Introduction

Existence d'une créance

Délivrance d'un titre exécutoire

Existence de biens ou créances saisissables

Conditions de l’exécution forcée

Autorité judiciaire

Autres autorités

Autorités et personnes compétentes

Opérations

Difficultés d’exécution

Mise en œuvre de l’exécution forcée

Droit commun des voies d'exécution

Notion d'astreinte

Champ d'application rationae personae

Champ d'application rationae materiae 

Détermination de l’astreinte

Compétence du juge

Pouvoirs du juge

Effets de la décision prononçant ou rejetant l’astreinte

Prononcé de l'astreinte

Conditions de fond

 Conditions procédurales

Rôle et pouvoirs du juge

Effets du jugement de liquidation

Liquidation de l'astreinte

Astreinte

Conditions de mise en œuvre

Contestations des mesures conservatoires

Droit commun des mesures conservatoires

Saisies conservatoires

Sûretés judiciaires

Régimes particuliers

Mesures conservatoires

Saisie des créances de sommes d'argent

Saisie des biens meubles corporels

Saisie des droits incorporels

Mesures d'exécution sur les meubles

Saisies immobilières

Expulsions

Mesures d'exécution sur les immeubles

Mesures d'exécution forcée

5. Procédures civiles d'exécution

La saisie des rémunérations du travail est également soustraite au régime général des saisies-attributions de créances de sommes d'argent, en raison du caractère alimentaire des salaires et de la nécessité qui en découle de sanctuariser une partie de ceux-ci pour assurer la subsistance du débiteur. Elle fait depuis longtemps l'objet de règles spéciales, édictées par les actuels articles L. 3252-1 à L. 3252-13 du Code du travail, auxquels renvoie l'article L. 212-1 du Code des procédures civiles d'exécution. Comme la saisie-attribution de droit commun, la saisie des rémunérations intervient dans le cadre de rapports tripartites entre un créancier, son débiteur, le salarié, et l'employeur de ce dernier, le tiers saisi.

En vertu de l'article L. 3252-1, le régime spécial s'applique aux sommes dues à titre de rémunération à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou  plusieurs employeurs, quels que soient le montant et la nature de sa rémunération ou la forme et la nature de son contrat. Toutes sommes ayant la nature d'une rémunération, à l'exclusion de celles présentant un caractère indemnitaire, que l'article L. 3252-3, alinéa 3, répute insaisissables, relèvent de ce dispositif. Sont saisissables, le montant de la rémunération, ses accessoires ainsi que la valeur des avantages en nature, après déduction des cotisations et contributions sociales obligatoires et de la retenue à la source. Outre les indemnités insaisissables, ne sont pas couvertes les sommes  allouées à titre de remboursement de frais exposés par le travailleur et les allocations ou indemnités pour charges de famille. L'indemnité de départ à la retraite versée au salarié qui quitte volontairement l'entreprise pour bénéficier du droit à une pension de vieillesse n'ayant pas pour objet de compenser un préjudice, elle constitue une rémunération soumise aux règles de saisie prévues par le Code du travail . Il en va de même des pensions et rentes, y compris celles servies par les institutions de retraite complémentaire . 

Eu égard à leur caractère alimentaire, l'article L. 5232-2 prévoit que les sommes dues à titre de rémunération ne sont saisissables ou cessibles que dans des proportions et selon des seuils de rémunération affectés d'un correctif pour toute personne à charge, déterminés par les articles R. 3252-2 et suivants. En vertu de ces textes, la proportion dans laquelle les sommes dues à titre de rémunération sont saisissables ou cessibles est fixée :

1° au vingtième, sur la tranche inférieure ou égale à 4 370 euro ;

2° au dixième, sur la tranche supérieure à 4 370 euro et inférieure ou égale à 8 520 euro ;

3° au cinquième, sur la tranche supérieure à 8 520 euro et inférieure ou égale à 12 690 euro ;

4° au quart, sur la tranche supérieure à 12 690 euro et inférieure ou égale à 16 820 euro ;

5° au tiers, sur la tranche supérieure à 16 820 euro et inférieure ou égale à 20 970 euro ;

6° aux deux tiers, sur la tranche supérieure à 20 970 euro et inférieure ou égale à 25 200 euro ;

7° à la totalité, sur la tranche supérieure à 25 200 euro.

