CA Paris, 1re ch. G, 12 septembre 2001, n° 2000-02431
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Hippocampe Caen (SA)
Défendeur :
Actiel (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Présidents :
MM. Boval, Charruault
Conseillers :
Mmes Regniez, Schoendoerffer, M. Le Dauphin
Avoués :
SCP Teytaud, SCP Roblin - Chaix de Lavarène, SCP Varin-Petit
Avocats :
Mes Chapron, Bloch.
La cour, sur renvoi de la cour de cassation, statue sur l'appel interjeté par les sociétés Nordivet, devenue depuis Hippocampe Caen, et Yzoft Informatique , d'un jugement rendu, le 17 mars 1994, par le tribunal de commerce de Bobigny, 5ème chambre, dans un litige les opposant à la société Actiel.
Le 21 septembre 1983, Nordivet, société spécialisée dans la distribution de produits vétérinaires, qui avait consulté Actiel pour connaître les conditions auxquelles pourraient être réalisés les programmes nécessaires à l'informatisation de sa comptabilité et de sa gestion commerciale, a accepté la proposition qui lui était faite par cette société pour la somme de 180.000 Francs hors taxes, ce coût incluant " outre la réalisation du dossier d'analyse et des programmes, un forfait de 10 journées de formation ".
De 1983 à 1989, Actiel a procédé à divers développements du logiciel commandé. Ces interventions se sont élevées à la somme totale de 692.885,96 Francs.
Les relations contractuelles se sont détériorées durant le 1er semestre 1989 et ont été rompues au mois de juin 1989.
Le 19 septembre 1989, Actiel a cependant proposé à Nordivet de lui remettre sous diverses conditions, qui n'ont pas été acceptées, les codes sources de l'installation " pour permettre la conservation des moyens actuels d'exécution ", ce à titre de " tolérance ", l'opération ne devant " en aucun cas constituer une cession de (...) droits (...) ni sur les logiciels exécutables, ni sur les outils qu ils intègrent ".
Au cours du mois de novembre 1989, Nordivet a vainement tenté d'obtenir devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Caen, le programme source de son installation.
Le 16 novembre 1990, Actiel a fait procéder dans les locaux de la société Yzoft Informatique, créée en juillet 1989 par un de ses anciens salariés, Zouhir Fahim, précédemment spécialement chargé par elle des interventions auprès de Nordivet, à la saisie-contrefaçon de divers listings et fichiers informatiques portant à la fois les mentions d'Actiel et de Nordivet ou Nordi.
Actiel a fait assigner Yzoft Informatique, par acte d'huissier du 28 novembre 1990, en paiement de dommages et intérêts à raison des actes de contrefaçon et concurrence déloyale qu'elle impute à cette société.
Yzoft Informatique , indiquant que les programmes sources saisis dans ses locaux lui avaient été remis par Nordivet, a appelé cette société en garantie.
Après qu'une expertise a été ordonnée par jugement avant dire droit du 25 juin 1992, par jugement rendu le 17 mars 1994, le tribunal de commerce de Bobigny, au vu du rapport de François Wallon, a :
- dit que nonobstant les travaux réalisés par Fahim avant le 3 juillet 1989, les programmes sources, dont la licence d'exploitation a été cédée à Nordivet, sont la propriété d'Actiel,
- dit que la soustraction frauduleuse par Fahim de la totalité des programmes sources, intermédiaires, exécutables ainsi que des outils logiciels appartenant à Actiel pour les apporter à la société Yzoft Informatique qu'il a constituée pour la circonstance constitue un délit de concurrence déloyale,
- dit que les agissements coupables de Fahim n'ont pu être perpétrés qu'avec l'accord de Nordivet qui ainsi s'en trouve complice et doit être condamné in solidum à les réparer,
- condamné Yzoft Informatique et Nordivet à payer in solidum la somme de 500.000 Francs à Actiel à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice direct subi,
- fait interdiction à Yzoft Informatique et Nordivet d'utiliser les outils logiciels appartenant à Actiel en leur possession sous astreinte définitive de 5.000 Francs par jour à compter de la date ou sa décision aura acquis la force de chose jugée,
- commis Me Puyravaud, huissier de justice, qui pourra se faire assister d'un technicien de son choix pour constater aux frais des défendeurs, la destruction desdits outils logiciels litigieux,
- ordonné la publication de sa décision dans cinq journaux et revues au choix d'Actiel et aux frais in solidum des défendeurs,
- ordonné l'affichage de la décision dans les bureaux des deux défendeurs pendant une durée d'un mois,
- dit les parties mal fondées pour le surplus de leurs demandes,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- condamné les défendeurs in solidum aux dépens, ainsi qu'au paiement de la somme de 30.000 Francs sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Nordivet et Yzoft Informatique ont interjeté appel de cette décision.
