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Décisions

CA Toulouse, 2e ch. sect. 2, 4 février 1999, n° 98-00896

TOULOUSE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Mattei Sport (SARL)

Défendeur :

Sport Mirail (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Brignol

Conseillers :

MM. Coleno, Boyer

Avoués :

SCP Sorel Dessart, SCP Nidecker Prieu

Avocats :

Mes Graugnard, Soussan.

T. com. Toulouse, du 5 janv. 1998

5 janvier 1998

La société Mattei a organisé au Parc des Expositions de Toulouse, les 17, 18, 19 et 20 janvier 1997 une vente d'articles de ski.

La société Sports Loisirs, estimant qu'il s'agissait d'une vente au déballage non autorisée obtenait une ordonnance de référé commercial du 17 janvier 1997, faisant interdiction à M. Mattei de procéder à la vente sous astreinte et à la société Nouvelle de la Foire Exposition de mettre à la disposition de M. Mattei des locaux également sous astreinte.

Cette ordonnance sur appel de la société Nouvelle du Parc des Expositions de Toulouse et de M. Mattei était confirmée par arrêt du 8 janvier 1998 devenu définitif ; M. Mattei était en outre condamné à verser à Sports Loisirs, la somme de 20.000 F au titre de la liquidation d'astreinte.

La société Sport Mirail, avait, elle aussi assigné devant le juge des référés commerciaux les mêmes parties et l'audience s'était tenue le 18 janvier 1997. Dans sa décision du 20 janvier 1997, le juge des référés, considérant, ainsi que l'avaient indiqués les défendeurs, que l'ordonnance du 17 janvier 1997 avait été appliquée, estimait n'y avoir lieu à référé.

Or, les opérations de vente se sont poursuivies, en dépit de ces affirmations de sorte que la société Sport Mirail a assigné au fond.

Par jugement du 5 janvier 1998, la juridiction, a retenu que la société Mattei Sport avait organisé les 17, 18, 19 et 20 janvier 1997 une vente au déballage d'articles de ski et l'a condamnée à verser à la société Sport Mirail.

- 50.000 F à titre de dommages et intérêts.

- 10.000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La société d'Exploitation du Parc des Expositions était mise hors de cause et obtenait de la société Sport Mirail, 3.000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La société Mattei Sport a relevé appel de cette décision, dont elle sollicite la réformation en soulignant que c'est à tort que le tribunal a considéré qu'elle avait organisé une vente au déballage.

Elle présente une demande reconventionnelle et rappelle qu'elle a été contrainte d'arrêter sa manifestation, ce qui lui a occasionné un préjudice qu'elle chiffre à 827.421 F et qui devra être vérifié par expertise.

Très subsidiairement, elle fait valoir que la société Sport Mirail ne rapporte pas la preuve d'un préjudice et d'un lien de causalité.

Elle demande une provision de 100.000 F sur le préjudice causé du fait de l'arrêt de la manifestation, 15.000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et l'organisation d'une expertise comptable pour déterminer son préjudice direct et indirect.

Elle soutient que la manifestation était conforme à l'article 27 de la loi du 5 juillet 1996 et elle invoque une décision du Tribunal de Commerce de Marseille statuant en référé, qu'elle produit, et dont elle déduit que la manifestation ne pouvant être assimilée à une vente au déballage, ne saurait être soumise à l'autorisation préfectorale exigée par l'article 27.

La société Sport Mirail qui conclut à la confirmation sollicite 10.000 F à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et exercice d'une voie de recours dilatoire et 5.000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Elle rappelle la teneur de l'arrêt du 8 janvier 1998.

Elle souligne que son préjudice et le lien de causalité sont évidents et résulte de la date de la vente et des prix pratiqués.

Elle produit également les évaluations des chiffres d'affaires réalisés.

Elle s'oppose à la demande reconventionnelle en indiquant que la vente a été arrêtée, par ordonnance rendue dans l'affaire opposant M. Mattei à la société Sports Loisirs Sélection.

Dans ses conclusions additionnelles du 5 novembre 1998, l'appelante souligne que l'intimée n'a pas répondu à sa sommation de communiquer les chiffres d'affaires des premiers trimestres des années 1996, 1997 et 1998 de sorte qu'elle estime que la preuve du lien de causalité n'est pas rapportée.

De plus, elle soutient que Sport Mirail se contente de dire qu'il serait interdit d'organiser des manifestations commerciales avec un seul exposant, alors que cette affirmation ne repose sur aucun document et surtout pas des statuts de la société gérant la Foire Exposition de Toulouse.

