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Décisions

CA Paris, 1re ch. H, 12 octobre 1999, n° ECOC9910302X

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

ministre de l'Economie et des Finances

Défendeur :

Rallye (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Présidents :

Mmes Favre, Renard-Payen, Kamara

Conseillers :

Mme Bregeon, M. Hascher

Avoué :

SCP Fisselier-Chiloux-Boulay

Avocat :

Me Cussac.

CA Paris n° ECOC9910302X

12 octobre 1999

Le 23 décembre 1991, le ministre de l'Economie et des Finances a saisi le Conseil de la concurrence (le Conseil) de pratiques susceptibles d'être qualifiées d'ententes prohibées, mises en œuvre par la société Rallye lors de l'acquisition des réseaux de distribution Disque Bleu et Genty Cathiard, concernant la renégociation des contrats de coopération commerciale avec les fournisseurs ainsi que des demandes de participations publicitaires.

Par décision n° 95-D-34, en date du 9 mai 1995, le Conseil a estimé qu'il n'était pas établi que la société poursuivie ait enfreint les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986.

Par arrêt du 7 avril 1998, la Cour de cassation :

A cassé et annulé, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 mars 1996 par lequel cette cour, réformant la décision du Conseil, avait prononcé à l'encontre de la société Rallye une sanction pécuniaire de 7 millions de francs ;

A remis la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyées devant cette cour autrement composée ;

LA COUR :

Vu la déclaration de saisine en date du 11 mars 1999 par laquelle le ministre de l'Economie et des Finances demande à la cour, en sa qualité de cour de renvoi, de :

Dire que l'accord de volonté prévu par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 est établi ;

Constater que les pratiques en cause, présentant un objet et des effets anticoncurrentiels, sont sanctionnables sur le fondement dudit article ; qualifier les pratiques en cause au regard de l'article 7 ;

Confirmer la sanction pécuniaire d'un montant de 7 millions de francs infligée à la société Casino SCA ;

Vu la déclaration de saisine en date du 23 mars 1999 par laquelle le ministre de l'Economie et des Finances demande à la cour, en sa qualité de cour de renvoi, de :

- dire que l'accord de volonté prévu par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 est établi ;

- constater que les pratiques en cause, présentant un objet et des effets anticoncurrentiels, sont sanctionnables sur le fondement dudit article ;

- qualifier les pratiques en cause au regard de l'article 7 ;

- confirmer la sanction pécuniaire d'un montant de 7 millions de francs infligée à la société Casino SCA ;

Vu les écritures déposées le 15 avril 1999, par lesquelles le ministre de l'Economie et des Finances, rectifiant l'erreur matérielle contenue dans les moyens joints à sa déclaration du 23 mars 1999, précise que cette dernière concerne la société Rallye SA au lieu de la société Casino SCA ;

Vu les conclusions en date du 21 mai 1999, par lesquelles la société Rallye prie la cour de :

- constater que la société Casino SCA n'existe pas ;

- déclarer le ministre irrecevable en son recours en ce que, d'une part, il ne peut demander la confirmation d'un arrêt d'appel cassé et annulé en toutes ses dispositions et, d'autre part, il viole les droits de la défense en ne désignant pas l'entreprise mise en cause ;

- constater qu'il ne peut régulariser la procédure sans violer les dispositions des articles 1033 du nouveau Code de procédure civile et 2 du décret du 19 octobre 1987 et le déclarer, de plus fort, irrecevable en ses demandes ;

- constater que le ministre n'a pas respecté les délais de notification à la société Rallye de sa déclaration de saisine en application des articles 1036, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile et 4 du décret du 19 octobre 1987 et le déclarer, de plus fort, irrecevable en ses demandes ;

le dire irrecevable faute de justification des pouvoirs de M. Diricq pour saisir la cour ;

- constater que les pratiques de la société Rallye ne sont pas susceptibles de constituer une entente ;

- condamner le ministre à lui verser la somme de 300 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Vu les observations déposées le 8 juin 1999 par le Conseil ;

Vu les observations en réplique respectivement déposées le 18 juin 1999 par le ministre de l'Economie et des Finances et le 1er juillet 1999 par la société Rallye ;

Le Ministère public ayant été entendu à l'audience en ses observations orales tendant à la recevabilité de la saisine de la cour et à la réformation de la décision du Conseil ;

Sur ce :

Considérant qu'aux termes de l'article 16 du décret du 19 octobre 1987, le ministre de l'Economie et des Finances est représenté par le directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ou son délégué ;

Que, par décret du 13 janvier 1999 publié au Journal officiel du 15 janvier 1999, M. Noël Diricq a reçu délégation de signature de sorte qu'il était habilité à saisir cette cour ;

Considérant que, dans ses écritures du 18 juin 1999, le ministre de l'Economie et des Finances renonce à toutes demandes envers la société Casino SCA ; que la saisine de la cour se trouve en conséquence limitée au recours exercé à l'encontre de la société Rallye ;

Considérant qu'il ressort des dispositions des articles 1032 et 1033 du nouveau Code de procédure civile que la juridiction de renvoi après cassation est saisie par déclaration à son secrétariat contenant les mentions exigées pour l'acte introductif d'instance devant elle ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 19 octobre 1997, la déclaration de recours doit préciser, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, l'objet du recours ;

Considérant, en l'espèce, que, dans la déclaration de saisine à laquelle il a procédé le 23 mars 1999 à l'encontre de la société Rallye, le ministre de l'Economie et des Finances vise la décision du Conseil ;

Qu'il ne formule cependant aucune critique à son égard et se borne à se référer à l'arrêt du 5 mars 1996 dont il sollicite la confirmation alors que, par l'effet de la cassation prononcée, celui-ci n'existe plus ;

Considérant qu'il s'ensuit que sa déclaration de saisine doit être déclarée irrecevable ;

Considérant que l'équité commande de ne pas attribuer de somme au titre des frais non compris dans les dépens,

Par ces motifs : Statuant sur renvoi après cassation : Considérant que le ministre de l'Economie et des Finances a renoncé à ses prétentions à l'égard de la société Casino SCA ; Dit irrecevable la déclaration de saisine concernant la société Rallye SA ; Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties ; Condamne le ministre de l'Economie et des Finances aux dépens comprenant ceux de l'arrêt cassé.