Par arrêt prononcé le 20 mars 1997, la cour d'appel de Paris a infirmé la décision déférée, débouté Actiel de toutes ses demandes et condamné cette société à payer à chacune des sociétés appelantes la somme de 60.000 Francs sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens de première instance et d'appel.
Sur le pourvoi formé par Actiel, la Cour de cassation, relevant qu'en se fondant sur des présomptions et, spécialement, sur le prix payé par Nordivet, pour rechercher si Actiel avait cédé à cette société l'intégralité des droits d'exploitation et d'adaptation des progiciels livrés et des programmes spécifiques qui y ont été progressivement intégrés, sans préciser la forme prise par la cession des droits et la délimitation de leur domaine d'exploitation, la cour d'appel n'avait pas donné de base légale à sa décision, a, par arrêt du 1er décembre 1999, cassé et annulé, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 mars 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Paris, a remis, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyées devant la cour d'appel de Paris, autrement composée et a condamné les sociétés Nordivet et Yzoft Informatique aux dépens.
La société Nordivet a saisi la Cour par déclaration du 8 février 2000.
La société Yzoft Informatique ayant fait l'objet d'une radiation au registre du commerce depuis le 9 octobre 1998, Maître Denis Faques a été désigné en qualité de mandataire ad hoc pour représenter cette société à l'occasion de l'instance devant la Cour, et ce, à la requête d'Actiel, par une ordonnance du délégataire du premier président en date du 2 février 2001.
Par ses dernières écritures, signifiées le 26 mars 2001, la société Hippocampe Caen, nouvelle dénomination de la société Nordivet, conclut en ces termes :
Il est demandé à la Cour de :
- déclarer recevable et bien fondée la société Hippocampe (anciennement dénommée Nordivet) en son Appel,
- y faire droit,
- infirmer le jugement du Tribunal de Commerce de Bobigny du 17 mars 1994 en toutes dispositions,
- dire et juger que la société Hippocampe est titulaire des droits d'exploitation sur le logiciel spécifique qui lui a été livré par la société Actiel,
- dire et juger que la société Hippocampe jouit d'un droit d'utilisation des outils logiciels Macro Mac et Macro Sub intégrés dans le logiciel spécifique cédé par la société Actiel à la société Hippocampe,
- dire que la société Hippocampe ne s'est livrée à aucun acte de concurrence déloyale et parasitaire et de contrefaçon à l'encontre de la société Actiel,
- débouter la société Actiel de toutes ses demandes,
- condamner la société Actiel à verser à la société Hippocampe une somme de 500.000 francs pour procédure abusive,
- subsidiairement condamner Actiel à rembourser la totalité des sommes à elle versées par Hippocampe, soit la somme de 821.762,75 francs,
- condamner la société Actiel à payer la somme de 80.000 francs au titre des dispositions de l'article 700 du NCPC, pour les frais irrépétibles engagés par la société Hippocampe,
- condamner la société Actiel en tous les dépens de première instance et d'Appel (...).
