CA Montpellier, 1re ch. D, 10 juin 1993, n° 90-5519
MONTPELLIER
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Mutuelle des Motards, Fédération Française des Motards en Colère, Editions Le Pavé dans la Mare (SARL)
Défendeur :
Auvray Antivol (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Bezombes
Conseillers :
M. Berger, Mme Minini
Avoués :
SCP Salvignol-Guilhem, Me Auche-Hedou
Avocats :
SCP Chatel-Merlin, Me Kam.
La Fédération Française des Motards en Colère, association régie par la loi de 1901 a créé plusieurs structures destinées à répondre à ses objectifs, ainsi qu'aux besoins de ses adhérents et notamment une mutuelle d'assurance, la Mutuelle des Motards ainsi qu'un organe de presse " Les Editions de la FFMC ", chargé plus particulièrement de l'édition du journal " Le Pavé dans la Mare ".
Afin de lutter de façon plus efficace contre le vol des engins de ses sociétaires, elle a en outre créé en son sein une commission intitulée " Stop Vol ", chargée de tester les antivols existant sur le marché et de leur accorder ou de leur refuser un agrément qu'elle a qualifié elle-même de "sorte de label de qualité ".
La société Auvray Antivol considérant que la fédération avait à tort refusé d'agréer ses antivols U Force 10 l'a alors assignée ainsi que la Mutuelle des Motards devant le Tribunal de grande instance de Montpellier en paiement de dommages et intérêts.
En outre, considérant que la société de presse éditant le journal " Le Pavé dans la Mare " avait organisé une véritable campagne de dénigrement à l'encontre de ses produits, elle a également assigné cette société en paiement de dommages et intérêts.
Par jugement du 12 octobre 1990, le Tribunal de grande instance de Montpellier statuant par un seul et même jugement sur ses deux demandes :
- déclara fondée la demande de dommages et intérêts formée à l'encontre de la société de presse et condamna en conséquence les éditions de la Fédération Française des Motards en Colère " Le Pavé dans la Mare " à payer à la SARL Auvray la somme de 150 000 F à titre de dommages et intérêts et ce, avec le bénéfice de l'exécution provisoire,
- débouta la SARL Auvray Antivol des demandes additionnelles qu'elle avait formées du chef de pratiques anti-concurrentielles,
- déclara contraire à la loi du 10 janvier 1978 et constitutif d'une faute civile la délivrance ou le refus d'agrément institué par la Fédération Française des Motards en Colère et la Mutuelle des Motards et par voie de conséquence inopposables à la SARL Auvray Antivol les contrats ou cartes ayant pour objet la délivrance de cet agrément, condamna en conséquence ladite Fédération et la Mutuelle à réparer les conséquences dommageables pour la société Auvray Antivol du refus d'agrément pour l'année 1988 et ordonna une mesure d'expertise afin de lui permettre de chiffrer le préjudice subi.
Les éditions de la FFMC " Le Pavé dans la Mare ", l'association des Motards en colère, en abrégé FFMC et la Mutuelle des Motards ont relevé appel de cette décision.
Elles critiquent le jugement rendu et font ainsi valoir :
1) Sur la licéité de délivrer des agréments, que c'est à tort que le Tribunal a appliqué en la cause les dispositions de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 dans la mesure où en accordant ou refusant son agrément, elle n'entendait nullement délivrer des certificats de qualification au sens de la loi susvisée et où ce texte qui a été édicté dans l'intérêt des consommateurs ne saurait s'appliquer entre professionnels, étant précisé qu'en ce qui la concerne, elle est indépendante de tous les fabricants,
2) Sur la cause de l'engagement :
que le Tribunal n'a pas tiré toutes les conséquences de la nullité de la convention, de sorte que si la cour considérait que la commission n'avait pas le pouvoir de donner un agrément ou de délivrer un certificat de qualification, elle devrait débouter la société Auvray Antivol de ses prétentions pour illicéité de la cause de l'engagement,
3) Sur les relations entre la Mutuelle des Motards et la société Auvray Antivol, que les relations de la commission " Stop Vol " et la société Auvray Antivol sont des relations purement contractuelles dans la mesure où il existe un contrat aux termes duquel la société Auvray Antivol acceptait de se soumettre aux contrôles de la commission, engagement qui ne fut pas tenu en l'espèce et reproche ainsi au Tribunal d'avoir écarté sa demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts,
4) sur les pratiques anticoncurrentielles, que c'est en revanche à bon droit que le Tribunal a écarté l'application de l'ordonnance de 1986 dans la mesure où il n'est aucunement justifié qu'elle ait exercé une position dominante, les articles 7 et 8 de l'ordonnance précitée ne pouvant recevoir application étant donné que l'état de dépendance économique ne peut s'apprécier que dans les rapports fabricants-distributeurs,
5) Sur le pseudo-dénigrement :
a) que la loi applicable était la loi spécifique sur la presse avec courte prescription de 3 mois, de sorte que la demande devait être déclarée irrecevable et
b) que la société Auvray Antivol n'avait pas qualité pour agir dans la mesure où seul Monsieur Auvray était visé.
Elles concluent donc au débouté et à l'allocation d'une somme de 1 000 000 F à la Mutuelle des Motards et à la fédération à titre de dommages et intérêts et de 10 000 F au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La société Auvray Antivol, après un rappel des faits et de la procédure et notamment de l'ancienneté de ses relations avec la FFMC fait valoir quant à elle :
- sur l'application de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 que c'est à bon escient que le Tribunal a dit qu'il convenait d'appliquer ce texte et qu'il était de l'intérêt des consommateurs de voir réglementer comme le fait la loi la délivrance d'une certification,
- que les appelantes sont de mauvaise foi lorsqu'elles soutiennent que le fait que la convention n'ayant plus de valeur, elle ne saurait avoir le moindre effet et que la soumission des articles à la commission " Stop Vol " n'était qu'une simple faculté,
- sur les pratiques anticoncurrentielles, qu'il résulte des documents versés aux débats que la Mutuelle des Motards bénéficie d'une position prépondérante sur le marché des assurances motos, que dans les contrats conclus avec ses adhérents est systématiquement incluse une clause selon laquelle le risque vol ne sera couvert que sur justification de l'achat d'un antivol agréé FFMC, lequel est décerné par commission " Stop Vol ", émanation de la FFMC et de la mutuelle, et que d'introduction de cette charge est de nature à entraver la concurrence et à fausser le libre fonctionnement du marché dans la mesure où il supprime la liberté de choix de l'acquéreur et permet d'exploiter l'état de dépendance économique des fabricants qui n'ont d'autres solutions que d'obtenir l'agrément FFMC afin d'accéder à une part substantielle du marché.
- sur le dénigrement par voie de presse, que le Tribunal a parfaitement analysé les faits de la cause en précisant au surplus que s'agissant non pas d'une diffamation au sens de la loi, mais d'un dénigrement systématique, les faits n'étaient pas couverts par la prescription de 3 mois, étant précisé au demeurant que la prise à partie personnelle du gérant ne constituait que l'un des éléments retenus par le Tribunal et que les dommages intérêts accordés doivent être augmentés.
De ce fait elle sollicite l'allocation d'une provision de 1 000 000 F, outre l'allocation d'une somme de 1 500 000 F à titre de préjudice commercial et économique et de 500 000 F au titre de l'atteinte portée à sa réputation commerciale ainsi que celle de 50 000 F au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Par conclusions additionnelles et responsives, les appelantes ont sollicité à nouveau l'allocation d'une somme de 1 000 000 F à titre de dommages et intérêts et de 10 000 F par application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et précisé :
- que l'agrément délivré ne constituait pas un certificat de qualification dans la mesure où un tel certificat est descriptif des spécifications de certains produits et doit faire apparaître dans son mode de présentation, les caractéristiques du produit dont il atteste la réalité, s'agissant d'un étiquetage informatif, ce qui n'est pas le cas de " l'inscription valeur sûre ", homologuée par la Mutuelle des Motards laquelle n'est pas complétée par les caractéristiques spécifiques du produit, étant précisé que le certificat de qualification doit être matérialisé obligatoirement par le logo de la lettre A et l'hexagone et comporter l'étiquetage imposé par la loi,
- qu'au mépris de ses engagements contractuels la société Auvray Antivol avait continué à promouvoir ses produits au moyen d'un agrément qui lui avait été retiré, de sorte que la demande de dommages et intérêts qui avait été formée était justifiée,
- et subsidiairement au cas où la Cour considèrerait que le contrat conclu doit s'analyser au regard des dispositions de la loi Scrivener, que c'est à tort que le premier juge a placé le débat au niveau de la relation du consommateur (tierce partie) et a conclu que la mutuelle s'était rendue coupable d'une faute civile, fondement de l'action en responsabilité précédemment engagée, dès lors que dans le cas de l'inobservation de ladite loi, l'article 24 de la loi susvisée du 10 janvier 1978, punit également celui qui a utilisé un certificat non conforme et en a retiré de substantiels bénéfices.
