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Décisions

CA Versailles, 14e ch., 20 octobre 1993, n° 3481-93

VERSAILLES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Reckitt & Colman France (Sté)

Défendeur :

Nicols France (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Gabet-Sabatier

Conseillers :

M. Ribeton, Mme Simonnot

Avoués :

Me Bommart, SCP Gas

Avocats :

Mes Monegier du Sorbier, Lamoureux

T. com. Versailles, 4e ch., du 2 févr. 1…

2 février 1993

LA COUR :

FAITS ET PROCÉDURE

La Société Reckitt et Colman diffuse sur le marché français des désodorisants à usage ménager qu'elle fabrique et commercialise sous différentes marques et notamment sous la marque Air Wick ; Depuis 1952, elle commercialise des désodorisants ménagers équipés d'un dispositif évaporateur et a constaté, en 1992, la présence dans les linéaires de produis ménagers, de produits désodorisants diffusés sous les marques Hyodair et Freshair présentant des caractéristiques, selon elle, proches des produits Air Wick ;

Dès le 23 juin 1992, la Société Reckitt et Colman a mis en demeure la Société Nicols qui commercialise les marques Hyodair et Freshair d'avoir à modifier la présentation de ses produits ;

La Société Nicols s'est déclarée prête à modifier la présentation de ses bouchons ainsi que les couleurs utilisées ;

Estimant que ces quelques modifications ne supprimaient pas les risques réels de confusion, la Société Reckitt et Colman a fait assigner à jour fixe, la Société Nicols devant le Tribunal de Commerce de Versailles afin de faire reconnaître et sanctionner la concurrence déloyale dont elle s'estime être la victime ;

Par jugement contradictoire en date du 2 février 1993 la juridiction saisie a débouté la Société Reckitt et Colman de ses demandes, estimant qu'il n'y avait aucune concurrence déloyale et a également débouté la Société Nicols en sa demande reconventionnelle, formée sur le même fondement de l'utilisation par la Société Reckitt et Colman d'un bouchon diffuseur, du produit désodorisant en cause, reprenant exactement un dispositif par elle conçu et mis sur le marché antérieurement ;

La Société Reckitt et Colman a interjeté appel de cette décision et a sollicité et obtenu, par ordonnance de Monsieur le délégataire de Monsieur le Premier président en date du 31 mars 1993, l'autorisation d'assigner la Société Nicols suivant la procédure à jour fixe ;

L'appelante prie la Cour d'infirmer la décision déférée et, statuant à nouveau, de :

- faire interdiction à la société Nicols de fabriquer, commercialiser ou faire quelque usage que ce soit des produits litigieux sous astreinte de 15 000 F par infraction constatée,

- ordonner la saisie et la destruction des produits Hyodair et Freshair en la possession de la Société Nicols,

- ordonner la publication de la décision à intervenir dans dix journaux de son choix et aux frais de la Société Nicols,

- condamner la Société Nicols au paiement de la somme de 500 000 F à titre de dommages-intérêts et au paiement de la somme de 30 00 F au titre des frais irrépétibles ;

La Société Nicols, en réplique conclut au débouté de l'appel de la Société Reckitt et Colman et formant appel incident prie la Cour d'infirmer la jugement déféré en ce qu'il a rejeté sa demande reconventionnelle et demande à la Cour, faisant droit à sa demande, de :

- dire que la Société Reckitt et Colman s'est rendue coupable de fait de concurrence déloyale à son égard,

- condamner la Société Reckitt et Colman à lui payer la somme de 150 000 F à titre de dommages intérêts,

- lui interdire, sous astreinte définitive de 5 000 F par infraction constatée, la vente des flacons désodorisants portant le bouchon porte-mèche,

- condamner la Société Reckitt et Colman à lui payer la somme de 100 000 F pour procédure abusive,

- ordonner la publication du présent arrêt dans cinq journaux choisis par elle, avec insertion au frais de la Société Reckitt et Colman dans la limite de 20 000 F HT l'insertion,

- lui allouer la somme de 50 000 F au titre des frais irrépétibles ;

Discussion et motifs de la décision

- Sur l'action principale en concurrence déloyale de la Société Reckitt et Colman

Considérant que la Société Reckitt et Colman estime que la faute de la Société Nicols caractéristique d'un comportement de concurrence déloyale est en l'espèce caractérisée par deux types d'agissements, d'une part une recherche de confusion et d'autre part une attitude de parasitisme ;

1 - SUR LA RECHERCHE DE CONFUSION -

Considérant que l'appelante fait grief aux premiers juges de n'avoir retenu que les différences entre les deux gammes de produits et non leurs similitudes pourtant plus importantes ;

