Procédures collectives

En application de l'article L. 625-9 du Code de commerce, et sans préjudice des règles relatives au privilège des créances salariales, les créances résultant du contrat de travail ou du contrat d'apprentissage sont garanties, dans les conditions fixées aux articles L. 3253-6 à L. 3253-21, par l'Assurance garantie des salaires (AGS). Cette garantie procède de l'obligation imposée à tout employeur d …

Garantie du paiement des créances salariales par l'AGS

TAQUET, Le nouveau champ d'application de l'AGS. Article 177 de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, RPC 2005, 295 ; PETEL, L'AGS et la réforme des procédures collectives, RJ com. 2006, 174.

En application de l'article L. 625-9 du Code de commerce, et sans préjudice des règles relatives au privilège des créances salariales, les créances résultant du contrat de travail ou du contrat d'apprentissage sont garanties, dans les conditions fixées aux articles L. 3253-6 à L. 3253-21, par l'Assurance garantie des salaires (AGS). Cette garantie procède de l'obligation imposée à tout employeur de droit privé d'assurer ses salariés, y compris ceux détachés à l'étranger ou expatriés, contre le risque de non-paiement des sommes qui leur sont dues en exécution du contrat de travail, en cas de procédure de sauvegarde . Le salarié étranger au sens de l'article L. 8252-1 bénéficie de ces dispositions pour les sommes qui lui sont dues en application des textes précités . Aussi, lorsqu’une entreprise est placée en procédure collective dans un État membre et dispose d’un établissement en France, les créances des salariés qui y exercent leur activité sont-elles garanties en cas d’insolvabilité de leur employeur .

1) Créances résultant de la rupture des contrats de travail

L'assurance contre le risque de non-paiement couvre également les créances résultant de la rupture des contrats de travail intervenant pendant la période d'observation et dans le mois suivant le jugement qui arrête le plan de sauvegarde . La rupture doit résulter d'une initiative de l'administrateur ou du mandataire judiciaire, et non d'une prise d'acte de celle-ci par le salarié .

Toutefois, l'AGS ne peut être mise en cause en cas d'ouverture d'une procédure collective au cours de l'instance prud'homale pour garantir le paiement des indemnités de rupture lorsque cette créance est antérieure au jugement d'ouverture , ou lorsque la rupture du contrat de travail est intervenue plus de trois ans après le jugement arrêtant le plan . L’AGS ne garantit pas non plus le paiement des sommes dues par l'employeur en application de l’article 700 du Code de procédure civile, qui ne résultent pas de l'exécution du contrat de travail .

En revanche, l’assurance des salariés contre le risque de non-paiement des sommes qui leur sont dues en exécution du contrat de travail couvre le paiement de la contrepartie pécuniaire de la clause de non-concurrence qui résulte de la rupture du contrat de travail intervenue pendant la période d’observation . A contrario, l’organisme de garantie ne peut être appelé lorsque la rupture est intervenue avant le jugement d'ouverture de la procédure collective .

Par ailleurs, conformément à l'article L. 3253-9 du Code du travail, sont également couvertes les créances résultant du licenciement des salariés bénéficiaires d'une protection particulière relative au licenciement dès lors que l'administrateur ou l'employeur a manifesté, au cours de la période d'observation, ou dans le mois suivant le jugement qui arrête le plan de sauvegarde, son intention de rompre le contrat de travail. Ainsi, l'indemnité allouée au salarié protégé pour licenciement sans cause réelle et sérieuse doit être garantie, lorsque l'administrateur judiciaire manifeste son intention de rompre le contrat de travail dans le mois suivant le jugement arrêtant le plan en lui indiquant par écrit qu'une procédure de licenciement va être engagée à son égard, quelle que soit la date de la rupture effective .

2) Mesures d'accompagnement résultant d'un plan de sauvegarde de l'emploi

L'AGS couvre les mesures d'accompagnement résultant d'un plan de sauvegarde de l'emploi déterminé par un accord collectif majoritaire ou par un document élaboré par l'employeur, conformément aux articles L. 1233-24-1 à L. 1233-24-4 du Code du travail, dès lors qu'il a été validé ou homologué dans les conditions prévues à l'article L. 1233-58, avant ou après l'ouverture de la procédure collective . La garantie s’étend aux sommes prévues par les plans de sauvegarde de l’emploi pour favoriser le reclassement des salariés, y compris à l’extérieur de l’entreprise ou du groupe auquel elle appartient, ainsi qu’aux dommages et intérêts qui réparent l’inexécution d'un engagement de reclassement . Lorsqu’un employeur ne respecte pas l'engagement pris, avant le jugement arrêtant le plan, de présenter un nombre minimal d’offres valables d’emploi en vue de faciliter le reclassement externe des salariés, l’AGS doit garantir les sommes allouées à titre de dommages et intérêts pour réparer le préjudice causé par l’inexécution de cette obligation, même si celle-ci n'est exécutable qu'après le licenciement . En outre, une société mère est tenue, en sa qualité de co-employeur, d’indemniser les salariés licenciés de sa filiale, lorsqu'elle ne justifie pas d'une impossibilité de reclassement au sein du groupe .

