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Décisions

Cass. com., 12 mars 2002, n° 00-13.849

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie

Défendeur :

Aéroports de Paris, Compagnie nationale Air France (SA), TAT European Airlines (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dumas

Rapporteur :

Mme Champalaune

Avocat général :

M. Viricelle

Avocats :

Me Ricard, SCP Baraduc, Duhamel, SCP Piwnica, Molinié, SCP Vier, Barthélémy.

Cass. com. n° 00-13.849

12 mars 2002

LA COUR : - Statuant tant sur le pourvoi principal que sur le pourvoi incident : - Met hors de cause, sur sa demande, la société Air France contre laquelle n'est dirigé aucun moyen des pourvois ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 mars 2000) que par décision n° 98-D-34 du 2 juin 1998, statuant sur la saisine de la société TAT European airlines (TAT) pour des pratiques mises en œuvre par l'établissement public Aéroports de Paris (ADP) et les sociétés du groupe Air France en ce qui concerne l'affectation des aérogares de l'aéroport d'Orly et sur sa saisine d'office portant sur la situation de la concurrence sur le marché des locaux et espaces nécessaires aux activités des compagnies aériennes mis à leur disposition par ADP sur l'aéroport d'Orly, le Conseil de la concurrence (le Conseil) a décidé que Air France, la société Air Inter, devenue Air France Europe et ADP s'étaient rendus coupables d'entente et que ADP s'était en outre rendu coupable d'abus de position dominante et a prononcé des sanctions pécuniaires à l'encontre de ces sociétés et établissement public ; qu'il ressort de cette décision que le conseil a considéré que le regroupement des activités du groupe Air France à Orly Ouest autorisés le 4 mai 1994 par le directeur général de l'aviation civile procédait d'une entente entre ADP et le groupe Air France, et que la décision du 17 juin 1994 d'ADP refusant à TAT d'ouvrir à partir d'Orly Ouest de nouvelles liaisons ainsi que l'obligation faite à TAT par ADP d'utiliser le personnel d'ADP pour les services dits d'assistance en escale étaient des pratiques constitutives d'abus de position dominante ; que saisie d'un recours contre cette décision, la Cour d'appel de Paris a, par arrêt du 23 février 1999, rejeté le déclinatoire de compétence déposé par le préfet de la région d'Île-de-France ; que le conflit ayant été élevé, le Tribunal des conflits a, par décision du 18 octobre 1999, confirmé l'arrêté de conflit en ce qu'il concernait les effets attachés à la décision ministérielle du 4 mai 1994 et à la décision d'Aéroports de Paris le 17 juin 1994 et l'a annulé pour le surplus ; qu'il a déclaré nuls et non avenus la procédure relative aux effets attachés à ces actes administratifs et l'arrêt précité de la Cour d'appel de Paris en ce qu'il déclarait la juridiction judiciaire compétente pour en connaître ;

Sur le premier moyen, du pourvoi principal et du pourvoi incident, formulé en termes identiques, pris en leur première branche : - Vu l'ordonnance du 1er juin 1828 et l'article 1351 du Code civil ; - Attendu que pour décider que la décision du 2 juin 1998 du Conseil était annulée en sa totalité, l'arrêt retient que dans le dispositif de cette décision, le Conseil n'a pas opéré de distinction entre les pratiques d'abus de position dominante retenues à l'encontre d'ADP, en son article 2, et n'a pas distingué la sanction se rapportant à chacune d'entre elles, en son article 3, ainsi qu'aux pratiques d'entente également retenues à son égard en son article 1er et qu'il en résulte que l'annulation de l'article premier relatif aux effets attachés à la décision ministérielle du 4 mai 1994 sur la réorganisation des aérogares d'Orly et l'annulation de l'article deuxième en sa partie relative au refus d'ADP le 17 juin 1994 d'autoriser TAT à ouvrir de nouvelles liaisons à partir d'Orly ouest, prononcées par le Tribunal des conflits, emportent annulation de la décision du Conseil ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que dans ses motifs, le Conseil avait distingué deux pratiques distinctes d'abus de position dominante attribuées à ADP et que le Tribunal des conflits n'a expressément exclu la compétence du Conseil, que pour celle des pratiques ayant consisté à refuser à TAT l'ouverture de nouvelles liaisons à partir d'Orly ouest, ce dont il résultait que le dispositif par lequel le Conseil a décidé que ADP avait enfreint les dispositions de l'article 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 devenu l'article L. 420-2 du Code de commerce, comportait implicitement deux chefs de condamnation distincts, dont l'un n'avait pas été annulé par la décision du Tribunal des conflits, la cour d'appel a méconnu la portée de cette décision ;

Et sur le premier moyen, du pourvoi principal et du pourvoi incident, formulé en termes identiques, pris en leur deuxième branche : - Vu l'ordonnance du 1er juin 1828, et l'article 1351 du Code civil ; - Attendu que pour décider que l'ensemble de la procédure suivie devant le Conseil avait été annulée par le Tribunal des conflits, faisant ainsi obstacle à ce que la cour d'appel se substitue au Conseil pour examiner les pratiques reprochées à ADP au titre de la fourniture des services en escale, l'arrêt retient que le Tribunal des conflits en annulant la procédure relative aux effets attachés aux actes administratifs des 4 mai et 17 juin 1994, n'a pas précisé quelles étaient les pièces annulées et que cette procédure formait un tout indissociable ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la portée de l'annulation de la procédure suivie devant le Conseil par le Tribunal des conflits a été expressément limitée aux effets attachés à deux actes administratifs dénommés, ce dont il résultait que subsistaient dans la procédure les actes ou la partie des actes ne concernant pas ces effets, ainsi que les saisines du Conseil en ce qui concernaient les faits entrant dans le champ de ses attributions, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen : Casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 mars 2000, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée.