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Décisions

Cass. com., 4 décembre 2001, n° 98-17.584

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Société Ouest (SARL)

Défendeur :

Rudolf Veldhoven BV (SARL), North sea fashion BV (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dumas

Conseiller Rapporteur :

M. Métivet

Avocat général :

M. Jobard

Conseiller :

Mme Favre

Avocats :

Me Spinosi, SCP Piwnica, Molinié.

T. com. Nanterre, du 3 févr. 1995

3 février 1995

LA COUR : - Sur le premier moyen : Vu les articles 1134, 1832 et 1873 du Code civil ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 26 mars 1998), que la société Ouest et la société Rudolph Veldhoven BV ont établi, au mois de juillet 1991, le projet de deux contrats en vue de la création, entre le 15 février et le 1er mars 1992, d'une filiale commune, la société United Clothing France, qui serait distributeur exclusif pour la France des marques exploitées par le groupe Rudolph Veldhoven ; que, dans l'attente de cette création, la commercialisation de la collection printemps-été 1992 a été effectuée par la société Ouest avec une participation financière de la société Rudolph Veldhoven ; que le 18 novembre 1991 cette dernière a avisé la société Ouest qu'elle mettait fin à leur relation à compter du 31 décembre 1991; que celle-ci l'a assignée en paiement de dommages-intérêts pour rupture abusive de la société créée de fait ayant existé entre elles et pour concurrence déloyale, lui reprochant d'avoir démarché sa clientèle en utilisant le fichier client détourné par son chef des ventes engagé dès le mois de novembre 1991 par la société United Clothing France; que la cour d'appel a rejeté la première de ces demandes ;

Attendu que pour statuer ainsi, l'arrêt retient que l'intention des parties était de constituer à l'avenir une "société de droit", ce qui impliquait nécessairement qu'elles n'entendaient pas se considérer comme associés de fait et que la distribution par la société Ouest de la collection printemps-été 1992 de la société Rudolph Veldhoven, pour le compte de la société en formation, ne présentait qu'un caractère temporaire et limité dans le temps, ce qui interdisait d'assimiler cet accord à une société créée de fait ;

Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs impropres à écarter l'existence d'une société créée de fait, dès lors qu'il résultait de ses constatations que l'activité développée par les parties dépassait l'accomplissement des simples actes nécessaires à la constitution de la société United Clothing France en formation, sans rechercher si les éléments constitutifs d'une telle société étaient ou non réunis, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le second moyen, pris en sa seconde branche : - Vu l'article 1382 du Code civil : - Attendu que pour rejeter les demandes formées par la société Ouest à raison des fautes qu'elle imputait à la société Rudolph Veldhoven dans la conduite des pourparlers et dans leur rupture, l'arrêt retient qu'il n'est pas établi que cette dernière n'avait jamais envisagé sérieusement une collaboration loyale entre les deux sociétés ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté la concomitance entre la rupture des pourparlers par la société Rudolph Veldhoven et les faits qu'elle a retenus comme constitutifs à sa charge de concurrence déloyale, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations;

Par ces motifs, Casse et annule, mais seulement en ce qu'il a rejeté les demandes de la société Ouest en ce qu'elles sont fondées sur la rupture d'une société créée de fait, l'arrêt rendu le 26 mars 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris.