Conseil Conc., 20 janvier 1999, n° 99-A-02
CONSEIL DE LA CONCURRENCE
Avis
Acquisition de la société Vicarb par la société Alfa Laval Holding AB
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Délibéré, sur le rapport de M. Jacques Poyer, par Mme Hagelsteen, présidente, Mme Pasturel, vice-présidente, MM. Cortesse, Jenny, vice-présidents, Mme Boutard-Labarde, MM. Rocca, Sloan, Thiolon, Urbain, membres.
Le Conseil de la concurrence (section III),
Vu la lettre enregistrée le 13 octobre 1998 sous le numéro A 257 par laquelle le ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie a saisi le Conseil de la concurrence d'une demande d'avis relative à l'acquisition de la société Vicarb par la société Alfa Laval Holding AB ; Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 modifiée, relative à la liberté des prix et de la concurrence, notamment son titre V, et le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 modifié, pris pour son application ; Vu les observations présentées par la société Alfa Laval et le commissaire du Gouvernement ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement entendus, les représentants des sociétés Climespace, Barriquand Echangeurs et Dalkia entendus, conformément aux dispositions de l'article 25 de l'ordonnance précitée, les représentants de la société Alfa Laval Holding AB entendus ; Adopte l'avis fondé sur les constatations (I) et les motifs (II) ci-après exposés :
I. - CONSTATATIONS
A. - L'Opération notifiée
Aux termes de l'accord signé le 20 mai 1998 par Alfa Laval Holdings AB et MM. Lucien Fayolle et Gérard Fayolle, la société Alfa Laval Holdings AB acquiert la totalité des actions détenues par Elgema Holding SA, la famille Fayolle et M. Chandu Patel dans les sociétés constituant le groupe Vicarb.
La réalisation de cette opération notifiée au ministre chargé de l'économie est soumise à la condition de l'accord des autorités compétentes en matière de concurrence. Il est également prévu qu'elle sera précédée du détachement de la branche ingénierie du groupe Vicarb.
B. - Les entreprises parties a l'opération
1. La société Alfa Laval Holding AB
Société de droit suédois appartenant au groupe Tetra Laval, issu du rapprochement des groupes Tetra Pak et Alfa Laval, la société Alfa Laval Holding AB est la maison mère du sous-groupe Alfa Laval constitué d'environ 110 sociétés présentes dans 48 pays. Les activités de ce dernier sont regroupées en trois pôles principaux : la séparation (séparateurs et décanteurs centrifuges, système de nettoyage d'huile, filtres disques et nettoyant de pâte à papier), le transfert des fluides (pompes, soupapes, installation de tuyauterie, compteurs) et l'équipement thermique. Alfa Laval, qui employait en 1997 13 500 personnes, a réalisé la même année un chiffre d'affaires mondial consolidé de 11,2 milliards de francs.
La division thermique (Alfa Laval Thermal) produit des équipements thermiques et fournit des services dans le domaine de la récupération de chaleur, du refroidissement, de la condensation et de l'évaporation. Elle employait en 1997 3 400 personnes dans le monde et a réalisé la même année un chiffre d'affaires mondial consolidé de 2,8 milliards de francs. Elle possède des unités de production en Suède, au Royaume-Uni, en France, en Italie, aux Etats-Unis, au Brésil, en Russie, en Inde, au Japon et en Chine.
En France, le groupe Alfa Laval est constitué principalement de la société Alfa Laval France, société par actions simplifiée, et de ses filiales, les sociétés Alfa Laval SNC, Alfa Laval Spiral SNC et Sharples Stokes. L'ensemble de ces sociétés a réalisé en 1997, en France, 500 millions de chiffre d'affaires dont 120 millions dans le domaine thermique. Les deux principales activités en France d'Alfa Laval Thermal sont la fabrication et la distribution d'échangeurs thermiques et la fourniture de services après-vente. Ces activités sont effectuées par Alfa Laval SAS, située à Les Clayes-sous-Bois dans les Yvelines, pour les activités thermiques générales, par Alfa Laval Spiral SNC, qui fabrique et commercialise des échangeurs thermiques à spirales dans son usine de Nevers et qui exporte 90 % de sa production dans le monde entier, et par Sharples Stokes SA, qui fabrique des pièces détachées pour échangeurs thermiques et assure l'entretien et la réparation de ces pièces.
2. La société Vicarb
Société à capitaux familiaux dont le siège est situé près de Grenoble, Vicarb a été créée en 1948 par M. Lucien Fayolle. Elle produit des échangeurs thermiques, des unités thermiques ainsi que d'autres matériels thermiques. Elle s'est développée aux Etats-Unis et au Canada par le rachat de la société Nixon Plate Coils Ltd. Elle a également créé des filiales dans plusieurs pays, notamment l'Espagne, la Suisse, l'Allemagne, la Roumanie, la Hongrie, la Chine et Singapour.
En France, le groupe Vicarb est constitué de la société Vicarb SA qui fabrique et vend différents types d'échangeurs thermiques ainsi que du groupe Uranus, racheté en 1996, qui fabrique et distribue des unités thermiques destinées au chauffage de l'eau.
En 1997, le groupe Vicarb a réalisé un chiffre d'affaires mondial consolidé de 470 millions de francs et un chiffre d'affaires en France de 315 millions de francs dont 90 millions pour les seuls échangeurs thermiques. A l'exception de l'année 1993, les exercices des dernières années ont tous été déficitaires.
C. - Le secteur des échangeurs thermiques
1. Les produits
Les échangeurs thermiques sont des appareils qui permettent d'échanger de la chaleur entre deux fluides sans produire par eux-mêmes ni chaleur ni froid. Le principe mis en œuvre est simple, puisqu'il s'agit de mettre en contact un fluide chaud et un fluide froid afin qu'ils se trouvent à la même température. Au cours du processus, un des fluides pourra changer de phase (condensation, évaporation). Ils peuvent être intégrés dans des équipements destinés aussi bien au refroidissement qu'au réchauffement.
