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Décisions

Cass. crim., 10 novembre 1999, n° 98-83.916

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gomez

Rapporteur :

Mme de la Lance

Avocat général :

M. Launay

Avocat :

Me Odent.

TGI Saverne, ch. corr., du 10 juill. 199…

10 juillet 1997

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par X Jean-Claude, contre l'arrêt de la cour d'appel de Colmar, chambre correctionnelle, en date du 20 mai 1998, qui, pour infraction aux règles sur la facturation, l'a condamné à 150 000 francs d'amende, a ordonné la publication de la décision et la confiscation des scellés ; - Vu le mémoire produit ; - Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 45 et 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, des articles L. 16 B et L. 80 F du Livre des procédures fiscales, des articles 6 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté l'exception de nullité présentée par le demandeur et tirée de l'audition de Jean-Claude X par les agents des Impôts ;

"aux motifs qu'il résulte de l'article 45 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 que les fonctionnaires habilités peuvent procéder aux enquêtes nécessaires à l'application de la présente ordonnance, qu'il entre bien évidemment dans le cadre général de ce pouvoir d'enquête, de procéder aux auditions des personnes concernées, et que seules les visites et saisies, en application de l'article 48, sont soumises à autorisation du président du tribunal, dans la mesure où il s'agit d'actes pouvant porter atteinte à la vie privée des personnes concernées ;

"alors que les fonctionnaires en cause étaient tous des agents des Impôts et non des officiers de police judiciaire, de telle sorte que leur pouvoir de perquisition et de saisie ne pouvait s'exercer que dans le cadre des droits qui leur sont reconnus par le Livre des procédures fiscales qui ne leur donne nullement le droit de procéder à des auditions ; qu'ainsi l'arrêt attaqué encourt la censure pour violation de la loi" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Jean-Claude X a fait l'objet d'une enquête par les services fiscaux pour des faits d'achats ou de ventes de produits ou de prestations de service sans facture, dans le cadre d'une activité professionnelle, faits prévus et réprimés par l'article 31 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Attendu que, pour rejeter l'exception de nullité de procédure présentée par le prévenu, qui soutenait que les enquêteurs, agents des Impôts, n'avaient pas le droit de procéder à son audition, les juges, après avoir relevé que la procédure a été exclusivement diligentée sur le fondement de l'ordonnance du 1er décembre 1986, se prononcent par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que, selon les articles 45, 46 et 47 du texte précité, les fonctionnaires habilités, comme en l'espèce, à procéder à des enquêtes nécessaires à l'application de ladite ordonnance, peuvent accéder à tous lieux à usage professionnel, demander la communication de tous documents de même nature et entendre sur convocation ou sur place toutes personnes pour recueillir les renseignements et justifications, chaque acte devant donner lieu à l'établissement d'un procès-verbal, la cour d'appel a justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 31 et 55 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, de l'article 1er de la loi du 25 juin 1991, de l'article 1998 du Code civil, des articles 6 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir considéré que la culpabilité de Jean-Claude X était parfaitement caractérisée au regard des articles 31 et 55 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 ;

"aux motifs que son activité pour le compte de la SARL Y correspond à celle d'un agent commercial au sens de l'article 1er, alinéa 1, de la loi n° 91-593 du 25 juin 1991 ; que cet article n'exige pas que les contrats aient été réellement conclus, puisqu'une négociation est suffisante pour caractériser le contrat d'agence commerciale ; que l'agent commercial n'est tenu qu'à une obligation de moyens ; que les modalités de calcul de la commission dispensaient Jean-Claude X de l'établissement d'une facturation et le fait qu'il ne garde ni double ni copie de ses prescriptions ou ne fasse aucune vérification des sommes remises par la SARL Y est indifférent et ne peut, au contraire, que conforter sa volonté de dissimulation ;

"alors que, si l'article 31 de l'ordonnance précitée prévoit une obligation de facturation pour les achats de produits et les prestations de services, ce n'est que dans la mesure où ils sont effectués pour une activité professionnelle, ce que n'établissent nullement les motifs de la décision attaquée ; qu'ainsi l'arrêt ne pourra qu'être cassé pour manque de base légale" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la société Y, pour faire connaître les produits cosmétiques et diététiques qu'elle commercialisait, utilisait les services de Jean-Claude X, masseur-kinésithérapeute, qui recommandait ces produits en ayant à sa disposition des bons de commande à en-tête de la société ainsi que des enveloppes au nom de celle-ci et pré-affranchies qu'il remettait à ses patients, et qui percevait une rémunération sous forme de commissions représentant entre 10 et 30 % des ventes, en fonction du chiffre d'affaires réalisé ;

Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable d'avoir effectué, pour une activité professionnelle, des prestations de service sans factures, infraction prévue par l'article 31 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, les juges du second degré se prononcent par les motifs repris partiellement au moyen ;

Attendu qu'en cet état, la cour d'appel, après avoir souverainement analysé les relations entre le prévenu et la société Y en un contrat d'agent commercial et en retenant que les commissions versées en contrepartie des services rendus devaient faire l'objet d'une facturation conformément au texte précité, a justifié sa décision; que, dès lors, le moyen ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.