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Conseil Conc., 27 janvier 1998, n° 98-PB-02

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Décision

Saisine présentée par le Syndicat national des artisans teinturiers traditionnels

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré, sur le rapport de M. Philippe Komiha, par M. Barbeau, président ; MM. Cortesse, Jenny, vice-présidents.

Conseil Conc. n° 98-PB-02

27 janvier 1998

Le Conseil de la concurrence (commission permanente),

Vu la lettre enregistrée le 19 septembre 1997 sous le numéro P 08, par laquelle le Syndicat national des artisans teinturiers traditionnels a saisi le Conseil de la concurrence des comportements en matière de prix des pressings dits "hard discount", qu'il qualifie de vente à perte et d'infraction à l'article 10-1 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 modifiée, relative à la liberté des prix et de la concurrence et le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 modifié, pris pour son application ; Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement et le représentant du SNATT entendus ;

Considérant que le Syndicat national des artisans teinturiers traditionnels (SNATT) fait état de différentes pratiques tarifaires mises en œuvre par des pressings pratiquant le "hard discount", qui fausseraient le jeu de la concurrence sur le marché de la teinturerie et qui constitueraient une pratique prohibée par les dispositions de l'article 10-1 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Considérant qu'à l'appui de sa saisine le SNATT a communiqué, en premier lieu, des publicités de prix de pressings, qui proposent un prix unique s'échelonnant de 9,50 francs à 25 francs pour les vêtements courants, de 35 francs à 45 francs pour les articles plus importants, ainsi que des courriers de teinturiers traditionnels se plaignant de la baisse de leur activité qui résulterait de la concurrence des discompteurs ; que le SNATT a également produit plusieurs articles parus dans la presse professionnelle qui exposent, d'une part, l'évolution du marché caractérisé par la forte baisse des volumes traités due à la désaffection du consommateur, à l'évolution des modes de consommation, à la baisse du pouvoir d'achat et à l'inadéquation entre les niveaux de prix pratiqués et l'inadaptation de la qualité des prestations et de l'accueil dans les teintureries traditionnelles, d'autre part, les caractéristiques de la formule du prix bas unique, fondée sur une automatisation des tâches, des volumes traités plus importants et des coûts de revient peu élevés ; que ces mêmes articles de presse montrent, enfin, que des pressings ont été en mesure d'adapter leur offre face à cette nouvelle concurrence soit en proposant à leur tour des formules similaires, soit en réduisant leurs prix, soit en valorisant la qualité du service rendu et de l'accueil ;

Considérant que l'article 10-1 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 prohibe les offres de prix ou pratiques de prix de vente aux consommateurs abusivement bas par rapport aux coûts de production, de transformation et de commercialisation, dès lors que ces offres ou pratiques ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'éliminer d'un marché ou d'empêcher d'accéder à un marché une entreprise ou l'un de ses produits ; qu'aux termes de l'article 19 de cette même ordonnance, le Conseil de la concurrence peut déclarer, par décision motivée, la saisine irrecevable s'il estime que les faits invoqués n'entrent pas dans le champ de sa compétence ou ne sont pas appuyés d'éléments suffisamment probants ;

Considérant, en premier lieu, qu'en se bornant à produire des publicités de prix de pressings dits discompteurs, la partie saisissante n'apporte pas d'éléments qui permettraient d'apprécier en quoi ces prix seraient abusivement bas par rapport aux coûts de mise en œuvre des prestations concernées; qu'en second lieu, si le SNATT a fait référence à plusieurs courriers de ses adhérents faisant état de leur baisse d'activité, voire de la fermeture de teintureries traditionnelles dans certaines zones, il n'a pas apporté d'éléments suffisamment probants permettant d'établir que la pratique de prix unique mise en œuvre par les pressings dits discompteurs aurait eu pour objet ou aurait pu avoir pour effet d'éliminer un concurrent du marché en cause; que, dans ses observations lors de la séance, le représentant du SNATT a d'ailleurs indiqué qu'il n'était en mesure de préciser ni les zones où des teintureries traditionnelles auraient été mises en difficulté ou éliminées du marché en raison des pratiques tarifaires dénoncées, ni les dates au cours desquelles ces faits se seraient produits ; qu'en tout état de cause, les articles de presse cités par le SNATT dont état de conditions d'exploitation très différentes entre ces deux types de pressings, conditions qui peuvent générer des écarts de coûts susceptibles de justifier les différences de prix relevées entre eux, et permettent de constater que des teintureries en place ont pu s'adapter aux nouvelles conditions du marché face à ces concurrents ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de faire application de l'article 19 de l'ordonnance du 1er décembre 1986,

Décide :

Article unique. - La saisine enregistrée sous le numéro P 08 est déclarée irrecevable.