Par conclusions ultérieures les parties ont argumenté sur la portée du jugement rendu le 13 décembre 1989 par le Tribunal de grande instance de Nanterre, décision aux termes de laquelle la société " Moto Journal " fut condamnée à payer des dommages et intérêts à la société Auvray Antivol, les appelantes prétendant que cette dernière ne pouvait demander 2 fois la réparation du même préjudice et la société Auvray Antivol prétendant qu'il s'agissait de procédures et de demandes totalement distinctes.
DISCUSSION :
Attendu qu'il est constant qu'au cours de l'année 1987, la commission " Stop Vol " émanation de la Fédération Française des Motards en Colère (en abrégé FFMC) a mis au point une procédure élaborée de tests des antivols moto, tests qui déterminaient l'obtention de l'agrément FFMC et de la Mutuelle des Motards ;
Attendu qu'il est non moins constant également que c'est à la suite du refus d'agrément de ses deux antivols U Force 10 que la société Auvray Antivol a engagé la présente instance ; qu'il conviendra donc d'examiner successivement les diverses demandes soumises au Tribunal en commençant par la demande de dommages et intérêts formée par la société Auvray Antivol, laquelle impose que soit appréciée au préalable la régularité de la procédure d'agrément susvisée et la portée de ce refus, pour examiner ensuite la demande de dommages et intérêts des appelantes, la question du dénigrement par voie de presse et enfin le problème d'abus de position dominante, les dernières écritures des parties imposant que soit préalablement tranché le problème de chose jugée posé par le jugement du Tribunal de grande instance de Nanterre ;
Sur la portée du jugement rendu le 13 décembre 1989 par le Tribunal de grande instance de Nanterre :
Attendu qu'aux termes de cette décision, la société " Editions techniques et Touristiques de France " a été condamnée à payer à la société Auvray Antivol la somme de 100 000 F à titre de dommages et intérêts et ce, uniquement pour atteinte à son image commerciale du fait d'un article paru dans la revue Moto Journal à l'époque à laquelle se tenait le salon de la Moto, étant précisé que seul le dénigrement de l'antivol Challenger fut considéré par cette juridiction comme injustifié, les critiques formées à l'encontre des antivols Force 10 et Leader n'étant pas considérées comme étant formulées en des termes péjoratifs et excessifs ;
Qu'il s'ensuit que le caractère totalement distinct de la réparation allouée à la société Auvray Antivol par cette juridiction est sans incidence au niveau de la présente instance ;
Sur la licéité de la procédure d'agrément instaurée par la FFMC et la Mutuelle des Motards :
Attendu qu'il convient de rappeler au préalable que dans un document daté du 8 décembre 1987, émanant de la FFMC, il était précisé que la mission de la commission " Stop Vol " était de " tester " les antivols existant sur le marché (ou au stade de prototypes) et de leur accorder ou de leur refuser un agrément, sorte de label de qualité reconnu par les motards et désormais les mutuelles d'assurances ;
Attendu que les appelantes prétendent que l'article 22 de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 afférent aux certificats de qualification n'était pas applicable, d'une part parce qu'elle n'entendait pas délivrer de tels certificats et que ceux-ci constituent un étiquetage informatif sur les caractéristiques du produit et devant comporter certaines indications, outre la marque A contenue dans un hexagone, ce qui n'était pas le cas et d'autre part parce que, édicté dans le seul intérêt des consommateurs il ne saurait régir les rapports entre professionnels ;
Attendu que la société intimée prétendait en revanche que la procédure instituée par la fédération et la mutuelle était nulle dans la mesure où contrairement aux dispositions de la loi précitée, l'organisme certificateur, en l'espèce la commission " Stop Vol " n'avait pas reçu l'agrément de l'autorité administrative pour procéder aux tests conformément aux prescriptions de l'article 22 ;
