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Décisions

CA Toulouse, 2e ch. sect. 2, 30 avril 1998, n° 96-06362

TOULOUSE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

FTMS France (Sté)

Défendeur :

Adar (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Brignol

Conseillers :

MM. Cousteaux, Charras

Avoués :

Me de Lamy, SCP Nidecker Prieu

Avocats :

Mes Barbieri, Carmona.

T. com. Toulouse, du 28 oct. 1996

28 octobre 1996

La société Adar distributeur, non exclusif de la société FTMS, a adressé à ses clients, en janvier 1995 une correspondance leur demandant d'expliquer leur mécontentement par rapport à la chute des prix du marché de la téléphonie.

La société FTMS considérant que ce courrier lui causait un préjudice grave, a adressé la société Adar une mise en demeure aux termes de laquelle elle chiffrait son préjudice et en demandait réparation.

Sans réponse de la société Adar, la société FTMS l'a assignée devant le Tribunal de Commerce de Toulouse en invoquant des actes de dénigrement constitutifs de concurrence déloyale et en demandant réparation de son préjudice estimé à 1 430 560 F ainsi que le paiement d'une créance de 61 389,40 F en principal.

Par jugement du 28 octobre 1996, la juridiction a estimé que la société Adar avait commis des actes de dénigrement vis-à-vis de son fournisseur et que ces sociétés n'étant pas concurrentes, il n'y avait pas d'agissements en concurrence déloyale. Ainsi la société FTMS a été déboutée de sa demande en dommages intérêts de 1 430 560 F.

Considérant ensuite que la société Adar était d'accord sur le principe du remboursement des primes perçues lors d'un nouvel abonnement dès qu'il y a résiliation et que FTMS justifiait par ses notes de crédit un solde de 61 389,40 F à rembourser par Adar sur ses contrats, alors que celle-ci ne rapportait pas la preuve d'avoir de ce remboursement, le tribunal a condamné la société Adar à payer à la société FTMS la somme de 61 389,40 F, avec les intérêts légaux à compter de l'assignation.

Enfin, le tribunal a considéré que FTMS n'apportait pas la preuve par des soldes de notes de crédit que la société Adar était redevable du remboursement des 69 abonnements résiliés à raison unitairement de 1 200 F selon le calcul avancé, et a débouté FTMS de cette demande.

La société FTMS obtenait 15 000 F au titre de l'article 700 du NCPC.

Le 2 décembre 1996, la société Adar a relevé appel de ce jugement tandis que FTMS usait le 26 décembre 1996 de la même voie de droit, de sorte que les deux instances étaient jointes par ordonnance du 26 mai 1997.

La société Adar a conclu le 1er avril 1997 à la réformation au sujet des notes de crédit et des dispositions de l'article 700 du NCPC. Elle soutient que la preuve de la créance invoquée n'est pas rapportée et demande 10 000 F au titre de l'article 700 du NCPC.

Elle rappelle que les relations contractuelles prévoyaient un système de primes établi au profit de Adar pour chaque abonnement obtenu au bénéfice de FTMS et qu'un système complexe de remboursement d'une fraction de la prime prévoyait une restitution, à l'intimée dès lors que l'abonnement du client ne dépassait pas un certain délai.

Elle fait valoir que le contrat n'a, semble-t-il, jamais été transmis à la société Adar, ni jamais produit. En l'absence du contrat initial il lui apparaît que FTMS ne rapporte pas la preuve de la créance qu'elle invoque.

La société FTMS France, nouvelle dénomination de la société MDTF-Cellway, conclut le 15 avril 1997, sur l'appel relevé par Adar, à ce qu'il soit constaté que Adar reste débitrice de 61 389,40 F en principal. Sur l'appel qu'elle a formé, elle demande au visa de l'article 1382 du Code Civil et des courriers circulaires, qu'il soit jugé que Adar a commis des actes de dénigrement constitutifs de concurrence déloyale au détriment de FTMS et constaté, éventuellement au moyen d'une expertise, que le préjudice direct subi par FTMS du fait de la société Adar s'élève à 1 430 560 F.

Elle demande en conséquence la condamnation de la société Adar au paiement de cette somme à titre de dommages intérêts, et au paiement de 15 000 F au titre de l'article 700 du NCPC.

Elle rappelle que les fondements contractuels ont toujours été approuvés par les parties.

Elle souligne la définition du dénigrement et précise que la concurrence déloyale peut être constituée même lorsqu'elle n'a pas été commise au préjudice de ses concurrents directs.

Selon elle l'acte de dénigrement a entraîné des résiliations d'abonnement et a porté atteinte à son usage de marque. Elle chiffre son préjudice au titre des résiliations ) : 69 abonnés x 120 F par mois x 42 mois = 347 760 F et au titre du remboursement des primes, a : 69 abonnés : 1 200 F / abonnement = 82 800 F.

Elle estime que son préjudice commercial est de 1 000 000 F, de sorte que son préjudice total s'élève à 1 4730 560 F.

