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Décisions

CA Paris, 4e ch. A, 8 avril 1998, n° 96-02441

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

JCB (SA)

Défendeur :

Central Parts (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Duvernier

Conseillers :

Mme Mandel, M. Lachacinski

Avoués :

SCP Fisselier Chiloux Boulay, SCP Mira Bettan

Avocats :

Mes Dingome, Deveau.

T. com. Paris, 1re ch., sect. A, du 11 d…

11 décembre 1995

Faits et procédure

La société JCB SA, importateur exclusif pour la France de matériels de travaux publics d'origine anglaise de la marque JCB, a constaté au mois de janvier 1987, que la société Central Parts créée par Monsieur Vairon, ancien salarié de son concessionnaire exclusif la société Somater, procède à des publicités utilisant la marque et le logo JCB sans autorisation de son titulaire.

Par acte du 28 novembre 1990, la société JCB SA a assigné la société Central Parts devant le tribunal de commerce de Paris afin d'obtenir, sur le fondement de la concurrence déloyale, outre les habituelles mesures de publication, sa condamnation à lui payer la somme de 894 000 F, sauf à parfaire, à titre de réparation de son préjudice, et celle de 30 000 F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par jugement avant dire droit du 25 mai 1992, le tribunal saisi a ordonné une mesure d'expertise destinée notamment à :

- vérifier la réalité des désordres allégués par la société JCB SA,

- déterminer :

* si les grossistes anglais en pièces détachées en particulier la société Interpart et la société Heritage Disposacs, ont offert à la société Central Parts des marchandises d'occasion et si les prix pratiqués correspondent à la marque de matériel, objet du litige,

* si la société Central Parts s'approvisionne par d'autres sources et à quelles conditions,

- vérifier si la société JCB SA est la seule concessionnaire en France de la société JC Bramfort Excavators Ltd et les liens financiers éventuels avec celle-ci,

- relever l'évolution des ventes de la société JCB SA, année par année depuis 1987, par catégorie en nombre et montant, ainsi que celle des pièces de rechange,

- effectuer le même relevé chez la société Central Parts,

- contrôler si les micro-fiches utilisées par la société Central Parts sont identiques à celles mises en service chez la société JCB, et en indiquer la provenance.

Par jugement du 11 décembre 1995, le tribunal statuant en ouverture de rapport déposé le 20 juillet 1993 a :

- débouté la société JCB SA de son action en concurrence déloyale formée contre la société Central Parts,

- déclaré partiellement bien fondée la demande de dommages et intérêts pour allégations diffamatoires et mensongères formée par la société Central Parts contre la société JCB SA,

- condamné la société JCB SA à payer à la société Central Parts la somme de 50 000 F à titre de dommages et intérêts,

- débouté la société Central Parts du surplus de sa demande,

- condamné la société JCB SA à payer à la société Central Parts la somme de 10 000 F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La société JCB SA appelante conclut à l'infirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions, soutient que la société Central Parts a commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire à son préjudice et qu'elle doit en conséquent être condamnée à lui payer, outre la somme de 50 000 F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure, la somme de 1 000 000 F à titre de dommages et intérêts.

Elle reproche à la société Central Parts d'avoir commis les actes suivants :

- reproduction illicite de sa publicité,

- utilisation de l'enseigne JCB sans autorisation,

- utilisation de la mention " Distributeur agréé " dans ses publicités faisant référence à la vente de pièces et de matériels JCB,

- suppression des plaques d'identification d'origine et altération des numéros sur les tracto-pelles.

La société Central Parts intimée soutient que la société JCB SA a commis des actes de dénigrement, d'entrave et de discrimination constitutifs de concurrence déloyale à son égard, et sollicite la condamnation de la société JCB SA à lui payer la somme de 500 000 F à titre de dommages et intérêts, celle de 50 000 F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Elle indique qu'elle exerce son activité commerciale en achetant en Angleterre et en revendant en France et à l'étranger du matériel de travaux publics de marque JCB en toute licéité, et conteste avoir commis :

- des détournements des investissements de la société JCB SA du fait de la reproduction par copie servile des photographies publicitaires de JCB SA,

- des actes de dénigrement en diffusant de la publicité dans laquelle elle informait sa clientèle du prix des pièces détachées JCB et des conditions de leur vente,

- des actes susceptibles d'entraîner une quelconque confusion dans l'esprit du public entre elle-même et la société JCB SA,

- des altérations des plaques signalétiques et des moteurs des engins qu'elle a vendus,

- des actes qui ont entraîné une quelconque obligation à la charge de la société JCB SA,

- des actes de débauchage fautif de deux anciens salariés des concessionnaires JCB,

- une utilisation illicite de micro-fiches JCB et d'une enseigne lumineuse représentant le logo de la marque JCB.

Elle prétend donc n'avoir eu aucun comportement parasitaire et soutient que la société JCB ne justifie pas avoir subi un préjudice certain direct et actuel susceptible d'être indemnisé.

Sur quoi, LA COUR

La société JCB SA indique être l'importateur exclusif en France des matériels de travaux publics et manutention fabriqués par la société anglaise JC Bramford Excavators Ltd qui a déposé le 24 février 1978 à l'Institut national de la propriété industrielle sous le n° 270481 la marque JCB n° 1042529 renouvelée le 25 novembre 1987 et enregistrée sous le n° 1437153 pour des produits ou services de la classe 7.

La société JCB SA soutient également avoir obtenu pour la France de la société JB Bamford Ltd la licence exclusive d'exploitation de la marque susvisée, et avoir fait enregistrer l'acte de concession daté du 20 février 1991 à l'Institut national de la propriété industrielle le 29 mai 1991 dans lequel notamment, la société anglaise autorisait la société concessionnaire à engager directement et personnellement en son nom toute action en contrefaçon à l'encontre de tout contrevenant aux droits attachés à la marque déposée JCB.

- Sur la procédure -

Considérant que la société Central Parts pour solliciter, soit la révocation de l'ordonnance de clôture, soit pour rejeter des débats les conclusions signifiées le 26 janvier 1998, reproche à la société JCB SA de n'avoir répondu à ses écritures du 18 octobre 1996 que tardivement le jour de la clôture initialement prévue.

Mais considérant que le report de la clôture de la procédure au 2 mars 1998 a permis à la société Central Parts de préparer sa défense et de conclure régulièrement si elle le jugeait opportun.

Que la société Central Parts doit par conséquent être déboutée de sa demande de révocation de clôture ou de rejet des conclusions.

Considérant que conformément à l'article 562 du Nouveau Code de Procédure Civile, l'appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément ou implicitement et de ceux qui en dépendent.

Que la société JCB qui reproche à la société Central Parts des actes de concurrence déloyale et parasitaire a expressément limité son appel à la reproduction illicite des publicités, à l'utilisation de l'enseigne JCB sans autorisation, à l'utilisation de la mention " Distributeur agréé " dans les publicités diffusées faisant référence à la vente de pièces et matériels JCB et à la suppression des plaques d'identification d'origine et à l'altération des numéros sur les tracto-pelles.

Que la cour n'est donc tenue de répondre qu'aux seuls chefs de jugement que lui soumet la société JCB, à l'exclusion de tous autres.

- Sur la reproduction des publicités par la société JCB -

Considérant que le litige opposant les parties concerne la publicité diffusée en couleurs au mois de mars 1990 du tracto-pelle JCB 3CX4 Turbo Maxtrac II référencé 3CX.T/0390 chez la société JCB SA qui a été selon celle-ci illégalement reproduite par la société Central Parts.

Considérant que la société Central Parts ne reprochant pas à la société JCB SA de ne pas avoir versé aux débats le contrat de licence exclusif d'exploitation de la marque JCB daté du 20 février 1991 que lui a concédé la société JC Bramford Ltd, il y a lieu de considérer ce fait comme acquis.

Considérant que la société JCB SA soutient toutefois qu'elle a qualité et intérêt pour agir contre la société Central Parts, que la publicité litigieuse est une reproduction illicite et à l'identique de la publicité anglaise JCB, et que les dispositions des articles L. 713-4 et L. 713-6 du code de la propriété intellectuelle invoquées par la société Central Parts sont en l'espèce inapplicables.

Que la société Central Parts rétorque que la société JCB SA n'a pas qualité et intérêt pour agir contre elle, que les publicités litigieuses ont été reproduites à partir de celles 9999/2151 datées du mois d'octobre 1989 fournies par son fournisseur anglais la société JCB Sales Limited, que leur utilisation n'engendre aucun risque de confusion dans l'esprit du public dans la mesure où les photographies ne reproduisent que la silhouette d'un tracto-pelle, à l'exclusion de la marque JCB qui a été volontairement masquée.

Considérant que les faits reprochés par la société JCB SA à la société Central Parts ont été commis au mois d'avril 1990, et donc à une date où les dispositions de la loi du 31 décembre 1964 étaient applicables.

Que celles contenues à l'article L. 716-5 du code de la propriété intellectuelle ne le sont donc pas aux faits de l'espèce.

Que si la société Central Parts peut valablement soutenir que la société JCB SA ne peut agir contre elle en contrefaçon de marque sur la base du contrat de licence exclusive de la marque JCB concédé par la société anglaise JCB qui non publié Registre national des Marques ne lui est pas opposable, elle ne peut en revanche pas la critiquer lorsqu'elle exerce son action sur le fondement de la concurrence déloyale.

Qu'en effet, la société JCB SA dispose sur ce fondement juridique d'un droit propre à agir contre une société qui offre des produits identiques aux siens et qui diffuse des publicités qui selon elle comportent des indications déloyales qui lui causent préjudice.

Considérant que la société JCB SA à qui incombe la charge de la preuve ne démontre cependant pas que la société Central Parts a commis une faute en éditant un dépliant publicitaire représentant un tracto-pelle sur lequel la marque JCB a été noircie et comportant les mentions : " Vous voulez faire un achat ou remplacer votre tracto-pelle JCB ... " dans la mesure où aucune disposition nationale ou communautaire n'interdit à la société intimée qui s'est procurée licitement le dépliant litigieux auprès d'une société anglaise de vendre en France les produits de la marque qu'elle avait régulièrement achetés en Angleterre.

Que la société Central Parts ne saurait cependant invoquer l'application des dispositions contenues à l'article 713-6 b) du code de la propriété intellectuelle (article 17 b de la loi du 4 juillet 1991), dans la mesure où comme ci-dessus indiqué, la société JCB fonde son action, non pas sur le droit des marques, mais sur celui de la concurrence déloyale.

- Sur l'utilisation de la mention " distributeur agréé " -

Considérant que la société JCB SA reproche à la société Central Parts d'avoir diffusé des publicités le 15 juin et le 15 septembre 1991 dans lesquelles cette dernière faisait mention qu'elle était distributeur agréé à proximité des mentions " toutes pièces pour JCB ".

Considérant que la société Central Parts réplique que la mention qui lui est reprochée ne s'applique pas aux produits JCB, mais uniquement aux équipements Intertractor, Ardennes Equipements, et NPK.

Considérant la mention " distributeur agréé " ne saurait certainement pas concerner les produits JCB, puisqu'elle figure écrite en lettres de couleur marron en haut et à gauche des dépliants publicitaires pour désigner les équipements des trois marques susvisées, et sur la couverture du bimensuel La Centrale du Matériel pour s'appliquer à Intertractor pour certains départements déterminés.

Que son emplacement et sa disposition dans un cartouche isolé par deux traits horizontaux et verticaux et situé à l'opposé des mentions " Toutes pièces pour JCB " écrites en jaune ne permet pas à la société JCB SA de faire accroire que la société Central Parts est un distributeur agréé de la marque JCB et qu'elle a cherché à créer une confusion dans l'esprit du public qui ne peut se méprendre sur la qualité exacte de revendeur indépendant qu'à la société Central Parts.

Considérant au surplus que la publicité diffusée par la société intimée à la page 38 du numéro 146 de la revue La Centrale du Matériel datée du 1er juillet 1991 mentionne au contraire clairement : " Central Parts, bien connu dans le monde de la distribution de pièces détachées pour JCB, sans toutefois appartenir au réseau officiel, a décidé de compléter ses services en s'épaulant des partenaires suivants : Ardennes Equipements..., Intertractor... et NPK... ".

Que les griefs de concurrence déloyale pour ces faits seront donc rejetés.

- Utilisation de l'enseigne JCB sans autorisation -

Considérant que la société JCB SA reproche à la société Central Parts d'avoir, sans son autorisation, utilisé l'enseigne de couleur blanche et rouge JCB, monogramme qui a fait l'objet d'un dépôt de marque le 24 février 1978, et dont l'usage lui a été attribué en application de la licence exclusive de marque datée du 22 février 1991.

Qu'elle produit un constat d'huissier du 20 janvier 1992 duquel il résulte que la société Central Parts utilise au premier niveau du bâtiment qu'elle occupe 65 Levée de la Chevauchée à St Jean Le Blanc un panneau lumineux avec liseré portant les lettres JCB de couleur rouge de taille décroissante, la lettre J étant plus haute que la lettre C qui elle-même est plus haute que la lettre B.

Que la société Central Parts répond que cette enseigne qui ne s'est jamais trouvée à l'extérieur de son magasin a été achetée chez un brocanteur, tandis que le panneau lumineux, comme l'a constaté l'huissier dans son procès-verbal du 9 mars 1992, est apposé à l'intérieur du bâtiment au dessus du comptoir à un emplacement où il n'est pas visible de l'extérieur et où il ne peut avoir pour effet d'attirer la clientèle.

Considérant que l'enseigne est destinée à distinguer un établissement commercial afin de la singulariser et d'éviter tout risque de confusion avec un autre.

Considérant que l'utilisation sans autorisation du sigle JCB à titre d'enseigne par la société Central Parts dans un établissement commercial ouvert au public constitue pour la société JCB SA un acte de concurrence déloyale.

Qu'en effet, employé dans le cadre d'activités commerciales identiques se rapportant aux matériels de travaux publics, l'enseigne JCB apposée par la société Central Parts, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de ses locaux, révèle de sa part la volonté de créer une confusion dans l'esprit du public et de profiter de la notoriété de l'appellation pour attirer la clientèle qui est susceptible de croire que la société Central Parts est un distributeur officiel de la marque JCB, ce qu'elle n'est pas.

- Sur la suppression des plaques d'identification d'origine et l'altération des numéros -

Considérant que la société JCB SA, sur le fondement des articles L. 217-2 et L. 217-3 du code de la consommation, reproche à la société Central Parts d'avoir sur les tracto-pelles que celle-ci a vendus, soit systématiquement arraché les plaques d'origine rivetées, soit grossièrement falsifié les numéros gravés, rendant ainsi impossible de faire bénéficier les acquéreurs de la garantie et des modifications ou rappels éventuels de matériels nécessaires pour la protection de la sécurité des utilisateurs.

Considérant que la société Central Parts répond que le déplacement des plaques a été réalisé avec l'accord des clients afin d'éviter les vols, que le changement d'un numéro de série ne modifie en rien la valeur et la qualité du matériel vendu, et que la garantie légale et la maintenance des engins de travaux publics est directement assurée par elle et non par la société JCB SA.