Attendu que le Tribunal a considéré quant à lui que l'article 22 de la loi 78-23 du 10 janvier 1978 qui stipule que " constitue un certificat de qualification, quelle que soit la dénomination qui lui est donnée, toute inscription tout signe distinctif, tout document ou titre joint tendant à attester, à des fins commerciales, qu'un produit industriel un produit agricole non alimentaire transformé ou un bien d'équipement commercialisé en France présente certaines caractéristiques spécifiques ayant fait l'objet d'un contrôle par un organisme, distinct du fabricant, de l'importateur ou du vendeur " s'appliquait en l'espèce en notant de surcroît que le but du fabricant en obtenant l'agrément était de l'apposer sur ses produits en escomptant le vendre plus facilement et que la fédération sans rejeter sa vocation associative recherchait quant à elle en contrôlant la délivrance de l'agrément et par le biais d'une clause insérée dans les contrats d'assurance de la mutuelle, à limiter les vols mais aussi les conséquences pécuniaires de ceux-ci ;
Attendu que l'article 22 de la loi susvisée a une portée générale et ne saurait être limitée aux rapports avec des non professionnels, si tant est en l'espèce qu'une association, telle que la FFMC puisse être qualifiée de " professionnel " ; qu'il s'ensuit que le moyen soulevé n'est pas fondé ;
Attendu ensuite que l'intention et le but poursuivi par la FFMC ne sont pas en la cause déterminants dans la mesure où il s'agissait au premier chef de rechercher si l'agrément litigieux constituait ou non un certificat de qualification au sens de la loi ; qu'il en est de même des explications afférentes aux sigles et mentions que doivent comporter les dits certificats, dans la mesure où la non-conformité de celles-ci ne faisait pas pour autant perdre sa nature juridique à l'inscription apposée ;
Qu'il convient donc de confirmer le jugement déféré, sur ce point ;
Qu'en effet, si le texte fut conçu pour protéger le consommateur des agissements des vendeurs et fabricants, il n'en demeure pas moins que du fait de sa formulation, il permet également de protéger les vendeurs ou fabricants des agissements d'associations de consommateurs qui peuvent dans un but certes louable, être amenées néanmoins à délivrer des certificats de ce type dans des conditions susceptibles d'être critiquées ;
Qu'il convient donc de déclarer l'appel non fondé sur ce point ;
Sur le fondement de la demande de réparation formulée par la société Auvray Antivol :
Attendu que celle-ci était fondée sur le refus d'agrément qui lui fut notifié en 1988 par la commission " Stop Vol " ;
Attendu que les premiers juges, après avoir considéré que l'activité de la fédération tendant à la délivrance d'agréments était contraire à la loi, ont considéré qu'elle était fautive et susceptible comme telle d'ouvrir droit à l'allocation de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil ;
Attendu que les appelantes prétendent que dans la mesure où la société Auvray Antivol a bénéficié quant à elle de ladite procédure d'agrément et utilisé à des fins commerciales ledit agrément, elle était également passible de poursuites sur le fondement des dispositions de l'article 24 de la loi, de sorte qu'en application de la règle " nemo auditur... ", elle n'était pas fondée à solliciter réparation de son propre dommage ;
Attendu qu'en l'espèce, il est constant d'une part que la société Auvray Antivol n'est pas un tiers par rapport à la procédure d'agrément institué par la commission " Stop Vol ", dont elle a bénéficié, à tout le moins dans sa formule antérieure à celle qui fut mise au point en 1987 et d'autre part, que la procédure d'agrément instituée précisément en 1987 était illicite dans la mesure où la commission " Stop Vol " n'était pas habilitée à délivrer des certificats de qualification ;
Qu'il s'ensuit que sous peine de faire revivre les conventions conclues, lesquelles ne pouvaient produire aucun effet, la société Auvray Antivol n'était pas fondée à solliciter une quelconque réparation au titre du refus d'agrément expressément mentionné par le premier juge dans le cadre de la mission qu'il a donnée à l'expert ; qu'il convient donc de réformer sur ce point le jugement déféré, étant précisé de surcroît que la participation de la société Auvray Antivol à la procédure susvisée, lui ôtait du fait du caractère illicite de cette dernière, la possibilité de demander réparation du dommage éventuellement subi ;
Sur la demande reconventionnelle des appelantes :
Attendu que la FFMC et la mutuelle ne sauraient davantage, obtenir de quelconques dommages et intérêts tenant au fait que, malgré le refus opposé, la société Auvray Antivol aurait continué à vendre des antivols portant la mention d'agrément par la FFMC .