Dans ses écritures déposées le 16 janvier 1998, la société Adar demande la confirmation sur la concurrence déloyale, outre 10 000 F au titre de l'article 700 du NCPC

Elle précise que postérieurement à la lettre de janvier 1995, les résiliations ont été inférieures à celles de 1994. Elle soutient avoir agi de bonne foi en ne cherchant pas un instant, par le biais de ce courrier, à présenter de nouveaux opérateurs en lieu et place de la société FTMS.

Il lui apparaît manifeste qu'il n'y a pas eu de concurrence déloyale et qu'il n'y a aucun préjudice pour FTMS.

Elle souligne que les calculs approximatifs émanent de la société FTMS et aboutissent à un chiffre de 1 347 760 F qui ne correspond à rien, de sorte qu'elle demande la confirmation de la décision qui a rejeté toute action fondée sur l'article 1386 du Code Civil, puisque le courrier n'a causé strictement aucun préjudice à la société FTMS.

Sur quoi,

1°) Sur le dénigrement allégué

Il paraît tout d'abord nécessaire de rappeler les termes essentiels du courrier adressé, en janvier 1995 par la société Adar à quelque uns de ses clients :

" Dans le courant de l'année 1993, 1994 vous avez fait l'acquisition d'une GSM auprès de notre magasin. Vous avez par la suite, manifesté votre mécontentement devant la chute des prix. En effet la double conjonction de deux facteurs qui sont l'état du marché et l'organisation de nos fournisseurs a entraîné une chute de prix en matière d'équipement GSM. Aujourd'hui afin qu'une telle mésaventure ne se reproduise pas, Fax Phone a décidé de faire entendre à nos fournisseurs le mécontentement de nos clients.

" Je vous remercie donc de bien vouloir m'adresser un courrier explicatif du préjudice que vous avez subi, afin que nous le répercutions auprès de nos fournisseurs... "

Comme le rappelle la société FTMS, le dénigrement consiste à jeter le discrédit sur un concurrent, en répondant à son propos, ou au sujet de ses produits ou services, des informations malveillantes.

En l'espèce, les deux parties n'étaient pas en rapport de concurrence, puisqu'au contraire la société FTMS était le fournisseur de la société Adar et c'est donc à juste titre que le tribunal a écarté la concurrence déloyale.

Il n'en reste pas moins que le courrier litigieux, destiné à des consommateurs profanes, en alternant les termes désignant le service GSM exploité entre autre par FTMS et l'équipement GSM (correspondant à la fourniture d'un matériel téléphonique) dans un style rédactionnel suggérant un rapport de cause à effet, ne pouvait que créer une confusion dans l'esprit des destinataires, signant ainsi un comportement volontairement déloyal. Cette déloyauté est d'autant plus établie que la société Adar n'a pas cru devoir produire " la manifestation du mécontentement " des destinataires, à laquelle pourtant la lettre du 31 janvier 1995 était censée répondre.

Si les deux sociétés n'étaient pas en concurrence il n'en reste pas moins qu'elles étaient en relation commerciale sur des fondements contractuels. Dès lors la lettre de janvier 1995 volontairement malveillante constitue un manquement à la loyauté contractuelle qui doit présider aux relations commerciales.

Ce comportement n'a pas manqué d'entraîner pour la société FTMS une atteinte à sa crédibilité commerciale et à son image lui créant ainsi un préjudice qui sera équitablement réparé par le versement d'une somme de 30 000 F.

2°) Sur les impayés dus par la société Adar,

La société Adar reconnaît sur ce point, que les relations contractuelles prévoyaient un système de primes établi au profit de la société Adar pour chaque abonnement obtenu au bénéfice de FTMS et qu'un système de remboursement, qu'elle qualifie de complexe, prévoyait une restitution à la société FTMS dès lors que l'abonnement du client ne dépassait pas un certain délai.

Or, ces mesures ont fait l'objet d'un document accepté par les deux parties, et tamponné par la société Adar, fixant le principe et les conditions de rémunération du distributeur. Surtout ainsi que le souligne FTMS, ce système n'a jamais été contesté par Adar avant le présent recours.

Ainsi c'est à juste titre que FTMS soutient que les fondements contractuels ont toujours été approuvés par les parties, la société Adar ayant à ce titre accepté par écrit l'ensemble des dispositions ainsi que les modes de rémunération.

Il apparaît en conséquence que FTMS demeure créancière de la société Adar d'une somme de 61 389,40 F en principal au titre du montant débiteur de ses notes de crédit, de sorte que le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Il convient en définitive de réformer pour partie le jugement déféré et de condamner aux dépens d'appel la société Adar qui versera en outre 5 000 F à FTMS au titre de l'article 700 du NCPC

Par ces motifs, LA COUR, Reçoit les appels jugés réguliers ; dit partiellement fondé l'appel de FTMS et infondé celui de la société Adar. Confirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société Adar à payer à FTMS la somme de 61 399,40 F avec les intérêts légaux à compter de l'assignation. Le réformant pour le surplus : Constate que la société Adar a manqué à son obligation de loyauté contractuelle. La condamne en conséquence à payer à la société FTMS, en réparation de son préjudice, la somme de 30 000 F à titre de dommages intérêts. Condamne la société Adar aux dépens d'appel avec distraction au profit de Me de Lamy, avoué, conformément à l'article 699 du NCPC La condamne en outre à verser à FTMS la somme de 5 000 F (cinq mille francs).