Utilisés depuis plus d'un siècle dans l'industrie agro-alimentaire, les échangeurs thermiques ont maintenant de nombreuses applications, majoritairement dans l'industrie, mais également dans l'habitat (notamment le conditionnement d'air, la réfrigération et le chauffage urbain) ou dans les transports (conditionnement d'air, réfrigération et refroidissement des moteurs).
Il existe une grande variété de produits de tailles et de performances différentes qui se différencient principalement par leurs fonctions, leurs conditions d'utilisation, les technologies ou les matériaux employés, ainsi que par leurs prix.
1.1. Les différentes fonctions d'un échangeur thermique
Les échangeurs thermiques peuvent remplir plusieurs fonctions suivant la nature des fluides concernés par l'échange.
Lorsqu'il n'y a pas changement de phase, les échangeurs thermiques peuvent remplir trois fonctions. Ils permettent, en effet, des échanges de chaleur entre deux liquides, entre deux gaz ou entre un gaz et un liquide.
En cas de transfert de chaleur accompagné de changement de phase, les échangeurs thermiques peuvent assurer une fonction d'évaporation ou de condensation.
1.2. Les conditions d'utilisation
Il s'agit essentiellement de la température, de la pression et de la résistance à la corrosion. Les échangeurs thermiques peuvent couvrir actuellement une plage de pressions comprise entre 0 et 800 bars et une plage de températures entre - 50 et + 400 degrés. Toutefois, en majorité les échangeurs thermiques présents sur le marché sont utilisés dans des conditions de pression et de température variant respectivement entre 1 et 40 bars et - 50 et + 400 degrés. Les conditions d'utilisation des échangeurs entraînent une adaptation précise de l'appareil aux besoins de l'acheteur et revêtent donc une grande importance.
1.3. Les prix
Le prix d'un échangeur thermique varie de façon considérable suivant les différentes technologies mais également à l'intérieur d'une même technologie en fonction des besoins particuliers d'un acheteur. Selon la société d'études Frost et Sullivan, le prix des échangeurs thermiques varie entre 300 dollars et 50 millions de dollars.
1.4. Les différentes technologies
Pour résoudre ses problèmes d'échanges thermiques, l'utilisateur se trouve devant une grande variété de produits, dont les principales catégories sont les échangeurs tubulaires et les échangeurs à plaques. Dans son étude sur le marché européen des échangeurs thermiques, la société Frost et Sullivan en recense quant à elle huit : les échangeurs tubulaires à calandre, les autres échangeurs tubulaires, les échangeurs à plaques et calandre, les autres échangeurs à plaques, les aéroréfrigérants, les tours de refroidissement, les récupérateurs de chaleur et les autres équipements de récupération de chaleur.
a) Les échangeurs tubulaires :
L'échangeur tubulaire à calandre, le plus communément utilisé dans l'industrie, est formé d'une calandre de forme cylindrique contenant des tubes parallèles à l'axe de la calandre dans lesquels passe un des deux fluides. Il existe de nombreux autres types d'échangeurs tubulaires tels que les échangeurs coaxiaux et les échangeurs double tube. Ils sont surtout utilisés dans les échanges entre deux liquides.
Les échangeurs tubulaires représentent encore près de la moitié des échangeurs thermiques vendus en France et en Europe ; leur part relative est cependant en lent déclin. Ils présentent un certain nombre d'avantages : en particulier ils sont faciles à fabriquer, relativement bon marché, de maintenance aisée et surtout ils peuvent être utilisés à des pressions élevées et à de fortes températures. En revanche, leurs performances sont plutôt limitées et ils sont encombrants.
b) Les échangeurs à plaques :
De création plus récente que les échangeurs tubulaires, les échangeurs à plaques ont subi depuis leur création, il y a environ 60 ans, des améliorations substantielles. Ils sont formés par l'empilement d'un ensemble de plaques métalliques embouties, au travers desquelles s'effectue le transfert de chaleur entre deux fluides.
Cette technologie apparaît particulièrement adaptée à la circulation des liquides alimentaires. Aussi, les principaux débouchés sont-ils, d'après le bureau d'études Bipe conseil, les industries agro-alimentaires (35 %), la chimie (30 %), le génie climatique (20 %) et le froid industriel (5 %).
S'ils ne peuvent pas être utilisés pour les températures élevées et les fortes pressions, les échangeurs à plaques bénéficient d'avantages tenant notamment à leur meilleur rendement et à leur compacité.
Plusieurs technologies sont en concurrence. La principale, et la plus ancienne, est celle des échangeurs à plaques avec joints. Un joint par plaque assure l'étanchéité de l'échangeur ainsi que la répartition des fluides dans les canaux formés par deux plaques. Ces échangeurs ne peuvent être utilisés que pour des pressions maximales de 30 bars et des températures maximales de 200 degrés.
D'autres technologies plus récentes permettent de remédier aux inconvénients de l'existence de joints, comme les échangeurs à plaques soudées. Les échangeurs à plaques soudées sont adaptés à l'utilisation en présence de fluides encrassants corrosifs, chauds sous pression, présentant des débits très différents de part et d'autre de la surface d'échange.
Il existe d'autres échangeurs à plaques dont la diffusion est moins importante tels que les échangeurs à spirales et les échangeurs à plaques brasées. Les échangeurs à plaques brasées sont formés de plaques embouties, mais sans joints, qui forment ainsi un appareil compact et résistant à hautes pressions. Ils sont plus particulièrement utilisés en chauffage, réfrigération et récupération d'énergie. Les échangeurs à spirales, grâce à la forme des canaux qui obligent les liquides à adopter un mouvement permettant d'évacuer les particules avec le fluide, sont particulièrement adaptés au traitement des liquides chargés.
c) Les autres échangeurs :
La société Bipe conseil, dans son étude sur les biens d'équipement associés à l'utilisation rationnelle de l'énergie, distingue une catégorie particulière d'échangeurs à ailettes, tandis que, dans d'autres études comme celle de la société Frost et Sullivan, ces matériels sont répartis entre les échangeurs tubulaires et les échangeurs à plaques.