Sur le dénigrement par voie de presse :
Attendu que la prescription de 3 mois invoquée par les appelantes ne concerne que les infractions prévues de façon limitative par la loi du 29 juillet 1881 (injures et diffamations) et non les simples faits de dénigrement relatifs à des produits ;
Qu'il s'ensuit que le moyen n'est pas fondé ;
Attendu que le défaut de qualité de la société Auvray Antivol pour solliciter réparation du préjudice subi, que dans la mesure où les produits incriminés à l'origine des articles en cause avaient été fabriqués par la société Auvray Antivol, cette dernière était bien fondée à solliciter réparation de son préjudice, quant même bien elle n'aurait été visée dans certains articles qu'à travers la personne de son gérant lequel du fait de ses fonctions constitue l'organe représentatif de la société ;
Qu'il s'ensuit que le moyen n'est pas davantage fondé ;
Attendu sur le fond, que c'est par des motifs pertinents que la Cour adopte que le Tribunal a considéré que les faits de dénigrement étaient établis et résultaient notamment du caractère tendancieux du premier article paru dans le Pavé dans la Mare et de l'appel au boycott général de la marque dans le numéro de novembre-décembre 1988 dudit journal ;
Qu'il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré les faits établis et condamné la société de presse à payer à ce titre à la société Auvray Antivol la somme de 150 000 F à titre de dommages et intérêts et ce, avec le bénéfice de l'exécution provisoire, le montant de ladite somme ayant été évalué à bon escient à ladite somme par le premier juge ;
Sur les pratiques anticoncurrentielles et l'abus de position dominante :
Attendu que le Tribunal tenant le fait qu'il ne disposait d'aucun élément chiffré lui permettant de savoir si la fédération détenait ou non en l'espèce une position dominante a, par des motifs pertinents que la Cour adopte, considéré que la preuve n'était pas rapportée d'une violation des articles 7 et 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986;
Qu'il convient donc de confirmer le jugement déféré, étant précisé au demeurant qu'en l'espèce, l'abus dénoncé trouvait en fait uniquement sa source dans les conventions conclues avec les fabricants, conventions dans le cadre desquelles était organisée la procédure d'agrément susvisée ;
Attendu enfin qu'au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, une somme de 15 000 F sera allouée à la société Auvray Antivol qui triomphe partiellement dans ses demandes à l'encontre des appelantes, l'équité ne commandant pas qu'une quelconque somme soit accordée à ces dernières ;
Attendu en outre qu'il sera fait masse des dépens de première instance et d'appel qui seront mis à la charge intégrale des sociétés appelantes dont les agissements sont à l'origine du présent litige ;
Par ces motifs : LA COUR : Déclare recevable et partiellement fondé l'appel principal et non fondé l'appel incident. En conséquence, confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit et jugé : que les éditions de la Fédération Française des Motards en Colère " Le Pavé dans la Mare ", SARL de presse, ont engagé leur responsabilité civile en appelant notamment à un boycott général de la marque Auvray Antivol dans le numéro novembre-décembre 1988, ainsi qu'en s'en prenant à la personne du gérant de la société Auvray Antivol dans son numéro de mai 1988, le tout constituant une atteinte fautive à l'image de marque de la société, et condamné " en conséquence les éditions de la Fédération Française des Motards en Colère " Le Pavé dans la Mare " à payer à la SARL Auvray Antivol une somme de cent cinquante mille francs (150 000 F) à titre de dommages et intérêts de ce seul chef ", Ordonné l'exécution provisoire de la condamnation ci-dessus prononcée, débouté la SARL Auvray Antivol de l'ensemble de ses demandes relatives aux pratiques anti-concurrentielles, déclaré contraire à la loi du 10 janvier 1978 la procédure d'agrément instituée par la Fédération Française des Motards en Colère et la Mutuelle des Motards, par le biais de la commission " Stop Vol " FFMC, et déclaré inopposables à la SARL Auvray Antivol les contrats ou chartes ayant pour objet la délivrance de cet agrément ; Réforme en revanche le jugement déféré en ce qu'il a dit que les sociétés susvisées devaient réparer le préjudice subi par la société Auvray Antivol du fait du refus d'agrément et a ordonné à cette fin une mesure d'expertise et statuant à nouveau, déboute la société Auvray Antivol des demandes de dommages et intérêts qu'elle a formées de ce chef. Condamne les éditions de la FFMC, la Fédération Française des Motards en Colère et la Mutuelle des Motards à payer à la société Auvray Antivol la somme de quinze mille francs au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel et ce, avec droit de recouvrement direct au profit de Maître Auche-Hedou, en ce qui concerne les dépens d'appel.