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Décisions

Conseil Conc., 17 juin 1997, n° 97-D-39

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Décision

Pratiques mises en œuvre par différentes entreprises dans le secteur du béton prêt à l'emploi dans la région Provence-Alpes-Côte d'Azur

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré, sur le rapport de M. Jean­René Bourhis, par M. Barbeau, président, MM. Cortesse, Jenny, vice­présidents, MM. Bon, Callu, Gicquel, Mme Hageslsteen, MM. Marleix, Pichon, Rocca, Sloan, Thiolon, Urbain, membres.

Conseil Conc. n° 97-D-39

17 juin 1997

Le Conseil de la concurrence (formation plénière),

Vu la lettre enregistrée le 5 juillet 1994 par laquelle le ministre d'État, ministre de l'Economie, des Finances et du Budget a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre dans le secteur du béton prêt à l'emploi dans la région Provence­Alpes­Côte­d'Azur (PACA) ; Vu l'ordonnance n° 86­1243 du 1er décembre 1986 modifiée, relative à la liberté des prix et de la concurrence et le décret n° 86­1309 du 29 décembre 1986 modifié, pris pour son application ; Vu l'arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, en date du 3 octobre 1995 ; Vu les observations présentées par les sociétés Béton de France Sud-Est, Béton Chantiers Prêt (BCP), Unibéton, Redland Granulats Sud, Béton Granulats Sylvestre, Béton Chantiers du Var (BCV), Super Béton, Express Béton, Société Brignolaise de Béton et d'Agglomérés (SBBA), Béton Chantiers Nice (BCN), Béton de France, Béton Contrôlé de la Côte d'Azur (BCCA), Béton Travaux, Lafarge Béton Granulats, Lafarge Ciments et Vicat ainsi que par le commissaire du Gouvernement ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement et les représentants des sociétés Béton de France Sud-Est, Béton Chantiers Prêt (BCP), Unibéton, Redland Granulats Sud, Béton Granulats Sylvestre, Béton Chantiers du Var (BCV), Super Béton, Express Béton, Société Brignolaise de Béton et d'Agglomérés (SBBA), Béton Chantiers Nice (BCN), Béton Contrôlé de la Côte d'Azur (BCCA), Béton Travaux, Lafarge Béton Granulats, Lafarge Ciments et Vicat entendus, la société Béton de France ayant été régulièrement convoquée ; Adopte la décision fondée sur les constatations (I) et sur les motifs (II) ci­après exposés.

I. ­ CONSTATATIONS

A. ­ Le secteur d'activité, les marchés concernés et les entreprises

1. Le secteur d'activité

Le béton prêt à l'emploi est fabriqué à partir du ciment, des granulats, du sable et éventuellement d'autres adjuvants, dans des centrales fixes ou mobiles. Le coût moyen d'une centrale fixe varie entre environ 1 et 2 millions de francs.

A la fin de l'année 1993 et au courant de l'année 1994, avant l'entrée en vigueur de la nouvelle norme, les producteurs de béton opéraient une distinction entre différents types de béton, selon que les bétons étaient ou non normalisés :

- Le béton courant (dit " béton de marque ") correspond à un degré de résistance de 25 mégapascals (Mgp). Les bétons de marque commercialisés par les entreprises présentes dans le département du Var sont le BC 25 pour la société Béton Chantiers du Var, le VIC 25 pour la société Super Béton, le RMC 25 pour la société Béton de France et le béton UNI 25 pour UNIMIX et sa filiale, la Société Méditerranéenne de Béton (SMB) ;

- Le béton normalisé dit " à résistance garantie ". Le dosage retenu dans les cahiers des charges des ouvrages publics est généralement fixé à 350 kg de ciment par mètre cube de béton.

La nouvelle norme P 18 305, entrée en application courant 1994, fixe un dosage minimal en liant qui varie selon les " classes d'environnement " qui varient elles­mêmes, d'une part, selon les zones géographiques et, d'autre part, selon qu'il s'agit de béton armé et non armé ou encore précontraint. S'agissant du département du Var, le dosage varie entre 200 et 240 kg de ciment pour le béton non­armé. Il est de 280 kg de ciment par mètre cube pour le béton armé (Cf. Ouvrages du Syndicat National du Béton Prêt à l'emploi ­ (SNBPE) ­ intitulés " Guide d'utilisation de la norme béton prêt à l'emploi "). Selon le directeur du Centre Scientifique et Technique du Bâtiment (CSTB), les logements et les parkings nécessitent obligatoirement l'emploi de béton armé dans toutes les parties tendues, planchers en particulier, ainsi que dans les points singuliers des murs et fondations.

Le ciment est le constituant le plus coûteux des matériaux utilisés pour la fabrication du béton prêt à l'emploi. Les professionnels utilisent généralement 2 qualités de ciments pour cet usage : le ciment de type CPA (ciment Portland artificiel), de résistance plus élevée (au moins 97% de clinker selon la norme en vigueur en 1993), et le ciment CPJ (ciment Portland composé) de résistance moindre (65 à 97 % de clinker). Le clinker est un matériau obtenu par cuisson d'un mélange de craie et de chaux avec des produits argileux tels que le schiste, l'ardoise et le sable.

Tous les producteurs de ciment sont présents dans le secteur aval de la production du béton prêt à l'emploi qui représente pour l'industrie du ciment un débouché essentiel (environ 45% du ciment serait ainsi utilisé dans le BTP à travers le béton). Ainsi, la société Lafarge Ciments, à travers sa filiale Lafarge Béton Granulats, la société Calcia, à travers sa filiale Unibéton (anciennement Unimix), la société VICAT, à travers sa filiale Béton Travaux, sont présents dans le secteur du béton sur le plan national et notamment dans la région Provence­Alpes­Côte­d'Azur (PACA), concernée par la saisine. Les deux autres producteurs d'importance nationale sont les sociétés Béton de France, filiale du groupe Ready Mix Concrete (RMC) au Royaume Uni, et Redland, filiale du groupe du même nom au Royaume Uni, qui intervient dans la région PACA par l'intermédiaire de sa filiale Redland Granulats Sud.

Les groupes précités se trouvent fréquemment concurrencés par des entreprises locales à capitaux familiaux, à l'instar de la Société Nouvelle des Bétons Techniques (SNBT), qui exploitait une centrale à béton à La Ciotat et une autre à Ollioules, et de la société Bonifay, négociant en matériaux, pour ce qui concerne la région de Toulon.

Les granulats représentent, en valeur, le second constituant du béton prêt à l'emploi, ce qui explique que des producteurs de granulats sont également présents dans l'industrie du béton. Ainsi, dans la zone géographique concernée par la saisine, le groupe Garassin a pris des participations dans le capital de sociétés de béton prêt à l'emploi exploitées par des filiales de groupes d'importance nationale. De la même manière, le groupe Redland, fortement implanté dans le secteur des granulats, développe une activité importante dans le secteur du béton.

L'activité béton prêt à l'emploi est directement sujette aux variations de l'activité du BTP. Selon les chiffres communiqués par l'Union nationale des industries de carrière et matériaux (UNICEM), la production au cours des cinq premiers mois d'activité a évolué comme suit, en 1993 et 1994, dans le département du Var (en mètre cube) :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

2. Les marchés concernés et les entreprises

A la différence de ses constituants (ciments, granulats), le béton prêt à l'emploi est un produit qui ne se stocke pas, ce qui implique que les livraisons soient effectuées dans un délai très court (une heure à une heure et demie au maximum). Par ailleurs, le coût du transport du béton, produit pondéreux transporté en camions spéciaux de malaxage, a une incidence importante sur le coût du produit final. Les entreprises de production de béton possèdent parfois leur propre flotte de " camions toupies " mais elles ont souvent recours à des entreprises de transport spécialisées couramment appelées " locatiers ". Le prix du transport du béton est généralement fixé par les locatiers en fonction de zones concentriques dessinées autour des centrales de production. Pour ces différentes raisons, le Conseil de la concurrence estime (Cf. notamment décisions n° 93­D­54 du 30 novembre 1993 et n° 94­D­30 du 24 mai 1994) que les marchés du béton prêt à l'emploi géographiques sont définis comme des zones sphériques situées autour de centres urbains, consommateurs de béton, zones d'environ 25 km de rayon. Il arrive également que les entreprises de BTP décident, notamment en fonction des prix pratiqués sur le marché, de fabriquer eux­mêmes leur propre béton à partir de centrales mobiles.

