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Décisions

Cass. com., 18 juin 2002, n° 00-15.857

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Lafuma (SA)

Défendeur :

Marga (SRL), Distri (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dumas

Rapporteur :

Mme Champalaune

Avocats :

SCP Célice, Blancpain, Soltner, SCP Parmentier, Didier.

T. com. Lyon, du 16 sept. 1997

16 septembre 1997

LA COUR : - Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 31 mars 2000), que la société Lafuma, estimant que la société Marga fabriquait et distribuait, par l'intermédiaire de la société Distri, un modèle de fauteuil de relaxation qui constituait une copie servile d'un de ses produits, a assigné ces deux sociétés sur le fondement de la concurrence déloyale en réparation de son préjudice;

Attendu que la société Lafuma fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le moyen : - 1°) que l'action en concurrence déloyale ne requiert pas la constatation d'un élément intentionnel; qu'en retenant, pour écarter son action en concurrence déloyale, que la société Marga n'avait pas eu la volonté d'imiter ses produits, ni l'intention de profiter de son activité ou de sa notoriété pour tromper leur clientèle commune, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ; - 2°) que la concurrence déloyale n'exige pas une reproduction servile d'un produit et peut résulter de simples ressemblances conférant à deux produits une même impression d'ensemble; qu'en énonçant que la mise sur le marché par un fabricant ou un distributeur de produits semblables à ceux d'un concurrent ne constituait une faute que s'ils procédaient, au-delà d'une simple ressemblance, d'une imitation servile du produit préexistant, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ; - 3°) que le bien-fondé de l'action en concurrence déloyale s'apprécie d'après les ressemblances et non d'après les différences; qu'en l'espèce, la cour d'appel a expressément constaté qu'il existait des similitudes entre le fauteuil Marga et celui de Lafuma ; qu'en se bornant à relever que le fauteuil de Marga présentait des perfectionnements techniques le distinguant nettement de celui de la société La fuma et excluant tout risque de confusion, sans rechercher, comme le demandait cette dernière, quelle était l'impression d'ensemble produite par les ressemblances constatées, et notamment par l'articulation autour d'un axe unique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; 4°) qu'en retenant, pour écarter tout à la fois les griefs d'imitation et de parasitisme soulevés par la société La fuma, que les similitudes avec le fauteuil de Marga ne concernaient que des caractéristiques génériques, sans originalité particulière, sans rechercher si, comme le soutenait la société Lafuma, ce n'était pas la combinaison, sans nécessité technique, de différentes caractéristiques, telles que l'utilisation de la toile, le laçage par sandow, la têtière fixée par un élastique, le système de basculement complet autour d'un axe unique et l'utilisation de manettes de serrage, qui conférait à ce produit son originalité et si la reproduction de cette combinaison sur le fauteuil Marga n'engendrait pas un risque de confusion, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; 5°) qu'en retenant, pour considérer que la société Marga ne s'était pas rendue coupable de comportement parasitaire, qu'elle avait apporté des améliorations techniques ayant donné lieu à la délivrance de brevets, sans rechercher si ces améliorations ne constituaient pas des ajouts de détail sur le modèle de base créé par la société Lafuma, dont elle s'était ainsi appropriée le travail, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt retient que les spécificités et les caractéristiques techniques du fauteuil vendu par les sociétés Marga et Distri permettent d'y voir un produit beaucoup plus élaboré que celui que la société Lafuma avait conçu en 1971; que l'arrêt relève que l'article fabriqué par la société Marga présente des perfectionnements qui le distinguent nettement du modèle distribué par la société Lafuma, en ce qui concerne notamment le mode de fixation de la toile sur la structure métallique, la forme des jambages, la mise en place d'entretoises pour consolider l'ensemble, le système de relèvement, le procédé de serrage breveté, la mobilité des accoudoirs, également brevetée, la longueur du repose-pied, la protection contre les risques de basculement ou de fermeture et le confort d'ensemble offert à l'utilisateur; que l'arrêt constate que le consommateur moyennement attentif peut percevoir ce qui distingue le modèle ancien dans sa conception de la société Lafuma de celui techniquement mieux étudié de la société Marga ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, dont il ressort qu'elle a exclu tout risque de confusion entre les produits litigieux par appréciation de leur impression d'ensemble, la cour d'appel a légalement justifié sa décision, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les première et deuxième branches du moyen;

Et attendu, en second lieu, qu'ayant relevé que le modèle de fauteuil pliant réalisé et vendu par la société Lafuma ne présentait pas une originalité particulière par rapport à ce qui existait au moment de son lancement sur le marché et que la société Marga justifiait que, pour la réalisation du modèle argué de copie, elle avait mis au point des procédés de laçage, de déplacement des accoudoirs et de serrage ayant donné lieu à la délivrance de brevets, en s'attachant à cette fin les services d'un technicien et modéliste chargé de la conception du produit et en faisant appel aux services de conseils en brevet, la cour d'appel, qui en a déduit, au regard des efforts réalisés par la société Marga, exclusifs de parasitisme, que celui-ci n'était pas établi, et sans avoir à procéder à ta recherche invoquée par les troisième et quatrième branches du moyen que ses constatations rendaient inutile, a légalement justifié sa décision;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.