Livv
Décisions

Cass. com., 8 juillet 1997, n° 94-20.701

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Kickers distribution (Sté)

Défendeur :

Syndicat des commerçants détaillants en chaussures de Montpellier

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Vigneron

Avocat général :

M. Mourier

Avocats :

SCP Delaporte, Briard, Me Blanc.

T. com. Montpellier, du 16 mars 1993

16 mars 1993

LA COUR : - Sur le premier moyen : - Attendu que la société Kickers distribution fait grief à l'arrêt attaqué (Montpellier, 22 septembre 1994), d'avoir rejeté la fin de non-recevoir qu'elle avait soulevée devant les juges du second degré, tirée du défaut de qualité à agir du "Syndicat des commerçants détaillants en chaussures de Montpellier" alors, selon le pourvoi, que les fins de non-recevoir doivent être accueillies sans que celui qui les invoque ait à justifier d'un grief; qu'en écartant la fin de non-recevoir soulevée par la société Kickers distribution, faute pour celle-ci de justifier d'un grief, après avoir expressément relevé que l'action avait été initialement engagée par le "Syndicat des commerçants détaillants en chaussures de Montpellier et sa région" qui ne justifiait d'aucune existence, aucun syndicat répondant à cette dénomination n'ayant déposé ses statuts en mairie, la cour d'appel a violé l'article 124 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la qualité pour agir en justice, s'attache à la personne en tant que sujet de droit, quelle que soit son identité; qu'ayant retenu que la société Kickers, pour soutenir que le syndicat n'avait pas qualité pour agir, faute d'existence légale, se fondait en réalité sur le seul fait que le nom du syndicat, tel qu'il apparaissait sur les pièces de la procédure, n'était pas celui qui était régulièrement déposé, et ayant relevé en outre que cette partie avait indiqué l'adresse de son siège social et l'identité de son représentant légal, de sorte qu'aucune ambiguïté ne demeurait quant à sa personne, c'est à bon droit que la cour d'appel a déclaré recevable l'action engagée par le syndicat; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches : - Attendu que la société Kickers distribution fait encore grief à l'arrêt, de l'avoir condamnée à payer au syndicat une somme de 100 000 francs à titre de dommages-intérêts alors, selon le pourvoi, d'une part, que les soldes soumis à autorisation sont constitués par des ventes au détail, à caractère occasionnel, précédées de publicité et annoncées comme tendant à l'écoulement accéléré d'un stock prédéterminé et non-renouvelable de marchandises que ce soit pendant, mais aussi au-delà de la période de vente considérée; qu'en décidant que l'opération de vente litigieuse, réalisée du 20 au 30 mai, soit sept semaines avant le début de la période de soldes d'été, constituait une vente avec soldes, sans constater qu'aucun réapprovisionnement en marchandises identiques n'avait été effectué postérieurement au 31 mai, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article premier de la loi du 30 décembre 1906 et des articles 1, 2, 5 et 6 du décret du 26 novembre 1962 et alors, d'autre part, que le juge ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations; qu'en déduisant l'existence d'une vente avec soldes de ce que l'opération litigieuse avait été précédée d'une publicité, annonçant que les rabais seraient pratiqués "dans la limite de stocks disponibles", sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur le sens de cette mention, la cour d'appel a violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, d'une part, qu'en relevant que la publicité litigieuse mentionnait que l'opération était faite dans la limite des stocks disponibles, ce dont elle a déduit que la vente avait pour but de liquider, de façon accélérée, un stock de marchandises déterminées, en dehors de toute perspective de réapprovisionnement pendant cette période, la cour d'appel a justifié sa décision au regard des articles visés au moyen ;

Attendu, d'autre part, qu'en retenant l'existence de cette mention, qui figurait dans la publicité objet des débats, quand bien même les parties ne l'auraient pas spécialement invoquée au soutien de leurs prétentions, la cour d'appel n'a fait qu'user des pouvoirs qu'elle tient de l'article 7 du nouveau Code de procédure civile ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;

Et sur le troisième moyen : - Attendu que la société Kickers fait enfin grief à l'arrêt, d'avoir ainsi statué, alors, selon le pourvoi, que le propre de la responsabilité est de rétablir, aussi exactement que possible, l'équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable n'avait pas eu lieu; qu'en décidant, par motifs adoptés, que les dommages-intérêts dus par la société Kickers distribution devaient, à titre dissuasif, être fixés à la somme de 100 000 F, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu que l'arrêt relève que cette vente, réalisée en infraction aux règles et aux usages, est un acte de concurrence déloyale qui préjudicie à ceux qui, exerçant la même activité, respectent les dispositions réglementaireset qu'elle porte donc atteinte à l'intérêt collectif de la profession représentée par le syndicat;qu'en allouant à ce dernier une indemnité de 100 000 F, la cour d'appel n'a fait qu'user du pouvoir souverain dont elle dispose quant à l'appréciation de l'étendue du préjudice et des modalités de sa réparation intégrale; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs, rejette le pourvoi.