Ainsi selon l'appelante il convient d'appliquer le texte de loi, qui considère comme vente au déballage la vente dans un lieu non destiné au commerce, sans précision aucune du nombre des exposants.

Sur quoi

1°/ Il convient tout d'abord de retenir que l'arrêt du 8 janvier 1998, rendu sur appel notamment de M. Mattei est devenu définitif.

Selon l'article 27 de la loi du 5 juillet 1996, sont considérées comme ventes au déballage devant faire l'objet d'une autorisation préalable, les ventes de marchandises effectuées dans les locaux ou sur des emplacements, non destinées à la vente au public de ces marchandises.

L'article 1° du contrat de concession du Parc d'Exposition de Toulouse, prévoit que la ville de Toulouse, concède à la société Nouvelle de la Foire Exposition de la Région, la mission de procéder à l'aménagement d'une partie du Parc Toulousain dénommé " Parc des Expositions ", à la construction ou à l'extension de bâtiment ou de halls d'expositions, à leur entretien et à l'exploitation des activités consistant dans l'organisation de la Foire Internationales de Toulouse et à l'accueil de toutes manifestations à caractère économique, telles que, salons, expositions, concours, fêtes, congrès liés à une exposition.

Ces manifestations, auxquelles peuvent être ajoutées les foires, la liste n'étant pas limitative, doivent être ouvertes à plusieurs exposants.

En effet le décret du 10 octobre 1969 relatif aux manifestations commerciales, précise qu'entrent dans la catégorie des foires et salons les manifestations commerciales constituées par le groupement périodique d'exposants présentant aux acheteurs professionnels ou au public des échantillons de produits ou services dans l'intention d'en faire connaître la qualité et d'en provoquer les commandes.

Or, la pluralité d'exposants doit caractériser les manifestations organisées par la société Nouvelle de la Foire Exposition et il n'est d'ailleurs justifié d'aucun précédent de vente opéré par un seul exposant. Il est de plus intéressant de relever, ainsi que l'a d'ailleurs fait l'arrêt du 8 janvier 1998, que M. Mattei lui-même, n'a pas manqué de créer une certaine confusion, en faisant publier une annonce publicitaire mentionnant précisément " Foire aux skis-surf et vêtement ".

Dans ces conditions, c'est à juste titre, et par des motifs qui méritent confirmation, que le tribunal a retenu que ces locaux ne sauraient être considérés comme des emplacements destinés à la vente au public de matériels de ski de sorte que la vente organisée les 17, 18, 19 et 20 janvier 1997 doit être qualifiée de vente au déballage, conformément à l'article 27 de la loi du 5 juillet 1996.

2°/ Contrairement à ce que soutient l'appelante, il est évident qu'une vente au déballage, pratiquée sans autorisation, qui constitue un acte de concurrence déloyale, ne manque de pas de créer envers le commerçant respectueux de la législation un préjudice, qui résulte de la désaffection d'une certaine clientèle, en raison notamment de la date et des prix pratiqués, ainsi que l'a justement souligné le Tribunal.

Compte tenu des justificatifs produits, le Tribunal a fait une juste appréciation en fixant ce préjudice à 50.000 F, que la Cour confirmera.

3°/ La demande reconventionnelle de M. Mattei ne peut qu'être rejetée, puisque l'arrêt de la manifestation qu'il invoque est intervenu à la suite d'une ordonnance rendue dans une affaire opposant M. Mattei à la société Sport Loisirs Sélection (et non Sport Mirail).

Il convient par conséquence de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, de condamner l'appelant aux dépens d'appel, ainsi qu'à verser à l'intimée, la somme de 5.000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

En revanche, la demande de dommages et intérêts présentée par la société Sport Mirail sera rejetée, faute pour elle d'établir la réalité de son préjudice, ainsi que les caractères abusifs et dilatoires de la procédure.

Par ces motifs, LA COUR, reçoit l'appel jugé régulier, le déclare mal fondé, confirme le jugement du 5 janvier 1998 en toutes ses dispositions, dit n'y avoir lieu à dommages et intérêts au profit de la société Sport Mirail, déboute la société Mattei de toutes ses demandes, la condamne aux dépens d'appel, avec distraction au profit de la SCP Nidecker-Prieu-Philippot, avoué, conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. La condamne en outre à verser à la société Sport Mirail la somme de 5.000 F (cinq mille francs) au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.