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Décisions

Ministre des Finances, 10 janvier 1997, n° FCEC9710022A

MINISTRE DES FINANCES

Arrêté

PARTIES

Demandeur :

MINISTRE DES FINANCES

Ministre des Finances n° FCEC9710022A

10 janvier 1997

MINISTRE DES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES, DU COMMERCE ET DE L'ARTISANAT ; MINISTRE DELEGUE AUX FINANCES ET AU COMMERCE EXTERIEUR

Le ministre des Petites et moyennes entreprises, du Commerce et de l'Artisanat et le ministre délégué aux Finances et au Commerce extérieur,

Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986, et notamment ses articles 38, 40 et 42 ; Vu le décret n° 86-1309 du 1er décembre 1986 fixant les conditions d'application de l'ordonnance précitée, notamment son article 30 : Vu la notification en date du 12 juillet 1996 faite par la société Auchan, relative à la prise de contrôle par cette société de la société Docks de France ; Vu la lettre de saisine du Conseil de la concurrence du 24 mai 1996 : Vu l'avis du Conseil de la concurrence du 10 septembre 1996 ;

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 39 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 : "La concentration résulte de tout acte, quelle qu'en soit la forme, qui emporte transfert de propriété ou de jouissance sur tout ou partie des biens, droits et obligations d'une société ou qui a pour objet, ou pour effet, de permettre à une société ou à un groupe de sociétés d'exercer, directement ou indirectement, sur une ou plusieurs autres sociétés une influence déterminante" ;

Considérant qu'à partir d'avril 1996, la société Auchan a progressivement racheté des parts du capital de la société Docks de France ; que de 10,6 % en mai, sa part dans le capital de cette société s'élevait à 16,64 % en juin et qu'elle détenait à cette date 14,68 % des droits de vote ; que le 24 juin 1996, la société Auchan a présenté une offre publique d'achat du capital de Docks de France, offre acceptée par le conseil d'administration de cette dernière société le 22 juillet : qu'à l'issue de l'opération Auchan détenait 98,56 % des actions et 99,73 % des obligations convertibles émises par Docks de France ; que l'acquisition par la société Auchan de 14 596 945 titres et des obligations convertibles représentant 98,56 % du capital de la société Docks de France permet à la société Auchan d'exercer une influence déterminante sur cette société ; que cette opération constitue donc une concentration au sens des dispositions de l'article 39 de l'ordonnance précitée ;

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 38 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 précitée une opération de concentration ne peut être soumise à l'avis du Conseil que "lorsque les sociétés qui sont parties à l'acte ou qui en sont l'objet ou qui leur sont économiquement liées ont soit réalisé ensemble plus de 25 % des ventes, achats ou autres transactions sur un marché national des biens, produits ou services substituables ou sur une partie substantielle d'un marché, soit totalisé un chiffre d'affaires hors taxes de plus de 7 milliards de francs, à condition que deux au moins des sociétés parties à la concentration aient réalisé un chiffre d'affaires d'au moins 2 milliards de francs" :

Considérant que le chiffre d'affaires hors taxes réalisé en 1995 en France par la société Auchan s'est élevé, à 51 710 millions de francs ; que celui de la société Docks de France a atteint cette même année 46 200 millions de francs ; que par conséquent la condition fixée au deuxième alinéa de l'article 38 de l'ordonnance susvisée relative au montant des chiffres d'affaires des sociétés concernées est remplie ;

Considérant que les sociétés Auchan et Docks de France exercent des activités de vente au détail de produits de consommation courante à dominante alimentaire ; que les secteurs concernés par l'opération sont, d'une part, celui de la vente au détail des biens de consommation et, d'autre part, celui de l'approvisionnement de ces mêmes biens;

Considérant qu'en ce qui concerne la vente au détail le marché de référence ne saurait être étendu à l'ensemble des formes de commerce relevant de la grande distribution ou du commerce de proximité ; que la définition du ou des marchés concernés doit en effet tenir compte de la nature des produits vendus et des spécificités du service commercial rendu : dimension des magasins, offre plus ou moins diversifiée, nature des prestations offertes aux consommateurs (libre service, présence d'un vendeur) ;qu'ainsi la jurisprudence, tant communautaire (décisions Promodes/BRMC du 13 juillet 1992, Otto/Grattan du 21 mars 1991, La Redoute/Empire du 25 avril 1991) que nationale (avis Docks de France/SASM du 30 novembre 1993), distingue de façon constante les hypermarchés et supermarchés, le commerce spécialisé, le petit commerce de détail, les maxidiscompteurs, la vente par correspondance, en tenant compte des spécificités de chacune de ces formes de vente ;

Considérant que l'évolution de l'offre des hypermarchés et supermarchés conduit à distinguer la vente des biens de consommation courante en hypermarchés de celle effectuée dans les supermarchés ; qu'en effet, les lieux d'implantation de ces deux catégories de magasins sont choisis d'après des considérations propres à chacune de ces catégories ; que l'étendue de leur zone d'attractivité est différente, de même que le nombre moyen de références et l'offre de produits ; que la société Auchan elle-même estime que l'hypermarché met en jeu des compétences différentes de celles requises pour les autres commerces ; que, selon des études menées par des organismes de sondage, les consommateurs font état de motivations différentes dans la fréquentation de l'une de ces formes de commerce plutôt que l'autre, l'étendue du choix de produits étant le critère dominant pour l'hypermarché tandis que c'est la proximité qui est le premier critère de fréquentation d'un supermarché ; que si l'on ne peut exclure que, pour certains achats, les ventes en hypermarchés et en supermarchés sont partiellement substituables, les spécificités de chacune de ces formes de vente permettent de distinguer généralement un marché de la vente au détail en hypermarchés, d'un marché de la vente en supermarchés ; que l'opération concerne ces deux marchés ainsi que celui des commerces de proximité précédemment défini ; qu'en l'absence de données statistiques disponibles concernant cette dernière catégorie de commerce elle doit être examinée en prenant en compte les zones de recouvrement qui peuvent exister entre hypermarchés et supermarchés ;

Considérant par ailleurs que la proximité des commerces doit être prise en compte pour délimiter les zones de distribution; qu'alors la concurrence se limite aux points de vente de proximité en cas d'achat de petites quantités ou de dépannage ou de produits d'usage courant, elle s'exerce dans un rayon plus grand pour les achats en grande quantité ou de biens de consommation durables ; que, conformément à la décision Promodes/BRMC ci-dessus citée,les zones de chalandise doivent être délimitées géographiquement en fonction des temps de déplacement des clients; que la taille du point de vente (dont dépendent la variété des assortiments et l'étendue des gammes), les infrastructures commerciales qui lui sont associées, les voies de communication et la qualité de leur desserte doivent être également prises en compte pour définir l'étendue de la zone; que les zones de chalandise de différents points de vente se recoupent et que l'étendue de ces plages de recouvrement produit des effets sur les conditions de la concurrence, effets qui dépendent notamment de la densité d'implantation des points de vente et de la population ;

Considérant que chaque catégorie de commerce présente des spécificités propres par les services offerts ou les conditions dans lesquelles les produits sont vendus ; que, si les fournisseurs de produits de consommation courante offrent en général les mêmes produits aux différentes catégories de commerce, tel n'est pas le cas de l'ensemble des fournisseurs ; que, si les gammes de produits de consommation courante distribuées dans ces divers commerces sont globalement communes, il en va différemment de leur étendue ; que la valorisation commerciale des produits, tant en termes de notoriété que de potentiel de diffusion, dépend pour une large part du type de commerce dans lequel ils sont distribués ; que, si le référencement des fournisseurs est généralement effectué par des centrales regroupant aussi bien des hypermarchés que des supermarchés, voire des magasins de proximité, cet élément ne permet pas à lui seul de conclure qu'il n'y a pas lieu de distinguer entre les différentes formes de commerce concernées, y compris pour leur approvisionnement en produits de consommation courante :

Considérant que la concentration en cause renforce globalement la position détenue par la société Auchan et peut avoir des effets sur certains marchés locaux de la vente au détail en hypermarchés, en supermarchés et du commerce de proximité, tels que définis ci-dessus par zones de chalandises, ainsi que sur le ou les marché(s) de l'approvisionnement ;

Considérant que, selon les estimations de l'INSEE, les ventes au détail se sont élevées en France en 1995 à 2 192,7 milliards de francs et le chiffre d'affaires des entreprises du secteur commercial 1 900,1 milliard de francs ; qu'avec un chiffre d'affaires de 56 milliards de francs, la société Auchan représente 3 % des ventes au détail et la société Docks de France avec 46,3 milliards, 2,3 % ; qu'ainsi, avec un chiffre d'affaires de 102,3 milliards de francs, la nouvelle entité réalise 5,3 % du chiffre d'affaires global de la distribution ;

Considérant que, s'agissant des ventes au détail en hypermarchés, estimées à 445 milliards de francs en 1995, la nouvelle entité réalise un chiffre d'affaires global de 85 milliards de francs, soit 19,1 % des ventes, et se situe parmi les trois premières entreprises derrière la société Carrefour et l'association des centres distributeurs E. Leclerc, lesquels détiennent des parts voisines de 20 % ; que le quatrième opérateur, Casino, réalise 12 % de ce marché tandis que les autres opérateurs ne représentent chacun qu'un faible pourcentage ; que, s'agissant du classement en fonction des surfaces de ventes, la société Auchan après l'opération occupe le troisième rang avec 984 352 m2 et 16,2 % des surfaces, derrière l'association des centres distributeurs E. Leclerc, 1 476 531 m2 (24,2 %) et la société Carrefour, 1 100 906 m2 (18,1 %) ;

Considérant que si le rendement par mètre carré des magasins Mammouth, actuellement inférieur à celui des magasins Auchan, pouvait être sensiblement augmenté, la nouvelle société resterait confrontée à la concurrence des autres distributeurs dont deux sont de taille supérieure, que l'on se réfère à la surface exploitée ou au chiffre d'affaires réalisé, alors qu'au surplus ces concurrents sont également en mesure d'améliorer leur rentabilité et leur capacité concurrentielle ;

Considérant que, s'agissant des ventes en supermarchés et de celles des magasins de proximité, seule la société Docks de France est présente avec une part estimée respectivement à 3,8 % et 5,3 % des ventes globales ; qu'en conséquence, si l'opération permet la constitution d'un groupe disposant d'une logistique et de capacités financières qui pourront être mises au service des supermarchés et des magasins de proximité appartenant à la société Docks de France, il n'en reste pas moins que, la part de marché de cet opérateur étant modeste, la situation de la concurrence n'en sera pas affectée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'opération n'est pas de nature à conférer à la société Auchan une position dominante sur le secteur des ventes en hypermarchés ;

Considérant que, du point de vue du consommateur, le marché de la distribution est par nature circonscrit ; quel'analyse des effets d'une opération de concentration sur la concurrence doit donc être conduite en tenant compte des situations locales et de la configuration de chaque zone ;

Considérant que la distribution de détail est l'objet d'une réglementation spécifique prévue par la loi du 27 décembre 1973 qui subordonne à une autorisation administrative préalable l'ouverture de toute nouvelle surface de vente au-delà d'un certain seuil ; que ce seuil a été abaissé à 300 m2 par la loi du 5 juillet 1996 qui a par ailleurs étendu la procédure de l'autorisation préalable à de nouveaux cas ; que ce dispositif traduit la volonté du législateur d'encadrer les effets négatifs d'une emprise trop importante de la grande distribution sur l'ensemble de l'appareil commercial ; que, de plus, la pratique de prix d'appel qui peut, notamment quand elle est mise en œuvre par la principale enseigne de la zone de chalandise, entraîner un affaiblissement de la concurrence locale est plus facile à mettre en œuvre par un magasin adossé à un groupe puissant aux capacités financières importantes que par des opérateurs de taille plus réduite ; que, enfin la concentration des distributeurs peut avoir pour effet de diminuer le choix offert aux consommateurs en uniformisant les gammes de produits proposés ; que si, dans la plupart des agglomérations, l'opération n'est pas de nature à modifier significativement les conditions de l'exercice de la concurrence entre hypermarchés, en revanche, dans les agglomérations de Perpignan, Aubagne - La Ciotat - Marseille-Est et Strasbourg, l'opération confère au groupe Auchan une position prééminente dont les conséquences sur la concurrence doivent être examinées ;

Considérant que,dans l'agglomération de Perpignan, la zone de chalandise regroupe les communes distantes de moins de vingt-cinq minutes en automobile des points de vente et comprend Perpignan, Rivesaltes, Saint-Laurent-de-Salanque, Canet-en-Roussillon, Elne, Argelès-sur-Mer, Toulouges, Saint-Estève, Latour-de-France, Saint-Paul-de-Fenouillet, Millas et Thuir ; que la population concernée est de 265 000 habitants ; que l'équipement commercial compte six hypermarchés : Auchan, qui exploite 14 172 m2 (avec une autorisation pour 12 950 m2) et réalise un chiffre d'affaires estimé en 1994 à 1 100 millions de francs, Mammouth (8 023 m2 et un chiffre d'affaires de 500 millions de francs), Carrefour (8 600 m2 et 427 millions de francs de chiffre d'affaires) et deux magasins Leclerc (6 650 m2 et 621 millions de francs de chiffre d'affaires) et deux petits hypermarchés, Intermarché (2 585 m2 et 174 millions de francs de chiffre d'affaires) et Champion (2 648 m2 et 94 millions de francs de chiffre d'affaires) ; que la part de la société Auchan après la concentration s'élève à 55 % du chiffre d'affaires total réalisé sur la zone et à 52 % des surfaces ; que ses deux concurrents les plus importants, l'association des centres distributeurs E. Leclerc (15 % des surfaces et 21 % du chiffre d'affaires) et la société Carrefour (20 % des surfaces et 15 % du chiffre d'affaires), ne représentent ensemble que 36 % du chiffre d'affaires et 35 % des surfaces ;

Considérant que, dans cette même zone, sont implantés 22 supermarchés et 5 maxidiscompteurs ; que les supermarchés réalisent ensemble un chiffre d'affaires estimé à environ 760 millions de francs sur une surface de 26 000 m2 ; que, même en retenant l'hypothèse qu'il existe une substituabilité partielle entre hypermarchés et supermarchés, substituabilité dont l'étendue ou le degré ne sont pas connus, et faute de cette information, en prenant en compte l'ensemble des grandes surfaces de vente à dominante alimentaire, la part du groupe Auchan serait de 31 % pour la superficie et de 43 % pour le chiffre d'affaires, ce qui le place toujours en tête des distributeurs ; qu'ainsi, dans l'agglomération de Perpignan, la concentration a pour effet de renforcer la position déjà forte de la société Auchan ; que la densité commerciale de la zone s'élève à 161 m2 pour 1 000 habitants pour les hypermarchés et à 269 m2 pour 1 000 habitants sur l'ensemble des grandes surfaces alimentaires ; que ces taux se situent au- dessus de la moyenne nationale pour les hypermarchés (107 m2 pour 1 000 habitants) et pour les grandes surfaces alimentaires (252 m2 pour 1 000 habitants) ;

Considérant que si, avant l'opération, la société Auchan était déjà le principal distributeur avec 33 % des surfaces et 38 % du chiffre d'affaires, il existait plusieurs concurrents représentés par les enseignes Mammouth (19 % des surfaces et 17 % du chiffre d'affaires), Carrefour (20 % des surfaces et 15 % du chiffre d'affaires) et, dans une moindre mesure parce que répartie sur deux sites qui ne peuvent totalement concurrencer les grands hypermarchés sur l'ensemble des gammes de produits commercialisées, les magasins à l'enseigne Leclerc (15 % des surfaces et 21 % du chiffre d'affaires) ; quel'opération a pour effet de faire disparaître un des trois grands hypermarchés présents sur la zone, laissant, face à la société Auchan renforcée, Carrefour et les magasins Leclerc, qui ne disposent respectivement que de 38 % et 30 % (avec les réserves évoquées plus haut en ce qui concerne Leclerc) des surfaces exploitées par le groupe Auchan; qu'ainsi, la prééminence de la position détenue par la société Auchan pourrait l'inciter à renoncer à une politique commerciale offensive sur les gammes de produits pour lesquelles elle est ouvertement en concurrence avec Carrefour, politique sur laquelle, de son côté, la société Carrefour pourrait être tentée de s'aligner; que, par ailleurs, l'équipement commercial de Perpignan est fortement déséquilibré au profit du sud de l'agglomération où est situé le magasin à l'enseigne Auchan et, dans une moindre mesure, de l'est de l'agglomération où est implantée l'enseigne Mammouth ; que la présence dans la partie sud de l'agglomération de nombreuses grandes surfaces spécialisées, à proximité immédiate du magasin Auchan (et notamment des enseignes Décathlon, Leroy-Merlin, Kiabi, Norauto, appartenant à l'actionnariat de la société Auchan), constitue un élément d'attraction ; que, en outre, le magasin Auchan a été entièrement rénové pendant l'été 1996 et offre de nouveaux services ; que le nord de la ville, où l'équipement commercial en grandes surfaces est représenté par la société Carrefour et un magasin Leclerc, est en revanche enclavé ; que, si le premier a pu obtenir une autorisation d'extension avant l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions législatives, l'association des centres distributeurs E. Leclerc a dû retirer son projet d'extension ; que, enfin, le schéma départemental en cours de préparation pourrait tenir compte des réserves des instances consulaires à l'égard de toute création de surfaces de ventes supplémentaires ;

Considérant que la zone de La Ciotat - Aubagnecomprend, outre ces deux communes, celles de Cassis, Carnoux, Roquefort-la-Bédoule, Auriol, Roquevaire ; que, en raison de l'attraction exercée par la capitale régionale il convient de prendre également en compte les neuvième, dixième, onzième et douzième arrondissements de Marseille ; que, compte tenu des distances, des temps de transport et de l'équipement commercial existant, une zone plus large englobant la totalité de la ville de Marseille et de ses environs ne saurait être retenue ;

Considérant que l'équipement commercial en hypermarchés comprend les magasins à l'enseigne Auchan d'Aubagne (12 920 m2) et de Marseille (10e) (9 120 m2), le magasin à l'enseigne Mammouth de La Ciotat (6 200 m2) et deux magasins à l'enseigne Géant Casino, l'un de 17 700 m2 dans le quartier de La Valentine, l'autre de 3 500 m2 à Valmante-le-Redon, ainsi que deux magasins à l'enseigne Intermarché à Marseille, l'un de 3 200 m2 dans le neuvième arrondissement, l'autre de 2 653 m2. dans le dixième arrondissement ; qu'ainsila société Auchan exploite 28 240 m2, soit 51 % des surfaces, devant la société Casino qui, avec 21 200 m2, dispose de 38 % des surfaces; que le troisième distributeur, le groupe Intermarché, exploite 5 853 m2, soit 11 % des surfaces, via deux petits hypermarchés implantés dans Marseille ;

Considérant que l'équipement en supermarchés de la zone de chalandise telle qu'elle vient d'être définie est composée de vingt-six magasins d'une surface totale de 25 000 m2 environ, dont neuf développent une surface inférieure à 1 000 m2 ; que, par ailleurs, neuf magasins de maxidiscompte sont également recensés ; que, parmi les supermarchés, douze sont implantés en centre-ville de Marseille sur des surfaces restreintes et jouent le rôle de magasins de proximité ; que, par ailleurs, la société Auchan disposant depuis l'opération dans cette zone d'un supermarché Atac de 1 526 m2, il ne subsiste plus, en dehors d'Intermarché qui exploite deux "petits" magasins, que deux groupes de poids à peu près égal qui représentent ensemble 75 % du marché ; que l'on peut craindre, dès lors, qu'ils ne soient tentés à renoncer à engager une politique commerciale offensive, notamment en matière de prix ; qu'en retenant l'hypothèse où il existerait une substituabilité partielle entre les ventes en hypermarchés et en supermarchés, celle-ci serait forcément limitée, compte tenu des caractéristiques de l'équipement commercial mentionnées ci-dessus ; que la prise en compte à titre très subsidiaire de l'équipement en supermarchés conduirait à réduire à 37 % la part détenue par la société Auchan, lequel deviendrait le numéro deux derrière Casino qui détient 38 % du marché tandis qu'Intermarché, le troisième, ne représente que 14 % des surfaces ; considérant que la densité commerciale des hypermarchés, de 251, est très supérieure à la densité nationale qui est de 107 m2 pour 1 000 habitants ; que l'autorisation d'ouvrir de nouvelles surfaces dans le contexte réglementaire rappelé ci-dessus apparaît en conséquence peu vraisemblable ;

Considérant, dès lors, que la société Auchan est confrontée sur cette zone essentiellement au Géant Casino de La Valentine de 17 700 m2 ; que ce magasin voit son attraction renforcée par la présence d'un grand ensemble commercial comptant des enseignes fortement attractives (Toys R US, Le Printemps) ; que les magasins de La Ciotat et d'Aubagne ne bénéficient pas d'un environnement aussi favorable ; mais que, si sur cette zone la prééminence de la société Auchan doit être relativisée par la présence d'un concurrent également puissant, on peut craindre toutefois que dans une zone où il ne subsiste plus que deux concurrents de taille importante ces derniers ne soient incités à renoncer à une politique offensive en matière de prix ; que la présence des deux magasins à l'enseigne Intermarché, de taille restreinte mais dont la stratégie commerciale est très largement axée sur le prix bas, peut contrer partiellement un éventuel parallélisme dans la politique de prix sans en écarter totalement l'hypothèse ; que, en conséquence, le renforcement de la position déjà très forte du groupe Auchan peut présenter un risque pour la concurrence ;

Considérant que la zone de chalandise de Strasbourg comprend environ 742 600 habitants (soit 78 % de la population du département), cette estimation étant celle habituellement retenue par les membres de la commission départementale d'équipement communal ; que, si l'attraction de la ville de Strasbourg dépasse les limites du département, s'agissant des achats de consommation courante, l'attractivité devient très marginale au-delà d'une durée maximale de trajet d'autant plus courte que des établissements commerciaux de même nature existent et constituent autant de barrières commerciales ;

Considérant que la société Docks de France inclut dans l'équipement de la zone de chalandise les hypermarchés de Saverne et de Molsheim ainsi que les supermarchés implantés dans les communes de Marmoutier, Mutzig, Rosheim et Obernai ; qu'entre les villes citées et l'agglomération de Strasbourg s'étend une zone rurale qui interrompt la continuité urbaine ; qu'ainsi la part estimée des achats effectués à Strasbourg par les habitants de Molsheim et Obernai est très marginale pour les achats en produits alimentaires et, si elle est plus sensible pour les biens d'équipement de la personne ou de la maison, elle s'oriente plutôt vers les magasins spécialisés de centre-ville ou de la périphérie ;

Considérant que la zone de chalandise à prendre en compte est celle regroupant les communes de Strasbourg et la proche banlieue composant l'arrondissement de "Strasbourg campagne" ; que cette zone comprend notamment les communes de Geispolsheim, Illkirch, Mundolsheim, Schiltigheim où sont implantés les hypermarchés ; que sur cette zone, la société Auchan détient 30 198 m2, soit 54,9 % des surfaces et réalise un chiffre d'affaires évalué à environ 2 800 millions de francs, soit 59,6 % du chiffre d'affaires réalisé dans la zone; qu'elle est le premier opérateur devançant la société Cora, laquelle détient 14 780 m2, soit 27 % des surfaces, et réalise environ 26 % du chiffre d'affaires, le troisième opérateur étant l'Union des coopérateurs d'Alsace avec l'enseigne Rond-Point (10 000 m2, 18 % des surfaces et 15 % du chiffre d'affaires);

