CA Besançon, ch. corr., 25 novembre 1999, n° 961
BESANÇON
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Procureur général près la Cour d'Appel de Besançon
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Waultier
Conseillers :
MM. Perron, Colson
Avocat :
Me Lorach
1° Procédure et prétentions des parties
Régulièrement représentés par leur avocat, Monsieur Alain C et la société X contestent les faits reprochés. Ils demandent l'application des articles 7 et 8 du Code de Procédure Pénale et de dire l'action publique contre M. C éteinte. Subsidiairement, ils sollicitent la confirmation du jugement de relaxe déféré.
Le Ministère Public requiert l'infirmation du jugement, le prononcé d'une peine de 30 ou 40 000 F d'amende, publicité et affichage.
2° Prévention
Alain C est prévenu d'avoir à :
. Chalezeule, le 21 décembre 1995, étant commerçant, revendu des produits en l'état, à un prix inférieur à leur prix d'achat, en l'espèce les produits suivants (Nat. n° 2862) :
- bureau Amigo marque Monneret
- power spark marque MB
- archéolokit marque Smoby
- lav'net marque Smoby
- magic plastic bijoux de Smoby
- atelier menuisier Lansay
- château fort MLB
- steffi love jeep et caravane
- doudada de Clairbois
- majorette garage
- électro de Majodis
fait prévus et réprimés par les articles 32 I al. 1, al. 2, 55 al. 1 de l'Ordonnance 86-1243 du 1er décembre 1986
3° Discussion
Le 21 décembre 1995 à 11 h30, les fonctionnaires de la Direction Départementale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DDCCRF) se présentaient à l'hypermarché X sis à Thise afin de vérifier la licéité des prix de vente pratiqués pour les jeux et jouets au regard de la loi 63-628 du 2 juillet 1963 modifiée par l'article 32 de l'Ordonnance du 1er décembre 1986 interdisant la revente à perte.
Ils devaient constater, en présence d'Alain C que 9 articles sur 12 bénéficiaient d'une réduction du prix de vente ; cette remise promotionnelle était indiquée en rayon par un affichage mentionnant le prix de référence barré et le prix réduit des articles.
Des constatations effectuées, les agents concluaient que Monsieur C en sa qualité de chef de secteur Bazar, responsable de la détermination des prix de vente des jouets, a commis l'infraction visée à la prévention en revendant les 10 jouets à un prix de vente TTC inférieur à son prix d'achat TTC.
Les agents indiquaient que le prévenu ne pouvait prétendre au bénéfice des exceptions prévues par la loi notamment sur l'alignement des prix sur ceux pratiqués par les concurrents.
Monsieur C n'avait apporté aux agents aucun renseignement permettant la vérification de la légalité d'un éventuel alignement.
Selon le prévenu, compte tenu de la conjoncture, le jeu de la concurrence l'avait amené à baisser ses prix afin d'être compétitifs et de ne pas pénaliser le magasin en terme de chiffre d'affaires et de stocks.
Il a fait valoir, également, que les ventes à perte constatées entraient dans le cadre de l'exception des articles saisonniers en période terminale de vente ; que les jouets de Noël par leur spécificité constituaient des articles saisonniers dont la période de vente s'étendait de la Toussaint à la veille du jour de Noël ; que le 21 décembre 1995 se situait effectivement dans les derniers jours de cette période de 2 mois.
Décision de la Cour
1° Sur l'exception relative à la prescription soulevée par les prévenus :
Attendu que les premiers juges ont estimé que les procès-verbaux d'auditions de Messieurs C et G des 23 juillet 1996 et 13 juillet 1997 avaient eu pour objet, d'une part de déterminer l'acteur responsable du secteur de vente des jouets et d'autre part de faire préciser comment pouvaient être justifiées les ventes à perte qui avaient été constatées ; que c'est à bon droit et par une motivation adoptée par la Cour que le Tribunal en a tiré comme conséquence que les actes d'instruction visés ont interrompu le délai de prescription de l'action publique ;
Attendu qu'il y a lieu, en conséquence, de rejeter l'exception dont s'agit ;
2° Sur l'infraction à l'article 1er de la loi du 2 juillet 1963 modifié par l'article 32 de l'Ordonnance du 1er décembre 1986 :
Attendu que les reventes à perte ont été constatées 4 jours avant Noël ; que même en admettant le caractère saisonnier de la vente de jouets, la société X ne pouvait invoquer se trouver en période terminale de la saison des ventes, celle-ci commençant en octobre pour s'achever le 24 décembre; qu'en effet, l'exception à l'interdiction de la revente à perte n'est admissible que si la revente à lieu à un moment où les jouets sont potentiellement dépréciés, c'est-à-dire en fin de saison;
Attendu que dès lors,il y a lieu d'infirmer la décision déférée et déclarer Monsieur C coupable de l'infraction qui lui est reprochée et de retenir la société X comme civilement responsable;
Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire à l'égard de Monsieur Alain C et de la société X. Déclare l'appel recevable, Infirmant le jugement entrepris, Rejette l'exception, Déclare M. Alain C coupable de l'infraction qui lui est reprochée, En répression, le condamne à une amende de vingt mille francs (20 000 F), Déclare la société X civilement responsable, Constate que M. Alain C et la société X sont redevables d'un droit fixe de procédure de huit cents francs (800 F) auquel est assujetti le présent arrêt.