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Décisions

CA Paris, 4e ch. B, 5 novembre 1999, n° 1997-19177

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Bernard de Fallois Editeurs (SA)

Défendeur :

Editions Pygmalion (SA), Watelet, Zimmer Bradley, Baror International Inc (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Conseillers :

Mmes Mandel, Regniez, M. Waechter

Avoués :

Me Huyghe, SCP Fisselier-Chiloux-Boulay, SCP Bourdais-Virenque

Avocats :

Mes Cornut-Gentille, Thery, Cohen.

CA Paris n° 1997-19177

5 novembre 1999

Faits et procédure

Référence étant faite au jugement entrepris pour l'exposé des faits, de la procédure et des moyens antérieurs des parties, il suffit de rappeler les éléments essentiels suivants :

La société Editions Pygmalion a édité en 1986 et 1987 la traduction française de l'ouvrage américain de Marion Zimmer Bradley intitulé " The Mists of Avalon " dont elle avait acquis les droits selon contrat du 10 octobre 1983.

Cette édition a été réalisée en deux volumes, le premier sous le titre " Les Dames du Lac ", le second sous le titre " Les Brumes d'Avalon " avec pour sous titre " Les Dames du Lac** " lesquels relatent l'épopée des Chevaliers de la Table Ronde à travers notamment le destin de ses principales héroïnes.

En 1994, la même société a édité la traduction française d'un nouvel ouvrage de cet auteur sous le titre " La Colline du Dernier Adieu " avec la mention " par l'auteur des Dames du Lac ".

Ce livre est présenté comme étant une histoire se passant " bien des siècles avant la naissance du roi Arthur et la venue des Dames du Lac dans l'Ile d'Avalon, au temps de la conquête par Rome des terres voilées de brume de la Grande Bretagne" et relatant les aventures d'une jeune femme Elane qui est appelée à succéder à la Haute Prêtresse.

La société Editions Pygmalion a par ailleurs créé une collection intitulée " Les Dames du Lac " regroupant outre les ouvrages dont Marion Zimmer Bradley est l'auteur, des romans historiques d'autres auteurs se plaçant à différentes époques.

Courant 1996, un nouvel ouvrage de Marion Zimmer Bradley intitulé " The Lady of Avalon " est proposé à divers éditeurs européens.

La société Editions Pygmalion n'ayant pas souhaité acheter les droits sur la traduction française, ceux-ci sont cédés à la société Bernard de Fallois qui édite l'ouvrage en avril 1997 sous le titre " Le Secret d'Avalon " avec pour sous-titre " Les Dames Du Lac *** ".

Estimant que ce sous-titre entraînait une confusion avec l'ouvrage " Les Dames du Lac ", portait atteinte aux droits de Gérard Watelet sur le titre " Les Dames du Lac " et que la société Editions du Fallois se rendait coupable de concurrence déloyale et de publicité mensongère, leur causant un dommage imminent, la société Editions Pygmalion et Gérard Watelet ont saisi le juge des référés lequel par ordonnance en date du 14 avril 1997 a fait injonction aux défendeurs de suspendre provisoirement la diffusion de l'ouvrage " Le Secret d'Avalon " " Les Dames du Lac *** " à charge pour les demandeurs de saisir la juridiction du fond par la remise d'une assignation avant le 20 mai 1997.

Cette ordonnance a été frappée d'appel le 17 avril 1997.

Après avoir fait constater le 18 avril 1997, que l'ouvrage était offert à la vente, la société Editions Pygmalion et Monsieur Watelet ont à nouveau saisi le 22 avril 1997 le juge des référés lequel par ordonnance du 5 mai 1997 a dit n'y avoir lieu à référé après avoir relevé d'une part qu'il n'était pas démontré que l'éditeur et le distributeur avaient continué après la signification de la première ordonnance de diffuser l'ouvrage dans sa forme initiale, et d'autre part que la nouvelle couverture tenait compte des observations formulées par le juge des référés dans son ordonnance du 14 avril 1997.

La société Editions Pygmalion a interjeté appel de cette ordonnance mais elle a fait procéder à sa radiation de même que la société Editions du Fallois.

C'est dans ces circonstances, que la société Editions de Fallois a saisi à jour fixe le tribunal de grande instance de Paris.

Elle demandait que:

- il soit jugé que Gérard Watelet et les Editions Pygmalion n'ont aucun droit sur le titre " Les Dames du Lac ",

- il soit constaté que l'ouvrage " Le Secret d'Avalon " est le troisième tome de la série intitulée en France, " Les Dames du Lac ",

- il soit jugé que le fait, pour les Editions Pygmalion d'avoir intitulé une collection " Les Dames du Lac " ne saurait priver Marion Zimmer Bradley et les Editions de Fallois de se prévaloir de l'appartenance de l'ouvrage " Le Secret d'Avalon " à la série inaugurée par le même auteur sous le titre français " Les Dames du Lac ",

- il soit jugé qu'en s'opposant à ce que les Editions de Fallois publient " Le Secret d'Avalon " avec le sous titre " Les Dames du Lac *** ", Gérard Watelet et les Editions Pygmalion ont commis un abus de droit,

- Gérard Watelet et les Editions Pygmalion soient condamnés solidairement à payer à la société Editions de Fallois les sommes de 250 000 F et 500 000 F en réparation de son préjudice matériel d'une part, et à titre de provision sur son préjudice commercial d'autre part, outre une somme de 50 000 F au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Les Editions Pygmalion et Gérard Watelet qui avaient eux mêmes assigné la société Editions de Fallois et les sociétés Hachette Livre et Hachette Distribution s'opposaient aux demandes de la première et sollicitaient la condamnation de ces trois sociétés pour contrefaçon, concurrence déloyale et publicité mensongère à leur payer une somme de 1 000 000 F à titre de dommages et intérêts,

Par ailleurs, ils réclamaient des mesures d'interdiction sous astreinte et de publication ainsi que le versement d'une somme de 50 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Marion Zimmer Bradley et Danny Baror représentant légal de la société Baror International intervenaient volontairement à la procédure et concluaient au rejet des prétentions de la société Editions Pygmalion,

