CA Grenoble, 1re ch. civ., 10 mars 1998, n° 96-1187
GRENOBLE
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Hairline (SARL)
Défendeur :
Formaholt (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Berger
Conseillers :
Mmes Manier, Brenot
Avoués :
SCP Perret, Pougnand, SELARL Dauphin, Neyret
Avocat :
Me Grattard.
Les faits
Par convention de franchisage des 1er août 1989, 5 mai 1990, 5 février 1991, la Société Formaholt a accordé à la Société Hairline le droit d'exploiter essentiellement les marques " Jack Holt " et " Jack Holt Quick Service " dans 3 salons de coiffure établis à Bourgoin-Jallieu, la Tour du Pin et la Verpillière.
Les contrats ont été rompus le 1er janvier 1992.
Cependant, au vu de procès-verbaux d'huissier de justice dressés le 30 mars 1992 dans ces 3 établissements, il est apparu que la Société Hairline continuait d'exploiter les marques, dessins et modèles appartenant à la Société Formaholt. Le 17 juin 1992, celle-ci a mis en demeure la Société Hairline de cesser ces actes de contrefaçon et concurrence déloyale.
La procédure
Le 22 janvier 1993, la Société Formaholt a assigné la Société Hairline devant le Tribunal de Grande Instance de Bourgoin-Jallieu en contrefaçons et concurrence déloyale et en paiement, à titre principal, de la somme de 500 000 F à titre de dommages-intérêts.
Par jugement rendu le 20 décembre 1995, le Tribunal a condamné la société Hairline, dans le délai d'un mois à compter de la signification de la décision et sous astreinte de 10 000 F par jour de retard, à modifier la devanture et l'aménagement intérieur de son salon de coiffure et à payer à la Société Formaholt la somme de 250 000 F à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice, a ordonné l'exécution provisoire de sa décision, a condamné la Société Hairline à verser à la Société Formaholt la somme de 3 000 F en application de l'article 700 et a sursis à statuer sur l'action relative à la violation de la clause de non-concurrence.
Les prétentions des parties en appel et la motivation de la Cour
Sur le sursis à statuer :
La Société Hairline estime juridiquement illogique sa condamnation du chef de concurrence déloyale et le sursis à statuer ordonné sur l'application de l'article 6 des contrats de franchise relatif à la clause de non-concurrence.
Par jugement rendu le 13 avril 1995, le Tribunal de Commerce de Lyon n'a pas prononcé la nullité du contrat de franchise et a condamné la Société Hairline à payer à la Société Formaholt la somme de 150 090,46 F.
La procédure est pendante devant la Cour d'appel de Lyon saisie par la Société Hairline.
Mais la Société Formaholt fait justement valoir que les faits de contrefaçon et de concurrence déloyale imputés à la Société Hairline sont distincts des faits découlant de l'exécution des contrats de franchise. En d'autres termes, l'annulation éventuelle de ceux-ci n'a aucune incidence sur les faits commis par la Société Hairline postérieurement à la rupture (abusive ou non de la part de cette dernière) desdits contrats.
La Cour, en conséquence, déboute la Société Hairline de sa demande en sursis à statuer relative aux faits de la concurrence déloyale.
Sur les faits de concurrence déloyale :
La Société Hairline admet que la rupture du contrat de franchise impose au franchisé de restituer l'enseigne, le matériel publicitaire et les documents fournis par le franchiseur, mais elle soutient qu'elle a apporté des modifications évitant tout risque de confusion ou de concurrence parasitaire et qu'ainsi, alors qu'un seul procès-verbal dressé à la Tour du Pin a établi que le sigle " Quick Service " restait visible par l'effet de la poussière laissée sur le mur, elle a respecté les dispositions contractuelles de l'article 18 des contrats relatives à la non concurrence et n'a commis aucun fait de concurrence déloyale.
Mais la Société Formaholt estime, à juste titre, au vu des constatations des huissiers de justice, que les devantures et aménagements intérieurs des 3 magasins étaient restés identiques à ceux des anciens salons " Jack Holt " sous réserve de petits détails concernant la couleur des encadrements de vitrine et de coiffure, que les façades des magasins de la Tour du Pin et de la Verpillière laissaient apparaître, par les traces laissées, les inscriptions " Quick Services " et " Jack Holt ".
Par ailleurs, un procès-verbal dressé par un huissier de justice, le 22 juillet 1996 à la Verpillière, a permis de constater l'utilisation de la coiffure protégée auprès de l'INPI par son inscription à titre de dessins et modèles.
Sur le préjudice de la Société Formaholt :
Celle-ci réclame la somme globale de 600 000 F.
La Cour estime à la somme de 300 000 F le préjudice subi par la Société Formaholt en conséquence des faits de concurrence déloyale commis par la Société Hairline.
Sur l'application de l'article 700 :
La Société Formaholt sollicite 30 000 F. La Cour lui accord 8 000 F.
Par ces motifs : LA COUR, Statuant publiquement par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi, Déboute la Société Hairline de son appel, Confirme le jugement sur la modification des magasins de la Société Hairline sur l'astreinte, sur l'application de l'article 700 et sur le principe de la condamnation de la Société Hairline mais fixe celle-ci à la somme de 300 000 F (trois cent mille francs), Condamne la Société Hairline à payer à la Société Formaholt la somme de 8 000 F (huit mille francs) en application de l'article 700, Condamne la Société Hairline aux dépens, Dit que la SCP d'Avoués Perret et Pougnand pourra recouvrer directement les dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision.