Procédures collectives

La confidentialité peut se définir comme une qualité attachée à une donnée qui permet d'en réserver l'accès à un cercle restreint de personnes. La confidentialité incite le débiteur à engager une procédure amiable, notamment un mandat ad hoc, sans être inquiet de l'image renvoyée aux partenaires. Elle contribue au succès des procédures amiables car elle évite que tous les créanciers du débiteur pr …

Caractère confidentiel

MALHERBE, Ouverture d’une conciliation ou désignation d’un mandataire ad hoc, vers un meilleur compromis entre secret et transparence au profit des salariés, JCP E 2017, n° 1300 ; PEROCHON, Coût, transparence et confidentialité de la prévention, RPC 2014, dossier 3 ; SAINTOURENS, Mandat ad hoc : confidentialité et liberté, Act. proc. coll. 2015, rep. 263

La confidentialité peut se définir comme une qualité attachée à une donnée qui permet d'en réserver l'accès à un cercle restreint de personnes. La confidentialité incite le débiteur à engager une procédure amiable, notamment un mandat ad hoc, sans être inquiet de l'image renvoyée aux partenaires. Elle contribue au succès des procédures amiables car elle évite que tous les créanciers du débiteur prennent connaissance de l'ouverture de la procédure et rompent prématurément les contrats conclus avec lui ou modifient les conditions d'exécution de ces derniers.

Le mandat ad hoc est soumis à la confidentialité depuis la loi de sauvegarde des entreprises : l'article L. 611-15 du Code de commerce dispose que toute personne appelée à un mandat ad hoc ou qui, par ses fonctions, en a connaissance est tenue à la confidentialité. Ce texte, qui vise “toute personne”, englobe tant les personnes physiques que les personnes morales, sous la seule réserve qu'elles aient été appelées à la procédure ou en aient eu connaissance compte tenu de leurs fonctions. Sont en principe appelés à la procédure, le débiteur, son représentant s'il s'agit d'une personne morale, ses associés, les créanciers et, plus généralement, les personnes qui participent volontairement à la procédure. La catégorie des individus qui ont connaissance de la procédure du fait des fonctions qu'ils exercent, semble viser les magistrats, greffiers, mandataires désignés, avocats et plus largement les personnes qui disposent de pouvoirs tirés de la loi pour participer ou assurer l'effectivité de la procédure. 

La jurisprudence a étendu l'obligation de confidentialité aux organes de presse , bien qu'ils ne soient pas expressément visés par l'article L. 611-15 afin de protéger les entreprises et ses partenaires tout en veillant au respect du droit à l'information et du droit d'informer. Il a, en effet, été jugé, en vertu de l'article 10, paragraphe 2, CEDH que des restrictions peuvent être apportées par la loi à la liberté d'expression, dans la mesure de ce qui est nécessaire dans une société démocratique pour protéger les droits d'autrui et empêcher la divulgation d'informations confidentielles relatives à la procédure de mandat ad hoc, tant par la personne soumise à un devoir de confidentialité que par un tiers comme un organe de presse . Ainsi, la décision du juge des référés d'ordonner le retrait d'articles qui ont divulgué des données chiffrées confidentielles sur les difficultés des sociétés d'un groupe et le détail des négociations en cours en vue de restructurer leur dette dans le cadre d'une procédure de mandat ad hoc n'a pas été déclarée contraire à l'article 10, paragraphe 2, CEDH dès lors que ces publications n'étaient pas de nature à nourrir un débat d'intérêt général sur les difficultés d'un grand groupe industriel et ses répercussions sur l'emploi et l'économie nationale, mais tendaient à satisfaire les intérêts de leurs abonnés, public spécialisé dans le suivi de l'endettement des entreprises, et risquaient de causer un préjudice considérable aux sociétés concernées ainsi qu'aux parties appelées à la procédure de prévention amiable et de compromettre gravement son déroulement et son issue .

Saisie d'une demande de renvoi de question prioritaire de constitutionnalité, la Cour de cassation a estimé que l'article L. 611-15 n'est pas contraire à la Constitution même s'il ne vise pas expressément les organes de presse, dès lors que l'obligation de confidentialité cède lorsque la diffusion d'informations sensibles contribue à l'information légitime du public sur un débat d'intérêt général et se justifie par la nécessaire protection des entreprises engagées dans un processus de négociation avec leurs créanciers . En outre, exempter les organes de presse de cette obligation viderait de toute effectivité la confidentialité garantie par l'article L. 611-15 . Ainsi, la divulgation de données chiffrées précises sur les propositions faites aux créanciers dans le cadre d'une procédure de mandat ad hoc, l'état des discussions en cours, les difficultés concrètes auxquelles la société doit faire face ainsi que les efforts consentis par les créanciers et les délais de grâce obtenus, informations qui proviennent nécessairement des participants aux négociations, engage la responsabilité de son auteur .  L’obligation de confidentialité doit être respectée même si le débiteur a informé la presse de la mise en place d’un mandat ad hoc .