Ces seuils sont augmentés d'un montant de 1 690 euro par personne à la charge du débiteur  saisi ou du cédant, sur justification présentée par l'intéressé . Il sont révisés annuellement en fonction de l'évolution de l'indice des prix à la consommation, hors tabac, des ménages urbains dont le chef est ouvrier ou employé tel qu'il est fixé au mois d'août de l'année  précédente dans la série France-entière, et arrondi à la dizaine d'euro supérieure. Comme en matière de saisie-attribution de droit commun, l'article R. 5232-5 précise que la somme laissée dans tous les cas à la disposition du salarié dont la rémunération fait l'objet d'une saisie ou d'une cession doit être égale au montant du RSA. Cependant, ces seuils ne s'appliquent pas lorsque le créancier poursuit le recouvrement d'une créance d'aliments : dans cette hypothèse, l'article L. 3252-5 indique que la mesure peut s'étendre à l'intégralité de la rémunération et concerne le terme mensuel courant et les six derniers mois impayés des pensions alimentaires ou les vingt-quatre derniers mois lorsque l'organisme débiteur des prestations familiales agit pour le compte du créancier, pour autant qu'un montant égal au RSA soit réservé. 

La procédure de saisie est obligatoirement précédée d'une phase de conciliation, sous peine de nullité . En vertu de l'article R. 3252-13, la demande du créancier doit être formée par requête remise ou adressée au greffe contenant, à peine de nullité : les nom et adresse de l'employeur du débiteur ; le décompte distinct des sommes réclamées en principal , frais et intérêts échus ainsi que l'indication du taux des intérêts ; les indications relatives aux modalités de versement des sommes saisies et une copie du titre exécutoire . Le greffier convoque alors le débiteur à l'audience, quinze jours au moins avant la tenue de celle-ci, en lui indiquant, notamment, le nom du créancier, les lieu, jour et heure de la tentative de conciliation, l'objet de la demande et l'état des sommes réclamées, avec le décompte distinct du principal, des frais et des intérêts échus et en l'avertissant qu'il doit élever lors de cette audience toutes les contestations qu'il peut faire valoir et qu'une contestation tardive ne suspendra pas le cours des opérations de saisie . Le jour de l'audience, le juge tente de concilier les parties . Si un accord est trouvé, la procédure est clôturée, étant toutefois précisé que si le débiteur manque par la suite aux engagements pris à l'audience, le créancier pourra demander au greffe de procéder à la saisie sans nouvelle conciliation . Si la conciliation échoue ou si le débiteur ne comparaît pas, il est procédé à la saisie après que le juge ait vérifié le montant de la créance en principal, intérêts et frais et, le cas échéant, tranché les contestations soulevées par le débiteur .

Contrairement à la saisie-attribution de droit commun, la saisie des rémunérations est diligentée non par un commissaire de justice, mais par le greffe du tribunal judiciaire en qualité de juge de l'exécution , dans les huit jours, au vu du procès-verbal de non-conciliation . L'acte de saisie, qu'il notifie à l'employeur par lettre recommandée avec accusé de réception, doit contenir : les nom, prénoms et domicile du débiteur et du créancier ou, s'il s'agit d'une personne  morale, sa dénomination et son siège social ; le décompte distinct des sommes pour lesquelles la saisie est pratiquée, en  principal, frais et intérêts échus ainsi que l'indication du taux des intérêts ; le mode de calcul de la fraction saisissable et les modalités de son règlement ; l'injonction d'effectuer au greffe, dans un délai de quinze jours, la déclaration prévue par l'article L. 3252-9 ; et la reproduction des articles L. 3252-9 et L. 3252-10. En vertu de l'article L. 3252-9, l'employeur doit déclarer la situation de droit qui existe entre lui-même et le débiteur saisi, ainsi que les cessions, saisies, saisies administratives à tiers détenteur ou paiement direct de créances d'aliments éventuellement en cours d'exécution. Il dispose pour y procéder d'un délai de quinze jours au plus tard à compter de la notification de l'acte de saisie , contrairement au tiers saisi de droit commun qui doit s'exécuter sur-le-champ. Le tiers employeur saisi qui s'abstient sans motif légitime de faire cette déclaration ou fait une déclaration mensongère peut être condamné par le juge au paiement d'une amende civile de 10 000 euro maximum, sans préjudice d'une condamnation à des dommages et intérêts et d'une condamnation au montant des retenues qu'il aurait dû opérer sur la rémunération du débiteur .

Le déroulement de la procédure de saisie peut être perturbé par divers incidents. Il en va ainsi de la notification à l'employeur d'une saisie administrative à tiers détenteur relative à une créance garantie par le privilège du Trésor public, qui a pour effet de suspendre le cours de la saisie jusqu'à l'extinction de l'obligation du redevable . De même, en cas de notification d'une demande de paiement direct d'une créance alimentaire, l'employeur est tenu de verser au débiteur la fraction de la rémunération correspondant au montant du RSA et de verser au créancier d'aliments les sommes qui lui sont dues. Si ces sommes n'excèdent pas la fraction insaisissable de la rémunération,  l'employeur en remet le reliquat au débiteur. L'employeur doit continuer de verser au greffe la fraction saisissable de la rémunération, après imputation, le cas échéant, des sommes versées au créancier d'aliments .

Lorsqu'il n'existe qu'un seul créancier saisissant, l'employeur adresse tous les mois au greffe une somme égale à la fraction saisissable du salaire, au moyen d'un chèque libellé conformément aux indications données par celui-ci. Le greffier adresse dès sa réception, et après mention au dossier, ce chèque au créancier ou à son mandataire. Si l'employeur procède par virement, il doit justifier  auprès du greffe de la date et du montant du virement .

Par opposition à la saisie-attribution de droit commun, la saisie des rémunérations n'emporte pas attribution immédiate de la créance de salaire au saisissant, de sorte que celui-ci peut se trouver en concours avec d'autres créanciers. L'article L. 3252-8 règle ces conflits en précisant qu'en cas de pluralité de saisies, les créanciers viennent en concours sous réserve des causes légitimes de préférence et de la priorité accordée aux créances d'un montant inférieur à 500 euro . 

La prétention émanant d'un autre créancier peut être élevée par voie d'intervention à la procédure en cours, si celui-ci dispose d'un titre exécutoire, et sans qu'il ait à justifier d'une tentative préalable de conciliation . Dans une telle hypothèse, après que le juge de l'exécution ait vérifié le montant, en principal, intérêts et frais, de la créance nouvelle faisant l'objet de l'intervention, le greffier doit aviser le débiteur et les créanciers qui sont parties à la procédure de cette intervention et informer l'employeur que les versements doivent désormais être effectués à l'ordre du régisseur installé  auprès du greffe du tribunal judiciaire ou le cas échéant, de l'une de ses chambres de proximité . Mais l'existence d'un concours peut aussi procéder de la cession préalable de sa créance salariale effectuée par le débiteur. Dans un tel cas, le greffier doit notifier l'acte de saisie au cessionnaire, l'informer qu'en application de l'article L. 3252-12, il vient désormais en concours avec le saisissant pour la répartition des sommes saisies, et l'inviter à produire un relevé du montant de ce qui lui reste  dû. Le greffier doit également informer l'employeur que les versements doivent désormais être effectués à l'ordre du régisseur. 

La répartition des sommes versées au régisseur est effectuée au moins tous les six mois, à moins que dans l'intervalle, les sommes atteignent un montant suffisant pour désintéresser les créanciers . Le greffier notifie à chaque créancier l'état de répartition. Si une  intervention a été contestée, les sommes revenant au créancier intervenant sont consignées. Elles lui sont remises si la contestation est rejetée. Dans le cas contraire, elles sont distribuées aux créanciers ou restituées au débiteur selon le cas . L'état de répartition peut être contesté dans le délai de quinze jours de sa notification. A défaut de contestation formée dans ce délai, le greffier envoie à chaque créancier un chèque du montant des sommes qui lui reviennent. En  cas de contestation, il est procédé au  versement des sommes dues aux créanciers après que le juge ait statué sur la contestation .

La mainlevée de la saisie résulte soit d'un accord des créanciers, soit de la constatation par le juge de l'extinction de la dette. Elle est notifiée à l'employeur dans les huit jours .

Cass. soc., 30 janvier 2008, LawLex202300003934JBJ.

Cass. 2e civ., 16 mars 2000, LawLex202300003936JBJ.

C. trav., art. R. 3252-19, al. 2 et 3. - V. Cass. 2e civ., 16 décembre 2004, LawLex202300011742JBJ, précisant que le jugement qui autorise la saisie n'a pas à constater que la tentative de conciliation préalable a eu lieu, à mentionner l'identité de l'employeur, et à déterminer les proportions dans lesquelles les rémunérations sont saisissables, dès lors que celles-ci sont fixées par la loi.

C. trav., art. L. 3252-9, L. 3252-10, al. 3 et R. 3252-25.

C. trav., art. R. 3252-30. - V. égal., art. R. 3252-38, al. 3, qui assimile la saisie administrative à tiers détenteur relative à une créance non garantie par le privilège du trésor public à une intervention.

Cass. 2e civ., 19 septembre 2002, LawLex202300011744JBJ, précisant que ce correctif s'applique même en cas de procédure de paiement direct engagée par un créancier d'aliments.

Cass. 2e civ., 26 juin 2014, LawLex202300011741JBJ, excluant la sanction de l'irrecevabilité.

V., sur la possibilité de régularisation, Cass. 2e civ., 26 juin 2014, LawLex202300011741JBJ.

Cass. 2e civ., 2 mai 2024, LawLex202400003635JBJ, soulignant que dès lors que le débiteur doit être informé avant l’audience de  conciliation de l’objet de la demande et de l’état des sommes réclamées, le créancier ne peut substituer un autre titre exécutoire à celui qu’il  a joint à sa requête.

126. Caractère alimentaire