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Décisions

CA Paris, 13e ch. B, 21 octobre 1999, n° 99-00282

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Défendeur :

Ministère public

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Sauret

Conseillers :

Mme Marie, M. Ancel

Avocat :

Me Revest

TGI Auxerre, ch. corr., du 12 nov. 1998

12 novembre 1998

Rappel de la procédure :

La prévention :

C Yannick, J Olivier, S Jacky et W Benoît ont été poursuivis pour :

Revente d'un produit par un commerçant à un prix inférieur à son prix d'achat effectif, le 6 mai 1997, à Tonnerre, infraction prévue par l'article 32 paragraphe I Al. 1, Al. 2 de l'Ordonnance 86-1243 du 01/12/1986 et réprimée par les articles 32 paragraphe I Al. 1, Al. 2 de l'Ordonnance 86-1243 du 01/12/1986 et réprimée par les articles 32 paragraphe I Al. 1, 55 Al. 1 de l'Ordonnance 86-1243 du 01/12/1986.

Le jugement :

Le Tribunal, par jugement contradictoire a déclaré C Yannick, J Olivier, S Jacky et W Benoît non coupables des faits reprochés et les a relaxés des fins de la poursuite.

L'appel :

Appel a été interjeté par :

M. le Procureur de la République, le 16 novembre 1998 contre M. C Yannick

M. le Procureur de la République, le 16 novembre 1998 contre M. J Olivier

M. le Procureur de la République, le 16 novembre 1998 contre M. S Jacky

M. Le Procureur de la République, le 16 novembre 1998 contre M. W Benoît

Décision :

Rendue contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant sur l'appel du Ministère public à l'encontre du jugement déféré auquel il est fait référence pour l'exposé des faits et de la prévention.

Benoît W régulièrement cité à sa personne n'a pas comparu. Il sera statué à son encontre en application de l'article 410 du Code de procédure pénale.

Yannick C sollicite par confirmation du jugement déféré sa relaxe.

Par voie de conclusions Jacky S, à l'époque des faits PDG de la SA X sollicite sa relaxe par confirmation du jugement déféré. Il soutient qu'il avait délégué ses pouvoirs à Benoît W et à Yannick C, respectivement, chef de département liquides et chef de rayon épicerie et précise qu'ils étaient responsables de la loi et des règlements en vigueur, notamment en matière de législation économique et commerciale et plus particulièrement de la conformité des prix de vente et du respect de l'interdiction des ventes à perte.

Par voie de conclusions Olivier J, à l'époque des faits directeur de la grande surface à l'enseigne Y située à Tonnerre, sollicite sa relaxe par confirmation du jugement déféré pour les mêmes motifs que ceux exposés par Jacky S.

Rappel des faits

Jacky S est PDG de la SA X, qui exploite un magasin à grande surface à l'enseigne Y.

Olivier J est directeur de ce magasin. Son salaire mensuel brut est de 13 900 F selon son contrat de travail du 29 novembre 1995.

Yannick C est chef du rayon épices. Selon son contrat de travail, son salaire mensuel brut était de 9 000 F au 1er juin 1994.

Benoît W jusqu'au 24 mai 1997 était chef du département liquides. Au moment des faits son salaire mensuel brut était de 12 000 F selon son contrat de travail du 1er décembre 1995.

Par Procès-verbal de délit établi le 17 juillet 1997, la DGCCRF a constaté que le 6 mai 1997, des marchandises étaient mises en magasin à un prix affiché inférieur au prix d'achat ressortant des factures, à savoir :

- Orangina 12,90 F pour 13,95 F,

- pâte à tartiner Super Poulain 13,10 F pour 14,46 F,

- produit d'entretien Ajax 17,50 F pour 17,67 F.

Jacky S a soutenu qu'il était exonéré de toute responsabilité pénale en vertu des délégations de pouvoirs antérieures données à Olivier J, Yannick C et Benoît W.

Olivier J pour les mêmes raisons a fait valoir que les faits ne lui étaient pas imputables.

Yannick C et Benoît W ont soutenu que les faits poursuivis étaient la conséquence d'une erreur matérielle et qu'en l'absence d'intention coupable aucune infraction pénale ne pouvait leur être reprochée.

