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Décisions

CA Metz, 1re ch. civ., 5 novembre 1998, n° 4518-97

METZ

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Espace Import International (SARL), Autohaus Import et Partners (SA), Rouppert

Défendeur :

VAG France (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dory

Conseillers :

M. Bockenmeyer, Mme Duroche

Avoués :

Mes Roulleaux, Vanmansart & Associés

Avocats :

Mes Fourgoux, Baccichetti.

TGI Metz, du 2 déc. 1997

2 décembre 1997

FAITS ET PROCEDURE :

Par actes d'huissier en date des 23 juillet 1993, 28 août 1994 et 17 juillet 1995, la société VAG France a successivement assigné devant la Chambre Commerciale du Tribunal de Grande Instance de Metz la SARL Espace Import International, la SA Autohaus Import et Partners et Monsieur Jean Rouppert, exploitant sous l'enseigne Autohaus International, aux fins de :

1) "Dire et juger que la société Autohaus Import et Partners s'est rendue coupable du délit de publicité trompeuse prévu et sanctionné par l'article 44 de la loi du 27 décembre 1973 et l'article 1er de la loi du 1er août 1905;

Dire et juger que la société Autohaus Import et Partners exerce une activité constitutive de concurrence déloyale;

Dire et juger que la société Autohaus Import et Partners s'est rendue coupable d'une infraction aux dispositions de la loi du 18 janvier 1992 relatives à la publicité comparative;

Ordonner à la société Autohaus Import et Partners de faire clairement apparaître notamment sur ses publicités sa qualité de mandataire en caractères au moins aussi gros que son nom commercial ou son enseigne sans adjonction de signes distinctifs faisant croire abusivement qu'elle agit en qualité de revendeur, telles que "disponibilité rapide ou immédiate" "nos relations d'exclusivité avec nos concessionnaires", "nos volumes de vente" ... sous astreinte de 100 000 F par publicité effectuée en violation de cette interdiction;

Ordonner à la société Autohaus Import et Partners l'interdiction de faire paraître des publicités relatives aux véhicules des marques VAG, Volkswagen, Seat et Audi, sans indication de sa qualité de mandataire, sous astreinte de 100 000 F par publicité effectuée en violation de cette interdiction;

Interdire à la société Autohaus Import et Partners de faire paraître des publicités comportant des indications laissant penser qu'elle agit en qualité de revendeur (disponibilité immédiate et rapide ou autres ...) et/ou des publicités qui au contraire ne précisent pas que les prix indiqués correspondent à la meilleure estimation, et ce sous astreinte de 100 000 F par publicité effectuée en violation de cette interdiction;

Interdire à la société Autohaus Import et Partners de faire paraître des publicités laissant à penser qu'elle fait partie du réseau Volkswagen Audi, telles que les publicités comportant la mention "Nos relations d'exclusivité avec nos concessionnaires", sous astreinte de 100 000 F par publicité effectuée en violation de cette interdiction;

Interdire à la société Autohaus Import et Partners de faire paraître des publicités instaurant une comparaison avec les véhicules de marque VAG, Audi, Seat ou Volkswagen distribués tout à fait régulièrement par le réseau de concessionnaires de VAG France (comparaison de prix, ...), et ce sous astreinte de 100 000 F par véhicule vendu en violation de cette interdiction;

Condamner la société Autohaus Import et Partners solidairement avec la société Espace Import International et Monsieur Rouppert à payer à la société Groupe Volkswagen France SA venant aux droits de la société VAG France la somme de 736 331,40 F à titre de dommages-intérêts pour les publicités réalisées en infraction des dispositions en vigueur et du préjudice subi par la société Groupe Volkswagen France SA;

Ordonner la publication du présent jugement par extraits dans le Journal Le Républicain Lorrain et dans le magazine Auto Plus aux frais de la société Autohaus Import et Partners, sans que le montant des insertions effectuées ne puisse cependant dépasser la somme de 250 000 F ;

Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir nonobstant appel et sans caution;

Condamner la société Autohaus Import et Partners à payer à la société Groupe Volkswagen France SA venant aux droits de la société VAG France la somme de 30 000 F HT au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile;

Condamner la société Autohaus Import et Partners en tous les dépens."

2) Dire et juger que la société Espace Import International s'est rendue coupable du délit de publicité mensongère prévu et sanctionné par l'article 44 de la loi du 27 décembre 1973 et l'article 1er du 1er août 1905;

Dire et juger que la société Espace Import International exerce une activité illégale au sens du règlement 123-85 constitutive de concurrence déloyale;

Ordonner à la société Espace Import International la cessation de la vente des véhicules de marque Volkswagen et Audi sans indication de sa qualité de mandataire sous astreinte de 100 000 F par véhicule vendu en violation de cette interdiction;

Condamner la société Espace Import International à payer à la société VAG France la somme de 150 000 F à titre de dommages-intérêts;

Ordonner la publication du présent jugement par extraits dans le Journal Le Républicain Lorrain aux frais de la société Espace Import International;

Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir;

Condamner la société Espace Import International à payer à la société VAG France la somme de 20 000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile;

Condamner la société Espace Import International en tous les dépens.

3) " Dire et juger que Monsieur Rouppert s'est rendu coupable du délit de publicité mensongère et sanctionné par l'article 44 de la loi du 27 décembre 1973 et l'article 1er de la loi du 1er août 1905;

Dire et juger que Monsieur Rouppert exerce une activité illégale constitutive de concurrence déloyale;

Dire et juger que Monsieur Rouppert s'est rendu coupable d'une infraction aux dispositions de la loi du 18 janvier 1992 relatives à la publicité comparative;

Ordonner à Monsieur Rouppert de faire clairement apparaître sa qualité de mandataire en caractères au moins aussi gros que son nom commercial ou son enseigne sans adjonction de signes distinctifs faisant croire abusivement qu'il est revendeur, notamment l'indication de la disponibilité immédiate, de la garantie propre (...) sous astreinte de 100 000 F par véhicule vendu en violation de cette interdiction;

Condamner Monsieur Rouppert à payer à la société VAG France la somme de 250 000 F à titre de dommages-intérêts;

Ordonner la publication du présent jugement par extraits dans le Journal Le Républicain Lorrain aux frais de Monsieur Rouppert;

Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir;

Condamner Monsieur Rouppert à payer à la société VAG France la somme de 20 000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile;

Condamner Monsieur Rouppert en tous les dépens.

Les parties défenderesses ont soulevé l'irrecevabilité des demandes aux motifs que VAG France, filiale du constructeur, est une entreprise liée au sens du règlement CEE 123-85 et que le contrat de concession VAG est inopposable aux tiers à défaut de notification.

Sur le fond, elles ont contesté être les auteurs d'actes de concurrence déloyale et de publicités illicites.

Par jugement en date du 2 décembre 1997, le Tribunal de Grande Instance de Metz a :

- ordonné la jonction des procédures;

- constaté que Jean-Paul Rouppert, la SARL Espace Import International, représentée par son liquidateur, et la SA Autohaus Import et Partners ont commis des actes de concurrence déloyale à l'encontre de la société Groupe Volkswagen France SA, venant aux droits de la société VAG France;

- condamné in solidum les susnommés à verser à la société Groupe Volkswagen France SA la somme de 80 000 F à titre de dommages et intérêts et la somme de 30 000 F sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile;

- fait interdiction à la SA Autohaus Import et Partners de faire paraître des annonces publicitaires non conformes à l'article 44 de la loi du 27 décembre 1973 et aux articles L. 121-8 et L. 121-12 du Code de la Consommation, sous astreinte de 5 000 F par infraction constatée;

- condamné les défendeurs in solidum aux dépens.

Pour statuer ainsi les premiers juges ont énoncé :

- Sur la recevabilité:

* que la société demanderesse opère sur les mêmes marchés que les défendeurs en sa qualité de fournisseur et de responsable de l'organisation du réseau des concessionnaires Volkswagen Audi ; qu'elle a donc intérêt et qualité pour agir en concurrence déloyale contre les agissements de tiers qui mettraient en péril son réseau;

* que la demanderesse est également en droit d'opposer au tiers le contrat de concession en vigueur dans son réseau qui a fait l'objet d'une exemption par catégorie en vertu du règlement CEE n° 1475- 95 concernant l'application de l'article 85 paragraphe 3 du Traité à des catégories d'accord de distribution et de service de vente et d'après-vente de véhicules automobiles.

