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Décisions

CA Versailles, 9e ch. corr., 4 février 1998, n° 101-1998

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Canivet

Conseillers :

M. Limoujoux, Mme Delafollie

Avocat :

Me Faure-Gilly

TGI pontoise, 6e ch. corr., du 28 mai 19…

28 mai 1997

Rappel de la procédure :

Le jugement :

Par jugement en date du 28 mai 1997, le Tribunal correctionnel de Pontoise a déclaré X Raymond coupable de :

Facturation non conforme - vente de produit ou prestation de service pour une activité professionnelle,

Faits commis à Presles, le 27 avril 1995,

Faits prévus et réprimés par les articles 31 alinéas 2, 3 de l'ordonnance 86-1243 du 01-12-1986,

L'a condamné à une amende délictuelle de 100 000 F avec sursis,

Appels :

Appel a été interjeté par :

- le Ministère public, le 29 mai 1997,

Décision :

LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le seul appel, recevable en la forme du ministère public à l'encontre du jugement susvisé ;

Considérant que Raymond X a été condamné dans les termes ci-avant rappelés de ce jugement, pour avoir à Presles le 27 avril 1995, effectué, pour une activité professionnelle, un ou des achats de produits, une ou des ventes de produits, une ou des prestations de service sans une facture conforme, en l'espèce, en commercialisant sous la dénomination " greffons osseux " des greffons de nature tissulaire, ne bénéficiant pas à ce titre, d'un remboursement par les caisses d'assurance maladie, en avoir établi ainsi les factures correspondantes auprès des acheteurs,

Faits prévus et réprimés par les articles 31 alinéas 2, 3 de l'ordonnance 86-1243 du 01-12-1986,

Considérant qu'il est fait référence pour l'exposé des faits, aux énonciations précises et complètes du jugement entrepris ;

Qu'il suffit de rappeler qu'aux termes d'une enquête diligentée par la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF), à laquelle avaient été signalées des anomalies dans le remboursement par les Caisses d'Assurance Maladie de produits d'origine humaine, voire dans la qualité, et la sécurité de ces produits, il est apparu que la société Y, dont Raymond X est le président du conseil d'administration, avait revendu sous la dénomination de " greffons osseux d'origine humaine stérile " des " Fascia Lata ", dont la nature tissulaire ne faisait aucun doute, s'agissant de membranes musculaires fibreuses utilisées en chirurgie pour remplacer les ligaments, et qu'il avait pu faire entrer ces produits, qui ne figurent pas dans le Tarif Interministériel des Prestations Sanitaires (TIPS) résultant de l'arrêté du 24 juillet 1992, dans la catégorie des produits remboursables par la Sécurité Sociale, en leur attribuant à tort sur les factures émises par sa société, le code 301 Z02 de ce TIPS, applicable aux seuls greffons d'origine osseuse ;

Considérant que Raymond X, qui n'a pas relevé appel du jugement le déclarant coupable des faits visés à la prévention, n'a pas contesté la matérialité de ces faits, mais a argué de l'absence d'intention délictueuse, se prévalant notamment de deux courriers ministériels des 15 et 22 septembre 1993,

- le premier, adressé à un des vendeurs de ces fascia lata, lui indiquant que de nouvelles dispositions allaient être prises par la Direction de la Sécurité Sociale, et que le Directeur général de la Santé, " conscients des conséquences néfastes " qu'entraînait " l'interruption " de la prise en charge de ces produits, avait demandé aux CNAM de les prendre à nouveau en charge sur facture jusqu'à leur inscription aux TIPS,

- le second adressé au Directeur National de l'Assurance Maladie, émettant le voeu qu'" à titre provisoire et dans l'intérêt de la Santé publique ", soient pris en charge " comme dans le passé " les greffons d'origine humaine stériles " autres que cornéens ou osseux ", spécialement veineux et ligamentaires, et les dure-mère ;

Mais considérant que, comme le relève le ministère public, dont l'appel tend à voir réformer le jugement entrepris en ce qu'il a estimé que ce " contexte particulier " justifiait qu'il soit entièrement sursis à l'exécution de la condamnation pécuniaire prononcée contre Raymond X, ces courriers ne sauraient valoir modification du code de la Sécurité Sociale ;

Qu'il résulte des pièces du dossier, que les recommandations du ministère de la santé n'ont pas été suivies par les CNAM, qui, par courrier en réponse du 4 octobre 1993, ont rappelé qu'aucune considération de santé publique n'imposait la prise en charge des greffons en cause, qu'au contraire le refus de leur inscription au TIPS résultait de l'absence de garanties sanitaires suffisantes pour leur commercialisation, et qu'en tout état de cause, une modification de l'arrêté du 24 juillet 1992 était nécessaire ;

Considérant que, Raymond X professionnel dans le secteur de la santé, ne pouvait ignorer les dispositions réglementaires en vigueur; que l'emploi dans les facturations litigieuses, d'une dénomination ne correspondant pas exactement aux produits concernés et de codes TIPS applicables à des produits de catégorie distincte suffit à établir qu'il avait connaissance de l'absence de modification de cette réglementation; que dans l'hypothèse où il aurait pu momentanément croire à cette éventualité, il lui appartenait à tout le moins de s'informer auprès des organismes compétents des dispositions prises en ce sens ;

Considérant que, comme l'a souligné la DGCCRF, le procédé utilisé, qui a permis à la société Y de laisser croire à ses clients que les greffons vendus bénéficiaient d'un avantage supplémentaire par rapport aux produits concurrents, celui d'être remboursables par les Caisses d'Assurance Maladie, a entravé la transparence des conditions tarifaires, et permis de promouvoir les ventes ;

Considérant dans ces conditions, qu'il apparaît plus approprié de prononcer à l'encontre de Raymond X une peine de 30 000 F d'amende ;

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, En la forme : Reçoit l'appel du ministère public, Au fond : Confirme le jugement entrepris sur la déclaration de culpabilité, Le réforme sur la peine, Condamne Raymond X à la peine de 30 000 F d'amende.