Livv
Décisions

CA Nîmes, 1re ch., 15 décembre 1997, n° 97-2127

NÎMES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Midi façade (SA)

Défendeur :

Quettelard

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bruzy

Conseillers :

M. Favre, M. Testud

Avoués :

SCP Tardieu, SCP Fontaine-Macaluso-Jullien

Avocats :

Mes Maury, Chabannes.

TGI Ales, du 5 mars 1997

5 mars 1997

Faits, procédure, prétentions des Parties :

Sur l'assignagion en date du 8 Mars 1996 de la Société Anonyme Midi Façade qui se plaignait de ce que Monsieur Héric Quettelard usait illicitement du nom commercial de Midi Façade GARD alors que la marque semi-figurative Midi Façade avait été antérieurement déposée et de ce que, profitant de la confusion née dans l'esprit des clients et fournisseurs des deux entreprises, il lui faisait ainsi une concurrence déloyale, le Tribunal de Grande Instance d'Ales, par jugement contradictoire en date du 5 Mars 1997 auquel il est y a lieu de se référer pour un exposé complet des faits, de la procédure antérieure et des prétentions des parties, a débouté la SA Midi Façade de ses demandes et l'a condamnée à payer à Monsieur Héric Quettelard la somme de 5.000 Frs par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La SA Midi Façade a régulièrement relevé appel de ce jugement et conclut à sa réformation en soutenant :

- que les conditions prévues par l'article L. 713-2 du Code de la Propriété Intellectuelle étaient bien remplies en l'espèce, le Tribunal ayant à tort estimé que la marque était essentiellement figurative et déduit qu'il n'y avait pas reproduction, alors que, elle avait obtenu l'enregistrement d'une marque composée de l'association d'un élément nominatif "Midi Façades" et d'un élément figuratif constitué par un dessin de deux immeubles représentant la lettre M avec un soleil en arrière plan, le tout complété par la description de chacun de ces éléments : lettres noires pour l'élément nominatif et logo noir, soleil orange dégradé jaune pour l'élément figuratif ;

- que le dépôt de marque protège la marque dans son ensemble et chaque élément caractéristique de cette marque ;

- que chaque élément de la marque, qu'il soit nominatif ou figuratif, doit bénéficier d'une protection isolée dès lors qu'il présente en lui même un caractère distinctif, l'élément nominatif de la marque en question, constitué par une association de mots qui n'a de surcroît rien de générique, répondant bien à cette exigence ;

- subsidiairement, que l'article L. 713-3 du Code de la Propriété Industrielle doit s'appliquer dès lors que le risque de confusion par les clients est évident, phonétiquement et visuellement s'agissant de l'élément nominatif, puisqu'elle intervient dans le GARD où elle bénéficie d'une importante notoriété ;

- que la démonstration de la faute de Monsieur Quettelard et du préjudice qui en résulte pour elle, aurait dû amener le Tribunal à accueillir son action en concurrence déloyale ;

Elle demande en conséquence :

- qu'il soit interdit à Monsieur Quettelard d'utiliser le nom commercial Midi Façade sous astreinte ;

- d'ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans un journal périodique

- de condamner Monsieur Quettelard à lui verser la somme de 100.000 Frs à titre de dommages intérêts représentant son manque à gagner et la perte subie outre la somme de 100.000 Frs à titre de dommages et intérêts pour concurrence déloyale et celle de 10.000 Frs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile outre les dépens.

Monsieur Heric Quettelard conclut en réponse à la confirmation du jugement entrepris en soutenant pour l'essentiel ;

- que la marque déposée est une marque figurative comme le démontrent les termes mêmes du dépôt et que ce n'est pas la dénomination Midi Façade qui est protégée en elle même mais l'expression figurative de l'ensemble ;

- que l'absence de confusion est évidente compte tenu de ce que leurs champs d'intervention concernent pour la SA Midi Façade l'Hérault et pour Midi Façade GARD, ce dernier département, de ce que la nature de leurs prestations est également différente : la mise en œuvre de peinture sur de grands bâtiments ou ensembles par la SA Midi Façade, la mise en œuvre de mono-couches par l'intermédiaire d'une machine appropriée, exprimant la spécialité de l'entreprise, sur des bâtiments de petite et moyenne importance, complémentairement sur certains chantiers avec des entreprises de peinture de façade ;

- qu'il devient alors superfétatoire de viser ou non le caractère banal ou en tout cas non singulier du vocable Midi Façade pour un façadier exerçant son activité dans le Midi de la France ;

- qu'enfin, sur l'action en concurrence déloyale, le nom commercial Midi Façade. n'était pas disponible pour avoir fait l'objet en 1978 par Baille d'une marque déposée antérieurement à celle que l'appelante invoque ;

Il demande en conséquence :

- de confirmer le jugement querellé ;

Si mieux n'aime à la Cour :

- de le réformer en ce qu'il a dit la marque Midi Façade protégée ;

- de dire infondée l'action en contrefaçon et en concurrence déloyale ;

En toute hypothèse,

- de condamner la SA Midi Façade pour son action morosive et en tout cas non conforme à une réalité professionnelle, à lui payer la somme de 100.000 Frs à titre de dommages-intérêts et celle de 20.000 Frs hors taxes par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile outre les dépens ;

Motifs :

La SA Midi Façade qui a son siège social à Montpellier a déposé le 1er Octobre 1992 à l'INPI la marque ainsi figurée et décrite sur le certificat d'enregistrement :

971215IMAG.JPG

Marque déposée en couleurs.

