Le droit européen et français applicable aux réseaux de distribution.
Le Droit de la distribution, deuxième tome du Traité de droit économique, expose, dans une perspective comparative, l’ensemble des règles européennes et françaises : approvisionnement et fourniture exclusifs, distribution exclusive, distribution sélective, distribution automobile.

Droit français de la distribution

La sévérité des règles d'urbanisme commercial, qui, avant l'adoption de la loi LME du 4 août 2008, limitaient strictement les possibilités d'ouverture de magasins dans les centres-ville, a entraîné une lutte des enseignes de distribution afin de s'assurer le contrôle des points de vente existants. De fait, on a assisté à une explosion du contentieux fondé sur les règles de la concurrence déloyale, …

Complicité de violation d'obligations contractuelles.

La sévérité des règles d'urbanisme commercial, qui, avant l'adoption de la loi LME du 4 août 2008, limitaient strictement les possibilités d'ouverture de magasins dans les centres-ville, a entraîné une lutte des enseignes de distribution afin de s'assurer le contrôle des points de vente existants. De fait, on a assisté à une explosion du contentieux fondé sur les règles de la concurrence déloyale, opposant les grands réseaux de franchise qui s'accusent mutuellement d'une nouvelle forme de débauchage, consistant à approcher les distributeurs de réseaux concurrents pour les inciter à résilier leurs contrats et rejoindre leur propre réseau. 

Comme en matière de revente hors réseau dans le cadre de la distribution exclusive ou sélective, la seule connaissance de l'affiliation d'un franchisé à un réseau concurrent ne suffit pas à rendre un franchiseur complice de la résiliation avant terme de son contrat par le franchisé. En effet, l'appartenance à un réseau déterminé n'est pas nécessairement synonyme de soumission à une clause de non-réaffiliation, notamment dans des domaines où ce type de clauses n'est pas d'application généralisée . En outre, la rupture du contrat de franchise peut s'expliquer par d'autres causes que la volonté du franchisé d'adhérer à un autre réseau, comme la mauvaise exécution de ses obligations par le franchiseur . Lorsque le franchisé a déjà exprimé des griefs à l'encontre de son franchiseur, le simple fait, pour un concurrent, d'avoir démarché un franchisé et de lui avoir communiqué les coordonnées d'un avocat spécialisé dans la défense des droits des franchisés ne suffit donc pas à le rendre complice de la rupture ultérieure du contrat de franchise, dès lors qu'une telle décision relève du libre arbitre du franchisé . En outre, la responsabilité du franchiseur concurrent ne peut être recherchée s'il n'est pas clairement établi qu'il a noué des contacts avec le franchisé avant la rupture , s'il ne l'a approché qu'après la rupture , même fautive , du contrat ou lorsque les circonstances lui permettaient légitimement de croire que le contrat était déjà rompu . Une action en désorganisation ne peut, sans abus, être intentée contre lui lorsqu'un franchisé du réseau rival est passé dans le sien, dès lors que ce transfert s'inscrit dans un contexte de concurrence entre distributeurs en vue de maintenir un réseau de commerce de proximité . En revanche, la complicité du franchiseur concurrent dans la violation de ses obligations par le franchisé sera retenue s'il est établi qu'il connaissait ou ne pouvait ignorer  l'existence du contrat, même si cette connaissance ne portait pas sur le détail des clauses . A fortiori, la tête de réseau concurrente, qui a été informée par lettre recommandée de l'existence d'une clause de non-concurrence à la charge d'un revendeur, se rend complice de la violation de ses obligations contractuelles en ne rompant pas les liens noués avec ce dernier .

Lorsque le contrat de franchise comporte un droit de préférence  ou de préemption , que le franchiseur en titre n'a pas exercé  ou lorsqu'il n'est pas établi que le franchiseur concurrent connaissait l'intention du franchiseur en titre d'exercer son option , la tierce complicité est exclue . Dès lors, l'achat de fonds de commerce franchisés d'un réseau concurrent avant le terme des contrats de franchise et d'approvisionnement, ne constitue pas un acte de concurrence déloyale, en l'absence de manoeuvres déloyales . De même, le franchiseur ne peut demander la poursuite du contrat en référé lorsque, invité à exercer son droit d'agrément ou de préemption, il a opposé une réponse négative aux deux options proposées et que les parties ont prévu la résiliation automatique de l'accord dans de telles circonstances . La volonté d'éluder le droit de préférence et de préemption du franchiseur peut résulter du choix de limiter à 49 % la fraction de la société franchisée cédée à un tiers, aussitôt contredit par l'octroi à ce dernier de prérogatives exorbitantes . Par ailleurs, le droit de préférence stipulé au profit du franchiseur doit être exécuté de bonne foi par le franchisé, c'est-à-dire sans inclure de condition manifestement irréalisable dans l'acte de cession . Plus récemment, la Cour de cassation s'est montrée plus protectrice des droits de préférence : elle a en effet estimé que la tête d'un réseau concurrent qui se porte cessionnaire des parts sociales d'un franchisé en violation du droit de préférence du franchiseur engage sa responsabilité pour tierce complicité dès lors qu'elle a nécessairement connaissance de ce type de stipulation, qu'elle impose elle-même à ses propres franchisés .

Dans l'hypothèse de la rupture d'un contrat de franchise autorisée par le juge-commissaire à la suite du placement du franchisé en procédure de sauvegarde, le franchiseur ne peut obtenir la communication de pièces non versées aux débats qui comportent des éléments essentiels de l'adhésion du franchisé à un groupe concurrent et notamment son savoir-faire ou les marges qui  peuvent être envisagées, à plus forte raison lorsque sa demande vise “toute annexe”, ce qui démontre qu'il ne s'agit pas d'accéder à un  document précis qui serait dissimulé mais d'entrer en possession des  conditions proposées par un groupe concurrent à ses adhérents ou franchisés .