Considérant que, dans cette même zone, sont implantés soixante-dix-huit supermarchés d'une surface globale de 66 948 m2 dont trente-cinq développent une surface inférieure à 1 000 m2, en centre-ville ; que, parmi les supermarchés figurent 23 magasins aux Enseignes Suma, Atac et Galeries Gourmandes (enseigne locale de la société Docks de France), soit une surface totale de 24 379 m2 et 36 % des surfaces de supermarchés ; que, sous réserve des caractéristiques de l'équipement commercial évoquées ci-dessus, en admettant même que les ventes en supermarchés puissent être considérées comme étant partiellement substituables aux ventes en hypermarchés, la société Auchan reste encore le premier distributeur avec 54 577 m2, soit 44,8 % des surfaces, devant le groupement Coop (28 282 m2 et 23,2 %) et la société Cora (20 531 m2 et 16,8 %) ; que les densités commerciales des hypermarchés et des supermarchés sont respectivement de 107 m2 et de 131 m2 pour 1 000 habitants, soit voisines des chiffres nationaux ;

Considérant que les sites sur lesquels sont implantés les magasins de la société Auchan, en tant qu'ils comprennent de nombreuses surfaces spécialisées, constituent des pôles d'attraction ; qu'ainsi, à côté de l'hypermarché à l'enseigne Auchan, la société Leroy-Merlin exploite un magasin de 6 506 m2, la société Décathlon un magasin de 6700 m2 ; que le magasin à l'enseigne Mammouth d'Illkirch est entouré d'un magasin de bricolage à l'enseigne Obi de 7200 m2, d'un centre commercial de 3 980 m2 et d'un centre auto de 1 000 m2 ; que seul le magasin à l'enseigne Mammouth de Schiltigheim ne bénéficie pas de cet environnement mais qu'en revanche il est situé en centre-ville ; que, si les surfaces des centres commerciaux dans lesquels les magasins Cora et Rond-Point Coop sont implantés sont également très vastes, ces centres commerciaux, en raison de leur implantation, exercent surtout une attraction sur des communes périphériques dont beaucoup sont éloignées ; qu'ainsi les zones d'attraction des deux principaux concurrents de la société Auchan, si elles sont étendues, sont principalement orientées vers une clientèle qui réside à l'extérieur de Strasbourg ; que, par ailleurs, les encombrements de fin de semaine rendent plus difficile l'accès de ces magasins aux habitants de la ville ;

Considérant que les magasins Auchan de Strasbourg et Mammouth de Schiltigheim, situés dans des zones de population très dense, ont une clientèle originaire majoritairement du centre-ville ; que la société Auchan bénéficie d'une desserte routière particulièrement favorable puisque le magasin Auchan est situé à un carrefour autoroutier drainant le flux venant du centre et de l'ouest de l'agglomération ; que, par ailleurs, la seule ligne de tramway de Strasbourg dessert les sociétés Auchan et Mammouth, qui sont implantées l'une au départ de la ligne, l'autre au terminus ; que les habitants des quartiers centraux de Strasbourg, dont la densité de population est élevée, peuvent ainsi utiliser ces deux hypermarchés comme des magasins de proximité ; que la présence de nombreux supermarchés aux enseignes Atac et Galeries Gourmandes renforce la position détenue par le nouvel ensemble sur le centre-ville ;

Considérant enfin que, si le jeu de la concurrence par les prix s'exerce actuellement entre trois enseignes, Auchan, Mammouth et Cora, la stratégie de l'enseigne Rond-Point est plutôt celle de la fidélisation des clients par une politique de qualité ; que, dès lors la concentration a pour conséquence de laisser face à face deux opérateurs, lesquels, en l'absence de possibilités d'extension de leurs magasins, peuvent avoir intérêt à mener une politique de revalorisation de leurs marges ; que Cora, au lieu d'accroître son poids sur Strasbourg, voit sa part de marché régresser ; que, par ailleurs, il n'existe pas de projet d'implantation de nouvelles grandes surfaces alimentaires susceptible de modifier la situation concurrentielle sur Strasbourg ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et notamment du poids des situations acquises, dû aux caractéristiques locales de la distribution rappelées plus haut, que la nouvelle entité constituée par la réunion des groupes Auchan et Mammouth détiendra une position prééminente susceptible de comporter des risques d'atteinte à la concurrence dans les zones de Perpignan, Aubagne - La Ciotat - Marseille-Est et Strasbourgtelles que définies ci-dessus ;

