Cass. crim., 10 mars 1999, n° 98-81.521
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Gomez
Rapporteur :
Mme de la Lance
Avocat général :
M. le Foyer de Costil
Avocat :
Me Luc-Thaler.
LA COUR : - Statuant sur les pourvois formés par C Yvan, la société P, contre l'arrêt de la cour d'appel de Douai, 6e chambre, en date du 27 novembre 1997, qui, pour infraction aux règles sur la facturation, a condamné le premier à une amende de 8 000 F et a déclaré la seconde civilement responsable. - Joignant les pourvois en raison de la connexité ; - I - Sur les pourvois formés le 2 décembre 1997 : - Attendu que les demandeurs, ayant épuisé, par l'exercice qu'ils en avaient fait le 28 novembre 1997, le droit de se pourvoir contre l'arrêt attaqué, étaient irrecevables à se pourvoir à nouveau contre la même décision ; que seuls sont recevables les pourvois formés le 28 novembre 1997 ; - II. - Sur les pourvois formés le 28 novembre 1997 ; - Vu le mémoire produit commun aux demandeurs ; - Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 31 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986, 111-3 et 111-4 du Code pénal, 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, 427, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Yvan C coupable d'infraction aux règles de l'article 31 de l'ordonnance n° 86-1243 relatives à la transparence et à la facturation des produits et services et, en répression, l'a condamné à 8 000 F d'amende ;
" aux motifs propres qu'après avoir constaté que la société P dont Yvan C est le directeur régional, avait facturé à des magasins X des poires Williams sans indiquer la catégorie des fruits vendus, les premiers juges ont, à juste titre, retenu Yvan C dans les liens de la prévention en observant notamment que la catégorie des poires constitue un élément essentiel de la détermination des prix et que son indication sur les factures entre dans l'exigence de " dénomination précise " (et non " dénonciation " comme indiqué par erreur par l'arrêt attaqué) prévue par l'article 31 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 (arrêt, page 3) ;
" et aux motifs, adoptés des premiers juges, que l'article 31 de l'ordonnance de 1986 inséré dans le Titre IV " de la transparence et des pratiques restrictives " exige que la facture mentionne la dénomination précise du produit vendu ; qu'en matière de fruits et légumes, le seul rappel du nom du produit ne saurait être suffisant à en appréhender toutes les caractéristiques ; que cet aspect du problème n'a pas échappé aux instances européennes qui ont soumis la plupart des fruits et légumes à des normes communes de qualité rendant obligatoire leur classification, calibrage et marquage ; qu'ainsi un règlement CEE n° 92-089 du 10 avril 1989 est venu classer les pommes et les poires en 4 catégories en fonction de leur forme, de leur développement, de leur coloration et des défauts les affectant ; que ces caractéristiques qui permettent de distinguer les différents fruits et légumes à l'intérieur d'une catégorie bien définie influent directement sur le prix déterminé ; qu'en conséquence, l'absence de ces informations sur les documents commerciaux rend impossible tout contrôle tendant à vérifier a posteriori la qualité du produit ou la recherche d'une éventuelle revente à perte ce qui va à l'encontre des dispositions de l'article 31 de l'ordonnance de 1986 qui vise à accroître la transparence des prix pratiqués ; que l'élément matériel de l'infraction est constitué ; que l'élément intentionnel s'induit par le fait qu'Yvan C connaissait la réglementation en vigueur d'autant que les établissements P avaient déjà fait l'objet d'un avertissement pour des faits identiques le 13 avril 1995 (jugement, page 3) ;
" 1° alors que, conformément à l'article 111-3 du Code pénal, toute infraction doit être définie en des termes clairs et précis pour exclure l'arbitraire et permettre au prévenu de connaître exactement la nature et la cause de l'accusation portée contre lui ; que tel n'est pas le cas de l'article 31, alinéa 3 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence qui, sous la sanction pénale prévue par le même texte en son cinquième alinéa, se borne à indiquer que toute facture doit mentionner la " dénomination précise " du produit vendu, ces seules mentions ne permettant pas de savoir si, pour satisfaire à cette dénomination, le vendeur de fruits et légumes doit faire figurer sur la facture, l'appellation des produits, en l'espèce la dénomination " Poires William's " ou s'il doit, en outre, y faire figurer la catégorie de classement des fruits vendus ; qu'ainsi, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a méconnu les exigences du principe de la légalité criminelle ;
" 2° alors, subsidiairement, que la loi pénale est d'interprétation stricte ; qu'en première instance, comme en appel, le prévenu a fait valoir que la " dénomination précise " visée par l'article 31 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ne pouvait s'entendre que de l'appellation ou de la désignation par un nom des produits litigieux, de sorte que, le vendeur était seulement tenu de faire figurer sur les factures le nom et l'appellation des fruits vendus, à savoir des poires Williams, sans être tenu en outre de mentionner toutes les caractéristiques du produit, telles que leur classification ; qu'ainsi, en estimant au contraire que le texte imposait de faire figurer une telle mention sur les factures, afin d'appréhender toutes les caractéristiques du produit, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Attendu que, pour déclarer Yvan C, directeur général de la société P, coupable d'avoir effectué des ventes de fruits sans mentionner sur les factures remises aux acheteurs la dénomination précise des fruits vendus, à savoir leur catégorie de classement, en application de l'article 31, (inséré dans le titre IV " de la transparence et des pratiques restrictives "), de l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, les juges du second degré se prononcent par les motifs propres et adoptés repris au moyen ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors que la dénomination précise, au sens du texte précité, s'entend non seulement de l'indication de la nature du produit, mais aussi de ses caractéristiques permettant d'assurer la transparence des prix pratiqués, la cour d'appel a justifié sa décision ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Par ces motifs : I - Sur les pourvois formés le 2 décembre 1997 ; Les déclare irrecevables ; II. - Sur les pourvois formés le 28 novembre 1997 ; Les rejette.