Ils sollicitaient la condamnation solidaire de cette société et de Gérard Watelet à leur payer les sommes de:

- 225 000 F en réparation du préjudice résultant de l'interruption de la diffusion du roman " Le Secret d'Avalon " avec la mention " Les Dames du Lac *** ",

- 200 000 F en réparation du préjudice moral résultant de l'atteinte au droit de divulgation de l'auteur,

- 100 000 F en réparation du préjudice moral résultant de l'atteinte au respect dû à la qualité d'auteur du roman " Le Secret d'Avalon ",

- 20 000 F pour procédure abusive et 40 000 F sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Les Editions Pygmalion et Gérard Watelet concluaient à l'irrecevabilité de l'auteur et de son agent littéraire Danny Baror et demandaient que ce dernier soit condamné à leur payer une somme de 10 000 F par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Le tribunal par le jugement entrepris a:

- déclaré irrecevable l'intervention de Marion Zimmer Bradley et de Danny Baror,

- déclaré recevables les conclusions et pièces en réplique du demandeur principal,

- dit que le titre " Les Dames du Lac " est dépourvu d'originalité,

- rejeté l'action en contrefaçon des Editions Pygmalion et de Gérard Watelet,

- dit qu'en diffusant l'ouvrage " Le Secret d'Avalon " avec le sous titre " Les Dames du Lac " et un bandeau rouge portant la mention " Les Dames du Lac " le mystère révélé, en reprenant la présentation du titre des ouvrages " Les Dames du Lac " et la " Colline du Dernier Adieu " ainsi que le dessin du même personnage féminin que celui illustrant la couverture de ces ouvrages, la société Bernard De Fallois a commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société Editions Pygmalion et de Gérard Watelet,

- dit que les publicités parues dans le n° 19 de la revue Biblioteca et dans la revue Livre Hebdo du 11 avril 1997 et l'apposition du bandeau rouge sus mentionné, en ce qu'elles annoncent le tome 3 des " Dames du Lac ", constituent une publicité mensongère,

- interdit à la société Bernard De Fallois de diffuser ou de laisser diffuser dans le public, directement ou indirectement par son distributeur, l'ouvrage " Le Secret d'Avalon " avec le sous titre " Les Dames du Lac *** " ainsi que sous le bandeau et la couverture sus décrite sous astreinte de 200F par infraction constatée à compter de la signification du jugement avec exécution provisoire,

- condamné la société Bernard De Fallois à payer à la société Editions Pygmalion et à Gérard Watelet la somme de 200 000 F à titre de dommages et intérêts et celle de 20 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- autorisé diverses mesures de publication,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

La société Bernard De Fallois d'une part, et Marion Zimmer Bradley et la société Baror International d'autre part, ont respectivement interjeté appel de cette décision les 30 juillet et 14 août 1997.

Parallèlement, Marion Zimmer Bradley et Danny Baror représentant légal de la société Baror International assignaient par exploit en date du 22 septembre 1997 selon la procédure à jour fixe, la société Editions Pygmalion, Gérard Watelet et les sociétés Centre de Diffusion de l'Edition (CDE)et de Distribution de Produits de l'Edition (SODIS) devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir interdire sous astreinte aux Editions Pygmalion l'utilisation du titre " Collection les Dames du Lac " pour désigner des ouvrages d'auteurs autres que Marion Zimmer Bradley ainsi que toute référence aux expressions " Les Dames du Lac ", " Dames du Lac ", " La Dame du Lac " ou " Dame du Lac ".

Ils sollicitaient par ailleurs, outre des mesures de publication, la condamnation des Editions Pygmalion à payer à Marion Zimmer Bradley la somme de 250 000 F et à la société Baror International celle de 100 000 F à titre de dommages et intérêts outre une indemnité de 25 000 F à chacun d'eux sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et demandaient que le jugement à intervenir soit déclaré opposable aux sociétés CDE et SODIS.

Danny Baror a renoncé ultérieurement à ses demandes et Marion Zimmer Bradley s'est désistée de son instance à l'encontre de CDE et SODIS.

Par jugement en date du 5 décembre 1997, le tribunal a sursis à statuer sur l'intégralité des demandes formées par Marion Zimmer Bradley à l'encontre de la société Editions Pygmalion et Gérard Watelet dans l'attente de la décision de la Cour de céans sur l'appel du jugement du 4 juillet 1997.

La société Bernard De Fallois demande à la Cour de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que le titre " Les Dames du Lac " était dépourvu d'originalité et rejeté l'action en contrefaçon.

Pour le surplus, elle en poursuit l'infirmation et conclut au rejet des demandes de la société Editions Pygmalion et de Gérard Watelet.

Reconventionnellement, elle sollicite leur condamnation solidaire à lui payer une somme de 250 000 F en réparation de son préjudice matériel, une indemnité provisionnelle de 500 000 F sur son préjudice commercial dont elle se réserve de réclamer la réparation intégrale et une somme de 50 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Marion Zimmer Bradley et la société Baror International concluent également à la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté la société Editions Pygmalion et Gérard Watelet de leur action en contrefaçon du titre " Les Dames du Lac ".

Pour le surplus, ils demandent à la Cour de débouter la société Editions Pygmalion et Gérard Watelet de leurs prétentions, de dire que l'utilisation du titre " Les Dames du Lac " pour désigner une collection d'ouvrages d'autres auteurs que Marion Zimmer Bradley constitue un acte de parasitisme, de condamner la société Editions Pygmalion à payer à Marion Zimmer Bradley la somme de 450 000 F en réparation du préjudice matériel par elle subi du fait de l'interruption de la diffusion de l'ouvrage " Le Secret d'Avalon " et 90 000 F en réparation du préjudice matériel par elle subi du fait des ventes non réalisées des ouvrages " Les Dames du Lac ", " Les Brumes d'Avalon et la Colline du Dernier Adieu " outre une somme de 180 000 F en réparation de son préjudice moral.

Ils réclament par ailleurs des mesures d'interdiction et de suppression de référence sous astreinte ainsi que des mesures de publication.