La société Actiel a fait assigner, par acte du 13 février 2001, Maître Denis Faques, pris en sa qualité de mandataire ad hoc de la société Yzoft Informatique, à l'effet de faire juger que l'arrêt à intervenir lui sera commun et opposable.
Par conclusions signifiées, le 15 janvier 2001 à la société Hippocampe et le 15 mars 2001 à Maître Faques, ès qualités, elle demande à la cour de :
- Déclarer mal fondées les Sociétés Yzoft et Nordivet en toutes leurs demandes et conclusions.
- Déclarer recevable et bi en fondée la Société Actiel en toutes ses demandes.
- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit :
- Que la Société Yzoft s 'était rendue coupable de concurrence déloyale.
- Que les agissements de la société Yzoft ont été perpétrés avec l'accord de Nordivet qui s'en trouve ainsi complice.
- Interdit sous astreinte de 5.000 Francs par jour de retard, à compter du jugement à intervenir, aux sociétés Yzoft Informatique et Nordivet d'utiliser les outils logiciels de la Société Actiel.
L'infirmer pour le surplus.
- Constater que la Société Yzoft Informatique disposait d'une version contrefaite des logiciels d'application et des outils logiciels de la Société Actiel.
- Condamner les Sociétés Yzoft Informatique et Nordivet au titre des actes constitutifs de contrefaçon de propriété littéraire et artistique dans les termes des dispositions qui étaient applicables au moment des faits.
- Condamner les Sociétés Yzoft Informatique et Nordivet au titre des agissements de concurrence parasitaire et déloyale.
- Condamner la Société Yzoft, représentée par Monsieur Fahim pris en sa qualité de liquidateur amiable de la Société Yzoft et Nordivet à payer conjointement et solidairement à la Société Actiel une somme de 1.000.000 Francs au titre de la contrefaçon et une somme de 2.015.156 Francs au titre du détournement de clientèle, sauf à parfaire,
- Dire que toutes les condamnations porteront intérêts à compter de l'assignation introductive d'instance ;
- Dire que les Sociétés Yzoft Informatique et Nordivet devront procéder à la destruction de la totalité des outils Actiel en leur possession et ce sous astreinte de 5.000 Francs par jour à compter du jugement.
- Ordonner la publication de la décision à intervenir dans 5 journaux ou revues au choix de la Société Actiel et aux frais des sociétés Yzoft et Nordivet, sans que la valeur globale de la publication excède 100.000 Francs.
- Ordonner l'affichage de la décision à intervenir dans les locaux des Sociétés Yzoft Informatique et Nordivet et ce pendant une durée d'un mois.
- Condamner la Société Nordivet et la société Yzoft, représentée par Monsieur Fahim pris en sa qualité de liquidateur amiable, à payer conjointement et solidairement à la Société Actiel une somme de 80.000 Francs au titre de l'article 700 du NCPC.
- Condamner les Sociétés Nordivet et Yzoft aux entiers dépens (...).
Maître Denis Faques, indiquant agir en tant qu' " assigné en sa qualité de mandataire ad hoc de la société Yzoft Informatique ", par des écritures en date du 23 mars 2001, conclut en ces termes :
Donner acte à Maître Facques " ès qualités " de ce qu'il émet les plus expresses réserves sur la régularité de la décision rendue le 2 Février 2001, l'ayant nommé en qualité de mandataire ad hoc de la société Yzoft Informatique pour représenter ladite société dans le cadre de la présente procédure.
Constater que le concluant " ès qualités " est dans l'impossibilité d'exercer les fonctions de mandataire ad hoc de la société Yzoft Informatique.
Condamner la société Actiel ou tout succombant aux entiers dépens (...).