Considérant que le procès-verbal d'huissier du 17 septembre 1993 révèle que le tracto-pelle JCB neuf 3CX 4RM T vendu par la société Central Parts à la société UFB Locabail le 17 septembre 1993 ne comporte pas de plaque d'immatriculation d'origine et porte sur le longeron du châssis la référence 3CX4-410890 au lieu de 410390.

Que celui vendu par la même société à la société UFB Locabail le 8 septembre 1993 ne comporte plus les plaques d'origine sur le bloc moteur, sur la barres d'essieu avant gauche et arrière droit, sur la face arrière du bloc boîte de vitesse qui ont été arrachées, et que la référence 3CX-4/411468 gravée dans le métal été remplacée par celle 3CX-4/411488.

Considérant que la société Central Parts produit pour démontrer qu'elle ne connaissait pas les altérations qui lui sont reprochées les factures d'achats de ces matériels émis par la société anglaise Heritage Disposals le 13 et 2 septembre 1993 qui mentionnent que les numéros de série ont respectivement 410890 et 411488.

Considérant que le procès-verbal d'huissier du 25 novembre 1994 a constaté que sur le tracto-pelle n° 3CX4/414895 acheté à la société Central Parts par la commune de Guidel, la plaque d'identification originellement rivetée sur le châssis chargeur a été déplacée derrière le pare-soleil de la cabine et que les chiffres gravés sur le longeron châssis avant droit ont été altérés et détériorés à l'aide d'une meule, puis repeints.

Que la société intimée soutient que la plaque d'identification a été déplacée afin d'éviter les vols, mais ne fournit aucune explication sur le meulage des numéros figurant sur le longeron.

Considérant que contrairement à ce que soutient la société JCB SA, la directive n° 89-392 CEE du 14 juin 1989 ne s'applique pas à la présente espèce dans la mesure où son article 3 exclut de son champ d'application les machines mobiles et les engins de levage que sont les tracto-pelles.

Considérant qu'outre le fait que les dispositions du code de la consommation interdisent de supprimer, masquer, altérer ou modifier frauduleusement de façon quelconque les numéros de série et les signes de toute nature destinés à identifier les marchandises qui sciemment mises en vente exposent les contrevenants à des sanctions pénales, la société Central Parts a également commis des actes de concurrence déloyale envers la société JCB SA, importateur exclusif en France des produits de la marque JCB, en commercialisant des marchandises identiques aux siennes qui ont eu l'un de leurs éléments essentiels gravement altérés du fait de la suppression ou du déplacement des plaques d'identification, ou du meulage des numéros de série.

Que ces procédés doivent également être considérés comme déloyaux dans la mesure où ils faussent les règles de la concurrence puisqu'ils contraignent en vertu du règlement CEE n° 1983-83 du 22 juin 1983, la société JCB SA distributeur exclusif pour la France, d'assurer le service à la clientèle et la garantie aux acquéreurs de tracto-pelles vendus par la société Central Parts, alors que ces produits possèdent un défaut d'identification qui n'est pas imputable au concessionnaire et qui rendent difficile l'application des règles communautaires.

Que la garantie accordée par la société Central Parts à ses acquéreurs n'a pas comme elle le prétend pour conséquence de supprimer l'obligation légale qui pèse sur la société JCB SA.

Que la société Central Parts en sa qualité de professionnel ne pouvait également pas méconnaître les dispositions légales susvisées, ne pas se rendre compte des anomalies affectant les numéros d'identification qui ont été supprimés, déplacés ou meulés sur les tracto-pelles et reporter sur la société anglaise la responsabilité de ces faits, alors qu'il lui appartenait en sa qualité de société importatrice de vérifier la conformité des marchandises livrées par la société exportatrice avec les documents délivrés.

