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Décisions

Cass. com., 23 mars 1999, n° 97-30.319

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Directeur général de la concurrence

Défendeur :

Signal (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

Mme Mouillard

Avocat général :

Mme Piniot

Avocats :

Me Ricard, SCP Célice, Blancpain, Soltner.

TGI Bordeaux, prés., du 4 févr. 1997

4 février 1997

LA COUR : - Attendu que, par deux ordonnances du 7 mai 1996, le président du Tribunal de grande instance de Toulouse a, en vertu de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, d'une part, autorisé des agents de la direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes à effectuer une visite et des saisies de documents dans les locaux de six entreprises, parmi lesquels ceux de la SA Signal situés à Mérignac (Gironde), d'autre part, donné commission rogatoire au président du Tribunal de grande instance de Bordeaux pour contrôler le déroulement des opérations effectuées dans son ressort ; que ce dernier a, par ordonnance du 23 mai 1996, désigné deux officiers de police judiciaire pour y assister ; que, par requête déposée le 14 janvier 1997, la société Signal a contesté la saisie de certaines pièces, effectuées selon elle en dépassement du champ de l'ordonnance ; que par l'ordonnance attaquée rendue le 4 février 1997, le président du Tribunal de grande instance de Bordeaux a annulé diverses saisies ;

Sur la recevabilité du pourvoi contestée par la défense : - Attendu que la société Signal soulève l'irrecevabilité du pourvoi du directeur général de la Concurrence, tardif selon elle pour avoir été formé plus de 5 jours francs après la décision attaquée ;

Mais attendu que, si la déclaration de pourvoi n'est intervenue que le 18 septembre 1997, il ne peut être considéré, faute de production d'une signification éventuelle de la décision attaquée, que le délai prévu à l'article 568 du même Code avait commencé à courir lorsque le directeur général de la Concurrence a déclaré son pourvoi, lequel doit dès lors être déclaré recevable ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches : - Attendu que le directeur général de la Concurrence fait grief à l'ordonnance de ne pas avoir entendu les parties en audience publique et d'avoir été prononcée non publiquement alors, selon le pourvoi, d'une part, que les débats sont publics, sauf le cas où la loi exige qu'ils aient lieu en chambre du conseil ; qu'aucune disposition ne prévoit que le juge saisi aux fins de contrôler la régularité des opérations de visites et saisies autorisées puisse statuer sans débats publics ; que, dès lors, la décision qui ne précise pas que les débats ont eu lieu en audience publique encourt la cassation pour violation des articles 11-1 de la loi n° 72-626 du 5 juillet 1972, 433 et 446 du nouveau Code de procédure civile, 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; alors, d'autre part, que les décisions contentieuses sont prononcées publiquement ; qu'aucune disposition ne prévoit que le juge saisi aux fins de contrôler la régularité des opérations de visites et saisies autorisées puisse prononcer sa décision non publiquement ; que, dès lors, la décision rendue en l'espèce dans des conditions non précisées et qui se borne à mentionner " fait à Bordeaux le 4 février 1997 " encourt la cassation pour violation des articles 11-2 de la loi n° 72-626 du 5 juillet 1972, 451 et 458 du nouveau Code de procédure civile, 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Mais attendu, d'une part, qu'il résulte de l'article 446 du nouveau Code de procédure civile, applicable en la cause, qu'aucune nullité ne peut être ultérieurement soulevée pour inobservation de la publicité des débats si elle n'a pas été invoquée avant leur clôture ; qu'il n'est pas établi que tel ait été le cas en l'espèce ;

Attendu, d'autre part, qu'aux termes de l'article 458 du même Code, aucune nullité ne peut être soulevée pour inobservation des formalités prescrites à l'article 451, si elle n'a pas été invoquée au moment du prononcé de la décision, par simples observations dont il est fait mention au procès-verbal d'audience ; qu'il n'est pas allégué que de telles observations aient été présentées ; qu'il s'ensuit que le moyen est irrecevable en chacune de ses deux branches ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches : - Attendu que le directeur général de la Concurrence fait aussi grief à l'ordonnance d'avoir retenu sa compétence pour contrôler la régularité des opérations de visites et de saisies des documents effectuées dans les locaux de la société Signal à Mérignac alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'appréciation de l'adéquation des documents saisis au champ de l'ordonnance d'autorisation appartient au juge qui a délivré l'autorisation, tant pour les saisies effectuées dans son ressort que pour celles effectuées dans les lieux pour lesquels il a délivré commission rogatoire, le juge saisi sur commission rogatoire n'étant compétent que pour le contrôle du déroulement matériel des opérations effectuées dans son ressort ; que, dès lors, aucune contestation du déroulement matériel des opérations n'étant invoquée en l'espèce, le juge saisi qui n'avait statué que sur commission rogatoire n'était pas compétent pour apprécier l'adéquation des documents saisis au champ de l'ordonnance d'autorisation qu'il n'avait pas rendue lui-même ; qu'en se reconnaissant compétent, le juge a violé l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; et alors que le président du Tribunal de grande instance de Bordeaux a mentionné dans son ordonnance du 23 mai 1996 "Indiquons que les entreprises peuvent nous saisir par voie de requête pour contester la régularité du déroulement matériel des opérations" ; qu'en se reconnaissant compétent pour apprécier l'adéquation des documents saisis au champ de l'ordonnance d'autorisation qu'il n'avait pas rendue lui-même, le juge a violé l'autorité de la chose jugée attachée à sa précédente décision, en violation de l'article 1351 du Code civil ;

Mais attendu qu'aux termes de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, la visite et la saisie s'effectuent sous l'autorité et le contrôle du juge qui les a autorisées et, lorsqu'elles ont lieu en dehors du ressort de son tribunal de grande instance, ce magistrat délivre une commission rogatoire pour exercer ce contrôle au président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel s'effectue la visite ; que c'est donc à bon droit, et sans méconnaître l'autorité attachée à sa précédente ordonnance désignant des officiers de police judiciaire chargés d'assister aux opérations et de lui rendre compte de leur déroulement que le président du tribunal s'est reconnu compétent pour apprécier l'adéquation des documents saisis au champ de l'ordonnance ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;

Et sur le troisième moyen : (sans intérêt) ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.