Ceci exposé, LA COUR, Considérant que ne s'agissant pas d'une prétention saisissant la Cour d'un différend, il n'y a pas lieu de donner à Me Faques l'acte qu'il sollicite quant à ses réserves sur la régularité de sa désignation -observation faite cependant qu'à la date de sa désignation l'affaire était pendante devant la cour d'appel de Paris, sur renvoi de la Cour de cassation ;
Qu'aucun élément n'est versé aux débats justifiant que Me Faques serait dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions de mandataire ad hoc d'Yzoft Informatique pour représenter ladite société à la présente procédure ;
Considérant qu'Actiel, qui rappelle que seules les dispositions des articles 40 de la loi du 11 mars 1957 et 45 de la loi 3 juillet 1985 sont applicables en l'espèce, reproche aux sociétés Yzoft et Nordivet d'avoir, sans son autorisation, utilisé et fait évoluer des logiciels dont elle est seule titulaire des droits d'auteur ;
Qu'Hippocampe soutient qu'Actiel lui avait, dans le cadre d'un engagement définitif, vendu les logiciels et lui avait donc transféré tous ses droits ; qu'à titre subsidiaire, elle prétend que, s'il devait être jugé qu'Actiel ne lui a transmis que des droits d'exploitation, ces droits, conformément aux dispositions de l'article L.122-6-1 du Code de la propriété intellectuelle, comprennent le droit d'effectuer la reproduction permanente ou provisoire du logiciel, sa traduction, son adaptation, son arrangement ou toute autre modification, qu'elle pouvait donc adapter le logiciel afin d'en assurer la maintenance corrective et évolutive pour les besoins propres de son exploitation et utiliser pour ce faire les outils Macro Sub et Macro Mac ;
Considérant qu'il est constant que le logiciel commandé par Nordivet consiste en une adaptation spécifique d'un progiciel " Cogeco " créé par Actiel, dont les éléments recueillis par l'expert Wallon établissent le caractère original, qui n'est, au demeurant, plus contesté ;
Que la convention des parties est constituée par une lettre d'Actiel du 21 septembre 1983, contenant une proposition pour la " réalisation du logiciel nécessaire à l'installation informatique (projetée) " plus précisément décrite dans une précédente proposition du 12 septembre à laquelle il est fait référence, pour un coût global de 180.000 Francs hors taxes, lettre dont le double a été retourné à Actiel avec le cachet de Nordivet et deux mentions manuscrites " Bon pour accord " signées ;
Qu'Hippocampe se prévaut, en outre, d'un document qui n'est ni signé ni daté intitulé " contrat de vente - conditions générales " qui lui aurait été adressé en même temps que la facture ;
Que postérieurement à la réalisation de ce logiciel et jusqu'en 1989, Actiel a encore effectué divers travaux d'assistance technique et de développement du logiciel facturés pour une somme totale de 512.885,96 Francs hors taxes ;
Considérant que rien dans les écrits produits ne permet de dire que la propriété du logiciel aurait été cédée ainsi que le soutient l'appelante, étant observé que le contenu du document intitulé " contrat de vente " n'est relatif qu'aux prestations et travaux de la société Actiel, qui s'analysent en un louage d'ouvrage ;
Qu'en toute hypothèse, il n'est fait état dans aucun de ces écrits de la transmission des droits d'auteur, alors que cette transmission était subordonnée, aux termes de l'article 31 de la loi du 11 mars 1957, devenu depuis l'article L. 131-3 du Code de la propriété intellectuelle, à la condition que chacun des droits cédés fasse l'objet d'une mention distincte dans l'acte de cession et que le domaine d'exploitation de ces droits soit limité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée ;
Qu'en l'absence de toute mention de ce type, les droits d'auteur n'ont pu être cédés par Actiel et cela quelles qu'aient été les pratiques suivies par cette société quant aux programmes sources, partiels ou non, qui ont pu, ou non, être communiqués à Nordivet entre 1984 et 1989, observation faite que l'appelante ne peut prétendre que la mention des droits cédés résulterait de l'énumération des fonctions attendues du logiciel, détaillées dans le contrat ;