On distingue les échangeurs tubes à ailettes, dont les principaux sont les aéroréfrigérants, aérocondenseurs échangeurs tubulaires à ailettes, utilisés pour refroidir un liquide ou condenser une vapeur en utilisant un courant d'air, et les tours de refroidissement qui refroidissent l'eau utilisée dans les centrales thermiques, des échangeurs à batterie de tubes à ailettes, utilisés pour la réfrigération et le conditionnement de l'air avec de l'eau. Ces produits sont plus particulièrement utilisés dans les échanges entre un gaz et un liquide. Ils peuvent être vendus séparément mais le plus souvent ils font partie d'un ensemble (matériel frigorifique, climatisation, pompes à chaleur, ventilation).
Parmi les échangeurs thermiques, il convient également de noter les tours de refroidissement, notamment utilisés dans les centrales thermiques, qui ne comportent pas de séparation entre les fluides mais mettent directement en contact l'eau chaude et l'air froid.
2. L'innovation
Dans l'ensemble, le secteur des échangeurs thermiques est un secteur mature dont les principales technologies sont maintenant bien maîtrisées, notamment dans le domaine des échangeurs tubulaires et des échangeurs à plaques et joints. Les développements portent surtout sur des améliorations de détail comme les joints ou les fixations.
Toutefois, certains échangeurs sont couverts par des brevets, plus particulièrement les échangeurs à plaques soudées comme le Compabloc de Vicarb ou l'Alfa Rex d'Alfa Laval. La recherche, matérialisée par des dépôts de brevets, porte surtout sur l'utilisation de nouveaux matériaux ainsi que sur les conditions d'amenée des fluides. Les matériaux les plus utilisés dans les échangeurs sont les aciers inoxydables et le titane, mais d'autres matériaux sont également employés et font l'objet de recherches, notamment pour limiter l'effet des phénomènes de corrosion, comme le graphite, la céramique, et les plastiques. L'objectif est d'améliorer la résistance des échangeurs afin de les rendre plus fiables lorsqu'ils sont utilisés dans des cycles thermiques. Un autre axe de recherche vise à diminuer l'encombrement des échangeurs. Réduire l'encombrement des échangeurs thermiques implique une augmentation de leurs performances. En particulier, les échangeurs à plaques se sont développés grâce à leur compacité et à leur grande performance et font l'objet de nombreux efforts d'amélioration portant notamment sur la conception des cannelures des plaques pour améliorer les échanges.
Un autre problème à résoudre est celui des hautes températures, plus particulièrement dans la sidérurgie, la verrerie et certains domaines de la pétrochimie pour des températures dépassant 900 degrés. Dans ce domaine, la recherche s'oriente vers des matériaux comme les céramiques, mais les applications sont encore rares.
L'innovation technologique apparaît donc comme un élément important de l'efficacité des échangeurs thermiques et par conséquent de la compétitivité des constructeurs.
Compte tenu de ses implications en matière d'économies d'énergie, le secteur des échangeurs thermiques bénéficie du soutien de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), notamment par l'intermédiaire du Groupement de recherche sur les échangeurs thermiques (GRETH), créé en collaboration avec le Commissariat à l'énergie atomique (CEA).
3. Le service après-vente
Le service après-vente des échangeurs thermiques est constitué à raison de 80 % de fournitures de pièces de remplacement et de 20 % de services d'entretien . Si certaines pièces, notamment le bâti ou le corps, peuvent avoir une durée de vie égale à celle de l'ensemble du produit, d'autres, comme les joints en élastomère, peuvent avoir une durée de vie bien moindre.
L'utilisation dans des conditions difficiles, notamment au contact de substances corrosives, peut réduire la durée de vie des plaques à 5 ou 10 ans pour une durée de vie moyenne de l'échangeur d'environ 20 ans.
En ce qui concerne la réparation, les travaux les plus complexes dans des conditions difficiles sont généralement réalisés par le fournisseur. Quant aux travaux pour les appareils utilisés dans des procédés simples, ils peuvent être réalisés par tout intervenant connaissant les appareils de pression.
Enfin, suivant les modalités d'utilisation, un nettoyage périodique peut être nécessaire. Il peut s'agir soit d'un nettoyage mécanique entraînant le démontage de l'ensemble de l'appareil, soit d'un nettoyage chimique.
4. La structure de l'offre
D'après les parties notifiantes, la situation du secteur des échangeurs thermiques, en excluant le service après-vente, se présente comme suit en France :
EMPLACEMENT TABLEAU
Il n'existe pas de données détaillant pour chaque catégorie d'échangeurs thermiques les parts détenues par chaque société.
La société Bipe conseil, dans son tableau de bord des biens d'équipement associés à l'utilisation rationnelle de l'énergie, évalue le marché français des échangeurs thermiques comme suit (en millions de francs) :
EMPLACEMENT TABLEAU
Elle distingue trois catégories principales d'échangeurs, les échangeurs tubulaires qui représentent 56 % de l'ensemble, les échangeurs à ailettes 27 %, les échangeurs à plaques 16 % et les " autres " 1 %.
L'offre d'échangeurs à plaques, qui représente 16 % de la production d'échangeurs thermiques, s'élèverait donc à 568 millions de francs en 1997 et à 602 millions de francs en 1998.
La société Frost et Sullivan, dans son étude sur le marché européen des échangeurs de chaleur (European Heat Exchanger Market Report 1997), évalue le chiffre d'affaires réalisé en France dans le secteur des échangeurs de chaleur tubulaires et à plaques à 397,7 millions de dollars en 1996 et à 410,8 millions de dollars en 1997, soit pour cette dernière année environ 2 310 millions de francs.
Elle propose, toutefois, une segmentation différente de celle proposée par Bipe conseil, où la catégorie des échangeurs à ailettes, en particulier, n'apparaît pas et est répartie entre les autres échangeurs tubulaires et les autres échangeurs à plaques.