- Sur le fond :

* que les publicités parues courant 1993 et 1994 à l'initiative des défendeurs dans la revue professionnelle Auto Plus ne respectent pas les dispositions de l'article 44 de la loi du 27 décembre 1973 puisqu'elles comportent des allégations fausses soit sur la disponibilité du véhicule soit sur le millésime ou n'indiquent pas en quelle qualité, mandataire ou négociant, agissent les défendeurs, ce qui est de nature à induire les clients en erreur sur la nature et l'étendue des prestations qu'ils sont en droit d'attendre de leur cocontractant; que d'autres publicités portent des mentions contradictoires qui induisent également en erreur le consommateur moyen sur les conditions de vente et la nature des services proposés par un concessionnaire et par un mandataire; que les faits de publicité mensongère sont donc caractérisés;

* que certaines publicités parues courant 1994 dans des revues professionnelles Auto Moto, Auto Plus ou des quotidiens ne respectent pas les dispositions de l'article L. 121-8 du Code de la Consommation sur la publicité comparative, dès lors qu'elles instaurent des comparaisons de prix alors que les biens ne sont pas identiques et que leur condition de commercialisation est différente selon que celle-ci intervient dans le cadre d'un réseau de concession ou par un opérateur indépendant;

* que les actes avérés de publicité mensongère et de publicité comparative illicite qui ont pour effet de détourner la clientèle en raison des informations fallacieuses constituent des procédés déloyaux de concurrence pour lesquels la société demanderesse est fondée à demander leur cessation et la réparation du préjudice qu'elle a subi;

* que le préjudice doit être fixé, toutes causes confondues, à 80 000 F et doit être supporté in solidum par Jean-Paul Rouppert, la SARL Espace Import International, la SA Autohaus Import et Partners qui ont coexisté ou se sont succédé en exerçant la même activité à la même adresse, 11 rue des Clercs à Metz.

Par déclaration reçue au greffe le 19 décembre 1997, la SARL Espace Import International, la SA Autohaus Import et Partners et Monsieur Jean-Paul Rouppert ont interjeté appel du jugement.

Par ordonnance de référé en date du 15 janvier 1998, Monsieur le Premier Président a accordé le sursis à l'exécution provisoire.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES:

La société Espace Import International, la société Autohaus Import et Partners et Monsieur Rouppert demandent de :

- infirmer le jugement entrepris;

- mettre hors de cause Monsieur Rouppert et la société Espace Import International;

- dire et juger que le comportement de la société Groupe Volkswagen SA est constitutif de concurrence déloyale;

- en conséquence, condamner la société Groupe Volkswagen SA à payer à la société Autohaus Import et Partners la somme de 100 000 F hors taxes à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi et à titre de procédure abusive;

- autoriser la société Autohaus Import et Partners à faire publier l'arrêt à intervenir dans trois journaux nationaux de son choix aux frais de la société Groupe Volkswagen SA ;

- condamner la société Groupe Volkswagen SA à payer à la société Autohaus la somme de 50 000 F sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- condamner la société Groupe Volkswagen SA aux entiers dépens.

Les appelants soutiennent pour l'essentiel :

- que l'activité des concluants exercée tant dans le cadre du mandat que dans celui de la revente est licite comme l'a rappelé la Cour de Justice des Communautés Européennes dans deux arrêts de principe du 15 février 1996; qu'en conséquence les importations parallèles, quelles que soient leurs formes ne sont à aucun moment constitutives de concurrence déloyale;

- que le Tribunal ne pouvait affirmer que l'absence de précision du statut juridique du commerçant indépendant est en soi constitutif d'une publicité mensongère de nature à induire en erreur les clients potentiels sur la nature et l'étendue des prestations qu'ils sont en droit d'attendre de leur cocontractant, alors que le statut juridique du commerçant indépendant importe peu pour le consommateur si le commerçant est en mesure de lui procurer le véhicule demandé au prix convenu ; qu'en tout état de cause, la prétendue confusion, à la supposer démontrée, ne saurait constituer un acte de concurrence déloyale au détriment des concessionnaires et constructeurs qui n'ont aucun intérêt à agir; que la position du Tribunal revient à interdire toute publicité par les concluants, mesure constitutive d'une restriction à la libre circulation des marchandises interdite par l'article 30 du Traité; que les publicités des concluants sont d'autant moins critiquables qu'elles font, dans leur quasi totalité, mention de leur qualité de "prestataires de services-mandataires 123-85";