Considérant qu'il convient de rappeler que les deux sociétés offrent à la vente des produits désodorisants ménagers dits de " longue durée " présentés sous la forme liquide, en flacons et dont la diffusion dans l'atmosphère est réalisée à l'aide d'une mèche immergée dans le liquide et que l'utilisateur retire du flacon lors de son utilisation ;

Considérant que l'appelante estime qu'il y a concurrence déloyale par confusion dans la mesure où il existe des ressemblances tellement grandes entre les deux produits que le consommateur est amené à ne pas percevoir la différence et la spécificité de chacun des produits ;

Elle reproche notamment à la Société Nicols six aspects de la présentation des produits, sources de confusion ;

Considérant qu'avant de procéder à l'examen de chacun des chefs de confusion allégué, il convient de souligner qu'aucun des produits ne bénéficie d'une protection spécifique au titre des marques ;

- la présentation du bouchon ;

Considérant que la Société Reckitt et Colman reproche à la Société Nicols de fermer son produit par un bouchon blanc identique ou presque à celui qu'elle utilise ; que cette ressemblance est si évidente que sur mise en demeure, la Société Nicols a modifié la couleur de son bouchon et y a supprimé des rainures qui figuraient également sur les bouchons des produits Reckitt et Colman ;

Considérant que l'appelante réplique que la forme ronde donnée au bouchon comme sa couleur blanche ne relèvent d'aucune originalité et ne sauraient concourir à la création d'une confusion dans l'esprit du public ;

Considérant que les premiers juges ont relevé que nombre de produits d'entretien sont ainsi fermés sans qu'il n'y ait aucune concurrence déloyale ;

Considérant qu'à l'évidence le mode de fermeture d'un flacon se présente le plus simplement et le plus fréquemment sous la forme d'un bouchon rond, que la couleur blanche est la plus banale et la plus neutre qui soit même si, en matière de produits ménagers, elle peut évoquer la propreté et qu'enfin les rainures tracées sur lesdits bouchons rendent seulement plus facile la prise en main sans marquer ledit bouchon d'une originalité particulière ;

- la déclinaison des couleurs de la gamme -

Considérant que la Société Reckitt et Colman fait grief à la Société Nicols d'avoir repris exactement la déclinaison des couleurs de ses propres produits, couleurs qui ne sont pas indispensables à la vente du produit mais qui concourent à leur attractivité, que rien n'imposait à la Société Nicols de faire choix de couleurs identiques sinon pour s'inscrire dans le sillage de la gamme Air Wick, bien connue du public ;

Considérant que l'intimée rappelle que sous la marque Hyodair elle commercialise des désodorisants à la lavande, au pin et aux senteurs exotiques, que sous la marque Freshair elle commercialise des désodorisants à la lavande à la menthe, devenue pin, au citron et aux senteurs exotiques ;

Considérant qu'à juste titre les premiers juges ont relevé que les couleurs de la société Reckitt et Colman étaient plus vices et fluorescentes ;

Considérant qu'il n'existe de droit privatifs sur les bases des parfums et leurs dénominations génériques, tirées de la réalité et de l'observation des données naturelles ; que de très longues dates et dans toutes sortes de produits ménagers, certaines espèces végétales ont attiré les fabricants et les consommateurs par leur parfum et son évoquées par des couleurs caractéristiques de ces espèces : ainsi la lavande, violette, le citron jaune, le pin, vert ; que les produits exotiques plus récents sur le marché, sont souvent représentées par des couleurs rose-orange qui, elles aussi, évoquent la mangue, la goyave ou toutes autres essences exotiques ;

Qu'il n'y a rien là d'original et ce d'autant plus, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, que les couleurs de la Société Reckitt sont plus fortes par leur présentation fluorescente ;

Considérant que, certes, la Société Nicols s'en est tenue à une gamme sinon identique à tout le moins fort proche de celle diffusée par la Société appelante y ajoutant cependant le citron, mais qu'ainsi, qu'il a été dit plus haut ce choix est avant tout fait à partir des évocations de ces plantes par rapport à leur parfum et à ce qu'elles évoquent au niveau de la propreté ; qu'avant tous produits ménagers, les graines séchées des fleurs de lavande étaient placées dans les armoires à linge tout comme le citron était utilisé comme désinfectant ;

- la taille des flacons -

Considérant que les deux gammes de produits sont présentées en flacons de 275 ml ;

Considérant qu'il convient de rappeler que la contenance des flacons utilisés pour la diffusion des produits d'entretien est normalisée par arrêté, que certes les contenances de 250 ml ou de 500 ml sont possibles ; que rien n'interdit l'usage de flacons de même taille, d'autant que ce choix de taille correspond bien à un produit dit de longue durée mais qui ne se consomme pas en grande quantité par son usage, comme par exemple la lessive pour vaisselle ;