Pour des raisons topographiques et de dessertes routières, les marchés ne coïncident pas nécessairement avec les limites des découpages administratifs. Ainsi, dans un département donné (comme celui du Var), existent plusieurs marchés du béton prêt à l'emploi dont le plus important est celui de Toulon. Au cours de l'année 1993 ont débuté les importants travaux relatifs à la traversée souterraine de Toulon (tunnel, station d'épuration ...) qui ont accru fortement la demande de béton prêt à l'emploi dans cette zone, alors que la demande globale enregistrait une tendance à la baisse dans l'ensemble de la région PACA et notamment dans le département du Var. En dépit du soutien de la demande, les prix du béton prêt à l'emploi subissaient une baisse très forte à partir du mois de novembre 1993, baisse qui coïncide avec l'entrée sur le marché d'un nouveau producteur, la SNBT, qui avait installé une centrale à béton à Ollioules, en octobre 1993. A la différence de ses concurrents, la SNBT utilisait notamment des ciments en provenance de Grèce importés par la société Intertitan.

Dans l'ouest du département du Var (zone de Toulon), les principales entreprises intervenant sur ce marché au moment des faits étaient les suivantes : Béton de France, Béton Chantiers du Var (appartenant au groupe Lafarge Ciments), Société Méditerranéenne de Béton (SMB) (détenue à 50 % par la société Unibéton et à 50 % par le groupe Garassin, qui n'en assurait pas la gestion), Super Béton (filiale commune de Lafarge Ciments et Vicat, qui en assure la gestion), la société Bonifay et la SNBT, à partir d'octobre 1993.

Dans l'est du département Var : les sociétés Express Béton (appartenant au groupe Lafarge Ciments), Unimix (devenue Unibéton appartenant au groupe Calcia, anciennement Ciments Français), Société Brignolaise de Béton et d'Agglomérés (SBBA, détenue à 50 % par la société Béton de France et à 50 % par le groupe Garassin) et Redland Granulats Sud.

Dans la zone d'Aix­en­Provence : le GIE Béton et Granulats Phocéens (BGP), dissous fin 1994, SMB, Béton de France et Redland Granulats Sud.

Dans la zone d'Avignon : les sociétés Béton Chantiers Prêt (BCP) (appartenant au groupe Lafarge Ciments), Unimix, Béton de France, Redland Granulats Sud ainsi que quelques entreprises familiales.

Dans la zone de Cavaillon : les sociétés BCP, Unimix, Redland Granulats Sud ainsi que quelques petites entreprises familiales au nombre desquelles figure la société Bétons Granulats Sylvestre.

Dans la zone de Nice : les sociétés Béton Chantiers Nice (BCN, filiale du groupe Lafarge Ciments), Béton Contrôlé de la Côte d'Azur (BCCA, filiale du groupe Vicat), Béton de France et quelques entreprises familiales.

B. ­ Les circonstances de l'origine de l'enquête : la dénonciation des faits par MM. Mas et Engel, responsables de la société nouvelle des bétons techniques (SNBT) auprès des services de la direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DCCRF), le 5 juillet 1993

MM. Mas et Engel se sont présentés le 5 juillet 1993 à la Brigade interrégionale d'enquête de Marseille (BIE) où ont été recueillies leurs déclarations. A l'issue de leur audition, deux procès-verbaux ont été rédigés par les enquêteurs, l'un manuscrit, l'autre dactylographié. Le procès-verbal manuscrit ne figure pas au dossier de saisine au fond mais a été joint uniquement en photocopie au dossier de demande de mesures conservatoires présentée par le ministre chargé de l'économie. Le procès-verbal dactylographié, qui figure en original au dossier de fond, comporte les déclarations suivantes :

"M. Mas nous expose ce qui suit : j'étais directeur commercial de la société UNIMIX pour la région PROVENCE­ALPES­COTE D'AZUR de septembre 1992 à mars 1993. Auparavant, j'étais directeur de l'agence de Toulon de la même société dont le siège social était 15, quai Le Chatelier de l'île SAINT­DENIS à PARIS. La Région qui s'appelle la région " Rhône Méditerranée " c'est-à-dire de Lyon à Nice et Perpignan a son siège ZI des Molières à Miramas (13). Mon bureau était situé ZA du Bertoire à LAMBESC. C'est Monsieur AUZAS qui était mon supérieur hiérarchique direct et qui a également son bureau à LAMBESC.

Comme directeur commercial, j'avais reçu l'ordre de M. AUZAS d'organiser la répartition de marché du béton prêt à l'emploi de la Région PACA, dans le cadre d'une entente entre le GIE BETONS GRANULATS PHOCEENS (BGP), BETONS DE FRANCE, et UNIMIX, ceci pour le secteur des BOUCHES­DU­RHONE Nord englobant AIX­EN PROVENCE. Ensuite je gérais l'entente du secteur AVIGNON­CAVAILLON (84) entre les sociétés BETONS CONTROLES PRADIER (BCP), UNIMIX et BETONS DE FRANCE. De la même façon dans le VAR entre BETON 83 Z.I. du Camp Laurent à LA SEYNE, BETON DE FRANCE, BETON CHANTIERS DU VAR et UNIMIX, ceci concernant le VAR Ouest.

Dans le VAR Est, l'entente regroupait EXPRESS BETON (Lafarge), BETON DE FRANCE et UNIMIX.

Voilà pour ce qui concernait mon rôle dans l'entente.

Je précise que depuis plusieurs mois je répétais à mes supérieurs que je ne voulais plus gérer ces ententes conscient que j'étais de l'illégalité de ces pratiques. Au début du mois de mai 1993 j'ai été licencié pour faute lourde injustifiée, sans indemnité aucune. A ce sujet, je suis actuellement en procès aux Prud'hommes de TOULON par l'intermédiaire de Maître HOUILLOT 4 rue Péreisc à TOULON.

Ayant pressenti début 1993 mon licenciement, j'ai pris des participations passives dans la SARL SNBT dont je détiens la moitié du capital social, l'autre moitié étant détenue par mon associé M. ENGEL.

La société SNBT fabrique des éléments préfabriqués en béton, et depuis la mi-mai du béton prêt à l'emploi, que nous commercialisons dans une zone de 25 kilomètres autour de LA CIOTAT. Depuis cette date, M. ENGEL et moi-même, ainsi que nos épouses n'avons cessé de subir des pressions et menaces de toute sorte, ainsi qu'un attentat contre notre voiture aux alentours du mois de mai.

Plainte a été déposée auprès des services de la Gendarmerie de LA CIOTAT. Tous les détails de ces pressions et voies de fait sont consignés dans nos déclarations à la Gendarmerie qui comportent les noms des personnes qui font pression sur nous. Nous avons prévenu les gendarmes de LA CIOTAT que nous venions vous voir.

Je vous remets ce jour, copie de mes notes manuscrites prises au cours des réunions de répartition de marché entre le 7 janvier 1993 et le 15 avril 1993. J'ai conservé les originaux de ces documents et j'ai remis copie du dossier que je vous donne à mon avocat Maître Houillot.

Ces documents comportent les éléments ci-après :

- date et lieux des réunions ;

- noms des participants et noms des sociétés ;

- pourcentages des parts de marchés de chacun ;

- suivi des parts de marchés, écarts par rapport aux objectifs ;

- prix de chaque marché, de chaque client déterminé à l'avance et prix des entreprises couvrant l'attributaire pré­désigné.

Je précise que chez Unimix nous avions pour consigne de détruire tous ces documents, tous les trois mois.

Je précise aussi que les notes de frais d'Unimix sont à la comptabilité à MIRAMAS. Les frais de réunions, repas et locations de salle étaient payés à tour de rôle. En principe les salles de réunions étaient réservées au nom de la personne qui réservait et très rarement au nom des sociétés. Je vous remets quarante quatre feuillets que vous annexez à mes déclarations ".

M. ENGEL nous déclare : " Il y a quinze ans que je travaille dans le secteur du BTP où toutes les pratiques que vous a décrites M. MAS sont connues. Je tiens à préciser qu'actuellement, sur le secteur de LA CIOTAT, BGP casse les prix auprès de nos clients afin de nous faire disparaître, abusant de sa position dominante ".

M. MAS ajoute : dans le passé, début 1993, des actions ponctuelles de ce type ont été menées par l'entente afin d'éliminer des indépendants du nord des BOUCHES­DU­RHONE comme PRO­BETON à GIGNAC et GM BETON à ENTRAIGUES (84) ".

Le procès­verbal manuscrit comportait, outre la totalité des déclarations ci­dessus mentionnées, les informations suivantes communiquées oralement par M. Mas :

" Les notes prises par les autres participants à toutes ces réunions peuvent à mon avis être retrouvées chez :

­ M. AUZAS à son bureau, son domicile ou dans sa voiture : son bureau à LAMBESC, son domicile à PELLISSANNE.

­ M. FERNANDEZ, qui m'a remplacé chez UNIMIX sur le secteur, et qui a son bureau ZI COURTINE à AVIGNON

­ M. Bernard MARIE chez BGP Agence d'Aix

­ M. DANERE, BETON DE FRANCE, qui habite à AUBAGNE, bureau A

­ Pierre PERASSO, BGP au siège ".

C. ­ Les éléments recueillis lors de l'enquête et relatifs à des pratiques de concertation généralisée de quotas et de prix entre sociétés concurrentes telles que dénoncées par MM. Mas et Engel dans leur plainte

Une enquête est ouverte en septembre 1993 par les services de la DGCCRF. Cette enquête préliminaire menée sur le fondement des dispositions de l'article 47 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 est suivie par une enquête effectuée sur le fondement des dispositions de l'article 48 de l'ordonnance, le 7 février 1994, avec visite simultanée de locaux commerciaux de différentes entreprises et saisies de documents, et ce, à la suite d'une ordonnance rendue le 28 janvier 1994 par le président du tribunal de grande instance de Marseille. Le 3 octobre 1995 la Cour de cassation valide l'ordonnance rendue le 28 janvier 1994, à l'exception d'une disposition fixant un " délai de six mois pour la présentation des requêtes en contestation de la régularité des opérations de visite et saisie domiciliaire ". Le 5 juillet 1994, le Conseil est saisi par le ministre de l'économie de pratiques relatives au " marché du béton prêt à l'emploi de la région Provence­Alpes­Côte­d'Azur ". Le ministre dénonce notamment des ententes de répartition de marché dans les départements des Bouches-du-Rhône, du secteur d'Avignon et de Cavaillon, de l'ouest et de l'est du département du Var. En outre, il dénonce une entente visant à exclure du marché la Société Nouvelle du Béton Technique (SNBT). La saisine du ministre était accompagnée d'une demande de mesures conservatoires.

1. Les constatations effectuées auprès de divers établissements hôteliers

Lors de l'enquête, les constatations suivantes ont pu être effectuées auprès de différents établissements hôteliers de la région PACA :

- pour la journée du 7 janvier 1993, le responsable de l'hôtel Campanile de La Penne­sur­Huveaune (13) a versé au dossier une copie de son carnet de réservations et a déclaré que la salle de réunion étant déjà réservée à cette date, c'est dans une chambre que s'est tenu " le séminaire de M. Mari ". Ce même responsable a également versé au dossier une copie de son agenda qui établit que les 25 mars et 14 avril 1993, M. Nervi, de la société Redland, avait loué la salle de réunion de l'hôtel ;

- pour la journée du 8 janvier 1993, le directeur de l'hôtel Campanile de La Seyne­sur­Mer a confirmé que M. Gerondal, cadre de la société Super Béton, avait réservé une salle de réunion ;

- pour la journée du 18 janvier 1993, M. Christian Nervi de la société Redland a réservé une salle de réunion à l'hôtel Les Relais Bleus à Aix-en-Provence. Une note de frais d'un montant de 432 F a été établie pour la location de la salle Vasarely, le 18 janvier ;

- pour la journée du 20 janvier 1993, la société Unimix a réservé un salon à l'auberge l'" Orée du Bois " situé carrefour Sainte­Roseline au Muy (83) ;

- pour la journée du 3 février 1993, la société Béton de France a réservé une salle de réunion à l'hôtel Araxe situé à l'Isle sur la Sorgue dans le Vaucluse. La propriétaire de l'hôtel a déclaré, le 24 septembre 1993, par procès-verbal d'audition : " Je reconnais avoir, à plusieurs reprises, loué à la société Béton de France à Saint­Saturnin­les­Avignon, un salon de l'hôtel pour une réunion de six personnes pour une durée d'une demi-journée. Je vous remets un duplicata des doubles de notes correspondant aux prestations facturées au titre de ces locations dont la liste figure ci-après " ;

- pour la journée du 5 février 1993, la société Béton de France a réservé une salle à l'hôtel Climat de France à La Farlède (83). Une salle a également été réservée dans cet établissement par M. Mas pour le 5 mars 1993 pour la " matinée " ;

- pour la journée du 17 février 1993, M. Bicchi de la société Béton de France a réservé une salle de réunion de 14 heures à 18 heures à l'hôtel­gril Campanile situé RN 8 à Marseille ;

- pour la journée du 12 mars 1993 : M. Mas a réservé une salle de réunion à l'hôtel Campanile de Saint­Antoine à Marseille (15 ème) ;

- pour la journée du 22 mars 1993 : la société Redland a réservé un salon de 14 heures à 18 heures à l'hôtel Mercure de Lançon­de­Provence (13) pour 8 à 10 personnes.

Les dates susmentionnées correspondent toutes à des dates mentionnées par M. Mas lors de sa déposition, le 5 juillet 1993, comme étant des dates de réunion entre sociétés concurrentes. Ces dates apparaissent en effet sur un document manuscrit intitulé " Réunion de table PACA ", rédigé par M. Mas et annexé à sa plainte.

2. Les notes manuscrites prises par MM. Mas et Fernandez et les déclarations des intéressés

Dans sa déposition, le 5 juillet 1993, auprès de la BIE de Marseille, M. Mas avait mentionné l'existence de " notes manuscrites prises au cours des réunions de répartition de marché entre le 7 janvier 1993 et le 15 avril 1993 " et déclaré avoir " conservé les originaux de ces documents et (....) remis copie du dossier (.....) à mon (son) avocat Maître Houillot ".

M. Mas avait communiqué aux enquêteurs quarante­quatre feuillets manuscrits en photocopies, comportant notamment des tableaux, dont certains sont datés, consistant en des listes de chantiers. Au regard de ces différents chantiers figurent des colonnes comportant des abréviations telles " SMB, BF, B 83, B.C. ". Ainsi, à la date du 2 février 1993, figure la mention suivante :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

Le 8 novembre 1995, M. Mas a versé au dossier les pièces suivantes en originaux : ­ un agenda annoté de sa main au crayon, faisant apparaître des lieux de réunions organisées du 7 janvier 1993 au 10 mai 1993. Ces informations, qui concernent des réunions relatives à différentes zones géographiques de la région Provence­Alpes­Côte­d'Azur (Bouches­du­Rhône Nord, Toulon, Avignon­Cavaillon, Var Est, Marseille Est), portent mention du lieu où elles sont supposées s'être tenues (Hôtel Campanile Saint-Antoine, Hôtel Climat de France à La Farlède, Coustellet...) ­ des cahiers à spirales de couleur bleue, verte et rouge, annotés de la main de M. Mas au crayon et comportant différents tableaux datés comportant en lecture verticale une liste de marchés et en lecture horizontale quatre colonnes supposées correspondre chacune à une entreprise (SMB, BF, B 83 et BC), l'entreprise attributaire du marché étant, aux dires de M. Mas, celle marquée d'un rectangle ­ des tableaux chiffrés portant des abréviations d'entreprises (BGP, BF, SMB...) ainsi que des pourcentages.

Lors de son audition, le 8 novembre 1995, M. Mas a déclaré : " Le document coté 131 sur le cahier vert correspond à une réunion organisée à l'hôtel Baladin le 9 avril 1993. Le but de cette réunion était le partage des marchés de l'accès Ouest et Est du tunnel de Toulon ainsi que la station d'épuration du Cap Sicié. Cette réunion faisait suite à plusieurs réunions préparatoires dont l'une s'est tenue vraisemblablement le 16 mars 1993 à La Seyne comme l'atteste l'annotation portée sur mon agenda à cette date. L'annotation " 6000 BC 6000 BF " correspond au partage des parois moulées réalisées par la société Bachy (6000 pour Béton Chantiers du Var et 6000 pour Béton de France).

Le document que vous me montrez, qui a été saisi dans la société Unimix (coté 3584) est une prévision de volumes interne à l'entreprise rédigée par un commercial (certainement M. Delpy). Selon les pratiques en vigueur dans l'entreprise, le point d'interrogation figurant dans la rubrique " chantiers à traiter " signifie que le commercial concerné interroge son supérieur au sujet des prix à remettre ainsi qu'au sujet des sociétés concurrentes desquelles il doit se rapprocher.

(...)

Comme je l'ai déjà déclaré, j'étais chargé de gérer 5 secteurs géographiques dans l'entente organisée entre les producteurs de béton, filiales de cimentiers et béton de France. Ces zones étaient les suivantes : ­ Cavaillon, Avignon, Aix (Bouches-du-Rhône Nord),­ Fréjus­Saint­Raphaël (Var­Est),­ Toulon (Var Ouest). Les parts indiquées pour chacune de ces zones et pour chaque société concernée (Cf. cotes 150 et 151 pour Cavaillon et Avignon) étaient fixes. Elles pouvaient varier lors de fermetures de centrales (exemple lors de la fermeture de la centrale de Fos par la société Unimix, cette entreprise a bénéficié d'une augmentation de part de marché de 2% à Toulon en compensation, dans la mesure où à Toulon se pratiquaient les prix les plus élevés du secteur).

(...)

Il existait également une entente sur le secteur de Marseille au sein du groupement BGP avec Béton de France comme j'en témoigne le 15 janvier 1993, j'avais été invité à déjeuner avec les membres de l'entente (M. Pierre Perasso).

Le 17 janvier 1993, date à laquelle j'étais en congés, s'est tenue une réunion au Campanile de Saint­Antoine à Marseille. M. Thierry Fernandez me représentait à cette réunion. Les notes figurant sur le cahier de couleur rouge en bas de page (cote 144) ont été prises par cette personne ".

Une note manuscrite, versée au dossier par M. Mas, datée du 5 février 1993 et intitulée " m3 janvier 1993 " se présente comme suit :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

" Après correction du mois d'août, (...) Sylvestre avait fait une erreur de 1000 m3 ".

Dans une télécopie enregistrée au Conseil le 20 janvier 1996, M. Fernandez, qui n'avait pas souhaité être entendu au Conseil de la concurrence, a déclaré : " M. Mas m'avait demandé de faire un point sur le marché AVIGNONNAIS avec mes confrères. C'est l'objet du document que vous possédez ".

3. Les pièces recueillies lors des enquêtes auprès d'entreprises concurrentes de la SNBT et les déclarations des intéressés au sujet des échanges d'informations entre sociétés concurrentes, antérieurement à l'implantation de la centrale à béton de la SNBT à Ollioules

a) Les pièces contenant des informations sur la production du béton prêt à l'emploi par des sociétés concurrentes

La zone géographique de Fréjus (département du Var), zone dans laquelle la société Redland Granulats Sud a implanté une centrale en 1992 :

Un cahier aide­mémoire appartenant à M. Alain de Philip, directeur des filiales du groupe Lafarge Ciments, division granulats, pour la région Sud­Est a été saisi au cours d'une visite effectuée, le 7 février 1994, dans les locaux de la société Lafarge Ciments à Marseille. Les informations figurant sur ce document sont les suivantes :

" AR suite réunion BPE + LUCAS FREJUS à GRANULATS CANTAREL Veut 3000 à FREJUS PANCIN dit 15 2800 CF REDLAND "

Alain de Philip, qui a reconnu être l'auteur de cette note, a déclaré, ne pouvoir les " restituer dans leur contexte chronologique circonstanciel ", n'arrivant pas à " établir une interprétation exacte de ce que l'on croit pouvoir y lire ". Au moment des faits, M. Alain de Philip occupait également les fonctions de représentant de la société Lafarge Ciments, en tant qu'administrateur de la société Super Béton, filiale commune exploitée en commun avec un autre producteur de ciment, le groupe Vicat. M. Pancin occupait, au moment des faits, la fonction de directeur délégué de la société Béton de France. M. Lucas exerçait la fonction de directeur régional de la société Redland Granulats Sud. Les initiales " CF " sont identiques aux initiales de la société Ciments Français, groupe auquel appartient de la société Unimix.

La zone de Toulon

Un document manuscrit, rédigé de la main de M. Arrieta, en tant que directeur de la société Super Béton, saisi le 7 février 1994 dans l'entreprise Super Béton à La Seyne­sur­Mer (83), mentionne :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

Les chiffres 2100,1900,1900,1200 inscrits respectivement au regard des sigles Béton de France (société Béton de France), BCV ( société Béton Chantiers du Var), 83 (société Super Béton) et SMB(Société Méditerranéenne de Béton) correspondent aux pourcentages suivants du total (7200) :

BF = 29,2%,

BCV = 26,4%,

Super Béton = 26,4%,

SMB = 16,7%.

Les Bouches-du-Rhône, le Var et le Vaucluse :

Une pièce manuscrite datée du 19 octobre 1993, saisie le 7 février 1994, dans les locaux des sociétés UNIMIX et SMB à Lambesc (13), dans le bureau de M. Auzas, mentionne :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

Une autre pièce manuscrite saisie dans la société Unimix (cote 3562) mentionne : " Place faite à Redland sur Fréjus partie à récupérer ailleurs " (cette phrase est raturée).

La Société Méditerranéenne de Béton (SMB) exploitait une centrale à béton à Venelle, dans le département des Bouches­du­Rhône.

Dans un cahier de couleur bleue à spirales intitulé " Muy ­ Saint-Raphaël ­ Frejus " versé au dossier par M. Mas, le 8 juillet 1995, on lit notamment, à la date du 1er mars 1993 :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

Par ailleurs, sur le même document, en regard d'une liste de chantiers apparaissent des chiffres dans chacune des colonnes intitulées " UNI ", " EB ", " BF ", et " Red". Ainsi, en regard de la mention " Gagnereau ­ Lycée de Roquebrune ", sont inscrits les montants suivants :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

La copie de ces pièces avait été communiquée aux enquêteurs par MM. Mas et Engel, lors de leur plainte auprès de la DGCCRF, le 5 juillet 1993, soit antérieurement à la saisie des pièces susmentionnées, en février 1994. Le chiffre de 6000, mentionné par M. Mas au sujet du sigle " Red", correspond à celui apparaissant sur le document saisi, le 7 février 1994, dans les locaux des sociétés Unimix et SMB.

La zone du Vaucluse :

M. Michel Galibert, producteur de béton à Entraigues (84), a déclaré, par procès­verbal en date du 25 octobre 1993 : " GM Béton a commencé à livrer le 11 janvier 1993 et les problèmes sont apparus : (......) " matraquage " sur les prix. Avant mon apparition sur le marché, les prix dans la zone que je livre étaient de l'ordre de 380 F/m3 pour les gros chantiers à 500 F et plus pour le particulier. Mes concurrents ont visité une clientèle et ont fait chuter les prix pour m'intimider. Les prix dans cette zone ont atteint aujourd'hui le niveau de 300 F/m3 pour tous les clients, ou moins./ ­ Je tiens le coup parce que j'ai une clientèle fidélisée avec GUIDI Matériaux et que certains de mes gros clients savent bien que si je disparais les prix remonteront au niveau antérieur./­ Le même phénomène s'était produit dans les années 89­90 quand l'indépendant PRADIER de Madrague (86) a été repris par Lafarge./­ Les concurrents qui cherchent à m'éliminer en cassant les prix sélectivement sont Béton de France, BCP, Unimix et Redland ".

Un tableau dactylographié daté du 21 décembre 1993 saisi dans la société Unimix intitulé " Rapport concurrence Vaucluse " fait ressortir des tonnages de béton par entreprise de janvier à septembre 1993. Ce tableau est reproduit ci­après :

" SECTEUR PACA

Le 21 décembre 1993

A l'attention de J.C. PELLE

<EMPLACEMENT TABLEAU>

INFORMATION : Redland fermerait sa centrale de Cavaillon en 1994 (livraisons assurées par la centrale de Sénas) "

La société Intertitan est un producteur grec, concurrent des cimentiers Lafarge, Vicat et Calcia. Les chiffres de 1168, attribué à l'entreprise Sylvestre, et 412, attribué à l'entreprise Redland, coïncident avec ceux figurant sur le cahier de couleur bleue appartenant à M. Mas et versé au dossier par ce dernier, le 8 novembre 1995. Ces chiffres figuraient également sur les tableaux communiqués aux enquêteurs en photocopies, le 5 juillet 1993, par M. Mas. Interrogé au sujet du tableau dactylographié saisi dans la société Unimix, le 7 février 1994, M. Mas a en effet déclaré, le 8 novembre 1995 : " Le tableau que vous me montrez et qui a été saisi dans l'entreprise Unimix correspond, à mon avis, à une synthèse des notes prises par moi­même jusqu'en avril 1993. Les chiffres (volumes de béton facturés) mentionnés sur ce document pour le mois de janvier 1993 correspondent à ceux figurant sur les notes manuscrites originales que je vous ai communiquées en début d'audition (cotes 150 à 152) pour les sociétés Redland (412) et Sylvestre (1168). Par contre si les chiffres mentionnés pour la société Unimix présentent des différences avec mes propres notes, il peut s'agir vraisemblablement de corrections après avoirs ou de certains mètres cubes occultes ".

La zone de Nice :

Un document manuscrit saisi dans la société Super Béton à La Seyne­sur­Mer (83), le 7 février 1994, et intitulé " Liste ETUDES " mentionne :

" ­ Ne donner aucun prix sur l'Est en dessous 420 HT pour du 350

" " " " " " en dessous 390 HT pour du B25 de Villefranche à Menton compris

Les chantiers convoités par BALBIANO sur l'Est (en dehors des ....) seront contrés par BCCA (proximité de centrale)

Uniquement ".

La société BCCA, filiale du groupe Vicat, possédait des centrales à béton à Falicon, La Colle­sur­Loup, Menton et Pagomas. M. Balbiano exploitait une entreprise indépendante dénommée " Trinité Planchers ". M. Arrietta, président de la société Super Béton, entreprise dans laquelle ont été découverts les documents, a déclaré avoir " personnellement été nommé par le groupe Vicat " pour gérer cette entreprise, puisque, selon lui, celle­ci n'ayant pas de service administratif, " ce service est assuré par la société BCCA ".

Un second document manuscrit intitulé " chantiers " saisi le même jour dans la société Super Béton indique :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

Les initiales BCN sont identiques à celles de la société Béton Chantiers Nice, filiale du groupe Lafarge, concurrente de la société BCCA, par ses centrales, situées à Grasse, La Turbie, Nice et Vallauris.

Un troisième document manuscrit, rédigé de la même main que le précédent, portant la mention " A faire " énumère une liste des chantiers suivants :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

Le sigle BF est identique aux intiales de la société Béton de France qui exploitait des centrales à béton à Cannes, Nice et Vallauris.

Un quatrième document manuscrit saisi dans l'entreprise fait apparaître les informations suivantes :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

Un cinquième document manuscrit saisi dans la même entreprise fait apparaître les informations suivantes :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

Les chiffres 14 514, 13 760 et 9 425 correspondent à la somme du terme " reste " et des chiffres 6700, 3800 et 6200 affectés à chacune des colonnes 1,2 et 3, ces chiffres étant eux­mêmes égaux à la somme des chiffres inscrits respectivement au regard de chacune des entreprises de BTP (Roatta, Sogea...). Par ailleurs, le chiffre de 4 400 mentionné au sujet de " MCB " correspond à la somme des chiffres 2 000 et 2 400 indiqués sur le troisième document susdécrit et attribué au sigle " BF ". De même, les chiffres de 1 800 et de 1 000 correspondent respectivement aux chantiers " Jardin bleu " et " Chantereine " attribués respectivement aux sigles " BF " et " BCN. ". Les chiffres de 800 (Roatta) et 400 (Sogea) mentionnés dans la colonne ­1­ correspondent à ceux mentionnés sur le quatrième document susmentionné et affectés à l'entreprise BCCA.

Le rapport des chiffres 14 514, 13 760 et 9 425 au volume de 37 700 m3 indiqué sur le document susmentionné donne les pourcentages suivants :

1 : 14 514/ 37 700 x 100 = 38,5 %,

2 : 13 760/ 37760 x 100 = 36,5 %,

3 : 9 425/37 700 x 100 = 25 %

Ces pourcentages, qui apparaissent sur le quatrième document susdécrit, ont servi à effectuer une répartition chiffrée du montant de 42 600, qui correspond à une estimation totale en volume des chantiers qui y sont mentionnés.

Une série de documents, saisis dans la même entreprise, sous forme de tableaux dactylographiés intitulés " suivi des chantiers ", aux 7 septembre 1993, 16 octobre 1993, 22 novembre 1993, 8 décembre 1993 et 29 janvier 1994 portent les mentions suivantes, telles qu'elle apparaissent sur celui mis à jour au 29 janvier 1994 :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

b) Les pièces relatives à la fourniture de béton prêt à l'emploi pour la construction des ouvrages destinés à la traversée souterraine de Toulon

La construction de la traversée souterraine de Toulon est un chantier d'un coût estimé à environ 2 milliards de francs lors de la phase d'étude. Destiné à résoudre les problèmes de circulation automobile au centre de la ville et à assurer la continuité du réseau autoroutier du littoral varois, ce chantier, qui a débuté en 1992 et qui se heurte actuellement à des problèmes importants, comprenait deux phases de réalisation et était piloté par la Direction départementale de l'équipement du Var. Le volume total de béton nécessaire à la confection des travaux était estimé à 207 000 m3. Les entreprises possédant des centrales à béton fixes susceptibles de fournir du béton prêt à l'emploi aux entreprises de travaux publics retenues étaient principalement les suivantes :

Société Méditerranéenne de Béton (centrale de Sanary), Béton Chantiers du Var (centrale de La Seyne­Sur­Mer), Super Béton (centrale de La Seyne­Sur­Mer), Béton de France (centrale de La Seyne­Sur­Mer), Bonifay (centrale de Toulon) et la SNBT (centrale d'Ollioules) à compter de novembre 1993.

Les travaux ont donné lieu à 5 appels d'offres correspondant à la réalisation de 5 tranches :

- Sortie Est de Toulon, diffuseur Benoît­Malon (fin 1991), puits d'attaque (fin 1992­début 1993), 3e tranche : accès Ouest (janvier 1993), 4e tranche : accès Est (septembre1994) et 5e tranche : tunnel (début 1994).

Le marché relatif à la fourniture du béton nécessaire à l'accès Ouest a été confié respectivement aux sociétés Super Béton et Béton Chantiers du Var pour ce qui concerne le génie civil et les parois moulées. Le marché relatif à l'accès Est a été attribué à la société Béton de France qui en a sous­traité une partie à la société SMB La société Super Béton a également déclaré avoir fourni du béton en quantités importantes pour le chantier de la trémie Est.

Les éléments relatifs aux principaux marchés passés par les entreprises de BTP pour la fourniture du béton prêt à l'emploi apparaissent dans le tableau ci­après :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

La société Béton de France et la SMB avaient, chacune, remis à la société GTM une offre identique de 490 F en décembre 1992 pour du béton à livrer sur le chantier " génie civil " de l'accès Ouest (et de 550 F/m3 pour du béton avec fumée de silice). La société Béton de France a reconnu ne pas avoir répondu à une nouvelle consultation de la société GTM, en mars 1993. Cette dernière, jugeant les offres trop élevées, avait décidé de procéder à une nouvelle mise en concurrence. Cette décision lui a permis d'abaisser de 490 F à 410 F/m3 le prix unitaire du béton. La société Béton de France ne conteste pas avoir fourni du béton prêt à l'emploi pour la construction de l'accès Ouest, alors qu'elle n'apparaît pas comme sous­traitant désigné. La société Super Béton, bien que titulaire du seul marché de génie civil, a également déclaré avoir fourni du béton pour le chantier de parois moulées. M. Arrieta, actuel président­directeur général de cette entreprise, a en effet déclaré : " S'agissant de la tranche parois moulées, nous avions fait une offre au maître d'œuvre, la société Bachy qui ne l'a pas retenue. Nous avons cependant fourni du béton en quantité importante pour ce chantier pour Bachy ".

Un tableau manuscrit rédigé par M. Mas a été communiqué en photocopie aux enquêteurs, le 5 juillet 1993 et en original, le 8 novembre 1995, au Conseil de la concurrence. Les informations apparaissant sur ce tableau sont reproduites ci-après :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

M. Cuoghi était responsable des approvisionnements au sein de la société GTM.

Le document manuscrit présente la société portant le sigle " BC ", correspondant à celui de la société Béton Chantiers du Var, comme étant le " pilote " des deux opérations. Or, le responsable de la société GTM a déclaré par procès­verbal d'audition :

" (.....) Nous avons renégocié les prix offerts par les producteurs de béton fin mars 1993. Au terme de ces négociations, notre choix s'est porté sur Béton 83. Béton Chantiers du Var et Béton 83 nous ont proposé au cours de la négociation une offre conjointe le 16 juin. Nous ne l'avons pas acceptée car nous ne souhaitions avoir qu'un seul partenaire ". Une note manuscrite de la société GTM, datée de juin 1993, versée au dossier indique d'ailleurs :

" 1 commande Béton 83

1 commande Béton chantier

Préciser dans la commande que Béton 83 est pilote. C'est à Béton 83 que seront passées les commandes ".

Un tableau intitulé " prévisions volumes trimestrielles " adressé, le 22 décembre 1993, à la société UNIMIX par sa filiale SMB faisait notamment apparaître les " chantiers à traiter " en janvier­février­mars 1994. Parmi ces chantiers figuraient la " traversée de Toulon trémie " pour des volumes de 1 500 m3 en janvier et février 1994 et " Bachy Paroi moulée " pour un volume de 500 m3 en mars 1994 (la société Bachy intervenant comme sous­traitant de l'entreprise attributaire pour la réalisation des parois moulées).

c) Les déclarations relatives aux réunions organisées entre sociétés concurrentes

M. Deverne, chef de secteur commercial de la société Béton de France, en poste à Saint­Saturnin­les­Avignon, a déclaré, par procès-verbal d'audition, le 20 septembre 1993 : " (.....) Il m'est arrivé de rencontrer mes confrères d'entreprises concurrentes M. RIDOLFI de la SA BCP et M. MAS de la société UNIMIX. Je confirme avoir rencontré ces 2 personnes le 22 mars 1993 à l'hôtel MERCURE de LANCON DE PROVENCE (BdR) à 14 heures. Au cours de cette réunion, nous avons fait le point des différentes actions menées par chacun d'entre nous pour le développement du béton prêt à l'emploi ; (.....) J'ai effectivement rencontré M. Ridolfi et Mas en début d'année 1993 à l'hôtel Cristel à Cavaillon. je ne me souviens plus des dates exactes "(......).­ Je vous remets ci­après copie des documents que vous m'avez demandés, documents à caractère commerciaux contenus dans mon bureau "

M. Ridolfi, agent commercial à la société Béton Chantiers Prêt (BCP) à Mondragon (84), filiale du groupe Ciments Lafarge, a reconnu par procès­verbal d'audition en date du 20 septembre 1993 avoir rencontré MM. Mas et Deverne, les 3 février (hôtel Araxe de l'Isle­sur­la­Sorgue), 10 mars (hôtel Cristel de Cavaillon) et 22 mars 1993 (hôtel Mercure de Lançon de Provence). Ce responsable a déclaré que la première réunion avait pour but " de connaître M. Mas de UNIMIX" et que les autres réunions avaient pour but de " communiquer à nos concurrents les noms des entreprises avec qui nous avons des problèmes de paiement pour qu'eux­mêmes ne rencontrent pas les mêmes difficultés ".

Le 20 septembre 1993, MM. Gaillot et Giraudo, respectivement directeur et directeur commercial de la société Béton Chantier du Var (BCV), ont déclaré, par procès­verbal d'audition : " Les réunions organisées avec les confrères locaux des sociétés Béton 83, SMB et Béton de France avaient pour objet principal la préparation du futur chantier de la traversée de Toulon ­ logistique, prix proposés. ­ M. Gaillot reconnaît avoir participé à 2 reprises à ces réunions préparatoires. ­ D'après les éléments recueillis sur l'éphéméride de M. Giraudo, des réunions ont été organisées aux dates suivantes :­16.03.1993 annexe n° 5 " Réunion ", ­19.03.1993 annexe n° 6 " RV Bachy­Reynier ", ­M. Reynier étant responsable commercial de Béton de France,­9.04.1993 annexe n° 7 " Réunion confrères "­30.04.93 annexe n° 8 " RV NOVOTEL. 14h30 ",­10.05.1993 annexe n° 9" RV15h ". MM GAILLOT et GIRAUDO ont participé à l'organisation d'au moins une réunion parmi celles­ci ". Les intéressés ont communiqué aux enquêteurs des photocopies de pages d'éphéméride correspondant aux dates et indications mentionnées dans leurs déclarations ainsi qu'une carte géographique représentant le Sud du département du Var. MM. Gaillot et Giraudo ont déclaré que la zone mentionnée sur cette carte était la " zone commerciale privilégiée ".

M. Sylvian Lucas, directeur du bassin méditerranéen de la société Redland Granulats Sud, a déclaré, le 18 avril 1996, par procès-verbal d'audition : " J'étais au courant de réunions entre sociétés concurrentes qui se sont tenues au cours de l'année 1993 dans la région PACA. Ces réunions avaient pour objet la définition des nouvelles normes dans le ciment et le béton. M. Nervi de la société REDLAND GRANULATS SUD a parfois assisté à ces réunions ".

M. Arrieta, président-directeur général de la société Super Béton, a notamment déclaré par procès- verbal d'audition, le 27 février 1996 : " Le but des réunions organisées en 1993 avec des sociétés concurrentes (SMB, Béton de France, Béton Chantiers du Var) était de faire face au marché qui représentait un volume important sur Toulon et afin d'évoquer le risque d'implantation de centrales de chantiers. Nous avons sans doute abordé le niveau des prix que pourrait pratiquer une centrale de chantier (implantée par une entreprise de TP titulaire d'un lot important) pour un tel ouvrage au cours de ces réunions. Bonifay ne traitait pas de gros chantiers, ce qui explique son absence aux réunions. SNBT n'était pas présente dans cette zone à cette époque. Bonifay et SNBT ont par la suite obtenu un marché conjoint et solidaire pour la traversée de Toulon. Il est possible que j'ai participé à une réunion, le 30 avril 1993, avec le représentant de la société Béton Chantiers du Var pour évoquer le chantier de la traversée de Toulon ".

4. Les constatations effectuées auprès des entreprises de bâtiment et de travaux publics au sujet des marchés de béton prêt a l'emploi

La consultation relative au marché " Jas de Bouffan " réalisé par la société de BTP CIEBAT :

Sur une page d'un cahier de couleur rouge versé au dossier par M. Mas en original le 8 novembre 1995 et en photocopie dès le 5 juillet 1993, on lit à la date du 12 mars 1993, parmi d'autres informations :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

L'enquête effectuée le 13 avril 1995 auprès de la société CIEBAT, chargée de réaliser le chantier, a permis d'établir que le GIE BGP avait présenté une offre de prix d'un montant de 397 F, le 25 février 1993, pour la fourniture du béton nécessaire à la réalisation du chantier " Jas de Bouffan " et que ce montant avait été ramené à 345 F par la suite. La société Béton de France (sigle BF) avait présenté une offre de 406 F, le 1er mars 1993 . Le gérant de la société CIEBAT a déclaré, par procès­verbal d'audition en date du 13 avril 1995, au sujet de l'offre de la SMB : " Nous n'avons pas contacté l'entreprise SMB car nous ne leur achetons jamais de béton prêt à l'emploi. Finalement pour ce marché nous avons négocié avec BGP et avons obtenu qu'il nous facture le produit à 345 F au lieu de 397 F en première offre pour du R 25. Je vous donne copie de cette facture ".

La consultation relative au marché du centre de impôts d'Aix­en­Provence réalisé par la société de BTP Bruno Rostand :

A la date du 18 janvier 1993, M. Mas avait indiqué dans ses notes manuscrites :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

L'enquête effectuée, le 9 mai 1995, dans l'entreprise Bruno Rostand a établi que les prix offerts par Redland et SMB lors de la deuxième consultation, le 15 février 1993, correspondaient à ceux mentionnés sur les notes manuscrites de M. Mas à la date du 18 janvier 1993. Le gérant de la société Bruno Rostand a déclaré par PV d'audition, au sujet de la deuxième consultation : " Béton de France n'a plus fait d'offre. C'est BGP, moins disant que nous avons retenu ".

La consultation relative au marché du pôle d'échange, parking de la rotonde, effectuée par la société Quillery :

Le 7 janvier 1993, date à laquelle il assistait à une réunion à l'hôtel Campanile de La Penne­sur­Huveaune avec des représentants de sociétés concurrentes, M. Mas, de la société Unimix, avait inscrit sur une page du cahier à spirales versé au dossier, en copie le 5 juillet 1993, puis en original le 8 novembre 1995 : " Quillery pôle d'échange parking de la rotonde (Sogea) 13500 m3 ". Puis, en face de cette inscription : " BF :380, BGP :385, RD :390, SMB :387 ". M. Labourel, directeur administratif et financier de la société Quillery, a déclaré aux enquêteurs : " Dans le cadre du marché Sextius Mirabeau, Parking Rotonde... C'est notre collaborateur M. Jacques Harnois, chef de bureau d'étude, qui a procédé à une pré­consultation des fabricants de béton, début 1993, (....). Je vous remets copie des notes manuscrites de M. Harnois datées du 11 janvier 1993 concernant son étude pour le gros œuvre. Sur ce document est portée la mention BPE 380 F. J'ai fait appeler par téléphone

M. Harnois (....) afin de connaître le nom du fournisseur ayant fait cette proposition. /

­ M. Harnois m'a indiqué qu'il ne s'en souvenait pas précisément mais qu'en règle générale il consultait Béton de France à ce stade des études ".

D. ­ Les éléments recueillis au sujet de la politique de prix menée par plusieurs producteurs de béton prêt à l'emploi à l'encontre de la SNBT dans la région de Toulon

M. Bonifay, producteur indépendant dans la zone de Toulon a déclaré, par procès-verbal d'audition, le 26 mai 1994 : " Notre société est une entreprise familiale née en 1946, devenue SA en 1988. Notre activité s'exerce dans le négoce des matériaux, la fabrication du béton, agglomérés et poutrelles de plancher et dans le domaine des transports, lié au bâtiment. La production et la vente de béton a commencé en 1976 (auparavant, nous produisions pour nos besoins propres). Cela représente environ 12 millions sur un chiffre d'affaires de 130 millions de F. /­ Nous employons une centaine de personnes./­ Nos concurrents, sur notre zone (notre centrale à béton se trouve à La Garde près de Toulon) sont Béton de France, Superbéton, Béton Chantiers du Var, SMB. Notre centrale a une capacité de 4 000 m3/mois et nous représentons environ 10 % du marché de l'Ouest Varois./­ Nous nous sommes faits cette place sur le marché en livrant notre clientèle traditionnelle : les artisans, PME, particuliers et Administrations./­ Le niveau des prix sur le marché était jusqu'en octobre 1993 de l'ordre de 420 à 450 F. le m3, ce qui nous permettait de gagner notre vie. En effet, nos prix de revient sont de l'ordre de 280 à 300 F le m3 sortie de centrale + 70 F de frais de transport. /­ Simultanément avec l'ouverture de la centrale à béton SNBT d'Ollioules nos 4 concurrents précités ont simultanément et immédiatement fait volontairement chuter les prix au niveau de 300 F puis un mois ou deux après à 250­280 F. /­ Nous avons le sentiment que par la même occasion ils ont décidé de nous éliminer également puisque nos 4 concurrents ont démarché certains de nos clients à ces prix de 250 ­ 280 F./ ­ Notre situation n'est plus tenable et s'il n'y avait nos autres activités nous serions obligés de licencier du personnel et d'arrêter notre centrale. Notre production est tombée de 3000 m3 à 500, 700 m3 par mois./ ­ Je sais par ouï-dire que nos concurrents se réunissent régulièrement pour étudier le marché. "

Le niveau des prix pratiqués en septembre 1993 par les concurrents de la SNBT, dans la zone de Toulon :

La fourchette des prix du béton courant (de type RMC 25) pratiqués en septembre 1993 par la société Béton de France dans la zone géographique considérée s'établissait entre 360 et 542 F par mètre cube pour du béton livré sur chantiers et entre 407 et 492,50 F par mètre cube pour du béton pris sous centrale. Ces prix n'ont pas été contestés par la société Béton de France.

Le prix le plus bas facturé par la société Super Béton s'est élevé à 370 F par mètre cube en septembre 1993 pour du béton courant (VIC 25) livré sur chantiers (client Campenon Bernard).

La société Béton Chantiers du Var a pratiqué un prix unitaire de 425 F par mètre cube pour du béton courant (BC 25) livré sur chantiers en septembre 1993 (client Costamagna).

Le prix le plus bas facturé par la société SMB s'est élevé à 360 F par mètre cube en septembre 1993 pour du béton courant (UNI 25) livré sur chantiers (client Campenon Bernard ).

Le niveau des prix pratiqués en octobre 1993 par les concurrents de la SNBT, dans la zone de Toulon :

La SNBT a ouvert sa centrale à béton d'Ollioules à la fin du mois d'octobre 1993. Les factures de vente versées au dossier établissent que les prix les plus bas pratiqués par cette entreprise s'élevaient à 365 F par mètre cube, pour du béton courant livré sur chantiers (type BT 25).

Au cours de ce mois d'octobre 1993, des prix de 345 F, 305 à 335 F, 295 à 340 F par mètre cube sont pratiqués respectivement par les sociétés Béton de France, Super Béton et SMB pour du béton courant livré sur chantiers.

Le niveau des prix pratiqués au cours des mois suivants par les concurrents de la SNBT, dans la zone de Toulon :

En novembre 1993, des prix de 250 F par mètre cube (Béton de France ), 275 à 280 F (Super Béton), 300 F (Béton Chantiers du Var) et 270­290 F (SMB) sont observés dans cette zone pour du béton de type 25 livré sur chantiers alors que les prix les plus bas pratiqués par la SNBT au cours du même mois ne descendent pas en dessous de 340 F/m3. Cette politique de prix persiste au cours des mois suivants.

Selon les déclarations de M. Georges Dao de la société Nicoletti, recueillies par procès­verbal d'audition, les prix proposés, en septembre 1993, par les sociétés Béton de France, Béton Chantiers du Var, Super Béton, SMB et Redland " étaient de l'ordre de 450F/m3 " pour la fourniture d'environ 40 000 mètres cube de béton destinés à l'accès Est de la traversée de Toulon. En décembre 1993, la société SNBT, consultée, a offert un prix de 400 F/m3. Selon M. Dao, la société Béton de France a finalement remporté le marché, " SNBT ne pouvant plus baisser ses prix ".

La SNBT a fait une offre de béton courant à 350 F par mètre cube le 29 novembre 1993 (chantier de la station d'épuration du Cap Sicié) alors que des prix inférieurs à 300 F étaient couramment pratiqués au cours de ce même mois par les sociétés concurrentes.

Le tableau ci­après intitulé " analyse des prix moyens de vente départ sur Var ouest et sur Var est ", versé au dossier par la société SMB, fait ressortir l'évolution du prix moyen de vente du béton prêt à l'emploi en F par mètre cube dans les centrales de Sanary (Var Ouest) et de La Garde (Var Est) du mois d'août 1993 à mai 1994 :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

Les prix moyens pratiqués en novembre 1993 par la SMB enregistrent une baisse brutale d'environ 20,5 % par rapport à ceux pratiqués au cours du mois précédent. Cette entreprise est gérée par la société Unibéton (anciennement Unimix) qui employait M. Mas comme salarié avant son licenciement.

Les coûts moyens variables de production du béton prêt à l'emploi :

Les coûts moyens variables (CMV) de production du béton prêt à l'emploi se composent essentiellement du coût des matières premières, à savoir le ciment, les agrégats et les adjuvants.