- que le Tribunal tente de soulever une contradiction entre les mentions figurant dans les publicités sans dire en quoi elles seraient contradictoires ou mensongères;

- que le Tribunal ne pouvait pas davantage considérer que les publicités effectuées étaient constitutives de publicités comparatives illicites au sens des articles L. 121-8 et suivants du Code de la Consommation au motif qu'elles instaurent des comparaisons de prix, alors que les biens ne sont pas identiques et que les conditions de commercialisation sont différentes; que cette argumentation est condamnée dans un arrêt du 16 juin 1992 de la Cour de Justice des Communautés Européennes et revient à interdire aux concluants toute publicité comparative dont le principe reste licite; qu'au surplus la comparaison des prix se fait par référence aux seuls tarifs du constructeur qui ne sont qu'une simple référence pour l'ensemble des opérateurs économiques et qui sont largement diffusés par VAG France ; que cette comparaison licite ne relève d'ailleurs pas de l'article L. 121-8 du Code de la Consommation mais de l'arrêté n° 77-105/P du 2 septembre 1977 relative à la publicité des prix dont l'article 3 autorise l'annonceur à utiliser comme prix de référence le prix conseillé par le fabricant ou l'importateur du produit;

- que la SA Volksvagen France ne rapporte pas davantage la preuve d'un quelconque préjudice personnel et direct, comme l'a constaté le Tribunal sans en tirer la conclusion ;

- à titre reconventionnel, que l'action de la société Volksvagen a été manifestement engagée et maintenue avec une légèreté blâmable, ce qui justifie la demande en paiement de dommages et intérêts.

La société Groupe Volkswagen France SA demande de :

Dire et juger que l'appel de la société Autohaus Import et Partners à l'encontre du jugement rendu le 2 décembre 1997 par le Tribunal de Grande Instance de Metz est dénué de fondement;

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que Jean- Paul Rouppert, la SARL Espace Import International représentée par son liquidateur Jean-Paul Rouppert, la SA Autohaus Import et Partners ont commis des actes de concurrence déloyale à l'encontre de la société Groupe Volkswagen SA venant aux droits de la société VAG France;

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fait interdiction à la SA Autohaus Import et Partners de faire paraître des annonces publicitaires non conformes à l'article 44 de la loi du 27 décembre 1973, et aux articles L. 121-8 et L. 121-12 du Code de la Consommation sous astreinte de 5 000 F par infraction constatée.

Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a limité à 80 000 F la somme de dommages et intérêts alloués à la société Groupe Volkswagen France, en ce qu'il a limité l'astreinte à 5 000 F par infraction constatée, et en ce qu'il a rejeté les autres demandes de la société Groupe Volkswagen France.

En conséquence ;

Dire et juger que la société Espace Import International, la société Autohaus Import et Partners et Monsieur Rouppert se sont rendus coupables du délit de publicité trompeuse prévu et sanctionné par l'article 44 de la loi du 27 décembre 1973 et l'article 1er de la loi du 1er août 1905.

Dire et juger que la société Espace Import International, la société Autohaus Import et Partners et Monsieur Rouppert exercent une activité constitutive de concurrence déloyale par le biais de publicités trompeuses et par leur refus d'indiquer l'identité de leur source d'approvisionnement.

Dire et juger que la société Espace Import International, la société Autohaus Import et Partners et Monsieur Rouppert se sont rendus coupables d'une infraction aux dispositions de la Loi du 18 janvier 1992 relatives à la publicité comparative.

Ordonner à la société Espace Import International, la société Autohaus Import et Partners et Monsieur Rouppert de faire clairement apparaître notamment sur leurs publicités leur qualité de mandataire en caractères au moins aussi gros que son nom commercial ou son enseigne sans adjonction de signes distinctifs faisant croire abusivement qu'elle agit en qualité de revendeur, telles que "disponibilité rapide ou immédiate" ; "nos relations d'exclusivité avec nos concessionnaires", "nos volumes de vente" ... sous astreinte de 100 000 F par publicité effectuée en violation de cette interdiction.

Ordonner à la société Espace Import International, la société Autohaus Import et Partners et Monsieur Rouppert l'interdiction de faire paraître des publicités relatives aux véhicules des marques VAG, Volkswagen, Seat et Audi, sans indication apparente de leur qualité de mandataire, sous astreinte de 100 000 F par publicité effectuée en violation de cette interdiction.