Que le jugement qui a condamné la société JCB SA à payer une somme de 50 000 F à la société Central Parts parce qu'elle aurait injustement accusé celle-ci d'avoir altéré ou falsifié des plaques d'identification, faits qui ont été démontrés et dont elle est responsable, sera par conséquent réformé.

- Sur les faits de concurrence déloyale imputés à la société JCB SA par la société Central Parts -

Considérant que celle-ci soutient en invoquant des actes de dénigrement, de discrimination et de concurrence déloyale que la société JCB SA exerce des pressions sur ses clients afin qu'ils ne lui achètent plus de matériels de marque JCB et sur ses fournisseurs anglais pour qu'ils ne lui livrent pas ces mêmes produits.

Considérant que la société JCB SA conteste les faits qui lui sont reprochés par la société Central Parts et soutient que les actions qu'elle a dirigées contre celle-ci sont essentiellement destinées à faire cesser les actes fautifs et déloyaux qu'elle a commis et certainement pas à l'empêcher d'effectuer des importations parallèles.

Considérant que la société JCB SA ayant partiellement vu son action en concurrence déloyale reconnue fondée, la société Central Parts en l'absence de preuve rapportée de l'existence des faits qu'elle impute à la société intimée devra être déboutée de sa demande.

Qu'en effet, le refus émis par les sociétés anglaises d'approvisionner la société Central Parts en tracto-pelles JCB trouve son origine dans les seuls actes de concurrence déloyale que la société JCB SA lui reproche.

Qu'au surplus, elle ne démontre pas que hormis les sociétés Heritage Disposals, Berkeley et Wattling, les autres sociétés anglaises auprès desquelles elle s'approvisionnait comme le révèle l'expertise ordonnée par jugement du 25 mai 1992, refusaient de lui vendre du matériel de la marque JCB.

Sur le préjudice

Considérant que la société JCB SA indique que les actes parasitaires de la société Central Parts constitutifs de faute lucrative doivent être réparés par le montant de l'enrichissement du parasite, et que selon les chiffres d'affaires réalisés de 1990 à 1992 par la vente de matériels et pièces de marque JCB, tel que relevé par l'expertise judiciaire, elle est en droit de réclamer la somme de 1 000 000 F à titre de dommages et intérêts.

Considérant que le rapport d'expertise mentionne que le chiffre d'affaires de la société Central Parts provenant de la vente de tracto-pelle a été en milliers de francs de 6 707 F en 1990, de 4 059 F en 1991, et de 4 264 F en 1991, tandis que celui des pièces détachées a été de 7 429 F en 1990, de 8 552 F en 1991 et de 10 248 F en 1992.

Mais considérant que l'évolution du chiffre d'affaires susvisée de la société Central Parts est sans incidence sur les fautes qui lui sont imputées et qui justifient une réparation destinée à compenser le préjudice qu'elle a effectivement subi.

Que la cour évalue le préjudice subi par la société JCB SA à la somme de 300 000 F.

Considérant qu'il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la société JCB SA la totalité des frais qu'elle a dû engager, tant en première instance qu'en cause d'appel, et qu'il convient de compenser à hauteur de la somme de 25 000 F.

Que la solution donnée au présent litige commande de rejeter, tant la demande formée par la société Central Parts sur le même fondement juridique que celle de publication du présent arrêt.

Par ces motifs : Infirme le jugement rendu le 11 décembre 1995 par le tribunal de commerce de Paris, Et statuant à nouveau, Dit que la société Central Parts a commis des actes de concurrence déloyale envers la société JCB SA en utilisant l'enseigne JCB sans son autorisation et en supprimant les plaques d'identification d'origine, en altérant les numéros de série sur les tracto-pelles qu'elle vendait, Condamne la société Central Parts à payer à la société JCB SA la somme de 300 000 F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, Rejette toute demande autre, contraire ou plus ample des parties, Condamne la société Central Parts aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction pour ces derniers au profit de la SCP d'avoués Fisselier, Chiloux et Boulay dans les conditions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.