Les données concernant les échangeurs tubulaires et à plaques sont les suivantes :
EMPLACEMENT TABLEAU
D'après les chiffres fournis par les parties notifiantes et en retenant les données globales de l'étude de Frost et Sullivan, la situation peut être résumée, en ce qui concerne la place détenue sur le marché des échangeurs à plaques par les groupes Alfa Laval et Vicarb, comme suit :
Chiffres en millions de francs 1995
EMPLACEMENT TABLEAU
Chiffres en millions de francs 1996
EMPLACEMENT TABLEAU
Chiffres en millions de francs 1997
EMPLACEMENT TABLEAU
L'offre d'échangeurs thermiques est constituée, si l'on considère l'ensemble du secteur, d'un grand nombre d'entreprises de tailles différentes. Toutefois, seules quelques entreprises de stature internationale disposent d'une gamme étendue de produits leur permettant de proposer plusieurs solutions aux utilisateurs. Les autres sociétés cherchent plutôt à se spécialiser dans une catégorie particulière d'échangeurs.
En dehors des échangeurs tubulaires qui sont proposés par de nombreux opérateurs chaudronniers, l'offre apparaît, en partie, segmentée entre des sociétés qui ont développé chacune une technologie particulière.
a) Les sociétés intégrées :
Ces sociétés appartiennent à des groupes qui exercent leurs activités au niveau mondial et fournissent des équipements industriels pouvant utiliser des échangeurs thermiques. Les groupes présents en France sont, outre Alfa Laval partie à l'opération, un américain, Tranter, présent par sa filiale suédoise Swep, un allemand, GEA, et un anglais, APV.
Appartenant au groupe Dover corporation, groupe industriel diversifié qui a réalisé en 1997 un chiffre d'affaires de 4,5 milliards de dollars, le groupe Tranter, spécialisé dans la technologie des échangeurs thermiques, dispose de deux divisions aux Etats- Unis et d'une filiale en Europe, la société Swep international AB. Cette dernière, créée en 1983 et spécialisée dans la fabrication des échangeurs à plaques, a réalisé en 1996 un chiffre d'affaires de 100 millions de dollars et employait à la même époque 400 personnes.
Le groupe APV, spécialisé dans l'ingénierie, produit également des échangeurs thermiques ainsi que des pompes et des valves. Il a réalisé en 1996 un chiffre d'affaires consolidé de 772 millions de livres dont 200 millions ont été réalisés par la division produit. Il dispose de sites de production d'échangeurs thermique au Danemark, aux Etats-Unis et en Chine.
Le groupe allemand GEA, présent dans le monde entier dans la fabrication d'équipements industriels, notamment l'énergie, le traitement de l'air, la réfrigération ou l'équipement des laiteries, a réalisé en 1997 un chiffre d'affaires de 4,7 milliards de deutsche marks. Il fabrique et distribue différents types d'échangeurs thermiques, tels que des tours de refroidissement, des échangeurs à tubes à ailettes ainsi que des échangeurs à spirales et des échangeurs à plaques, par l'intermédiaires de plusieurs filiales dont trois sont situées en France, GEA Ergé Spirale, Soramat SA et Batignolles Technologies Thermiques SA. Les échangeurs à spirales et à plaques sont fabriqués par une filiale allemande GEA Ecoflex GMBH.
b) Les sociétés spécialisées :
Frost et Sullivan ont recensé en Europe 70 sociétés actives dans le secteur des échangeurs thermiques, dont une quarantaine sont essentiellement actives dans le secteur des échangeurs tubulaires. Compte tenu du poids de ces équipements, ces sociétés ont plutôt un rayonnement national. Toutefois, plusieurs sociétés allemandes comme Funke ou italiennes comme Belleli, Villa et Bonaldi et FBM Hudson, sont présentes en France auxquelles il convient d'ajouter des sociétés françaises comme CIAT, Aset et Fouré Lagadec, Pecquet Tesson, Delas Weir (groupe GEC Alsthom) ou Niro appartenant au groupe GEA. Un nombre non négligeable de chaudronniers de taille plus réduite sont également en mesure de fournir des échangeurs thermiques. Au total, l'offre apparaît atomisée en ce qui concerne les échangeurs tubulaires, aucune société n'ayant une part de marché supérieure à 10 % dans ce secteur globalement en déclin, sur lequel les sociétés Alfa Laval et Vicarb sont peu présentes.
Pour les autres types d'échangeurs mettant en œuvre une recherche et un savoir- faire plus développé, le nombre d'entreprises vendant un type particulier d'échangeurs est plus réduit.
Pour les échangeurs à plaques et joints, sont présentes en France les sociétés Alfa Laval, Vicarb, APV France, GEA, Barriquand qui distribue également des produits de Swep, CIAT.
Pour les échangeurs à plaques soudées, sont présentes Vicarb, Barriquand, Kapp France, Thermi Consult.
Pour les échangeurs à spirales, sont présentes Alfa Laval, GEA.
Pour les échangeurs à plaques brasées, sont présentes Alfa Laval, Vicarb et Swep.
Pour les échangeurs en graphite, sont présentes les sociétés Carbone Lorraine, Alfa Laval et SGL, filiale de Hoescht, qui a racheté cette activité à la société Vicarb.
Pour les autres catégories d'échangeurs thermiques, l'offre apparaît limitée. Les aéroréfrigérants à tubes à ailettes, les aérocondensateurs ou les réfrigérants thermiques sont le domaine de deux groupes, GEA (notamment ses filiales Ergé Spirale et BTT) et le groupe belge Hamon (société Spiro Gills). Les sociétés Alfa Laval et Vicarb ne fabriquent pas ces matériels.
5. La demande
Elle émane de nombreux secteurs de l'industrie, principalement la chimie, les industries agro-alimentaires et le génie climatique, qui assurent à elles trois plus de la moitié des débouchés, mais d'autres secteurs sont également utilisateurs, comme la fabrication du papier, le textile ou la sidérurgie et l'ingénierie, pour laquelle les échangeurs constituent des éléments intégrés aux équipements installés. Elle émane enfin de distributeurs installateurs qui peuvent également assurer le montage des échangeurs thermiques.
Pour les applications industrielles, les échangeurs thermiques sont principalement intégrés dans un processus de production ou, en dehors de ce processus, sont utilisés pour récupérer de l'énergie ou comme conditionnement de l'air. Ils peuvent également être utilisés comme composants inclus dans une machine.
Les besoins des différents acheteurs sont divers et varient en fonction, notamment, de leur importance et du secteur concerné.
Si l'on excepte les petits utilisateurs, qui peuvent se satisfaire des produits standard et peuvent s'adresser à des distributeurs, la plupart des commandes requièrent généralement une collaboration entre les bureaux d'étude des utilisateurs et ceux des fabricants.
Les utilisateurs procèdent généralement par consultation des fournisseurs. Si dans certains cas ils ont une préférence marquée pour un certain type d'échangeur thermique, le plus souvent ils ne proposent qu'un cahier des charges spécifiant notamment les fluides et les températures concernés, les pressions ainsi que les conditions de construction.
En règle générale, les utilisateurs importants ont recours pour leurs procédés industriels à une gamme étendue d'échangeurs thermiques de types différents adaptés chacun à un usage spécifique. C'est ce qui ressort majoritairement des réponses au questionnaire qui leur a été adressé.
II. - SUR LA BASE DES CONTATATIONS QUI PRECEDENT, LE CONSEIL,
Sur la nature de l'opération :
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 39 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 : "La concentration résulte de tout acte, quelle qu'en soit la forme, qui entraîne transfert de propriété ou de jouissance sur tout ou partie des biens, droits et obligations d'une entreprise ou qui a pour objet, ou pour effet, de permettre à une entreprise ou un groupe d'entreprises d'exercer, directement ou indirectement, sur une ou plusieurs autres entreprises une influence déterminante" ;
Considérant quel'acquisition par la société Alfa Laval Holdings AB de l'ensemble des actions des sociétés constituant le groupe Vicarb lui permet d'exercer une influence déterminante sur ces sociétés; qu'ainsi, cette opération constitue un projet de concentration au sens des dispositions de l'article 39 précité ;
Sur les seuils et les marchés de référence :
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 38 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, une opération de concentration ne peut être soumise à l'avis du Conseil de la concurrence que : "Lorsque les entreprises qui sont parties à l'acte ou qui en sont l'objet ou qui leur sont économiquement liées ont soit réalisé ensemble plus de 25 % des ventes, achats ou autres transactions sur un marché national de biens, produits ou services substituables ou sur une partie substantielle d'un tel marché, soit totalisé un chiffre d'affaires hors taxe de plus de sept milliards de francs, à condition que deux au moins des entreprises parties à la concentration aient réalisé un chiffre d'affaires d'au moins deux milliards de francs" ;
Considérant que le chiffre d'affaires total réalisé en France, en 1997, par les entreprises appartenant au groupe Alfa-Laval s'est élevé à 500 millions de francs ; que celui réalisé par les entreprises du groupe Vicarb s'est élevé à 315 millions de francs; qu'ainsi, la condition fixée à l'article 38 de l'ordonnance susvisée relative au montant du chiffre d'affaires des entreprises concernées n'est pas remplie ; qu'il importe donc de rechercher si le seuil en valeur relative fixée par ce même texte est atteint ;
Considérant que les groupes Alfa Laval et Vicarb ont pour activité commune la fabrication, la distribution et le service après-vente de différents types d'échangeurs thermiques ;
Considérant que les parties à la concentration considèrent : "Qu'en ce qui concerne les utilisateurs finaux, la plupart des types d'échangeurs thermiques paraissent largement substituables" ; qu'elles reconnaissent, toutefois, qu'il convient d'exclure du marché pertinent certains types d'échangeurs comme les tours de refroidissement, équipements destinés aux centrales thermiques, plus volumineux et plus chers que les autres échangeurs thermiques, les condenseurs, équipements qui utilisent de l'air et n'assurent pas la double fonction d'échange et de récupération de chaleur, ainsi que les récupérateurs de chaleur, équipements marginaux plus complémentaires que concurrents des échangeurs ; qu'en conséquence, elles estiment que le marché du premier équipement concerné comprend : "Les échangeurs multitubulaires, les échangeurs à plaques, les échangeurs à spirales, les échangeurs à surface raclée et les autres échangeurs thermiques présentant des fonctions et des capacités similaires" ;
Considérant qu'une partie des utilisateurs estime que l'on peut, dans certains cas, remplacer une catégorie d'échangeurs par une autre ; qu'en particulier, la société Saipol considère que : "Dans le cas où nous devrions changer nos installations actuelles, nous changerions certains échangeurs à plaques et joints par des échangeurs à plaques soudées ou par des échangeurs tubulaires" ; que pour la société IMF : "On peut remplacer un échangeur existant par un échangeur d'un autre type ; ce n'est que rarement effectué car cela nécessite une modification du tuyautage" ; que la société Rhône-Poulenc déclare : "On peut remplacer un échangeur à plaques ou spiralé par un échangeur multitubulaire si l'implantation le permet. On peut remplacer un échangeur à plaques par un spiralé ou inversement" ; que la société Grande Paroisse observe : "En cas de changement théoriquement (d'un point de vue échange thermique) il est possible d'utiliser un autre type pour certains échangeurs. Néanmoins, le type d'échangeur en place (tubulaire) a démontré sa fiabilité, et en cas de problème des possibilités de réparation existent. Dans ce contexte, en ayant la sécurité pour objectif, l'intérêt d'un changement de type d'échangeur reste à démontrer" ;
Considérant que plusieurs fabricants ou distributeurs sont d'un avis similaire ; qu'en particulier, la société Barriquand soutient que : "Les différents types d'échangeurs à plaques et joints, à plaques soudées, tubulaires ont d'une manière générale, des domaines d'activité bien distincts. Il existe cependant de nombreux cas d'applications pour lesquels plusieurs types d'échangeurs peuvent être utilisés" ; que, selon la société GEA : "Le marché à prendre en considération est déterminé par les applications techniques, les domaines d'utilisation des différents types d'échangeurs de chaleur pouvant se recouper, dans ce cas, c'est en général le prix qui a un rôle décisif. Les critères secondaires de décision sont l'encombrement et les caractéristiques d'entretien" ; que ce point de vue est également soutenu par les études de marché ; qu'ainsi, Bipe conseil, dans son tableau de bord des biens d'équipement associés à l'utilisation rationnelle de l'énergie, déclare : "Dans le domaine des basses pressions, l'échangeur à plaques et l'échangeur tubulaire sont en concurrence directe" ; que l'étude de Frost et Sullivan sur le marché européen des échangeurs thermiques précise : "The brazed plate heat exchanger which competes with the shell and tube heat exchanger" ;