Interdire à la société Espace Import International, la société Autohaus Import et Partners et Monsieur Rouppert de faire paraître des publicités comportant des indications laissant penser qu'ils agissent en qualité de revendeurs (disponibilité immédiate et rapide ou autres...) et/ou des publicités qui au contraire ne précisent pas que les prix indiqués correspondent à la meilleure estimation, et ce sous astreinte de 100 000 F par publicité effectuée en violation de cette interdiction.

Interdire à la société Espace Import International, la société Autohaus Import et Partners et Monsieur Rouppert de faire paraître des publicités laissant penser qu'ils font partie du réseau Volkswagen Audi, telles que les publicités comportant la mention "Nos relations d'exclusivité avec nos concessionnaires", sous astreinte de 100 000 F par publicité effectuée en violation de cette interdiction.

Interdire à la société Espace Import International, la société Autohaus Import et Partners et Monsieur Rouppert de faire paraître des publicités instaurant une comparaison avec les véhicules de marque VAG, Audi, Seat ou Volkswagen distribués tout à fait régulièrement par le réseau de concessionnaires de VAG France (comparaison de prix, ...), et ce sous astreinte de 100 000 F par véhicule vendu en violation de cette interdiction.

Condamner la société Autohaus Import et Partners solidairement avec la société Espace Import International et Monsieur Rouppert à payer à la société Groupe Volkswagen France SA venant aux droits de la société VAG France la somme de 736 331,40 F à titre de dommages-intérêts pour les publicités réalisées en infraction des dispositions en vigueur et du préjudice subi par la société Groupe Volkswagen France SA.

Ordonner la publication du présent jugement par extraits dans le Journal Le Républicain Lorrain et dans le magazine Auto Plus aux frais de la société Espace Import International, la société Autohaus Import et Partners et Monsieur Rouppert, sans que le montant des insertions effectuées ne puisse cependant dépasser la somme de 250 000 F.

Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir nonobstant appel et sans caution.

Condamner la société Espace Import International, la société Autohaus Import et Partners et Monsieur Rouppert à payer à la société Groupe Volkswagen France SA venant aux droits de la société VAG France la somme de 30 000 F HT au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Condamner la société Espace Import International, la société Autohaus Import et Partners et Monsieur Rouppert en tous les dépens.

La société intimée fait valoir :

- que l'action de la concluante ne tend pas à interdire aux défendeurs l'exercice de leur activité et les importations parallèles mais porte sur l'exercice de cette activité qui doit être conforme aux principes du droit français relatifs à la concurrence déloyale, à la publicité trompeuse et à la publicité comparative;

- qu'or les publicités de la société Espace Import International n'indiquent pas en quelle qualité, mandataire ou négociant, elle agit, ou portent des mentions contradictoires qui créent une confusion dans l'esprit du consommateur; qu'elles sont trompeuses au sens de l'article 44 de la loi du 27 décembre 1973;

- que par ailleurs certaines publicités comportent des allégations fausses portant sur le millésime et la disponibilité du véhicule ; que l'infraction de concurrence déloyale est en outre confortée par le fait que les défendeurs ont refusé de révéler l'identité de leur source d'approvisionnement, alors que la licéité de principe de l'activité des importateurs parallèles n'exclut pas la nécessité de se procurer licitement les véhicules neufs revendus pour que leur activité soit validée; que le refus de révéler l'identité de leur source d'approvisionnement permet de faire présumer le caractère déloyal de leur activité;

- que les publicités litigieuses qui instaurent également une comparaison entre les véhicules vendus et ceux qui sont offerts par le constructeur concerné ne sont pas conformes aux dispositions de la loi n° 92-60 du 18 janvier 1992 sur la publicité comparative; qu'en effet il est incontestable que les véhicules vendus par la société Autohaus ne sont ni identiques aux modèles du constructeur ni vendus dans les mêmes conditions; qu'en outre cette dernière ne donne aucune information sur la référence du tarif, base de la comparaison, ni sur la durée pendant laquelle sont maintenus les prix mentionnés;