Considérant que, par ailleurs, Hippocampe ne peut soutenir avec succès qu'aux termes de l'article L. 122-6-1 du Code de la propriété intellectuelle, le droit d'utilisation du logiciel, qui à tout le moins lui a été concédé, implique le droit à l'adaptation, l'arrangement ou toute autre modification ainsi qu'à la reproduction en résultant dès lors qu'elles sont nécessaires à cette utilisation conformément à sa destination ;
Qu'en effet cette disposition est issue de la loi 94-361 du 10 mai 1994, qui n'était pas en vigueur en 1989 ; qu'en revanche, aux termes de l'article 47 de la loi 85-660 du 3 juillet 1985 alors applicable, toute reproduction autre que l'établissement d'une copie de sauvegarde par l'utilisateur, ainsi que toute utilisation d'un logiciel non expressément autorisée par l'auteur ou ses ayants droit était passible des sanctions prévues par la loi ;
Que la preuve n'est donc pas rapportée qu'Actiel aurait cédé à Nordivet le droit d'adapter le logiciel fourni en vue d'une évolution de son application, ni qu'elle l'aurait autorisée à utiliser les outils informatiques - Macro Mac et Macro Sub - nécessaires pour ce faire ;
Considérant qu'il ressort des conclusions de l'expert Wallon qui a examiné les programmes sources et listings qui ont fait l'objet de la saisie-contrefaçon pratiquée dans les locaux d'Yzoft Informatique que cette société a, pour développer de nouveaux programmes au profit de Nordivet, utilisé à partir de juillet 1989 les programmes sources réalisés par Actiel, ainsi que les outils informatiques de cette société, étant relevé qu'il ressort suffisamment du rapport de l'expert que les outils Macro Mac et Macro Sub sont une création originale d'Actiel, aucune confusion ne pouvant exister, contrairement à ce que soutient Hippocampe, entre ces outils et d'autres outils logiciels distribués par Philips avec son matériel ;
Considérant que cette utilisation sans autorisation, imputable tant à Yzoft Informatique qu'à Nordivet, est constitutive d'une contrefaçon, que le jugement entrepris sera réformé sur ce point ;
Considérant qu'il ressort des investigations de l'expert Wallon, qu'eu égard à la capacité des disquettes et cartouches informatiques que Nordivet a été en mesure de communiquer lors des opérations d'expertise, les programmes sources et les outils informatiques trouvés en possession d'Yzoft Informatique lors de la saisie-contrefaçon ne peuvent pas avoir été fournis par Actiel à Nordivet, contrairement à ce que soutient vainement cette dernière société ; qu'ils ne peuvent pas davantage, étant identiques à ceux détenus par Actiel, avoir été reconstitués à partir de codes sources précédemment transmis ;
Qu'il est, dès lors, suffisamment établi que l'ensemble des programmes sources - à jour au 20 avril 1989 à 11 heures 18 - et des outils informatiques retrouvés dans les locaux d'Yzoft Informatique, ne peuvent provenir que d'une copie effectuée aussitôt avant que Zouhir Fahim ne quitte Actiel, le 21 avril 1989, pour créer la société Yzoft Informatique dont les statuts ont été signés le 6 mai 1989 ;
Qu'il convient également de constater que la lettre d'Actiel en date du 14 juin 1989, interprétée par Nordivet comme une rupture des relations commerciales n'a été reçue par cette société que le 17 juin 1989 et que, dès avant cette date, elle avait fait appel aux services d'Yzoft Informatique dont une facture relative à un " Conseil sur projet micro-informatique ", datée du 15 juin 1989, est versée aux débats ; que, dès lors, l'appelante n'est pas fondée à prétendre qu'elle aurait été contrainte de s'adresser à Yzoft Informatique en raison de la rupture brutale par Actiel de leurs relations ;
Considérant qu'il ressort de ces éléments qu'Yzoft Informatique a eu recours à des procédés fautifs de désorganisation de l'activité d'Actiel pour détourner son client Nordivet ;que Nordivet elle-même a activement concouru à ces agissements fautifs alors qu'elle savait qu'Yzoft Informatique ne pouvait disposer régulièrement des codes sources ;qu'en assignant Actiel devant le juge des référés en novembre 1989 en sollicitant la remise de ces codes, elle a tenté de dissimuler ces faits et a persisté dans cette attitude en affirmant devant l'expert judiciaire (dont les investigations ont démontré l'invraisemblance desdites allégations) avoir remis elle-même les codes litigieux à Yzoft Informatique ;
Que le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu le grief de concurrence déloyale tant à l'égard de Nordivet, aujourd'hui Hippocampe, qu'à l'égard d'Yzoft Informatique ;
Considérant qu'Actiel demande qu'Yzoft Informatique et Hippocampe soient condamnées in solidum à lui payer une somme de 1.000.000 Francs au titre de la contrefaçon et une somme de 2.015.156 Francs au titre du détournement de clientèle et ce avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, lesdites sommes correspondant respectivement au coût de développement des outils indûment utilisés et au montant du chiffre d'affaires réalisés par Yzoft Informatique de 1989 à 1994 ;
Considérant qu'Hippocampe estime qu'Actiel ne justifie d'aucun préjudice ;
Considérant que le préjudice subi par l'intimée résulte de l'atteinte même portée à son droit privatif, des revenus dont elle a été privée - s'agissant des exploitations non autorisées de ses logiciel et outils informatiques - et du trouble commercial résultant des actes de désorganisation dont elle a été victime ;
Considérant qu'eu égard à l'ensemble des circonstances de la cause et des différentes pièces versées aux débats par les parties, la Cour estime que le préjudice, toutes causes confondues, subi par Actiel sera exactement indemnisé par l'allocation, à titre de dommages et intérêts, d'une somme de 650.000 Francs ;
Considérant que le jugement sera en outre confirmé en ce qu'il a ordonné des mesures de publicité qui devront toutefois tenir compte du présent arrêt (dont le coût et le nombre seront précisés au dispositif ci-après), de même que sur les mesures d'interdiction ;
Que dans les circonstances de l'espèce, les mesures de destruction sous le contrôle d'un huissier n'apparaissent plus appropriées et ne seront pas maintenues ;
Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge d'Actiel les frais irrépétibles de l'instance en appel ; qu'il lui sera alloué à ce titre une somme de 50.000 Francs ;
Par ces motifs, et ceux non contraires des premiers juges, Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a écarté le grief de contrefaçon, ordonné des mesures de destruction, ainsi que sur le montant de dommages et intérêts et les modalités des mesures de publication ; Réformant de ces chefs et ajoutant, Dit que les sociétés Yzoft Informatique et Nordivet, aujourd'hui Hippocampe, ont commis des actes de contrefaçon en utilisant sans autorisation les logiciels de la société Actiel ; Condamne in solidum la société Hippocampe et la société Yzoft Informatique à payer à Actiel la somme de six cent cinquante mille francs (650.000 Francs) à titre de dommages et intérêts ; Dit que les mesures de publication ordonnées par les premiers juges devront tenir compte du présent arrêt et que le coût de ces publications qui seront faites dans deux journaux ou revues du choix d'Actiel sera à la charge in solidum d'Yzoft Informatique et Hippocampe dans la limite d'une somme globale de 40.000 F ; Condamne in solidum la société Hippocampe et la société Yzoft Informatique à payer à Actiel, au titre de l'instance en appel, la somme de cinquante mille francs (50.000 Francs) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Rejette toute autre demande des parties ; Condamne in solidum la société Hippocampe et la société Yzoft Informatique aux dépens d'appel comprenant ceux afférents à l'arrêt cassé, dont distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.