Enfin Marion Zimmer Bradley demande en réparation du préjudice résultant des actes de parasitisme commis à son encontre la condamnation solidaire de la société Editions Pygmalion et de Gérard Watelet à lui payer la somme de 500 000 F à titre de dommages et intérêts et celle de 100 000 F au titre de l'atteinte à son droit moral ainsi qu'une indemnité de 80 000F sur le fondement de l'article 700 du NCPC.

La société Editions Pygmalion et Gérard Watelet concluent à l'irrecevabilité des demandes de Marion Zimmer Bradley et de la société Baror International relatives à la collection " Les Dames du Lac " et à la confirmation du jugement sauf en ce qu'il les a déboutés de leur action en contrefaçon du titre " Les Dames du Lac "

Formant appel incident de ce chef, ils sollicitent la condamnation de la société Bernard De Fallois à leur payer une somme de 1 000 000 F à titre de dommages et intérêts ainsi que des mesures de publication et le paiement d'une somme de 50 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Le 14 septembre 1999, les intimés ont fait signifier des conclusions dont les termes ont été réitérés le 16 septembre suivant tendant à voir déclarer irrecevable l'appel, les écritures et les pièces déposées, signifiées et communiquées au nom de Marion Zimmer Bradley.

Le 16 septembre 1999, Marion Zimmer Bradley et la société Baror International ont demandé le rejet comme tardives et contraires à l'article 15 du nouveau code de procédure civile des écritures et des pièces produites le 14 septembre 1999 par la société Editions Pygmalion.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 septembre 1999,

Sur ce, LA COUR,

I. Sur la procédure

Considérant que le 14 septembre 1999, la société Editions Pygmalion et Gérard Watelet ont fait signifier des conclusions par lesquelles ils font valoir que Marion Zimmer Bradley ne peut être considérée comme valablement représentée devant la Cour;

Qu'ils ont le même jour communiqué trois " e-mail " échangés entre l'avocat de la société Editions Pygmalion et le MZB Lirving Trust avec leur traduction libre ;

Considérant que le 16 septembre 1999, Marion Zimmer Bradley et la société Baror ont sollicité le rejet de ces conclusions et pièces au motif qu'elles étaient tardives et portaient atteinte au respect des droits de la défense;

Considérant ceci exposé, que sur l'appel de la société Editions Bernard De Fallois, Marion Zimmer Bradley a constitué le 19 août 1997 la SCP Bourdais Virenque avoué et a sous la même constitution interjeté le 14 août 1997 appel du jugement du 4 juillet 1997;

Considérant que par bulletin du 12 février 1999 les conseils des parties ont été informés de ce que l'ordonnance de clôture serait rendue le 9 septembre 1999 et que l'affaire serait plaidée le 24 septembre 1999 ;

Considérant qu'à l'audience de mise en état du 9 septembre 1999, le conseiller de la mise en état a accepté de reporter le prononcé de l'ordonnance de clôture au 16 septembre 1999;

Considérant dans ces conditions, qu'en attendant le 14 septembre 1999, soit l'avant veille du jour prévu pour le prononcé de l'ordonnance de clôture, pour soulever pour la première fois l'irrecevabilité de l'appel, des écritures et des pièces déposées, signifiées et communiquées par Marion Zimmer Bradley au motif que celle ci n'était pas valablement représentée devant la Cour et n'aurait pas mandaté la SCP Bourdais Virenque, la société Editions Pygmalion et Gérard Watelet ont mis Marion Zimmer Bradley dans l'impossibilité de répondre utilement à ce moyen et ont violé les droits de la défense;

Que le comportement des intimés a mis leur adversaire dans l'impossibilité de produire en défense tous éléments permettant de démontrer que le moyen soulevé in extremis par ses adversaires était mal fondé;

Que les conclusions de dernière heure du 14 septembre 1999, s'expliquent d'autant moins que Marion Zimmer Bradley avait constitué avoué dès août 1997, fait signifier ses premières conclusions le 15 décembre 1997, communiqué des pièces le 16 avril 1999 et que les documents sur lesquels s'appuient la société Editions Pygmalion et Gérard Watelet pour contester le mandat de la SCP Bourdais Virenque sont des e-mails adressés à leur avocat les 27 avril et 4 mai 1999 soit plus de 4 mois avant la signification des conclusions le 14 septembre 1999 ;

Qu'il convient de relever que les autres pièces produites pour démontrer que Marion Zimmer Bradley n'aurait pas été en état de suivre la procédure eu égard à son état de santé ont été communiquées dès le 23 février 1998 par la société Editions Pygmalion et Gérard Watelet sans qu'à cette date ceux ci en tirent la moindre conclusion quant à la représentation de cette partie devant la Cour;

Que par voie de conséquence, il convient de rejeter des débats les conclusions signifiées et les pièces communiquées le 14 septembre 1999

Qu'il en sera de même des conclusions récapitulatives signifiées le 16 septembre 1999, jour du prononcé de l'ordonnance de clôture, par la société Pygmalion et Gérard Watelet et que seules seront retenues les conclusions signifiées par la société Editions Pygmalion et Gérard Watelet les 23 janvier 1998, 13 et 19 février 1999 et les pièces communiquées les 23 février 1998 et 22 février 1999

II. Sur la qualité à agir de la société Baror International

Considérant que la société Editions Pygmalion et Gérard Watelet font valoir que la société Baror International ne justifie pas de sa qualité à agir;

Considérant que cette dernière n'a pas répliqué sur ce point;

Considérant que la société Baror International qui prétend être l'agent littéraire de Marion Zimmer Bradley ne produit aucun contrat en ce sens;

Que la lettre adressée le 29 mai 1997 par cette société à Gérard Watelet l'invitant à traiter avec elle pour le renouvellement du contrat du livre de poche " The Mists of Avalon " ne constitue pas en elle même une preuve pertinente de sa qualité d'agent de Marion Zimmer Bradley;

Que le contrat de cession des droits de publication en langue française du roman " Lady of Avalon " (en français le Secret d'Avalon) à la société Bernard de Fallois n'étant pas communiqué, rien ne démontre que la société Baror International l'a négocié pour le compte de l'auteur Marion Zimmer Bradley comme l'avait fait la société Scott Meredith Literary Agency pour l'ouvrage " The Mists of Avalon ";

Considérant en conséquence que la société Baror International ne justifie pas de sa qualité à agir, observation étant faite qu'elle ne forme aucune demande de condamnation pécuniaire à son profit;

III. Sur la contrefaçon

Considérant que la société Editions Pygmalion et Gérard Watelet font valoir que le titre " Les Dames du Lac " est un titre original qui doit être protégé par le droit d'auteur au motif que l'emploi de la formule " La Dame du Lac " au pluriel n'a pas d'antécédent et révèle l'idée majeure du contenu de l'ouvrage ;

Que selon eux, l'auteur du titre qui n'a pas procédé à une traduction littérale du titre anglais a marqué sa création de l'empreinte de sa personnalité ;

Considérant enfin, qu'ils font observer que le même titre ne se retrouve pas dans les autres éditions étrangères de l'ouvrage;

Mais considérant que les parties ne contestent pas que l'expression " La Dame du Lac " est dépourvue d'originalité, se retrouvant notamment à plusieurs reprises dans les sous titres des éditions du texte original du " Lancelot ", roman en prose du 13ème siècle évoquant l'histoire des Chevaliers de la Table Ronde à la librairie Droz de Genève (1979,1980 et 1982) et étant également le titre d'un poème de Walter Scott;

Considérant que même si le titre " Les Dames du Lac " n'est pas la traduction littérale du titre anglais " The Mists of Avalon ", l'emploi de cette expression au pluriel ne lui confère pas davantage un caractère original dès lors qu'elle est employée pour désigner un roman relatant la saga du roi Arthur sous la forme de l'histoire de plusieurs Dames du Lac devenant grande prêtresse: Viviane, fidèle amie d'Arthur et Morgane la fée, qui se font toutes deux appeler la Dame du Lac et que le lac d'Avalon est un des lieux principaux autour duquel se déroulent les aventures de ces personnages ;

Qu'en conséquence, c'est à juste titre que les premiers juges ont dit que le titre " Les Dames du Lac " n'était pas original et débouté la société Editions Pygmalion et Gérard Watelet de leur demande en contrefaçon;

IV. Sur la concurrence déloyale

Considérant que le tribunal a retenu que la société Editions Bernard de Fallois avait commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société Editions Pygmalion et de Gérard Watelet en diffusant l'ouvrage " Le Secret d'Avalon " avec le sous titre " Les Dames du Lac - le Mystère révélé ", en reprenant la présentation du titre des ouvrages " Les Dames du Lac et la Colline du Dernier Adieu " ainsi que le dessin du même personnage féminin que celui illustrant la couverture de ces ouvrages ;

Considérant qu'au soutien de son appel la société Editions Bernard de Fallois fait valoir que

- l'usage du sous titre " Les Dames du Lac*** "ne saurait constituer un acte de concurrence déloyale dès lors que l'ouvrage " Le Secret d'Avalon " appartient à la série " Les Dames du Lac " , que le sous titre ne désigne pas plus le tome III d'un même ouvrage que le troisième volume d'une même série et qu'il n'existe aucun risque de confusion pour la clientèle ;

- le choix de ce sous titre a été fait en complet accord avec l'auteur qui a le droit de choisir dans quelles conditions il souhaite que son ?uvre soit divulguée ;

- le format choisi correspond à celui de très nombreux ouvrages ;

- la présentation du titre est banale et classique;

- les ressemblances entre les illustrations s'expliquent par le fait d'une part que la société Editions de Fallois s'est adressée à Angus Gray Burbridge qui avait auparavant illustré la couverture d'un autre ouvrage de Marion Zimmer Bradley; " La Colline du Dernier Adieu ", d'autre part que les héroïnes sont des grandes prêtresses de l'Antiquité ou du début du Moyen Age,

- s'agissant de romans à vocation populaire, la provenance éditoriale de l'œuvre est sans influence sur son succès commercial et en conséquence l'apposition d'un bandeau rouge masquant le nom de l'éditeur n'a pas pour objet d'accroître la confusion dans l'esprit de la clientèle mais est destinée à attirer son attention sur une caractéristique essentielle de l'œuvre à savoir qu'en l'espèce l'auteur révèle le secret de la légende,

Considérant que Marion Zimmer Bradley expose que " Lady of Avalon " (Le Secret d'Avalon) et " The Mists of Avalon " se rattachent au même ensemble et qu'il existe une parfaite jonction chronologique entre les deux;

Qu'elle en conclut qu'elle était en droit de reprendre l'expression " Les Dames du Lac " pour désigner l'ouvrage " Le Secret d'Avalon " et qu'il était normal d'informer le lecteur de cette filiation en employant *** puisque ce volume paraît après les précédents, dont il livre la genèse et les clés ;

Que selon elle, en décider autrement reviendrait à interdire à un auteur, dès l'instant où il change d'éditeur, de faire apparaître explicitement le lien existant entre ses ouvrages successifs, même si ce lien est mis en relief par l'utilisation d'une expression dénuée d'originalité;

Que le fait qu'un ouvrage soit publié chez tel ou tel éditeur est sans importance dès lors que l'auteur est un auteur à succès ;

Que le choix de la prêtresse sur fond bleu pour la couverture est une création américaine, dont les Editions Pygmalion n'ont été ni les initiatrices, ni les créatrices, mais simplement les utilisatrices ;

Considérant que la société Editions Pygmalion et Gérard Watelet se fondant tout d'abord sur les dispositions de l'article L. 112-4 alinéa 2 du code de la propriété intellectuelle, leur opposent que l'utilisation du titre " Les Dames du Lac " pour présenter le livre " Le Secret d'Avalon " génère un risque de confusion avec l'ouvrage " Les Dames du lac ";