La nécessité d'informer le public sur des questions d'intérêt général ne peut être invoquée à titre d'exception à l'obligation de confidentialité lorsque les informations litigieuses sont publiées, non dans la presse généraliste, mais dans la presse spécialisée, suivie par des acteurs économiques susceptibles d'être intéressés par la situation de l'entreprise en cause .  A l'inverse, une information au conditionnel, publiée dans un article destiné au grand public, selon laquelle un groupe majeur ferait l'objet d'une procédure de mandat ad hoc, et qui fait suite à plusieurs autres articles parus dans la presse sur les difficultés rencontrées par ce groupe, n'apparaît pas de nature à compromettre les chances de succès de la procédure de mandat ad hoc, de sorte qu'aucune violation de la règle ne peut être retenue . De même, des articles qui évoquent les difficultés financières rencontrées par un groupe majeur du secteur de l'équipement en Europe et qui emploie 9 000 personnes en France, portent sur un sujet d'intérêt général qui justifie une dérogation à l'obligation de confidentialité prévue par l'article L. 611-15 du Code de commerce .

La violation de l'obligation de confidentialité peut être sanctionnée sur le terrain de la responsabilité civile extracontractuelle, en l'absence de contrat, sous réserve de prouver l'existence d'un préjudice .

Du fait de la rédaction extrêmement large de l'article L. 611-15, s'est également posée la question du champ des informations couvertes par l'obligation de confidentialité.  La Cour de cassation a estimé que, justifiée par la discrétion nécessaire sur la situation de l’entreprise concernée et les éventuelles négociations entre dirigeants, actionnaires, repreneurs, créanciers et garants de celle-ci, cette obligation s'étend à tous les actes et documents liés à la cession envisagée, de sorte que l'expert désigné par le comité du groupe pour examiner les comptes annuels de l'entreprise, n'est pas en droit d'en demander la communication . Par ailleurs, le fait qu'un cabinet d'expert-comptable soit lui-même soumis au secret professionnel et à une obligation de confidentialité dans l'exercice de sa mission n'est pas de nature à remettre en cause le principe de confidentialité qui régit la procédure de mandat ad hoc et les documents relatifs aux négociations en cours . De même, une attestation remise par un mandataire ad hoc, en violation de son obligation de confidentialité, à la caution du débiteur, relative au comportement d'un créancier au cours des négociations, doit être écartée des débats . 

En revanche, dès que la procédure est achevée, l'obligation de confidentialité tombe. Conformément aux articles L. 621-1, alinéas 5 et 6, et L. 631-7 du Code de commerce, le tribunal saisi d'une demande d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard d'un débiteur qui bénéficie ou a bénéficié d'un mandat ad hoc ou d'une procédure de conciliation dans les dix-huit mois précédents, peut, d'office ou à la demande du ministère public, obtenir communication des pièces et actes relatifs au mandat ad hoc ou à la conciliation, nonobstant les dispositions de l'article L. 611-15, du Code de commerce .

Paris, 6 juin 2019, LawLex202100002789JBJ. 

Cass. com., 15 décembre 2015, LawLex202100001241JBJ, cassant Versailles, 27 novembre 2013, LawLex202100003600JBJ. 

Paris, 6 juin 2019, LawLex202100002789JBJ, excluant l'existence d'un trouble manifestement illicite en l'absence de préjudice établi.

Cass. soc., 9 octobre 2019, LawLex202100001243JBJ : la Cour de cassation souligne dans le même arrêt que l'absence de communication de documents couverts par la confidentialité qui s'attache au mandat ad hoc, à l'expert comptable du groupe, ne constitue pas un trouble manifestement illicite a fortiori lorsque le débiteur a transmis à l’expert des informations comptables, financières et sociales suffisantes pour lui permettre de remplir sa mission.

Versailles, 15 février 2018,  LawLex202100005539JBJ. 

Cass. com., 22 septembre 2015, LawLex202100001232JBJ, soulignant que les responsabilité de son auteur peut également être engagée. 

Pour une application, V. Cass. com., 22 novembre 2023, LawLex202300014024JBJ, RJDA 2024, n° 111 ; Gaz. Pal. 19 mars 2024, 59, obs. GIORINI.

Cass. com., 13 février 2019, LawLex202100001242JBJ. 

Cass. com., 4 octobre 2018, LawLex202100001240JBJ ; Paris, 7 février 2019, LawLex202100005538JBJ.

Cass. com., 13 juin 2019, LawLex202100001239JBJ. 

Versailles, 14 septembre 2017, LawLex202100002804JBJ ; Cass. com., 13 juin 2019, LawLex202100001239JBJ.

Versailles, 15 février 2018, LawLex202100005539JBJ. 

Paris, 6 juin 2019, LawLex202100002789JBJ.

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23. Caractère confidentiel(1)

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