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Décisions

Cass. com., 10 février 1998, n° 96-11.281

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Givry automobiles (SARL)

Défendeur :

Conseil national des professions de l'automobile, Sodirac (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Huglo

Avocat général :

M. Raynaud

Avocats :

SCP Lesourd, Me Thouin-Palat.

T. com. Chalon-sur-saône, du 25 juill. 1…

25 juillet 1994

LA COUR : - Constate le désistement de la société Hadrzynski de son pourvoi n° 96-12.980 ; - Joint les pourvois n° 96-11.281 et n° 96-12.980 qui attaquent le même arrêt ; - Sur les premier et second moyens du pourvoi n° 96-12.980, réunis : - Attendu, selon l'arrêt déféré (Dijon, 30 novembre 1995), que le Conseil national des professions de l'automobile et vingt-quatre concessionnaires de diverses marques automobiles pour le département de la Saône-et-Loire ont assigné la société Givry automobiles pour qu'il lui soit fait interdiction de revendre des véhicules neufs, ainsi qu'aux fins de condamnation à des dommages-intérêts pour publicité mensongère et concurrence déloyale ;

Attendu que le Conseil national des professions de l'automobile et les concessionnaires reprochent à l'arrêt d'avoir rejeté leur action en concurrence déloyale fondée sur la revente de véhicules neufs par la société Givry automobiles alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en achetant pour les revendre des véhicules neufs auprès de concessionnaires français ou étrangers tenus à une obligation de protection du réseau de distribution sous forme d'interdiction de revente de véhicules neufs à des professionnels hors réseau, la société Givry automobiles a participé en toute connaissance de cause à la violation par lesdits concessionnaires de leurs obligations contractuelles et a commis une faute civile qui, même en l'absence de tromperies ou de manœuvres frauduleuses de la part de l'acheteur pour dissimuler sa qualité de professionnel, suffisait à caractériser de sa part un acte de concurrence déloyale ; qu'ainsi la cour en décidant du contraire a violé par refus d'application les articles 1382 et 1383 du Code civil ; et alors, d'autre part, que constitue, au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil, un acte fautif de concurrence déloyale le fait pour un revendeur parallèle de s'adresser en toute connaissance de cause à un utilisateur final, tel qu'un loueur automobile, qui trompe la bonne foi du concessionnaire, du concédant ou de l'importateur en procédant à des acquisitions de véhicules neufs à des conditions préférentielles pour les céder audit revendeur sans les avoir utilisés ; qu'en l'espèce, la cour d'appel après avoir expressément constaté que la société à responsabilité limitée Givry automobiles avait acquis auprès " d'utilisateurs finaux " tel que le loueur Avis des véhicules neufs a cependant écarté l'existence d'un comportement fautif constitutif d'un acte de concurrence déloyale ; qu'en statuant ainsi, les juges d'appel n'ont pas tiré les conséquences de leurs propres constatations et violé les articles 1382 et 1383 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, que l'arrêt retient à bon droit que le Conseil national des professions de l'automobile et les concessionnaires soutiennent à tort que le règlement d'exemption n° 123-85 interdit l'activité de revendeur de véhicules neufs hors réseau;

Attendu, d'autre part, que l'arrêt retient à bon droit que l'acquisition de véhicules par la société Givry automobiles auprès des loueurs professionnels ne peut être considérée comme fautive dans le mesure où elle n'est accompagnée d'aucune tromperie ou manœuvre frauduleuse et qu'aucune interdiction de revente n'est stipulée à la charge des loueurs professionnels ; que les premier et second moyens du pourvoi n° 96-12.980 ne sont pas fondés ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi n° 96-11.281, pris en sa première branche : - Vu l'article 1382 du Code civil ; - Attendu que, pour retenir à l'encontre de la société Givry automobiles des actes de concurrence déloyale, l'arrêt retient que la mention figurant dans trois factures " véhicule vendu avec une garantie de 12 mois constructeur " est mensongère ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'article 5-1 du règlement de la Commission n° 123-85, repris par le règlement n° 1475-95, subordonne l'exemption des accords de concession automobile à ce que le distributeur s'engage à assurer aux véhicules de sa marque et qui ont été vendus par une entreprise du réseau de distribution dans le marché commun sa garantie et alors que l'arrêt constate que les véhicules revendus par la société Givry automobiles ont été acquis régulièrement auprès de concessionnaires français ou étrangers, de succursales des constructeurs, de grossistes agréés par ceux-ci, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour de Cassation peut, en cassant sans renvoi, mettre fin au litige en appliquant la règle de droit appropriée ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen : casse et annule, mais seulement en ce qu'il a dit que la société Givry automobiles avait commis des actes de concurrence déloyale en promettant dans trois factures la garantie du constructeur, lui a fait interdiction de promettre à ses clients dans toute publicité ou document contractuel la garantie du constructeur et l'a condamnée à payer à chacun des concessionnaires et au CNPA la somme de 1 franc à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 30 novembre 1995 entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; dit n'y avoir lieu à renvoi ; rejette la demande du CNPA et des concessionnaires intimés en concurrence déloyale fondée sur la mention relative à la garantie du constructeur figurant sur les factures de la société Givry automobiles.