- que la loi du 18 janvier 1992 sur la publicité comparative ne prévoit nullement comme condition de son application que la publicité vise des opérateurs concurrents; qu'en tout état de cause, les opérateurs indépendants sont des concurrents directs des concessionnaires locaux et par la même de la société Volkswagen qui exerce une activité commerciale de même nature; qu'enfin les producteurs ou importateurs tête de réseau sont recevables à agir pour protéger leur réseau contre les agissements des tiers; que le fait que les tarifs des constructeurs fassent l'objet de publications officielles ne dispense nullement la société Autohaus de respecter la législation précitée;

- qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que les défendeurs se rendent coupables à la fois du délit de publicité trompeuse, d'une activité de concurrence déloyale et d'une infraction aux dispositions de la loi sur la publicité comparative; que ces agissements doivent cesser sous astreinte avec réparation du préjudice subi à hauteur de 736 331,40 F (d'où l'appel incident de ce chef).

Par conclusions en réplique, Monsieur Rouppert, la société Espace Import International et la société Autohaus Import et Partners demandent de rejeter l'appel incident et ajoutent à leurs précédentes écritures:

- que les demandes de Volkswagen France SA sont irrecevables puisque le groupe de Volkswagen France SA, filiale à 100 % du constructeur, est une entreprise liée au sens du règlement CEE 123- 85 prolongé par le règlement CEE 1475-95 et n'est pas en position de concurrence avec le constructeur auquel est assimilé l'entreprise liée ;

- que le seul fait pour un revendeur hors réseau de s'approvisionner auprès d'un concessionnaire agréé ne constitue pas en soi un acte de concurrence déloyale à défaut de preuve que le revendeur ait, en connaissance de cause, aidé les concessionnaires à enfreindre leurs obligations contractuelles; que le Groupe Volkswagen n'apporte pas cette preuve;

- que la jurisprudence a désormais tranché sans ambiguïté la licéité des publicités se bornant à comparer les prix offerts par le commerçant indépendant vis-à-vis du tarif figurant dans le catalogue constructeur;

- que le commerçant indépendant n'a pas à faire de publicité distincte selon son intervention ni même à mentionner son activité de mandataire.

La société Groupe Volkswagen France SA réplique:

- que les opérateurs indépendants sont des concurrents directs des concessionnaires locaux et par la même de la concluante qui distribue les véhicules par l'intermédiaire de son réseau de concessionnaires; que les producteurs ou importateurs tête de réseau sont recevables à agir pour protéger leur réseau, que la demande est en conséquence recevable;

- que s'il est exact que l'on ne peut interdire l'activité des vendeurs hors réseau en s'appuyant directement sur le règlement n° 123-85, il n'en reste pas moins que l'activité du revendeur hors réseau est sanctionnée lorsque celui-ci refuse d'indiquer ses sources d'approvisionnement ou en cas de faute détachable de l'activité de revente (publicité trompeuse, publicité comparative non conforme à la loi, acte de concurrence déloyale) comme c'est le cas en l'espèce.

MOTIFS DE L'ARRÊT :

- Sur la recevabilité de la demande de la SA Groupe Volkswagen SA:

Attendu que les premiers juges ont relevé avec exactitude que la société demanderesse opère en tant que fournisseur et responsable de l'organisation du réseau de concessionnaires Volkswagen - Audi sur le même marché que les défendeurs et qu'elle a en conséquence intérêt et qualité à agir en concurrence déloyale contre les agissements de tiers qui mettraient en péril, son réseau ; que la demande est ainsi recevable;

- Sur le fond :

Attendu que la société Groupe Volkswagen SA, qui ne conteste ni la licéité de l'activité du mandataire, ni la portée du règlement 123- 85 régissant les seuls rapports concédants - concessionnaires ni le principe de la licéité des importations parallèles, doit, pour prospérer en son action fondée sur l'article 1382 du Code Civil, rapporter la preuve de la réalité des actes de concurrence déloyale qu'elle allègue découlant selon elle de publicités trompeuses et de publicités comparatives non conformes à la législation de droit interne;

* Sur les publicités trompeuses :

Attendu que la société demanderesse reproche tout d'abord aux appelants de ne pas indiquer dans leurs publicités en quelle qualité, mandataire ou revendeur, ils agissent ou d'indiquer leur qualité de mandataire en tous petits caractères d'imprimerie et qu'ainsi les publicités sont trompeuses au regard de l'article 44 de la loi du 27 décembre 1973. Mais attendu que les appelants peuvent exercer parallèlement l'activité de mandataire et l'activité de revente; qu'ils n'ont aucune obligation de faire des publicités distinctes en fonction de l'activité exercée; que le consommateur est nécessairement informé de la nature de la transaction puisqu'il signe soit un contrat de mandat soit un contrat de vente, ce qui évite toute confusion; qu'en conséquence les publicités litigieuses, qui au surplus mentionnent la qualité de mandataire CEE des défendeurs, ne sont pas des publicités trompeuses;