Jacky S a déjà été condamné pour des faits similaires par le Tribunal correctionnel d'Auxerre le 30 janvier 1992 à la peine de 20 000 F d'amende, à l'affichage et à la publication de la décision.

Sur ce, La COUR :

Considérant que les premiers juges ont retenu qu'en présence d'une délégation de pouvoirs donnée à Yannick C et à Benoît W, les faits n'étaient pas imputables à Jacky S et à Olivier J ; qu'ils les ont relaxés sur ce motif ;

Considérant que le jugement déféré a également retenu que si la matérialité des faits n'était pas contestée, la preuve n'était pas rapportée que Yannick C et Benoît W avaient agi avec une intention coupable ; qu'il les a relaxé sur ce motif ;

Considérant qu'il est exact que la matérialité du délit de vente à perte est établie, les prévenus au surplus ne la contestant pas ;

Considérant en revanche qu'il n'est établi ni par les contrats de travail ni par les autres pièces du dossier, que Messieurs Olivier J, Yannick C et Benoît W dont les salaires étaient respectivement à l'époque des faits de 13 900 F, 9 000 F et 12 000 F, étaient pourvus de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires, propres à assurer la délégation de pouvoirs alléguée par Jacky S;

Qu'à juste titre Yannick C fait valoir que, compte tenu des carences du système informatique mis en place par Jacky S, où la saisie des achats était séparée de la saisie des ventes, ce dont il résultait qu'aucun lien informatique n'existait entre les achats et les ventes, le risque d'erreur humaine était inéluctable ; que Jacky S a admis devant la Cour qu'il avait fait changer ce système informatique après les faits reprochés soit en avril 1998, afin d'assurer une liaison avec la centrale d'achats et permettre la mise en rapport des prix des articles commandés avec les variations survenues ;

Considérant qu'il s'ensuit que Messieurs Olivier J, Yannick C et Benoît W seront relaxés des fins de la poursuite, par substitution des motifs retenus par les premiers juges ;

Considérant que Jacky S, qui a commis des négligences, en ne s'assurant pas de la fiabilité du système informatique mis en place sous son autorité, système qu'il a fait changer par la suite et en ne vérifiant pas la concordance des prix d'achat et de revente, dans le magasin à l'enseigne Y à Tonnerre dont il avait la responsabilité, en sa qualité de PDG de la SA X, sera retenu dans les liens de la prévention;

Considérant qu'il y a lieu de faire une stricte application de la loi pénale au prévenu déjà condamné pour des faits similaires, compte tenu du fait qu'il s'agissait de produits attractifs et de grande consommation ;

Par ces motifs ; LA COUR Statuant publiquement et contradictoirement à l'égard de Jacky S, Olivier J et Yannick C, contradictoirement en application de l'article 410 du Code de procédure pénale à l'égard de Benoît W ; Confirme le jugement déféré en ce qu'il a relaxé des fins de la poursuite, Olivier J, Yannick C et Benoît W ; L'infirme en ce qu'il a relaxé Jacky S ; Statuant à nouveau de chef : Déclare Jacky S coupable d'avoir à Tonnerre le 6 mai 1997, étant commerçant, revendu un produit en l'état, en l'espèce : - 1) de l'Orangina - 2) de la pâte à tartiner Super Poullain - 3) du produit d'entretien Ajax à un prix inférieur à son prix d'achat - 1) 12,90 F pour 13,95 F - 2) 13,10 F pour 14,46 F - 3) 17,50 F pour 17,67 F infraction prévue et réprimée par les articles 32 I al.1, al.2, art 55 al.1, ordonnance 86-1243 du 01.12.1986 ; Vu l'article 131-35 du Code pénal ; Condamne Jacky S à la peine de 30 000 F d'amende ; Ordonne la publication de cette décision aux frais de Jacky S par extraits, une fois, dans l'édition du samedi de l'Yonne Républicaine ; Ordonne l'affichage de la présente décision aux frais du condamné, pendant une durée de 15 jours, en trois exemplaires aux portes d'entrée et de sortie du magasin Hypermarché à l'enseigne Y à Tonnerre. La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure de 800 F dont est redevable le condamné.