Enfin, le franchiseur dépossédé devra faire preuve de prudence dans l'exercice de ses actions en justice, car le juge n'hésite pas à déclarer l'action abusive s'il constate qu'elle n'a d'autre objet que de protéger son territoire .

Dijon, 8 mars 2018, LawLex201800000497JBJ, LEDICO juin 2018, 3, obs. BUCHER ; Contrats Conc. Consom. 2018, n° 109, obs. MALAURIE-VIGNAL, dans le secteur de l'immobilier. - V. aussi Paris, 27 janvier 2021, LawLex202100000283JBJ, LD février 2021, 2 et Concurrences 2/2021, 105, obs. ERESEO, considérant que la seule acquisition, par la tête d'un réseau concurrent, des parts sociales de sociétés franchisées d'un autre réseau ne la rend pas complice de la violation, par ces dernières, de leur obligation de non-concurrence, dès lors qu'il n'est pas établi qu'elle avait  connaissance de cette stipulation.

Cass. com., 23 janvier 2007, LawLex200700000145JBJ, RJDA, 2007, nº 574.

Paris, 20 mars 2019, LawLex201900000434JBJ et LawLex201900000437JBJ.

Cass. com., 23 janvier 2007, LawLex200700000144JBJ, RJDA, 2007, nº 574, approuvant Besançon, 30 novembre 2004, LawLex200700000206JBJ ; Cass. com., 6 septembre 2011, LawLex201100001453JBJ, D., 2012, 585, obs. FERRIER.

Cass. com., 15 mai 2007, LawLex200900002656JBJ, D., 2008, 2193, obs. FERRIER ; D., 2007, AJ, 1498, obs. CHEVRIER approuvant Rennes, 10 janvier 2006, LawLex200900003106JBJ.

Cass. com., 6 septembre 2011, LawLex201100001453JBJ : le franchiseur qui a laissé expirer le délai pour exercer son droit de préférence, alors que l'offre de rachat présentée par son concurrent excluait la reprise des contrats de franchise et d'approvisionnement, ne peut reprocher à ce dernier aucun acte de concurrence déloyale tenant à la rupture de ces contrats par le franchisé.

Cass. com., 9 juin 2009, LawLex200900002928JBJ.

Comp. Paris, 6 mars 2019, LawLex201900000315JBJ, LD avril 2019, 5, obs. BORIES ; Contrats Conc. Consom. 2020, Etude nos 58 et 75, obs. GOUACHE et BÉHAR-TOUCHAIS, estimant que la tête d'un réseau concurrente se rend complice de la violation par un franchisé de la clause de préférence souscrite au profit de son franchiseur, lorsque, nécessairement au courant de l'existence de cette stipulation, il rachète ses parts sociales.

Agen, 11 juin 2014, LawLex201400002131JBJ, AJCA, 2014, 342, obs. PONSARD.

Paris, 6 juin 2013, LawLex201300000964JBJ.

Cass. com., 26 février 2013, LawLex201300000265JBJ, AJCA 2014, 87, obs. BRETZNER et DUMINY.

Paris, 13 juin 2012, LawLex201200001329JBJ, Concurrences, 4/2012, 93, obs. ERÉSÉO ; RDC, 2013, 183, obs. BÉHAR-TOUCHAIS.

Paris, 24 septembre 2009, LawLex201000000211JBJ. - V. aussi Paris, 25 février 2010, LawLex201000000684JBJ, Contrats Conc. Consom. 2010, n° 209, obs. MALAURIE-VIGNAL ; D. 2011, 551, obs. FERRIER. - Comp. Nîmes, 8 septembre 2005, LawLex200600000540JBJ.

Cass. com., 13 janvier 2021, LawLex202100000117JBJ, LD février 2021, 5, obs. BORIES ; RDC 2021/2, 64, obs. GRIMALDI ; LEDICO mars 2021, 2, obs. GONCALVES.

Lyon, 19 septembre 2024, LawLex202400006802JBJ.

Cass. com., 24 novembre 2009, LawLex200900003554JBJ, préc., approuvant Paris, 2 octobre 2008, LawLex200900003628JBJ.

Cass. com., 24 novembre 2009, LawLex200900003554JBJ et LawLex200900003555JBJ, D. 2011, 551, obs. FERRIER ;  Paris, 25 février 2010, LawLex201000000684JBJ, préc. ; Cass. com., 7 juin 2011, LawLex201100001031JBJ, RDC, 2012, 141, obs. GRIMALDI.

Cass. com., 9 juin 2009, LawLex200900002927JBJ.

Cass. com., 15 mai 2007, LawLex200900002656JBJ, D., 2008, 2193, obs. FERRIER ; D., 2007, AJ, 1498.

Cass. com., 3 avril 2007, LawLex200700000429JBJ. Adde : Toulouse, 20 mars 2013, LawLex201300000492JBJ, pour un franchisé ne faisant plus partie du réseau au moment où le concurrent du franchiseur a racheté son fonds de commerce.

Cass. com., 16 décembre 2010, LawLex201000001473JBJ.

Cass. com., 19 décembre 2000, LawLex200200000693JBJ, RJDA, 2001, nº 739.

Cass. com., 23 janvier 2007, LawLex200700000142JBJ et LawLex200700000149JBJ, D., 2008, 2199, obs. FERRIER ; RJDA, 2007, nº 574 ; 2 décembre 2008, LawLex200800002173JBJ.

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