Considérant que dans un contexte de concurrence, il ne fait nul doute que des produits présentés en même quantité permettent plus facilement une comparaison des prix, ce qui en soit seul n'est pas déloyal ;

- la forme du flacon -

Considérant que l'appelante fait grief à la Société Nicols d'avoir fait le choix d'une forme donnant une prise à la main semblable à son propre emballage ;

Que cette affirmation n'est nullement vérifiée par la présentation des produits litigieux ;

Qu'en effet, le produit Air Wick est caractérisé par des formes arrondies et douces au toucher alors que le produit Nicols présente des arrêtes ; que certes, les deux flacons s'élargissent vers le bas mais cela est le résultat de leur fonction et facilite seulement la prise en main ce qui est un but évident pour un pareil flaconnage ;

Considérant que cet élément n'est pas déterminant d'une concurrence déloyale ;

- Sur le choix des marques -

Considérant que l'appelante souligne que les produits concurrents comme les siens, intègrent le mot Air dans leur marque, indiquent qu'il s'agit de produits de longue durée ;

Mais considérant qu'à juste titre, l'intimée soutient et les premiers juges affirment, que l'usage d'un terme du langage courant, permettant de caractériser un produit, ne peut constituer un comportement de concurrence déloyale ;

Considérant enfin que l'étiquetage des deux types de flaconnage ne suscite aucune confusion, les produits Air Wick comportant des dessins stylisés évoquant les parfums contenus, les produits Freshair, ne comportant aucun dessin, aucun signe illustrant le produit et les produits Hyodair illustrant la base du parfum par une fidèle reproduction de l'essence utilisée ;

Considérant que l'analyse ci-dessus des différents éléments invoqués par l'appelante comme susceptible de créer la confusion, démontre que sur chacun des points, il n'y a ni originalité ni copiage servil du produit concurrent, que chacun de ces éléments ne suffit pas à caractériser une véritable confusion dans l'esprit du public intéressé ;

Considérant que la Société Reckitt et Colman fait alors valoir qu'il n'en reste pas moins que la présentation générale des produits, les choix de couleurs, de parfums, faits par la société concurrente démontrent à l'évidence que si les produits ne peuvent être tenus pour absolument identiques, tout dans la démarche de la société Nichols démontre que cette dernière a voulu mettre sur le marché des produits qui sans être similaires, ressemblent pour l'ensemble, fortement à ceux qu'elle commercialise, et que cette attitude n'est pas neutre et constitue un acte de concurrence déloyale ;

Mais considérant, ainsi que cela a été relevé au fil de l'analyse ci-dessus, que nombre des choix faits par l'une et l'autre des sociétés, relève tantôt d'impératifs techniques, tel le bouchon rond, un flacon facilement appréhensible par la main, soit de la mise en valeur de caractéristiques évidentes liées au produit lui-même tels que le choix de senteurs qui évoquent la propreté et la couleur des produits qui est représentative desdits parfums couramment utilisés et primés en matière de produits d'entretien ;

Considérant qu'il est clair que la Société Nicols cherche à introduire sa gamme de produits sur un marché où était déjà implanté la société appelante, qu'elle a fait le choix d'une gamme proche par ses parfums de celle diffusée par la Société Reckitt et Colman à partir de ce qu'ils représentent dans le goût du public et l'évocation traditionnelle de ces parfums au regard de la notion de propreté, que toutefois, rien dans l'aspect général ni les traits particuliers des produits présentés, n'est de nature à créer la confusion dans l'esprit du public, qui d'un regard même rapide sur un linéaire des produits en cause, est à même de réaliser qu'il est en face d'un produit désodorisant mais présenté différemment et sous des marques distinctes ;

Considérant que la société appelante évoque encore le fait que la Société Nicols diffuse ses produits à des prix moindres, ce qui contribue au caractère déloyal de la concurrence ;

Mais considérant que la liberté des prix est la règle que la Société Nicols a pu sacrifier à la séduction par la présentation pour préférer une séduction de la clientèle par le prix ; ce qui ne constitue nullement une concurrence déloyale;

2 - SUR LE PARASITISME -

Considérant que l'appelante estime que la Société Nicols s'est rendue coupable de parasitisme en fabricant et commercialisant des produits reprenant les caractéristiques essentielles de ses propres produits et en faisant l'économie de ses frais d'études et de mise au point ainsi que de ses frais de lancement et d'accompagnements publicitaires ;

Considérant que les premiers juges ont estimé que pareil parasitisme n'était pas établi en l'espèce ;

Considérant qu'il ne peut s'agir présentement que d'une éventuelle concurrence parasitaire et non d'un agissement parasitaire au sens actuellement fixé pour ces deux notions, par le droit positif ;