Que " Le Secret d'Avalon " n'est en rien la troisième partie de l'ouvrage " Les Dames du Lac ", qu'il n'existe aucune continuité entre les histoires et les personnages et qu'aucun éditeur étranger ne l'a présenté comme un troisième tome;

Qu'ils reprochent également à la société Bernard de Fallois d'avoir aggravé la confusion entre les différents ouvrages en adoptant une couverture de la même lignée que celles utilisées pour " Les Dames du Lac " et en apposant un bandeau rouge sur lequel est inscrit " Les Dames Du Lac - Le Mystère Révélé ",

Qu'ils en concluent que cette société a cherché délibérément à se mettre dans son sillage en appréhendant sans frais son travail, son investissement, son succès, sa notoriété puisque le titre " Les Dames du Lac " est extrêmement porteur, beaucoup plus que le nom de l'auteur lui même;

Considérant ceci exposé, que l'article L. 112-4 alinéa 2 du code de la propriété intellectuelle dispose que nul ne peut même si l'œuvre n'est plus protégée dans les termes des articles L. 123-1 à L. 123-3 du code de la propriété intellectuelle, utiliser ce titre pour individualiser une œuvre du même genre, dans des conditions susceptibles de provoquer une confusion;

Considérant qu'il a été ci dessus exposé que le titre " Les Dames du Lac ", dont l'auteur est Gérard Watelet, n'est pas original;

Que l'édition française de l'ouvrage de Marion Zimmer Bradley " The Mists of Avalon " a été scindé par la société Editions Pygmalion en deux volumes, comme l'y autorisait le contrat signé avec Scott Meredith Literary Agency, ayant respectivement pour titre " Les Dames du Lac " et " Les Brumes d'Avalon " sous titré " Les Dames du Lac ** ";

Qu'en 1994, la société Editions Pygmalion a publié un autre ouvrage du même auteur sous le titre " La Colline du Dernier Adieu " avec la mention " par l'auteur des Dames Du Lac " ;

Considérant qu'en avril 1997, la société Bernard De Fallois a publié la traduction française du livre de Marion Zimmer Bradley intitulé " Lady of Avalon " sous le titre " Le Secret d'Avalon " avec comme sous titre " Les Dames du Lac*** ";

Considérant que ces trois ouvrages ayant tous pour auteur Marion Zimmer Bradley, se rattachant tous à l'histoire du roi Arthur et aux prêtresses du Lac d'Avalon, le dernier constituant en quelque sorte le prologue des deux autres et introduisant notamment Viviane qui à la fin du livre devient prêtresse et qu'on retrouve avec cette qualité dans " Les Dames du Lac " , la société Bernard de Fallois était en droit de présenter le livre " Le Secret d'Avalon " comme faisant partie d'une même série à savoir l'histoire " Des Dames du Lac " au cours du cycle du Graal qui selon les documents produits commence au début de l'occupation romaine de la Grande Bretagne avec Bron et sa descendance appelés sur les ordres du Christ à aller en Occident dans les vaus d'Avaron pour y garder, en Rois Pêcheurs, le Graal et se termine avec Perceval;

Que les éditeurs américain et allemand dans leur présentation de l'ouvrage " The Lady of Avalon " ont, au demeurant, décrit cet ouvrage comme étant le prologue de " The Mists of Avalon ";

Mais considérant, qu'en apposant sur la première page de couverture *** après le sous titre " Les Dames du Lac " , l'appelante a fait nécessairement naître dans l'esprit du lecteur un risque de confusion et l'a amené à croire qu'il s'agissait du troisième tome ou volume d'un même ouvrage ayant la même provenance éditoriale, confusion au demeurant commise par Livres Hebdo dans le n° 248 du 9.5.97 qui écrit à propos des meilleures ventes: " de son côté, la suite de la légende du roi Arthur et des chevaliers de la Table Ronde, par Marion Zimmer Bradley, le Secret d'Avalon, a été tiré à 60 000 exemplaires depuis le 15 avril ";

Or considérant que le premier ouvrage de Marion Zimmer Bradley intitulé " The Mists of Avalon " ne comptait qu'un volume et que ce n'est qu'en raison de sa grosseur, que l'éditeur français Pygmalion a fait le choix de le scinder en deux volumes sous le titre commun " Les Dames du Lac " comme le contrat de cession des droits l'y autorisait et en indiquant sur la couverture du second " Les Brumes d'Avalon " " Les Dames Du Lac ** " ;

Considérant en revanche, que même si le livre intitulé " La Colline du Dernier Adieu " est censé se rattacher aux " Dames du Lac " et aux " Brumes d'Avalon ", la société Editions Pygmalion pour bien marquer qu'il s'en distinguait s'est contentée de mentionner sur la première page de couverture " par l'auteur des Dames du Lac ";

Considérant en outre, que dans l'édition française, les étoiles sont utilisées pour désigner dans l'ordre chronologique les différents volumes d'une même histoire ;

Considérant enfin, qu'aucune pièce du dossier n'établit que l'auteur ou son agent littéraire ait été consulté sur l'apposition de cette numérotation qui n'a pas été reprise par les éditeurs étrangers ;

Considérant que le risque de confusion se trouve renforcé par la présentation de la couverture;

Considérant en effet que les premiers juges ont justement relevé que le livre incriminé est de même format que ceux publiés par la société Editions Pygmalion, que le titre est semblablement présenté dans un encadré sur fond crème bordé d'un liseré de couleur, que les caractères typographiques utilisés pour écrire le nom de l'auteur et le titre de l'ouvrage sont identiques ;

Qu'il importe peu que ces caractéristiques soient banales dès lors que la concurrence déloyale est indépendante de toute originalité;