Considérant qu'en ce qui concerne l'approvisionnement la société Auchan soutient que les ventes réalisées par les deux sociétés parties à l'opération représentent, selon les gammes de produits, de 8,9 % à 13,4 % des ventes globales par produits, alors que les fournisseurs les plus importants détiennent, sur leur marché, des parts nettement supérieures puisqu'elles peuvent varier entre 11 % et 51 % selon les produits ; que, toujours selon la société Auchan, les achats effectués par cette dernière représentent entre 1 % et 4 % du chiffre d'affaires des grandes entreprises de production, dont le chiffre d'affaires est supérieur à 1 milliard de francs et entre 5 % à 11 % pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à 500 millions de francs, que dans ses observations, la société Docks de France situe le poids de Paridoc entre 5 % et 8 % du chiffre d'affaires de ses fournisseurs ; que les indications fournies par les fournisseurs de produits agroalimentaires et de consommation courante consultés dans le cadre de l'instruction tendent à confirmer la part généralement faible de la société Auchan dans le chiffre d'affaires de la plupart de ses fournisseurs ; qu'il ressort de ces mêmes indications que, si la part de la société Docks de France est en général un peu plus élevée, elle reste toutefois limitée ; que de cette analyse globale il ressort que la concentration en cause ne serait pas de nature à conférer une position prééminente au niveau de l'approvisionnement; qu'en l'absence d'examen plus détaillé, prenant notamment en compte la spécificité des formes de commerce précitées et leur importance relative vis-à-vis des fournisseurs, importance variable selon les familles de produits, mais aussi, selon le type même de produit concerné, aucun élément ne permet d'infirmer cette analyse ;

Considérant que la société Auchan estime que la contribution de l'opération au progrès économique résulte du renforcement de sa capacité face notamment à des concurrents étrangers plus puissants, de ses implantations à l'étranger, développement qu'elle estime ne pouvoir réaliser que si elle réalise un chiffre d' affaires de l'ordre de 100 milliards de francs sur son marché d'origine ; que, selon cette même société, la grande distribution serait fragilisée sur le marché français également par l'implantation de groupes de distribution étrangers qui disposent d'une puissance bien supérieure à la sienne ;

Mais, considérant qu'aucun des arguments présentés ne permet d'établir l'existence, au plan local, d'une contribution au progrès économique propre à compenser les atteintes à la concurrence résultant de l'opération, dans les zones de Perpignan, Aubagne - La Ciotat - Marseille-Est et de Strasbourg ; qu'il existe notamment un risque pour le consommateur de ces trois zones d'être confronté à un appauvrissement des gammes de produits offertes et une diminution de l'intensité concurrentielle ; que, dès lors, il y a lieu, en l'absence de toute contribution au progrès économique au sens de l'article 41 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 précitée, de prescrire l'adoption de mesures propres à rétablir les conditions d'une concurrence suffisante ;

Vu la lettre d'engagement de la société Auchan du 8 janvier 1997,

Arrêtent :

Art. 1er. - La concentration entre les sociétés Auchan et Docks de France est autorisée sous réserve du respect des conditions auxquelles s'est engagée la société Auchan par lettre du 8 janvier 1997,

Art. 2. - La société Auchan informera, trois mois avant l'expiration d'un délai de douze mois à compter de la date de publication du présent arrêté, les services compétents des mesures prises en vue de se conformer à l'injonction prévue au présent arrêté.

Art. 3. - Le directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes et le directeur du commerce intérieur sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté, qui sera publié au Bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.