, les modifications apportées tendaient à une meilleure cohérence et lisibilité des dispositions applicables aux conventions écrites qui ont fait l’objet de multiples réformes au cours des quinze dernières années.

La loi ASAP  du 7 décembre 2020 a introduit de nouvelles exigences formelles s'agissant de la rémunération des services rendus par les centrales internationales, afin de lutter contre le contournement de la loi française par la délocalisation des entités facturant des prestations à l'utilité contestable.

La loi EGalim 2  a introduit, à l'article L. 443-8 du Code de commerce, une nouvelle convention écrite spécifique aux produits alimentaires et aux produits destinés à l'alimentation des animaux de compagnie pour  lesquels les conditions générales de vente sont soumises au I de  l'article L. 441-1-1.

La loi EGalim 3  a introduit une nouvelle convention écrite pour les prestations logistiques  et, sans apporter de modification à son régime, consacré à nouveau un texte spécifique à la convention grossistes .

Enfin, la loi Le Maire du 17 novembre 2023 , portant mesures d'urgence  pour lutter contre l'inflation, a avancé le calendrier annuel des  négociations afin de favoriser une répercussion plus rapide sur les prix  en magasin des baisses du coût de certaines matières premières.

L. 2023-1041 du 17 novembre 2023 portant mesures d'urgence pour lutter contre l'inflation concernant les produits de grande consommation, JO 18 novembre 2023.

La situation peut cependant s'avérer encore plus complexe lorsque les grossistes rendent aux fournisseurs des services d'animation commerciale à l'occasion de la revente aux consommateurs.

Les questions/réponses publiées par l'Administration relatives au formalisme de la convention unique et questions de facturation précisent que le texte, qui vise le fournisseur, le distributeur ou le prestataire de services, exclut des produits ou services destinés à être transformés par ces derniers. Le texte concerne les prestations de services au titre de la coopération commerciale ou les autres obligations rendues directement ou indirectement par le distributeur.

L. 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation.

L. 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. - V. sur cette loi, PLANKENSTEINER et CREQUER, Les relations commerciales après la loi Sapin II, RLC 2017, n° 3108.

Loi 2020-1525 du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l'action publique (ASAP).

L. 2021-1357 du 18 octobre 2021 visant à protéger la rémunération des agriculteurs, JO 19 oct. 2021. - Sur cette loi, V. BONNET-DESPLAN, EGalim 2, La protection du prix des matières premières agricoles dans les négociations commerciales, LD novembre 2021, 6 ; GRALL, LAMY, ILLOUZ, Négociations commerciales 2022 : vers une nouvelle réforme du titre IV du livre IV du code de commerce ?, RLC 2021, n° 4107 ; JOUVENSAL, La protection de la rémunération des agriculteurs à l’épreuve du droit des ententes, RLC 2021, n° 4108 ; RIEM, Loi EGAlim 2 : Une loi visant à protéger la rémunération de “cet homme, dans la force de l'âge, qui avait choisi ce si beau métier d'agriculteur”, Contrats, Conc., Consom. novembre 2021, Focus 36 ; VANNI et MARTIN, Loi visant à protéger la rémunération des agriculteurs (dite "EGalim II") : sécuriser l'amont et verrouiller l'aval, RLC 2021, n° 4172.

L. 2023-221 du 30 mars 2023 tendant à renforcer l’équilibre dans les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs, JO 31 mars 2023. - V. sur cette loi BEHAR-TOUCHAIS et GRIMALDI, La loi Descrozaille dite “Egalim 3” ou la victoire des fournisseurs contre les distributeurs, JCP E 2023, n° 1169

Des accords de coopération commerciale et de services distincts à la convention écrite.

V. sur la coopération commerciale antérieurement à la loi Dutreil du 2 août 2005 : ARHEL, La revente à perte : la coopération commerciale, Rev. Conc. Consom., septembre-octobre 1991, 17 ; J.-M. et M. MOUSSERON, Coopération commerciale et discrimination, refus de vente et prix imposés, Cah. dr. entr., 1995, nº 11, 7 ; RENAUDIN, Point de vue de la DGCCRF sur la coopération commerciale, Cah. dr. entr., 1995, nº 1, 13 ; REYÉ, Coopération commerciale : référencement et services spécifiques (analyse des conséquences juridiques d'une réforme non maîtrisée), LPA, 5 janvier 1998 ; RETTERER, Le contrat de référencement : du droit des obligations au droit de la concurrence, Cah. dr. entr. 1999, nº 2, 1 ; Conquête de la clientèle et droit de la concurrence. Actualité et perspectives françaises, allemandes, communautaires et américaines. Abus de puissance d'achat et accès aux linéaires de la grande distribution, Colloque CREDA ; La restauration de l'équilibre des relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs de la grande distribution, D., 2003, 1210 ; GIVRY et GUILBERT, La circulaire Dutreil : un nouveau cadre pour la négociation commerciale, fruit d'un compromis, RLDA, 2003/62, 5 ; GRALL, Circulaire Dutreil : de la différenciation tarifaire à la discrimination abusive !, Dr. et patr., juin 2003, 81 ; GRALL, Commentaire de la circulaire Dutreil : suite et fin !, Dr. et patr., juillet-août 2003, 28 ; ZOUGHI, La négociation commerciale entre fournisseurs et distributeurs : une invitation à la différenciation tarifaire par la circulaire Dutreil, LPA, 2 juillet 2003, 6 ; VERTUT, Frein à la coopération commerciale : les vertus insoupçonnées de l'ABS (Aubenas, Bar-le-Duc, Strasbourg), LD, janvier 2006, 1. 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143. Des accords de coopération commerciale et de services distincts à la convention écrite.