Description de la marque : Lettres noires, logo noir, soleil orange dégradé jaune. La marque est constituée par la représentation de deux immeubles formant la lettre "M" avec un soleil en arrière plan.

La marque ainsi déposée est une marque complexe associant un élément figuratif et un élémént nominatif. Il est fait grief à Monsieur Héric Quettelard, qui est inscrit au registre des métiers et exerce son activité de façadier par la mise en œuvre d'enduits mono-couches par projection, sous l'enseigne Midi Façades Gard d'avoir contrefait l'élément nominatif de la marque déposée en usant de la seule dénomination Midi Façade au motif que chaque élément d'une marque complexe peut faire l'objet d'une protection isolée.

Mais cet élément ne peut être protégé isolément que s'il présente en lui même un caractère distinctif.

En l'espèce la dénomination Midi Façade pour désigner une entreprise de rénovation de façade qui indique exercer ses activités sur plusieurs départements du Midi de la France ne présente aucun caractère distinctif protégeable dans ce type d'activité. L'intimé fait observer d'ailleurs avec pertinence et le démontre par les pièces produites qu'il existe sous la même dénomination une entreprise " Midi Façades " à Chateaurenard et à Rognonas (département des Bouches du Rhône) et que le 14 Novembre 1978 un nommé Baille avait déjà déposé au Greffe du Tribunal de Commerce de Montpellier la marque Midi Façade associée avec un élément figuratif constitué par la représentation d'une façade qui se décolle, ce qui témoigne de ce que la seule dénomination Midi Façade pour une entreprise de rénovation de façades dans un département du Sud de la France ne présente isolément aucun caractère distinctif protégeable, seule son association avec un élément figuratif distinctif étant susceptible de constituer une marque figurative protégée.

Il est subsidiairement fait grief à Monsieur Héric Quettelard d'avoir imité illicitement la marque protégée en usant du nom commercial Midi Façade Gard susceptible d'entraîner une confusion phonétique et visuelle dans l'esprit des clients d'une entreprise ayant des activités similaires et la SA Midi Façade produit une attestation en ce sens et un courrier de l'un de ses clients qui avaient confondu et pensé que Midi Façade GARD n'était qu'un établissement de la SA Midi Façade.

Mais ces deux seuls éléments ne peuvent suffire pour démontrer qu'il existe nécessairement une possibilité de confusion entre cette société et Midi Façade Gard. Les attestations produites par Monsieur Quettelard, qui émanent de plusieurs de ses anciens clients démontrent à l'inverse que ces derniers ont eu recours à lui, sans confusion sur la dénomination de son entreprise, pour faire exécuter des enduits de façade.

La SA Midi Façade produit par ailleurs divers marchés de travaux réalisés dans le département du Gard de 1992 à 1996 mais l'on observe qu'ils concernent la rénovation d'ensembles immobiliers en copropriété et sont sans commune mesure avec les travaux réalisés par Monsieur Quettelard, inscrit au registre des métiers, qui intervient essentiellement sur des maisons individuelles.

La SA Midi Façade ne démontre pas par ailleurs que depuis que Monsieur Quettelard exerce son activité sous le nom commercial Midi Façade Gard elle a perdu un client ou un chantier par l'effet d'une confusion avec sa dénomination et que son activité qu'elle indique importante dans notamment la rénovation d'ensembles en copropriété a diminué de son fait par suite d'une confusion qu'il aurait entretenue.

Le préjudice dont elle demande réparation pour ce qu'elle qualifie de concurrence déloyale n'est d'ailleurs fixé que forfaitairement dans ses écritures sans aucun élément comptable permettant d'en vérifier la réalité.

Son appel est donc en voie de rejet.

En relevant appel du jugement querellé la SA Midi Façade n'a fait qu'exercer, sans en abuser, de son droit d'agir en justice. La demande de Monsieur Quettelard de condamnation à des domages intérêts n'est pas fondée.

Mais il serait contraire à l'équité qu'il conserve à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'il a dû exposer mais sa prétention sera modérée.

L'appelante qui sucocmbe supportera les entiers dépens.

Par ces motifs : La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ; En la forme reçoit l'appel ; Au fond, Confirme le jugement entrepris ; Y ajoutant, Condamne la SA Midi Façade à payer à Monsieur Héric Quettelard la somme de 10.000 Frs par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; La condamne aux entiers dépens.