Considérant qu'est considéré comme un agissement parasitaire le fait pour un agent économique de s'introduire sur un marché, avec ou sans risque de confusion, mais en utilisant une valeur économique d'autrui, fruit d'un investissement, en argent ou en travail;

Considérant qu'il n'est pas contestable que la société appelante est entrée sur le marché des produits litigieux depuis plusieurs décennies, qu'elle y représente une part très importante de ce marché ;

Mais considérant que la Société Nicols ne s'est pas limitée à fabriquer et diffuser un produit similaire, à tout le moins substituable, ce qui n'est pas interdit, mais a ajouté une amélioration d'importance au produit dans son mode et sa facilité d'utilisation; qu'en effet les produits de la gamme de la Société Nicols dès leur lancement, ont comporté une modalité d'utilisation originale, en ce sens que si dans l'une et l'autre des sociétés, le liquide parfumé est diffusé dans l'air à partir d'une mèche immergée, dans des produits de la société appelante, cette mèche devait jusqu'à une date récente, être sortie à la main par l'utilisateur, alors que dans les produits de la Société Nicols, l'utilisation est depuis l'origine rendue plus aisée par l'introduction d'un bouchon auquel la mèche solidarisée, ce qui permet d'extraire une partie de la mèche imbibée à l'aide du bouchon et assure un emploi plus aisé tant au niveau de l'ouverture initiale du produit que de sa conservation et de ses usages successifs ;

Considérant que la Société Nicols a ajouté à un produit devenu banal : un liquide désodorisant, un procédé d'utilisation jusque là non pratiqué ; que, pour ce faire, elle a dû procéder à des investissements et à des recherches techniques, alors que, ainsi qu'il a été dit plus haut, il est évident que, depuis longtemps, certaines essences, couleurs et parfums, sont particulièrement porteurs dans le domaine des produits ménagers ;

Considérant que la Société Reckitt et Colman soutient que, dès 1988, elle avait mené des études pour réaliser un bouchon solidaire avec la mèche, que, pour autant, elle n'établit nulle commercialisation antérieure à la Société Nicols et de ce fait ne peut contester les investissements et recherches également faites par cette dernière ;

Considérant ainsi que l'appelante n'établit pas le fait de concurrence parasitaire qu'elle invoque ;

Qu'ainsi elle doit être déboutée de son appel et que la décision déférée doit être confirmée dans ses dispositions relatives à la demande principale de la Société Reckitt ET Colman ;

- Sur l'appel incident de la Société Nicols en concurrence déloyale -

Considérant qu'en réplique, la Société Nicols fait grief à la Société Reckitt et Colman de s'être elle-même rendue coupable d'un comportement caractérisé de concurrence déloyale, en s'appropriant la technologie de la mèche intégrée au bouchon de fermeture ; qu'il s'agit là, selon elle, d'une concurrence parasitaire puisqu'aussi bien elle est l'inventeur de ce procédé qui a fait l'objet d'un brevet en Belgique avec demande de brevet français sous priorité du dépôt d'origine ;

Considérant en réplique que la Société Reckitt et Colman fait valoir que le bouchon litigieux n'est en France l'objet d'aucune protection au titre d'un brevet ;

Qu'elle fait encore valoir que techniquement les deux procédés utilisés pour parvenir à la solidarisation du bouchon et de la mèche sont différents, la Société Nicols utilisant une forme en étrier sur le haut du support de mèche alors qu'elle-même utilise une couronne moulée en haut du support de mèche ;

Considérant qu'elle fait encore valoir que ce procédé était à l'étude dans ses bureaux depuis 1988 sans que la Société Nicols puisse établir une quelconque antériorité ;

Considérant que si les deux bouchons actuellement poursuivent une finalité identique, à savoir permettre l'extraction de la mèche à l'aide du bouchon, la mise en œuvre technique de cette finalité diffère sans qu'au reste et surtout la Société Nicols établisse que la société concurrente se soit appropriée le fruit de ses recherches ;

Considérant qu'à bon droit les premiers juges ont également rejeté la demande reconventionnelle de la Société Nicols ;

- Sur les demandes formées au titre des frais irrepetibles -

Considérant que compte tenu de ce qui précède, il ne parait pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles exposés ;

Par ces motifs : La Cour, statuant publiquement et contradictoirement, Vu les articles 1382 et 1383 du Code Civil, Reçoit la Société Reckitt et Colman en son appel principal et la Société Nicols en son appel incident, Les déboute, Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré, Y ajoutant, Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, Condamne la Société Reckitt et Colman aux dépens et dit que la SCP GAS pourra recouvrer directement contre elle les frais exposés conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.