Considérant par ailleurs, que même si la société Editions Pygmalion n'a acquis de l'illustrateur de l'ouvrage " La Colline du Dernier Adieu ", dont l'auteur est Marion Zimmer Bradley, et qui chronologiquement se situe avant " Le Secret d'Avalon " aucun droit exclusif, il demeure que la société Editions Bernard de Fallois en s'adressant à lui pour illustrer la première page de couverture du livre " Le Secret d'Avalon " et en lui commandant une illustration reprenant sur un même fond bleu la représentation du même personnage féminin que celui des couvertures des ouvrages " Les Dames du Lac ", " Les Brumes d'Avalon " et " La Colline du Dernier Adieu ", à savoir une jeune femme aux longs cheveux noirs ondulés, les bras tendus en avant, vue de profil et vêtue d'une simple tunique, a manifestement cherché à profiter des investissements réalisés par les intimés, à se placer dans le sillage de la société Editions Pygmalion et à profiter du succès remporté auprès des lecteurs par cette société avec les trois précédents ouvrages de Marion Zimmer Bradley;

Considérant en revanche, qu'il ne saurait être valablement soutenu que la société Editions Bernard de Fallois a apposé sur l'ouvrage en cause un bandeau rouge portant la mention " Les Dames du Lac ", " Le Mystère révélé " et masquant le nom de l'éditeur dans le but d'accroître le risque de confusion, dès lors que cette pratique est d'usage courant , que l'une des caractéristiques de l'œuvre est précisément de révéler le secret de la légende arthurienne et que le roman présente un lien avec le premier ouvrage de la série ayant pour titre " Les Dames du Lac ";

Considérant que sous cette réserve, le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que la société Editions Bernard de Fallois avait commis des actes de concurrence déloyale engageant sa responsabilité sur le fondement de l'article 1382 du code civil;

V. Sur la publicité mensongère

Considérant que la société Editions Bernard de Fallois fait valoir que c'est à tort que les premiers juges ont retenu ce grief au motif que le sous titre " Les Dames du Lac*** " désigne simplement " Le Secret d'Avalon " comme le troisième volume de la série inaugurée par " Les Dames du Lac " et ce conformément à la volonté de l'auteur;

Considérant que les intimés font leur l'argumentation des premiers juges ;

Considérant qu'aux termes de l'article 44 de la loi du 27 décembre 1973 devenu l'article L. 121-1 du code de la consommation " est interdite toute publicité comportant, sous quelque forme que ce soit, des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur lorsque celles ci portent sur un ou plusieurs éléments ci après existence, nature, composition qualités substantielles, origine " ;

Considérant qu'il résulte des pièces mises aux débats que dans la revue Biblioteca et dans celle intitulée Livres Hebdo sont parues des annonces présentant l'ouvrage Le Secret d'Avalon comme " Les Dames du Lac " tome 3 ou comme le dernier tome de la trilogie de Marion Zimmer Bradley, cette dernière annonce étant accompagnée d'une reproduction de la première page de couverture de l'ouvrage avec le sous titre " Les Dames du Lac*** " ;

Or considérant qu'il a été ci-dessus démontré, que si le Secret d'Avalon pouvait être rattaché aux autres ouvrages écrits par Marion Zimmer Bradley autour de l'histoire du Graal, en revanche il ne pouvait être présenté comme étant le 3ème tome du livre intitulé " Les Dames du Lac ";

Considérant en conséquence que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a dit que de tels agissements étaient constitutifs de publicité mensongère et engageaient la responsabilité civile de la société Editions Bernard de Fallois qui ne conteste pas être à l'origine des encarts litigieux;

VI. Sur les mesures réparatrices

Considérant que la société Bernard de Fallois fait valoir que les intimés ne justifient pas du préjudice qu'ils invoquent;

Qu'elle soutient n'avoir jamais prétendu lors de l'audience de référé du 14 avril 1997 que les livres incriminés étaient toujours stockés et non encore routés mais avoir en revanche mentionné que les livres étaient en cours de diffusion et qu' elle précise que le juge des référés n'a ni ordonné le retrait de la vente au public, ni enjoint à Hachette Livres ou aux Editions de Fallois d'intervenir d'une manière quelconque auprès des libraires;

Qu'elle ajoute que les exemplaires distribués sont vendus et que l'éditeur n'en dispose plus et qu'en exécution du jugement elle a adressé, avant la fin du mois de juillet 1997, à Livres Hebdo un communiqué informant les libraires que l'ouvrage " Le Secret d'Avalon " n'était plus diffusé qu'avec une couverture ne comportant pas de sous titre ni d'indication de tomaison;

Considérant que la société Editions Pygmalion réplique que son préjudice doit être fixé à la somme de 1.000.000 F dans la mesure où:

- la société appelante a, avec la plus particulière mauvaise foi, profité du délibéré de 6 jours annoncé pour la première ordonnance de référé pour lancer avec la participation active de Hachette la distribution physique de l'ouvrage litigieux dès le 9 avril 1997,

- de Fallois n'a après l'ordonnance de référé, rien mis en œuvre pour stopper la mise à disposition au public des ouvrages routés,

- au mépris des mesures d'interdiction prononcées par le jugement dont appel et assorties de l'exécution provisoire, de Fallois a laissé les ouvrages dans les librairies,

Considérant ceci exposé, que la première ordonnance de référé ayant simplement fait injonction aux sociétés de Fallois et à Hachette de suspendre provisoirement la diffusion de l'ouvrage litigieux et cette ordonnance n'étant exécutoire qu'à compter de sa signification, soit en l'espèce le 16 avril 1997, il ne saurait être fait grief à la société de Fallois d'avoir poursuivi pendant la période de délibéré la diffusion du livre déjà commencée à la date des plaidoiries comme le relève le juge des référés en page 2 de son ordonnance et programmée depuis le 11 mars 1997 et de s'être abstenue de prendre des mesures pour obtenir le retour des livres déjà distribués chez des libraires à la date du 16 avril 1997;

Considérant en revanche, qu'en se contentant de faire paraître un petit encart dans une seule revue, Livres Hebdo, et dans un unique numéro celui du 22 août 1997, pour signaler aux libraires que l'ouvrage " Le Secret d'Avalon " n'était plus diffusé qu'avec une couverture ne comportant pas de sous titre ni d'indication de tomaison, la société Editions Bernard de Fallois n'a pas pris les dispositions suffisantes pour empêcher la diffusion directement ou indirectement de l'ouvrage dans le public comme le prescrivait le jugement entrepris, les mesures d'interdiction étant assorties de l'exécution provisoire;

