Le droit européen et français applicable aux réseaux de distribution.
Le Droit de la distribution, deuxième tome du Traité de droit économique, expose, dans une perspective comparative, l’ensemble des règles européennes et françaises : approvisionnement et fourniture exclusifs, distribution exclusive, distribution sélective, distribution automobile.

Droit français de la distribution

Le caractère consensuel du contrat de distribution exclusive ne fait pas obstacle à l'exercice par le fournisseur, initiateur du réseau, de son pouvoir de gestion et d'organisation . Aussi peut-il modifier unilatéralement certaines conditions contractuelles, notamment sa politique tarifaire et sa politique commerciale, dès lors que ces modifications ne constituent pas un abus de sa part . Un distr …

Modification unilatérale des conditions contractuelles.

FERRIER, Le pouvoir du promoteur de faire évoluer son réseau de distribution, Concurrences 1/2022, 66.

Le caractère consensuel du contrat de distribution exclusive ne fait pas obstacle à l'exercice par le fournisseur, initiateur du réseau, de son pouvoir de gestion et d'organisation . Aussi peut-il modifier unilatéralement certaines conditions contractuelles, notamment sa politique tarifaire et sa politique commerciale, dès lors que ces modifications ne constituent pas un abus de sa part . Un distributeur ne saurait donc exiger l'intangibilité de la politique commerciale du réseau et s'opposer aux modifications apportées au système de primes , à moins que le fournisseur ne diminue de façon draconienne l'ensemble des conditions financières du contrat et se mette lui-même à l'abri d'une évolution défavorable du marché. De même, le refus intransigeant du distributeur d'accepter de nouvelles conditions commerciales temporaires , ou un nouveau système de gestion prévisionnelle utile à la bonne marche de l'entreprise , est fautif. Un distributeur ne peut pas davantage reprocher à son fournisseur de lui imposer la vente de produits de substitution low cost lorsque le contrat comporte une clause selon laquelle la liste des produits confiés au distributeur pourra être augmentée ou réduite par son cocontractant . Enfin, la réduction du territoire contractuel imposée à l'ensemble des distributeurs à la suite de la réorganisation du réseau n'est pas fautive lorsqu'elle n'a pas eu de conséquences négatives sur les ventes .

Dans certains cas, le comportement du distributeur peut être à l'origine des modifications unilatérales du fournisseur. Un distributeur ne peut ainsi se plaindre de la limitation de ses droits lorsqu'il a accepté la reconduction du contrat à durée déterminée aux conditions antérieures alors que les parties étaient en litige sur la portée de la clause d'exclusivité . Les impayés du distributeur peuvent aussi conduire le fournisseur à bloquer les livraisons et instaurer un système de paiement au comptant .

La modification unilatérale doit être exempte d'abus. L'appréciation de la légitimité d'une telle modification peut parfois conduire le juge à s'immiscer dans la gestion des entreprises, ingérence qui peut être difficilement justifiable . Le fait pour un fournisseur d'augmenter unilatéralement les obligations d'achat de son distributeur , d'imposer de nouvelles modalités de traitement du service après-vente qui induisent de nouvelles charges pour le distributeur exclusif , d'arrêter la production de l'un des articles qui constituent l'objet principal de l'accord , de faire varier unilatéralement les objectifs de vente alors qu'en principe leur fixation doit être commune , de modifier les conditions de vente des produits, lorsque, dans un contexte général difficile, il impose de lourds sacrifices au distributeur tout en distribuant d'importants dividendes à ses actionnaires , ou encore de tenter d'imposer à son distributeur un changement de marque , a été jugé abusif. 

La modification unilatérale peut prendre la forme d'une rupture partielle de relations commerciales établies. La Cour de cassation a estimé que tel est le cas lorsque le fournisseur annonce au distributeur, moins de quinze jours avant la prise d'effet de sa décision, que dorénavant les commandes devront être passées auprès d'un intermédiaire, à des conditions tarifaires moins avantageuses .

Enfin, la modification unilatérale des conditions contractuelles par le fournisseur peut constituer un trouble manifestement illicite, lorsqu'elle sanctionne un manquement pour lequel le contrat prévoit d'autres mesures  ou lorsque le constructeur décide de supprimer un encours . Tel n'est pas le cas en revanche du recours au réseau internet, en remplacement du système obsolète de communication par minitel .

Versailles, 18 novembre 2004, LawLex200500007478JBJ. 

Aix-en-Provence, 9 juillet 1991, LawLex200200005855JBJ : la résiliation d'un contrat de distribution exclusive par le fournisseur est abusive lorsqu'elle est motivée par le refus du distributeur d'accepter une révision des prix non conforme aux dispositions contractuelles. 

Cass. com., 19 décembre 1995, LawLex200200005519JBJ. 

Paris, 8 février 2017, LawLex201700000306JBJ.

Cass. com., 6 mai 2008, LawLex200800000675JBJ. 