Considérant, toutefois, qu'une majorité d'utilisateurs estime qu'ils ne pourraient pas remplacer les échangeurs dont ils disposent actuellement par des échangeurs d'un autre type ; qu'en particulier, pour la société Cerestar, qui utilise la plupart des types d'échangeurs thermiques : "Chaque type d'échangeur correspond à des besoins ou des contraintes particulières" même si "Il est parfois possible d'envisager le remplacement d'échangeurs tubulaires par des échangeurs à plaques" ; que la société Climespace, spécialisée dans l'installation de réseau urbain de climatisation, qui utilise également la plupart des types d'échangeurs, considère également qu'elle ne pourrait pas remplacer les échangeurs dont elle dispose pour "Des raisons d'encombrement" ; que la société Soccram affirme quant à elle que : "Les échangeurs thermiques sont utilisés sur nos installations dans des conditions spécifiques et très difficilement substituables dans leur technologie pour des raisons d'encombrement et d'accessibilité" ; que pour la société Akzo Nobel : "Les échangeurs à plaques sont d'un encombrement réduit et de performances élevées, nos locaux n'acceptent pas d'autres types d'échangeurs" ; que la société Modo Paper considère que : "Chaque type d'échangeur a des applications particulières, il est difficile de les remplacer l'un par l'autre. Sauf peut- être les tubulaires dans certains cas" ; que la société Exxon Chemical estime : "Les types d'échangeurs sont en principe déterminés pour des raisons de procédé et d'optimum d'échange thermique" ; que la société Celia remarque : "En cas de changement d'échangeurs nous utiliserions le même type d'échangeurs. En effet, leur choix est dicté par la nature et la viscosité du produit à traiter ou la température de traitement" ; que pour Hervé Thermique : "Les échangeurs à plaques ne peuvent pas être remplacés par des échangeurs tubulaires ou autres du fait du faible pincement entre les deux fluides considérés" ; que la société Raytheon considère que : "Seul le type multitubulaire est accepté en raison des conditions de calcul pression et température. De plus la nécessité de pouvoir nettoyer l'appareil est très importante" ; qu'Electricité de France, qui n'utilise que des échangeurs à plaques, précise :" La conception des installations impose pour des critères technico-économiques de conserver ce type d'échangeurs. Les répercussions d'un changement de type d'échangeur imposeraient une politique de changement de matériel sur l'ensemble du parc" ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en dépit de l'élément commun que constitue leur fonction d'échange de chaleur entre plusieurs fluides, les différents échangeurs thermiques présentent des caractéristiques distinctes et des conditions d'utilisation différentes qui ne les rendent, du point de vue de l'utilisateur, que partiellement substituables ; qu'en particulier, si les échangeurs multitubulaires peuvent en principe être utilisés, dans la plupart des cas, notamment à des pressions et des températures élevées, ils ne sont pas susceptibles de répondre de manière satisfaisante aux besoins de certaines industries utilisatrices, compte tenu notamment de leur caractère volumineux et de leur faible rendement ; qu'en revanche, par exemple, les échangeurs à plaques et joints ne sont pas en mesure de répondre aux besoins des industries utilisatrices dont les échanges de chaleur se font à haute température, à des fortes pressions ou entre des liquides corrosifs ; que, par ailleurs, de nombreux utilisateurs mettent en avant la compacité comme élément de différenciation des échangeurs à plaques ; qu'en conséquence,il convient de retenir un marché des échangeurs à plaques, distinct de celui des échangeurs tubulaires ;
Considérant que, sur le marché des échangeurs à plaques, les parties à la concentration estiment que le groupe Alfa Laval détient une part de 19,5 % et le groupe Vicarb une part de 9,8 %, soit ensemble une part de 29,3 % ;
Considérant, en tout état de cause, que l'opération de concentration est contrôlable par le Conseil de la concurrence au regard de l'article 38 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;
Sur les effets de l'opération sur la concurrence :
Considérant que l'opération de concentration se traduira par la disparition d'un intervenant important sur le marché national des échangeurs thermiques à plaques; qu'en outre, en rachetant la société Vicarb, la société Alfa Laval va également élargir sa gamme de produits ; qu'en effet, la société Alfa Laval produit essentiellement des échangeurs à plaques et joints qui ne sont pas utilisables pour des températures et des pressions élevées; quel'opération lui permettra d'ajouter à son portefeuille des échangeurs susceptibles d'être utilisés dans de telles conditions, notamment le Compabloc fabriqué par Vicarb, échangeur à plaques soudées venant s'ajouter aux échangeurs brasés qu'elle produit déjà ;
Considérant toutefois que le commissaire du Gouvernement considère que, si cette opération est bien contrôlable, la part de marché de 29,3 % "n'est pas exacte" ; que ce chiffre serait obtenu par l'intégration d'une partie des échangeurs à ailettes dans le marché des échangeurs à plaques ; que ces produits, en ce qu'ils ont une fonction particulière, ne seraient pas substituables aux autres échangeurs à plaques ; qu'enfin, l'inclusion des échangeurs à spirales dans le marché des plaques serait "très discutable" ; qu'en conséquence, il ne conviendrait pas de retenir le montant global de 687 millions de francs pour le marché en cause, chiffre calculé à partir de l'étude de Frost et Sullivan sur le marché européen des échangeurs thermiques, mais celui de 370 millions de francs proposé par Bipe conseil ; que la prise en compte de cette étude aboutirait à une part de marché "d'au moins 54 % en France" ;
