Infractions au Code pénal, au Code de commerce ou au Code de l'environnement, Procédure pénale

Droit pénal des affaires

La délégation doit être opportune, c’est-à-dire justifiée au regard de la taille de l’entreprise, de ses activités et de son organisation interne. La délégation de pouvoirs est indispensable dans les entreprises de grande taille car le dirigeant ne peut superviser seul le suivi de toutes les activités et le respect de toutes les réglementations applicables. En revanche, la délégation de pouvoirs n …

Contenu de la délégation

La délégation doit être opportune, c’est-à-dire justifiée au regard de la taille de l’entreprise, de ses activités et de son organisation interne. La délégation de pouvoirs est indispensable dans les entreprises de grande taille car le dirigeant ne peut superviser seul le suivi de toutes les activités et le respect de toutes les réglementations applicables. En revanche, la délégation de pouvoirs n'est pas acceptable dans les plus petites entreprises, le chef d'entreprise pouvant et surtout devant assumer seul ses fonctions. Une délégation de pouvoirs artificielle sera donc privée d’effet par les tribunaux.

Pour emporter délégation de pouvoirs et transfert de la responsabilité pénale au délégataire, la délégation doit être certaine et dépourvue d’ambiguïté . Une formulation trop imprécise ou trop générale aura pour effet de faire perdre toute efficacité à la délégation . La délégation doit précisément viser les domaines dans lesquels la responsabilité pénale est transférée vers le salarié et ne peut être étendue au-delà des limites qu’elle définit . Il convient donc d’accorder un soin particulier à la rédaction de l’acte de délégation. Il est recommandé de mentionner le domaine et la portée de la délégation en précisant son objet, l’étendue des pouvoirs conférés au délégataire, la réglementation qui lui revient de faire appliquer et de respecter, ainsi que les moyens dont il dispose pour y parvenir, sa date de prise d’effet et sa durée. La délégation de pouvoirs doit s’inscrire dans la durée et conférer au délégataire une certaine stabilité. Si aucune durée minimum n’est requise par les juridictions, il faut que le délégataire ait eu le temps de mener à bien les missions qui lui ont été confiées, faute de quoi il aura été dans l’impossibilité de faire respecter la réglementation et donc d’éviter l’infraction. Pour permettre l’exonération du délégant, l’acte de délégation doit être antérieur à la commission des faits qui constituent l’infraction .

Il convient d’assurer un suivi régulier des délégations de pouvoirs accordées, notamment en cas de fusion-absorption. En effet, celle-ci, parce qu'elle donne lieu à la création d’une société distincte de la précédente et à un changement de dirigeant social, est susceptible d’entraîner la caducité d’une délégation de pouvoirs accordée à un salarié de la société absorbée .
Le cumul de délégations de pouvoirs est strictement exclu par la jurisprudence . Il convient de distinguer les co-délégations, qui correspondent à un cumul de délégations pour l’exercice d’un même travail et qui sont sanctionnées de nullité par les tribunaux, des pluri-délégations, qui sont admises dès lors qu’elles établissent diverses délégations pour la réalisation de missions différentes. La co-délégation est considérée comme nulle car chaque délégataire se trouve privé de son autorité et de l’indépendance nécessaire à la réalisation de la mission qui lui a été déléguée et entravé dans ses initiatives  . La pluralité de délégations pour un même objet équivaut par conséquent à leur absence par le risque avéré de paralysie qu'elle crée. Le caractère concurrent et ambigu de deux délégations accordées ne permet donc pas au chef d’entreprise de s'exonérer de la responsabilité personnelle qui lui incombe en cette qualité .

Comme les délégations, les subdélégations sont admises et obéissent aux mêmes conditions que celles-ci  : leur validité  n'est pas subordonnée à l'autorisation du chef d'entreprise, dès lors qu'elles sont régulièrement consenties et que le subdélégataire est pourvu de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires à l'accomplissement de sa mission . 

Par prudence, il est préférable soit de prévoir expressément la possibilité pour le délégataire de subdéléguer ses pouvoirs dans la délégation de pouvoirs, en précisant qu’il ne doit pas y avoir cumul de délégation, soit, à l'inverse, de formaliser le refus du dirigeant d'autoriser une subdélégation.

Enfin, une délégation de pouvoirs doit être signée tant du délégant que du délégataire . De fait, la délégation de pouvoirs consentie à un salarié qui ne l'a pas signée, exerce l'activité déléguée à titre gracieux et met en œuvre des moyens qui appartiennent à une personne morale distincte de celle gérée par le délégant, ne peut exonérer ce dernier .

Cass. crim., 25 janvier 2000, n° 99-82.123, LawLex202200002516JBJ ; 30 mai 2000, n° 99-86.695, LawLex202200002670JBJ.

Cass. crim., 2 février 1993, n° 92-80.672, LawLex202200002511JBJ, Dr. sociétés, n° 2, février 2012, étude LARCENA et ELINEAU ; JCP S 2016, 1216, prat. HENRION.

Cass. crim., 14 février 2012, LawLex202200001458JBJ, Dr. pén. n° 11, novembre 2012, chron. SEGONDS.

Grenoble, 23 février 2009, LawLex201200001315JBJ.

Cass. crim., 18 septembre 2001, n° 01-80.360, LawLex202200002669JBJ ; 12 avril 2005, n° 04-83.101, LawLex202200002515JBJ, JCP S 2021, 1159, étude LAPEROU-SCHENEIDER et SALOMON.

Aix-en-Provence, 25 juin 1997, LawLex200300002241JBJ.

Cass. crim., 20 juillet 2011, LawLex202200002247JBJ et LawLex202200001477JBJ, JCP S 2021, 1022, comm. DUQUESNE.

Cass. crim., 6 juin 1989, n° 88-82.266, LawLex202200002517JBJ, JCP 2016, doctr. 1050, PAGNERRE ; Dr. pén. n° 11, novembre 2008, chron. SEGONDS ; 23 novembre 2004, n° 04-81.601, LawLex202200001381JBJ, JCP E 2020, 1213, comm. AUMERAN ; JCP S 2020, 2018, comm. AUMERAN ; D. 2005. 1521.

Cass. crim., 2 octobre 1979, n° 78- 93.334, LawLex202200002518JBJ ; 23 novembre 2004, n° 04-81.601, LawLex202200001381JBJ, JCP E 2020, 1213, comm. AUMERAN ; JCP S 2020, 2018, comm. AUMERAN ; D. 2005. 1521.

Cass. crim. 23 janvier 1997, n° 95- 85.788, LawLex202200002832JBJ, JCP 2016, doctr. 1050, PAGNERRE ; Dr. pén.  n° 4, avril 2010, dossier 6, étude DOUCHEZ, DE LAMY, SEGONDS.

Cass. crim., 15 mars 2011, LawLex202200002084JBJ ; TGI Colmar, 14 février 2002, LawLex200200000047JBJ. ; Cass. crim., 3 avril 1997, LawLex200200000310JBJ, RJDA, 1997, nº 1506 ; D. aff., 1997, 1212 ; 18 octobre 1995, LawLex200300001015JBJ, Dr. pén. 1996, n° 42, ROBERT ; RJDA, 1996, n° 437.

Cass. crim., 30 octobre 1996, n° 94-83.650, LawLex202200002513JBJ, JCP 1997, 242 ; JCP E, 1997, 102 ; BJS 1997. 300, note MASCALA ; D. 1997. 20 ; JCP S 2013, 1223, étude CŒURET et DE MOUCHERON.

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18. Contenu de la délégation

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