Que les intimés établissent par plusieurs tickets de caisse et factures que l'ouvrage dans sa présentation initiale était toujours proposé à la vente au cours du mois de septembre 1997;

Considérant enfin qu'il n'est pas contesté que 46 696 exemplaires de l'ouvrage incriminé ont été diffusés

Mais considérant que si la présentation contestée a indéniablement attiré le lecteur qui connaissait les précédents ouvrages de Marion Zimmer Bradley , il demeure ainsi que l'ont relevé les premiers juges que d'une part, la société Editions Bernard de Fallois est le cessionnaire régulier des droits d'auteur sur l'ouvrage " Le Secret D'Avalon " que la société Editions Pygmalion n'a pas souhaité acquérir, d'autre part que Marion Zimmer Bradley a un lectorat qui lui est attaché du fait de ses précédents succès et pour qui la présentation de la première page de couverture n'est pas déterminante;

Considérant enfin qu'il y a lieu de relever que les actes de concurrence déloyale ont causé uniquement un préjudice à la société Editions Pygmalion, seule exploitante des ouvrages de Marion Zimmer Bradley;

Que Monsieur Gérard Watelet étant débouté de sa demande en contrefaçon et ne commercialisant pas à titre personnel les ouvrages de Marion Zimmer Bradley, ne peut prétendre avoir été victime d'actes de concurrence déloyale;

Que dans ces conditions, le préjudice subi par le société Editions Pygmalion du fait des agissements fautifs de la société Bernard de Fallois sera réparé par le versement d'une indemnité de 300 000 F;

Que les mesures d'interdiction par le tribunal seront confirmées SAUF en ce qu'elles portent sur un bandeau rouge comportant la mention " Les Dames du Lac , le mystère révélé " ;

Qu'il sera fait droit aux mesures de publication dans les conditions précisées au dispositif;

VII. Sur la demande des Editions de Fallois

Considérant que la société Bernard de Fallois fait valoir que la société Editions Pygmalion et Gérard Watelet ont commis un abus de droit en s'opposant à ce que Marion Zimmer Bradley et son nouvel éditeur, indiquent sur la couverture du " Secret d'Avalon " qu'il s'agit bien du troisième roman de la série " Des Dames du Lac " et sollicite leur condamnation à lui payer la somme de 200 000 F en réparation de son préjudice matériel outre une indemnité de 500 000 F à valoir sur son préjudice commercial;

Mais considérant, qu'outre le fait qu'il a été ci dessus retenu que la société Bernard de Fallois ne pouvait présenter l'ouvrage " Le Secret d'Avalon " comme étant le troisième volume ou tome " Des Dames du Lac ", il convient de relever qu'elle a diffusé 46 696 exemplaires de l'ouvrage incriminé, qu'elle n'a procédé à aucun retrait auprès des libraires et que dès le 29 avril 1997, elle était en mesure de faire distribuer l'ouvrage avec une autre couverture si on se réfère à la deuxième ordonnance;

Considérant dans ces conditions, qu'aucun abus de droit ne peut être imputé aux intimés et que la société Bernard de Fallois sera déboutée de sa demande en paiement de dommages et intérêts;

VIII. Sur la demande de Marion Zimmer Bradley

Considérant que Marion Zimmer Bradley fait grief à la société Editions Pygmalion d'avoir intitulé " Collection Les Dames Du Lac " un rassemblement hétéroclite d'environ 25 livres au nombre desquels figurent quatre de ses romans et quantité d'ouvrages n'ayant strictement rien à voir avec La Légende du roi Arthur et d'avoir cherché à faire profiter ces ouvrages de la notoriété de Marion Zimmer Bradley en apposant sur la quatrième page de couverture la mention: " Dans la même collection Marion Zimmer Bradley Les Dames Du Lac ";

Qu'elle ajoute que contrairement à ce que soutiennent les intimés, cette demande est recevable devant la Cour;

Considérant par ailleurs, qu'elle soutient que les procédures initiées par la société Editions Pygmalion et l'impossibilité tant de diffuser que de lancer aucune action publicitaire pour l'ouvrage Le Secret d'Avalon lui ont causé un préjudice patrimonial et moral;

Considérant que la société Editions Pygmalion et Gérard Watlet répliquent que Madame Marion Zimmer Bradley est irrecevable à solliciter devant la Cour réparation du préjudice qu'elle aurait subi du fait de la désignation d'une collection par le titre " Les Dames du Lac " aux motifs d'une part que le tribunal de grande instance saisi d'une telle demande a sursis à statuer de ce chef dans l'attente de la décision de la Cour, d'autre part qu'il s'agit d'une demande nouvelle au sens de l'article 564 du nouveau code de procédure civile ;

Que sur le fond, ils font valoir que cette demande n'est pas fondée, le titre " Les Dames du Lac " appartenant à Gérard Watelet qui en a la libre disposition et son utilisation ayant pour objet de promouvoir de manière constante les ouvrages de Marion Zimmer Bradley;

Qu'ils ajoutent que les mesures d'interdiction sollicitées ne se justifient plus dans la mesure où la société Editions Pygmalion a pris l'initiative d'en suspendre l'utilisation;

Considérant sur la demande formée par Marion Zimmer Bradley du chef de l'ouvrage " Le Secret d'Avalon ", qu' ils exposent que celle-ci ne peut prétendre avoir subi le moindre préjudice dans la mesure où:

- aucun retard n'a été apporté à la diffusion de l'ouvrage,

- les ouvrages de la première livraison sont restés chez les libraires,

- les ouvrages non routés n'ont pas été détruits,

- le choix du titre de la traduction française appartenant à l'éditeur, Marion Zimmer Bradley n'a subi aucun préjudice moral,

Considérant ceci exposé, que par jugement en date du 5 décembre 1997, le tribunal de grande instance de Paris a sursis à statuer sur la demande de Marion Zimmer Bradley relative à l'utilisation du titre " les Dames du Lac "pour désigner une collection dans le but de prévenir tout risque de contrariété de décisions et en soulignant: " qu'il n'a pas été soutenu que la Cour n'ait pas à se prononcer sur les droits que peut revendiquer Marion Zimmer Bradley sur le titre litigieux ";

Or considérant que la Cour est précisément saisie d'une telle demande par Marion Zimmer Bradley;

Que les intimées ne contestant pas la recevabilité de l'appel de Marion Zimmer Bradley et sa demande reconventionnelle se rattachant par un lien suffisant à celles formées par la société Editions Pygmalion dans la mesure où elle porte sur les droits à l'utilisation du titre " Les Dames du Lac ", il en résulte qu'elle est recevable en application de l'article 567 du nouveau code de procédure civile, observation étant faite au surplus qu'il n'est pas contesté que c'est lors de la procédure à jour fixe devant le tribunal que Madame Bradley a eu connaissance de l'existence de la Collection " Les Dames du Lac "

Considérant sur le fond que le titre " Les Dames du Lac " n'étant pas protégeable par le droit d'auteur ainsi qu'exposé plus haut, Monsieur Gérard Watelet ne saurait opposer ses droits sur ce titre ;

Que de même, Marion Zimmer Bradley ne peut prétendre à aucun droit privatif sur ce titre ;

Que si la société Editions Pygmalion avait le choix du titre de la traduction française de l'ouvrage " The Mists of Avalon ", elle ne pouvait dès lors qu'elle avait adopté le titre " Les Dames d'Avalon " pour désigner les deux tomes tirés de cet ouvrage dont elle a acquis les droits d'exploitation, l'utiliser pour désigner autre chose que ce livre, sans l'accord de Marion Zimmer Bradley;

Qu'en apposant, sans l'autorisation de Marion Zimmer Bradley, à la quatrième page de couverture de plusieurs ouvrages dont l'auteur n'est pas Marion Zimmer Bradley, qui se déroulent à des époques tout à fait différentes de celle de la Légende du Graal, qui racontent l'histoire de personnages sans rapport avec " Les Dames Du Lac ", un tampon dont le texte est le suivant: " Dans la même collection, Marion Zimmer Bradley Les Dames du Lac ", en intitulant la collection regroupant ces différents ouvrages : " Dames Du Lac " et en ajoutant au surplus dans certains cas la mention suivante: " Pour tous ceux qui ont aimé Les Dames du Lac les aventures romanesques d'une nouvelle héroïne confrontée à des dramatiques péripéties de l'Histoire", la société Editions Pygmalion a cherché à profiter indûment de la notoriété dont bénéficient cet auteur et ses œuvres pour promouvoir d'autres ouvrages;

Qu'un tel comportement est constitutif d'une faute et engage la responsabilité de la société Editions Pygmalion sur le fondement de l'article 1382 du Code civil;

Considérant que la preuve n'étant pas rapportée que Gérard Watelet a agi à titre personnel, sa responsabilité ne sera pas retenue;

Considérant que ces agissements de la société Editions Pygmalion ont causé à Marion Zimmer Bradley un préjudice moral qui sera réparé par le versement d'une somme de 100 000 francs;

Considérant que ses livres ayant continué à être exploités par la société Editions Pygmalion et Marion Zimmer Bradley ne rapportant pas la preuve que leur vente ait accusé une baisse sensible suite à la sortie d'autres ouvrages que les siens dans la collection " Les Dames du Lac " , cette dernière ne peut prétendre avoir subi un préjudice matériel du fait des agissements parasitaires de la société Editions Pygmalion;

Considérant sur les conséquences résultant de l'interruption de la diffusion de l'œuvre " Le Secret d'Avalon " avec la couverture et la mention incriminées, que les demandes de la société Editions Pygmalion étant reconnues pour partie fondées, Marion Zimmer Bradley ne saurait prétendre à réparation du préjudice qu'elle aurait subi du fait des ventes qui auraient été perdues ;

Qu' au surplus, il a été ci dessus démontré que la diffusion de l'ouvrage n'avait pas été interrompue;

Considérant en conséquence qu'elle sera déboutée de sa demande de ce chef;

Considérant en revanche, qu'il convient de faire droit aux mesures d'interdiction et de publication dans les conditions précisées au dispositif,

IX. Sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile

Considérant que chacune des parties succombant pour partie, l'équité ne commande pas de leur faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile;

Par ces motifs, et ceux non contraires des premiers juges, rejette des débats les conclusions signifiées les 14 et 16 septembre 1999 par la société Editions Pygmalion et Gérard Watelet et les pièces par eux communiquées le 14 septembre 1999, dit la société Baror International irrecevable à agir, confirme le jugement entrepris sauf sur le montant des dommages et intérêts et leur bénéficiaire et sur les mesures de publication, le réformant de ces chefs et statuant à nouveau et y ajoutant, condamne la société Bernard de Fallois à payer à la société Editions Pygamalion la somme de 300 000 F à titre de dommages et intérêts, déboute Gérard Watelet de sa demande de ce chef, déboute la société Bernard de Fallois de sa demande en paiement de dommages et intérêts, dit Marion Zimmer Bradley recevable en ses demandes, dit que la société Editions Pygmalion a eu à l'encontre de Marion Zimmer Bradley un comportement fautif engageant sa responsabilité sur le fondement de l'article 1382 du code civil, la condamne à lui payer la somme de 100 000 F à titre de dommages et intérêts, fait interdiction à cette société d'utiliser le titre " Collection Les Dames du Lac " -et/ou la mention " dans la même collection Marion Zimmer Bradley Les Dames du Lac " pour désigner des ouvrages d'auteurs autres que Marion Zimmer Bradley sous astreinte de 500 F par infraction constatée à compter de la signification du présent arrêt, autorise la société Editions Pygmalion et Marion Zimmer Bradley à faire publier le dispositif du présent arrêt dans deux revues ou journaux de leur choix dans la limite de 25 000 F HT par insertion et aux frais respectifs de l'une et l'autre de ces deux parties, rejette toute autre demande des parties, déboute les parties de leur demande du chef de l'article 700 du nouveau code de procédure civile devant la Cour.