Mais considérant que, dans son étude générale sur les biens d'équipement associés à l'utilisation rationnelle de l'énergie précitée, la société Bipe conseil évalue, en se plaçant du côté de l'offre, sur ce qu'elle appelle un segment des échangeurs à plaques, la part des groupes Alfa Laval et Vicarb à 47 % ; que cette étude ne définit pas un marché au sens du droit de la concurrence, mais la part d'Alfa Laval dans la production nationale d'échangeurs ; qu'elle a seulement distingué au sein du "marché des échangeurs thermiques", seul marché qu'elle reconnaît en tant que tel, trois catégories principales d'échangeurs, différenciées par leurs caractéristiques techniques ; que la catégorie des échangeurs à ailettes qu'elle retient est répartie par l'étude Frost et Sullivan, qui fait autorité dans la profession, entre les autres échangeurs tubulaires et les autres échangeurs à plaques ; que les échangeurs à plaques et à ailettes, s'ils sont plus particulièrement utilisés dans des applications cryogéniques, ne différent pas des autres échangeurs à plaques, notamment soudées ou brasées, en termes de performance ou de compacité ; qu'il en est de même des échangeurs à spirales, également classés par Frost et Sullivan dans la catégorie des "autres échangeurs à plaques" ; qu'en conséquence, ces produits doivent être inclus dans le marché pertinent des échangeurs à plaques ;
Considérant, en premier lieu, que, sur le marché national, les autres fournisseurs actuels sont principalement les groupes multinationaux GEA, Swep et APV, d'importance comparable au groupe Alfa Laval et qui disposent d'une large gamme de produits de nature à satisfaire l'ensemble des besoins des utilisateurs ; que les sociétés GEA et APV sont en outre directement concurrentes d'Alfa Laval sur les marchés connexes de l'installation d'équipements industriels ; que d'autres sociétés de plus faible taille sont également présentes sur le marché des échangeurs à plaques, comme la société Barriquand qui a développé le premier échangeur à plaques soudées sous le nom de "Platulaire" ; que cette société est également ensemblier d'échangeurs à plaques et joints alors qu'une société appartenant au même groupe qu'elle, la société Aset, fabrique des échangeurs tubulaires ; que la société Kapp France créée en 1993 dispose également d'une gamme étendue d'échangeurs ; qu'elle est, en particulier, détentrice d'un brevet d'échangeurs à plaques soudées (Heatex) ; qu'elle distribue, en outre, des échangeurs à spirales et les échangeurs fabriqués par la société portugaise Arsopi, licenciée de la société Isaka, important producteur japonais d'échangeurs thermiques à plaques ; que d'autres sociétés, comme la société CIAT, important fabricant d'échangeurs tubulaires, ou la société allemande API Schmidt-Bretten, proposent également, soit directement, soit par l'intermédiaire de distributeurs, des échangeurs à plaques ; qu'en outre, plusieurs sociétés européennes, allemandes, comme Funke, Balcke Durr, Ernest Fisher et Ingenieur Buro Weber, ou italiennes, comme Cipriani, sont en mesure de fournir de tels échangeurs ;
Considérant, en second lieu, que dans son étude précitée concernant les échangeurs thermiques, la société Bipe conseil relève, alors même que les échangeurs thermiques tubulaires sont beaucoup plus volumineux et donc plus difficiles à transporter que les échangeurs à plaques, pour l'ensemble du secteur des échangeurs thermiques, que la part des importations était en 1997 de 26 % de la consommation et celle des exportations de 51 % de la production ; qu'elle constate également que : "De plus en plus d'acteurs sont présents sur le segment des échangeurs à plaques et notamment des importateurs : japonais (Isaka), portugais (Arsopi) mais également suédois, allemands et italiens. Pour cette raison, les nouveaux acteurs français vont plutôt se positionner sur le tubulaire car de plus en plus d'acteurs sont présents sur les échangeurs à plaques" ;
Considérant, enfin, qu'une majorité des utilisateurs interrogés ont répondu que l'opération ne modifiera pas la situation de la concurrence en ce qui les concerne ; qu'en tout état de cause il existait d'autres fournisseurs que les parties à la concentration;
Considérant que le commissaire du Gouvernement estime que le fait que l'opération de concentration intervienne sur un marché sur lequel "Les fabricants doivent innover en permanence" entraînera un renforcement de la position d'Alfa Laval ;
Considérant, à titre liminaire, qu'à supposer que la circonstance que le rachat d'un produit couvert par un brevet sur un marché où l'innovation est permanente soit de nature à renforcer la puissance de marché de l'acquéreur, il conviendrait, en outre, qu'il soit établi que les conditions de la concurrence en sont affectées sur le marché sur lequel opèrent les parties à la concentration ;
Considérant, en premier lieu, que le secteur des échangeurs thermiques est un secteur parvenu à maturité sur lequel les échangeurs à plaques viennent remplacer progressivement les échangeurs tubulaires utilisés depuis une centaine d'années ; qu'en conséquence, les technologies de base et la plupart des adaptations ou aménagements sont dans le domaine public ; qu'en particulier, les échangeurs à plaques et joints sont, de par leur conception, simples et font appel à des techniques couramment utilisées que l'on peut également trouver en dehors des fabricants d'échangeurs, par exemple pour les moules d'emboutissage chez les fabricants de pièces détachées pour automobiles et chez les spécialistes du caoutchouc pour la fabrication des joints ;
Considérant en deuxième lieu, qu'entre 1977 et 1996, la société Alfa Laval a déposé 76 brevets concernant les échangeurs thermiques sur un total de 2 508, soit 3 % seulement de l'ensemble des brevets déposés dans ce domaine ; que la société Vicarb n'en a déposé que cinq, soit 0,2 % du nombre total de brevets déposés ; qu'en conséquence, l'opération ne renforcera que de manière marginale les droits de propriété industrielle détenus par Alfa Laval ;
Considérant en troisième lieu, qu'aucun élément n'établit que les brevets détenus par la société Vicarb et rachetés par la société Alfa Laval, notamment ceux concernant l'échangeur Compabloc du type à plaques soudées, soient indispensables aux utilisateurs ou qu'ils satisfassent des besoins qui ne pourraient pas l'être avec d'autres produits ; qu'il existe d'autres types d'échangeurs qui répondent aux impératifs de compacité, de lutte contre la corrosion, d'encrassement ou d'amélioration des rendements, avantages généralement associés aux échangeurs à plaques soudées ; qu'en particulier, l'échangeur à plaques brasées est présenté par Alfa Laval dans ses descriptifs comme répondant à un besoin en échangeur compact fonctionnant à haute pression et à haute température ; qu'il est précisé que cet échangeur est largement utilisé en chauffage, réfrigération et récupération d'énergie pour des échanges entre deux liquides, entre de la vapeur et un liquide, ainsi qu'entre un gaz et un liquide ; que ce point de vue est corroboré par les études publiées par la société Frost et Sullivan, qui relève, notamment, le développement important de l'utilisation des échangeurs à plaques brasées ces dernières années ; que dans l'étude sur les échangeurs thermiques, enjeux, marchés, technologies et politique d'innovation, publiée par les Editions européennes thermiques et industrie, et qui fait la synthèse des travaux engagés en 1986 et actualisés en 1991 à l'initiative de l'Agence française pour la maîtrise de l'énergie, il est précisé : "La nouvelle génération des échangeurs à plaques soudées, ainsi que les échangeurs à plaques brasées, apparue sur le marché au début des années 1980, constitue un progrès. Ils permettent d'atteindre des températures et des pressions plus élevées" ; que la même étude souligne que les échangeurs à plaques peuvent également, lorsqu'il n'y a pas de problèmes d'espace, être utilisés dans les mêmes conditions de température et de pression ; qu'en outre, il existe d' autres fournisseurs d'échangeurs à plaques soudées présents en France, tels que la société Barriquand, qui a mis au point le premier échangeur de ce type appelé "Platulaire", la société Swep, la société Kapp France, la société Thermi-Consult ainsi que la société Schmidt-Bretten ;
Considérant, enfin, que le fait qu'une société comme la société Barriquand, qui ne dispose que d'un nombre très faible de personnes affectées à la recherche développement, détienne une part du marché national significative et soit en mesure d'exporter, ainsi que l'a indiqué son président en séance, 60 % de sa production, montre que la recherche développement peut être effectuée par des entreprises de taille modeste et ne constitue pas une barrière à l'entrée sur le marché des échangeurs à plaques ;
Considérant que le commissaire du Gouvernement estime que la puissance d'achat du nouveau groupe pourrait lui permettre d'obtenir des conditions d'achat des matières premières plus favorables que celles que peuvent obtenir les entreprises françaises de taille moindre ;
Mais considérant, ainsi qu'il a été indiqué en séance par le conseil des sociétés Alfa Laval et Vicarb, que les achats totaux annuels de matières premières des deux groupes sur les marchés secondaires ne représentent que des quantités marginales, 0,012 % pour l'acier au carbone, 0,14 % pour l'acier inoxydable, 0,19 % pour les alliages de nickel et 3,52 % pour le titane ; qu'en tout état de cause, la part du groupe Vicarb dans ces achats de matières premières, n'est respectivement que de 0,002 %, 0,023 %, 0,042 % et 0,27% ; qu'il ne peut donc être valablement soutenu que le nouveau groupe disposera d'un pouvoir qui lui permettrait d'obtenir des conditions préférentielles ; qu'ainsi, l'opération de concentration ne modifiera pas la puissance d'achat du groupe Alfa Laval ;
Considérant que la part de marché du service après-vente que les parties assureront ensemble après l'opération est estimée à environ 27,5 % ; que cette activité qui consiste à fournir des pièces détachées et à assurer la maintenance des échangeurs peut être réalisée, outre par le fournisseur du premier équipement, par des sociétés de service ; que ces sociétés peuvent également se procurer des pièces détachées auprès d'autres fabricants que le fournisseur du premier équipement, en particulier en ce qui concerne les joints ; que la part du service après-vente est faible pour les échangeurs à plaques soudées ; qu'en outre, certaines activités d'entretien peuvent être réalisées par l'utilisateur lui-même ; qu'en conséquence, il existe une grande diversité de sociétés en mesure d'assurer la fourniture de pièces détachées, notamment des joints, et les services de réparation et d'entretien ;
Considérant qu'au vu de l'ensemble des constatations qui précèdent, il apparaît que la concentration résultant de la prise de contrôle des sociétés constituant le groupe Vicarb par la société Alfa Laval Holding AB n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés concernés;
Considérant, au surplus, que la société Alfa Laval a déclaré qu'elle envisageait de renforcer le pôle de Vicarb situé à Fontanil près de Grenoble, en réalisant les investissements nécessaires à l'augmentation de la capacité de production des échangeurs à plaques soudées de Vicarb, dont 90 % de la production serait destinée à l'exportation, ainsi qu'au renforcement de la recherche et développement sur les échangeurs à plaques soudées ; qu'elle envisage également de concentrer sur le site grenoblois de Vicarb la fabrication d'échangeurs thermiques de petites dimensions, la fabrication et la fourniture d'échangeurs à plaques de tailles moyenne et grande destinés à l'Europe du sud ainsi que l'approvisionnement en pièces de rechange pour l'ensemble de l'Europe ; que, même si le groupe Vicarb est déjà largement présent au niveau international, le fait pour cette société d'être intégrée dans un groupe disposant des moyens de développer des productions destinées en grande partie à être exportées, peut effectivement lui permettre d'élargir sa clientèle et ainsi d'améliorer sa compétitivité au regard de la concurrence internationale; qu'enfin, selon les utilisateurs des échangeurs thermiques, l'opération de concentration qui conduira à un renforcement et à une meilleure répartition des services commerciaux du nouveau groupe sera de nature à améliorer la qualité des services offerts par ces deux fournisseurs; qu'ainsi, cette opération apporte aussi une contribution au progrès économique,
Est d'avis :
Que la concentration résultant de la prise de contrôle des sociétés constituant le groupe Vicarb par la société Alfa Laval Holding AB n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés concernés.