Cass. com., 28 avril 2004, LawLex200400001111JBJ : le refus du distributeur d'accepter un nouveau système de gestion reposant sur des objectifs de vente unilatéralement déterminés par le fournisseur, alors que le contrat prévoit une fixation d'un commun accord, ne constitue pas une juste cause de résiliation. 

Cass. com., 15 janvier 2002, LawLex200200005004JBJ. 

T. com. Paris, 24 septembre 1999, LawLex200200004623JBJ. 

Cass. com., 23 octobre 2012, LawLex201200002245JBJ, Contrats Conc. Consom., 2013, n° 10, obs. MATHEY ; RJDA, 2013, n° 68. - V. égal. Paris, 29 septembre 2021, LawLex202100005455JBJ.

Pau, 1er juillet 1999, LawLex200200004204JBJ. 

T. com. Versailles, 29 décembre 2000, LawLex200400000225JBJ. 

Versailles, 19 juin 2003, LawLex200300004300JBJ.

TGI Paris, 9 mars 2004, LawLex200400000737JBJ, rappelant que “seul ouvre droit à indemnisation l'abus dans la modification de la politique tarifaire ou dans le changement de la politique commerciale que commettrait le fournisseur au détriment de ses distributeurs” ; 25 novembre 2004, LawLex200500004026JBJ, estimant qu'il ne peut être reproché au concédant de ne pas avoir appliqué son système de primes dès lors qu'il n'est pas établi que celui-ci présente un caractère contractuel ; T. com. Paris, 22 octobre 2014, LawLex201400001130JBJ ; Reims, 1er septembre 2015, LawLex201500001020JBJ : retenant que sous réserve de respecter un préavis raisonnable, la suppression unilatérale d'une bonification par le fournisseur n'est pas abusive, lorsque celui-ci s'est contractuellement réservé la faculté de modifier périodiquement les conditions spéciales dont bénéficie le distributeur en fonction des objectifs, besoins ou contraintes de l'entreprise.

Paris, 3 décembre 1999, LawLex200200000027JBJ. 

Paris, 3 juillet 2002, LawLex200400002109JBJ. 

Paris, 7 février 2018, LawLex201800000268JBJ.

T. com. Paris, 22 octobre 2014, LawLex201400001130JBJ.

Lyon, 31 mai 2001, LawLex200400001593JBJ, approuvé par Cass. com., 12 mai 2004, LawLex200400001204JBJ. 

Cass. com., 18 juin 2002, LawLex200200004194JBJ ; 28 septembre 2004, LawLex200400002202JBJ, RTD civ., 2005, 129, obs. MESTRE et FAGÈS ; Bordeaux, 7 septembre 2004, LawLex200400002136JBJ ; Paris, 29 novembre 2017, LawLex201700002029JBJ, AJ Contrat, 2018, 73, obs. BRICOGNE, HENRY, HOMMAN LUDIYE.

V. not. Cass. com., 15 janvier 2002, LawLex200200005004JBJ, Communic. com. électr., 2002, nº 61, obs. STOFFEL-MUNCK ; D., 2002, 1974 ; Contrats Conc. Consom., 2002, nº 94, obs. MALAURIE-VIGNAL ; JCP G, 2002, II, 10157, obs. JAMIN ; JCP E, 2002, 1819 ; D., 2002, Somm. obs. MAZEAUD ; RTD civ., 2002, 294, obs. MESTRE et FAGÈS ; Cah. dr. entr., 2002, nº 5, 28, obs. MAINGUY ; RJDA, 2002, nº 627. Dans cette décision, la Haute juridiction approuve la décision des juges du fond, qui avaient considéré qu'un fournisseur avait abusé de son droit de fixer unilatéralement les conditions générales de vente de son distributeur et devait par conséquent être condamné à combler l'insuffisance d'actif de ce dernier. Pour caractériser la faute, la Cour d'appel de Paris avait relevé que, dans un contexte général difficile, le fournisseur avait imposé de lourds sacrifices à ses distributeurs, tout en distribuant d'importants dividendes à ses actionnaires. Ce faisant, la Cour semble valider une ingérence difficilement justifiable du juge dans la gestion des entreprises. Certes, la recherche d'une faute de gestion est au cœur de l'action en comblement de passif. Mais encore faut-il que l'on puisse l'imputer à un dirigeant, qu'il soit de droit ou de fait. Or, en dépit de la forte intégration des réseaux de distribution, notamment en matière automobile, le distributeur demeure un commerçant indépendant et un fournisseur ne peut se voir qualifier de dirigeant de fait que dans la mesure où il outrepasse ses droits. Comment, dès lors, la détermination des conditions générales de vente des produits, prérogative essentielle du fournisseur, en l'occurrence expressément prévue au contrat, pourrait-elle suffire pour caractériser une direction de fait ? 

Droit français de la distribution

72. Modification unilatérale des conditions contractuelles.(1)

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