En vertu de l'article L. 3253-10 du Code du travail, l'AGS couvre, lorsqu'elles revêtent la forme d'un droit de créance sur l'entreprise, les sommes dues aux titres de l'intéressement, de la participation des salariés aux fruits de l'expansion ou d'un fonds salarial. La garantie ne s'étend aux sommes dues au titre de la participation des salariés aux fruits de l’expansion que si elles revêtent la forme d’un droit de créance sur l’entreprise et non à celles, qui, en application d'un accord de participation, sont employées à l'acquisition de parts d'un fonds commun de placement dont les salariés sont devenus copropriétaires . Toutefois, l'assurance ne couvre pas les versements de sommes effectués par des salariés sur un plan d’épargne d’entreprise du seul fait de l’affectation de ces sommes à ce plan .

4) Créances résultant d'un accord d'entreprise

L'assurance couvre les arrérages de préretraite dus à un salarié ou à un ancien salarié en application d'un accord professionnel ou interprofessionnel, d'une convention collective ou d'un accord d'entreprise, en application de l'article L. 3253-11 du Code du travail. Des créances salariales qui résultent d’un accord d’entreprise conclu postérieurement au jugement arrêtant le plan de cession de l'entreprise sont couvertes par la garantie de l’AGS . Cependant, l’accord collectif qui prévoit une majoration de la durée de préavis et du montant de l'indemnité de licenciement, en toute connaissance de cause du préjudice qui peut être causé à l'AGS en raison de l'incapacité de la société débitrice à honorer ses engagements, constitue une fraude qui rend inopposable à l’organisme la garantie des salariés .

En outre, des cotisations à un régime de retraite complémentaire prévu par une convention collective ou un accord d’entreprise ne sont pas des créances des salariés de l’entreprise mais constituent une dette de celle-ci envers l’institution gestionnaire du régime de retraite dont l’AGS ne garantit pas le paiement .

En vertu de l'article L. 3253-15 du Code du travail, l'AGS avance les sommes comprises dans un relevé établi par le mandataire judiciaire même en cas de contestation par un tiers. Elle avance également les sommes correspondant à des créances établies par décision de justice exécutoire, même si les délais de garantie sont expirés. Le salarié n’est pas tenu de notifier aux institutions de garantie de paiement des créances salariales le jugement rendu antérieurement à la procédure collective de l’employeur, qui leur est opposable de plein droit , même si elles ne sont pas appelées à l'instance .

Un salarié qui bénéficie d’une décision de justice définitive de condamnation à lui payer une créance salariale, née de la rupture d’un contrat de travail antérieure à l’ouverture de la procédure collective de son employeur, est fondé à demander que l’AGS fasse l’avance des fonds qui correspondent aux condamnations prononcées . L’assurance doit également garantir le règlement des sommes dues au salarié et portées sur le relevé complémentaire établi à la suite d’une décision de la juridiction prud’homale, même si celle-ci a été rendue après la clôture de la procédure collective .

Si les créances ne peuvent être payées en tout ou partie sur les fonds disponibles avant l'expiration des délais laissés au mandataire judiciaire pour établir les relevés de créances, l'article L. 3253-20 du Code du travail lui permet de demander, sur présentation des relevés, l'avance des fonds nécessaires à l'AGS. La preuve de l'absence ou de l'insuffisance des fonds en vue du paiement des créances résultant du contrat de travail, qui permet de déclencher la garantie, n'incombe pas au salarié . Il convient de préciser que l’obligation de justification préalable par le mandataire judiciaire de l’insuffisance des fonds disponibles de la procédure collective et la possibilité de sa contestation immédiate par les institutions de garantie ne sont prévues qu’en cas de sauvegarde . 

L'article L. 3253-21 précise les délais dans lesquels l'AGS verse au mandataire judiciaire, et non au salarié , les sommes figurant sur les relevés demeurées impayées.

L'article L. 3253-17 du Code du travail prévoit que la garantie de l'AGS est limitée, toutes sommes et créances avancées confondues, à six fois le plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions au régime d'assurance chômage . Ce montant est fixé à cinq fois ce plafond lorsque le contrat de travail dont résulte la créance a été conclu moins de deux ans et six mois au moins avant la date du jugement d'ouverture de la procédure collective, et à quatre fois ce plafond si le contrat dont résulte la créance a été conclu moins de six mois avant la date du jugement d'ouverture . Le montant du plafond s'apprécie à la date à laquelle est due la créance du salarié et au plus tard à la date du jugement arrêtant le plan ou prononçant la liquidation judiciaire . Le plafond de garantie des salaires, qui couvre la totalité des créances salariales, comprend le précompte effectué par l’employeur au profit des organismes sociaux, en vertu de l'article L. 242-3 du Code de la sécurité sociale , mais ne comprend pas les créances de ces derniers dès lors qu'il ne s'agit pas des créances du salarié . Néanmoins, lorsque le salarié perçoit un salaire nettement supérieur à celui prévu par la convention collective applicable, librement débattu avec l'employeur, le montant maximum de la garantie de l'AGS ne peut dépasser quatre fois le plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions au régime d'assurance-chômage .

Conformément à l'article L. 3253-16 du Code du travail, l'AGS est subrogée dans les droits des salariés pour lesquels elle a réalisé des avances pour les créances garanties par le privilège des salariés  et les créances avancées au titre de l'article L. 3253-8, 3°. La subrogation dont bénéficie l'AGS a pour effet de l'investir de la créance des salariés avec tous ses avantages et accessoires, présents et à venir. Bien que cette solution soit contestée par certains auteurs , cette transmission inclut, selon la Cour de cassation, le superprivilège garantissant le paiement de leurs créances, qui n'est pas exclusivement attaché à la personne des salariés, de sorte que l'AGS bénéficie, comme ces derniers, du droit à recevoir un paiement sur les premières rentrées de fonds de la procédure collective . Les autres sommes avancées dans le cadre de ces procédures leur sont remboursées dans les conditions prévues par les dispositions du Livre VI du Code de commerce pour le règlement des créances salariales nées antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure. L'AGS bénéficie alors des privilèges attachés à celle-ci.

Cass. soc., 2 octobre 2001, LawLex202100003811JBJ (RJ) ; 8 février 2012, précit.

Cass. soc., 8 février 2012, LawLex202100003809JBJ (RJ).

Cass. com., 28 novembre 2007, LawLex202100003765JBJ (LJ).

Cass. soc., 30 septembre 2009, LawLex202100003756JBJ (RJ).

Cass. soc., 29 septembre 2009, LawLex202100003757JBJ (RJ).

Cass. soc., 28 mars 2000, LawLex202100003806JBJ (LJ).

Cass. soc., 6 mars 2019, LawLex202100003818JBJ (LJ).

Cass. soc., 5 juin 2012, LawLex202100003540JBJ (LJ) ; 27 novembre 2013, LawLex202100003538JBJ (LJ).

Cass. soc., 17 octobre 2018, LawLex202100003761JBJ (LJ).

Cass. soc., 16 mars 2022, LawLex202200003968JBJ (LJ).

Cass. soc., 21 octobre 1998, LawLex202100003744JBJ (RJ).

Cass. com., 7 juillet 2023, LawLex202300008825JBJ (RJ), JCP E 2023, n° 1306, n° 24, obs. PETEL ; 17 janvier 2024, LawLex202400000490JBJ (LJ), RJDA 2024, n° 297. - V. aussi Toulouse, 9 septembre 2022, LawLex202300012444JBJ (LJ).

Cass. soc., 18 mars 2008, LawLex202100003558JBJ (RJ) ; 16 décembre 2008, LawLex202100003544JBJ (LJ).

C. trav., art. D. 3253-5, al. 3. - V. not., Cass. soc., 31 mars 2015, LawLex202100003746JBJ (LJ) ; 7 mars 2018, LawLex202100003747JBJ (LJ).

C. trav., art. L. 3253-8, 2°- pour une application Cass. soc., 10 mars 2009, LawLex202100003750JBJ (RJ), retenant qu'en cas d'ouverture d'une procédure de sauvegarde d'une entreprise qui par définition n'est pas en état de cessation des paiements, seules sont garanties les créances qui résultent de ruptures intervenues pendant la période d'observation et dans le mois qui suit le jugement qui a arrêté le plan de sauvegarde.

Cass. soc., 8 mars 2017, LawLex202100003749JBJ (LJ) ; 20 mars 2019, LawLex202100003768JBJ (LJ).

Cass. soc., 2 juillet 2014, LawLex202100003559JBJ (LJ).

C. trav., art. L. 3253-2, L. 3253-4 et L. 7313-8.

V. en particulier, obs. critiques FIN-LANGER, Act. proc. civ. et com. 2024, alerte 37.

Cass. com., 17 janvier 2024, LawLex202400000490JBJ (LJ) et LawLex202400000491JBJ (LJ), JCP E 2024, n° 1116, obs. PETEL ; RJDA 2024, n° 298 ; Act. proc. civ. et com. 2024, alerte 37, obs. FIN-LANGER.

Cass. soc., 20 décembre 2017, LawLex202100003807JBJ (LJ).

Cass. soc., 8 novembre 2011, LawLex202200003974JBJ (S).

Cass. soc., 9 novembre 2005, LawLex202100003554JBJ (RJ).

Cass. soc., 2 mars 1999, LawLex202100003764JBJ (LJ) ; 28 septembre 2011, précit.

Cass. soc., 29 janvier 2003, LawLex202100003810JBJ (RJ).

Cass. soc., 19 mai 2016, LawLex202200003985JBJ (S). - V. déjà, Cass. soc., 6 mai 1997, LawLex202100003760JBJ (RJ).

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242. Garantie du paiement des créances salariales par l'AGS(1)

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