Attendu que la société Groupe Volkswagen SA soutient ensuite que les publicités comportent des allégations fausses sur le millésime des véhicules et sur leur disponibilité;

Or attendu, s'agissant du millésime, que le Tribunal a retenu une publicité parue dans une annonce Auto Plus du 17 août 1993 offrant à la vente une Audi 1994 alors qu'un constat d'huissier du 7 septembre 1993 établissait que le modèle en exposition était un millésime 1993; que cependant il ressort d'une attestation du Groupe Volkswagen France SA du 1er février 1994 produit aux débats que le véhicule litigieux portait bien le millésime 1994 ; que l'unique publicité contestée sur ce point n'est donc pas inexacte;

Que s'agissant de la disponibilité du véhicule, il apparaît que sur les 106 publicités versées aux débats émanant des seules sociétés Espace Import International ou Autohaus Import et Partners (celles émanant d'une société Espace Import à Yutz n'ayant aucun lien avec le litige), seules dix publicités mentionnent "disponible" et six mentionnent "disponible rapidement"; que s'il est exact que la société demanderesse établit qu'un véhicule Polo Fox CL Diesel 1993, indiqué comme disponible dans la publicité, ne l'était pas en réalité comme l'établit un constat d'huissier du 6 avril 1993, ce fait isolé ne constitue pas un acte de concurrence déloyale à l'égard du Groupe Volkswagen SA;

Attendu que, de même, la société Groupe Volkswagen SA ne peut prétendre interdire aux défendeurs de mentionner dans les publicités qu'ils ont des relations avec des fournisseurs privilégiés ou qu'ils disposent de stock puisque l'activité de revente est licite;

Attendu enfin que la société Groupe Volkswagen SA ne peut voir une infraction de concurrence déloyale dans le seul fait que les défendeurs ont refusé d'indiquer l'identité de leur source d'approvisionnement; qu'en effet si le refus laisse présumer le caractère déloyal de l'activité, force est de constater que la société demanderesse n'apporte pas la preuve que les défendeurs ont aidé, en connaissance de cause, les concessionnaires à enfreindre leurs obligations contractuelles;

* Sur la publicité comparative :

Attendu que la SA Groupe Volkswagen SA soutient que les défendeurs contreviennent aux dispositions de l'article L. 121-8 du Code de la Consommation en comparant leur prix à celui du catalogue du constructeur alors que les modèles des véhicules et les conditions de leur commercialisation ne sont pas identiques;

Mais attendu que dès lors que les défendeurs n'indiquent pas le prix des concessionnaires locaux qui sont concurrents mais celui du concédant, la publicité ne relève pas de l'article L. 121-8 qui exige une comparaison des prix pratiqués par des opérateurs économiques concurrents;

Attendu que la SA Groupe Volkswagen SA est en conséquence mal fondée en l'ensemble de ses demandes;

Qu'il s'ensuit que le jugement entrepris doit être infirmé en toutes ses dispositions;

Attendu que la société Autohaus Import et Partners ne démontre pas que l'action de l'importateur lui a causé un préjudice commercial et moral ;

Attendu que la procédure n'a pas revêtu de caractère abusif;

Attendu qu'il n'y a pas lieu d'ordonner la publication du présent arrêt;

Qu'en conséquence, la demande reconventionnelle doit être rejetée;

Attendu qu'il apparaît inéquitable de laisser à la charge des appelants la somme de 10 000 F au titre des frais irrépétibles exposés dans l'instance;

Attendu que la SA Groupe Volkswagen SA, succombant en l'instance, doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Par ces motifs : LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement ; Reçoit en la forme l'appel ; Le dit fondé ; Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ; Statuant à nouveau : Déboute la SA Groupe Volkswagen de l'ensemble de ses demandes ; Déboute la société Autohaus Import et Partners de sa demande reconventionnelle ; Condamne la SA Groupe Volkswagen aux dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'au paiement d'une somme de 10 000 F sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.