La société Super Béton a " afin de permettre une comparaison plus juste ", procédé elle­même " au calcul relatif du coût moyen variable du VIC 25 en utilisant comme références les prix facturés par ses fournisseurs de matières premières et en y ajoutant le coût du transport, tel que déterminé par ses grilles analytiques ". Ces coûts, pour les mois d'août à décembre 1994, sont reproduits dans le tableau suivant.

<EMPLACEMENT TABLEAU>

Les factures de vente de la société Super Béton établissent que des prix unitaires de vente de 255 à 260 F ont été pratiqués au cours du dernier trimestre 1994 pour du béton de type VIC 25 livré sur chantiers (clients Arts Construction Littoral, Gagneraud, Guccione et un client comptant). La société Super Béton, qui avait enregistré un résultat positif de 7,7 millions de francs en 1992, a enregistré une perte de 0,68 million de francs en 1993 et de 3,8 millions de francs en 1994. Par ailleurs, cette entreprise a admis avoir pratiqué des prix de vente qui se situent juste au dessus des coûts moyens variables de production au cours de la même période, pour différents clients. ainsi, un prix de 263 F a été pratiqué pour du béton de type Vic 20 livré aux clients Cerbat, EMDC, Construction Montagnarde et Calzada, alors que le CMV s'élevait à 261,90 F (soit un écart de 1,10 F par mètre cube). La société Super Béton a par ailleurs déclaré, au sujet du client Rondoni : " une facture fait ressortir un prix de 169 F sous centrale (....), le coût moyen variable de cette qualité de béton s'établit à environ 170 F ". Pour le client Cevredo, la société Super Béton a déclaré que le prix de vente de 241 F pour du béton livré était supérieur au CMV " de l'ordre de 235 F ".

Le compte de résultats de la société Super Béton pour l'exercice 1994 fait apparaître que le rapport des charges d'exploitation/ coût d'achat des marchandises vendues s'est élevé à 1,85.

Le tableau ci­après, établi par le commissaire aux comptes de la société Béton de France, établit que des prix de vente unitaires inférieurs aux coûts moyens variables ont été pratiqués par la société Béton de France, à la fin de l'année 1993 et au cours de l'année 1994 :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

Par ailleurs, la société Béton de France a admis avoir pratiqué des prix se situant juste au dessus des coûts moyens variables de production, au cours du dernier trimestre 1994, pour les clients OBV (prix de vente de 278 F pour un CMV de 277,78 F), Senec, chantiers Descours, (prix de vente de 278 F pour un CMV de 277,78 F), Sol Sud (prix de vente de 300 F pour un CMV de 283,35 F), TPL (prix de vente de 303 F pour un CMV de 283,35 F), Comasud (prix de vente de 301 F pour un CMV de 277,78 F) et Screg Sud­Est (prix de vente de 303 F pour un CMV de 294,49 F).

Un tableau intitulé " analyse couverture prix de vente/coûts variables aire Toulonnaise " versé au dossier par la société SMB en annexe à ses observations en réponse à la demande de mesures conservatoires fait apparaître qu'au cours du premier semestre 1994 la marge moyenne sur coût variable de l'ensemble des bétons commercialisés, y compris les frais de distribution, était négative dans la centrale de Sanary (­ 10,12 F/m3) ainsi que sur l'ensemble des deux centrales de Sanary et de La Garde (­3,77 F/m3), alors qu'elle s'élevait respectivement à 79,40 F et à 76,49 F sur l'ensemble de l'année 1993. Par ailleurs, ainsi que l'a relevé la cour d'appel de Paris dans son arrêt en date du 3 novembre 1994, cette entreprise a reconnu avoir pratiqué un prix moyen départ de 246,52 F à partir de sa centrale de Sanary " c'est à dire inférieur au coût moyen de ses matières premières ressortant de sa comptabilité analytique à 266,03 francs ". Enfin, dans son mémoire en réponse lors de la procédure de vérification d'injonction, la société SMB a admis avoir, à l'occasion de différents chantiers, pratiqué des prix de vente unitaires inférieurs aux coûts unitaires variables de production au cours du dernier trimestre 1994 (clients La Méridienne : marges négatives de 48,78 F et de 39,89 F ; Gauthier : marges négatives de 28,78 F, de 22,89 F et de 19,84 F ; Sogea : marge négative de 25,89 ; Matériaux du Soleil : marges négatives de 9,89 F et de 2,89 F) et a justifié le maintien du niveau de bas prix par l'existence de contrats signés antérieurement à l'injonction du Conseil. En outre, les prix pratiqués par cette entreprise à l'égard de plusieurs clients font apparaître une marge positive légèrement supérieure au coût moyen variable de production. C'est notamment le cas des clients Beneventi Matériaux, Spie Tondella et de plusieurs clients payant au comptant. La société SMB, qui avait enregistré un résultat positif de 0,62 million de francs en 1992 et de 3,9 millions de francs en 1993, a enregistré une perte de 8,1 millions en 1994.

Le compte de résultats de la société SMB pour l'exercice 1994 fait apparaître que le rapport des charges d'exploitation/ coût d'achat des marchandises vendues s'est élevé à 2,01.

Selon les éléments certifiés conformes à la comptabilité de la société par le commissaire aux comptes, les coûts de transport de béton au cours de l'exercice 1994 se sont élevés au total à 5 806 858 F se décomposant en 3 876 698 de coûts variables, soit 66,8 %, et en 1 960 160 F de coûts fixes, soit 33,2 %, et ce, pour un volume total de béton transporté s'élevant à 80 864 m3. Le coût total du transport effectué par la société Béton Chantiers du Var s'est élevé à 1 815 858 F, soit 31,2 % et le coût total du transport effectué par locatiers à 3 991 000 F, soit 68,8 %. Au cours de cet exercice, le chiffre d'affaires réalisé par la société Béton Chantiers du Var s'est élevé à 32 375 720 F, le coût d'achat des marchandises vendues hors charges de transport à 20 804 904 F et le total des charges d'exploitation à 37 031 173 F. Le coût des marchandises vendues, charges variables de transport incluses, s'est donc élevé à 20 804 904 F + 3 876 698 F = 24 681 602 F, soit 76,23 % du chiffre d'affaires, la différence, soit 23,77 % représentant les " frais généraux " de l'entreprise, hors charges variables de transport. Ces frais représentent 35 % du coût des marchandises vendues, charges variables de transport incluses.

Le coût d'achat des marchandises vendues s'est élevé à 19 902 140 F au cours de l'exercice 1993 et le chiffre d'affaires s'est élevé à 36 082 181 F au cours du même exercice.

La société Béton Chantiers du Var a par ailleurs versé au dossier, le 23 août 1995, dans le cadre de la procédure de vérification d'injonction de la mesure conservatoire, un tableau intitulé " comparaison entre le PMV et le coût variable moyen " faisant apparaître les éléments ci­après pour les mois de juillet à décembre 1994 :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

Le commissaire aux comptes de la société Béton Chantiers du Var a estimé à 207,50 F le coût standard de production du béton de type BC 25 au cours de l'exercice 1994 pour la centrale de La Seyne. La société Béton Chantiers du Var a confirmé que ce coût unitaire variable était celui des chantiers " Hermès " et " Ciel d'Azur ", dans la mesure où, selon elle, " ce coût de production varie rarement au cours d'une même année, puisque le coût d'achat des matières premières est négocié au début de chaque année " et " qu'il est resté stable tout au long de l'année 1994 ". Ce béton prêt à l'emploi de type BC 25 a été facturé au prix unitaire de 255 F au cours des mois de mars à décembre 1994 et les bétons de type 350 kg CPJ 45 55 au prix de 290 F et 330 F, le coût variable de production de ce type de béton s'élevant à 241,10 F. Le contrat " Hermès ", signé le 31 mars 1994, portait au total sur la fourniture de 2 200 m3 de béton pour la construction d'un parking et de 2 500 m3 pour la construction de logements. Le contrat " Ciel d'Azur " a été signé le 18 février 1994.

Le commissaire aux comptes a également établi les prix moyens de vente (PMV) en F/m3, les coûts variables transport inclus (CVT) du béton de type BC 25 (béton normalisé dosé à 350 kg de ciment) ainsi que les marges sur coûts variables (MCV) pour les mois de novembre et décembre 1993. Ces éléments ont permis de déterminer le rapport marges sur coûts variables/PMV (4) comme suit :

<EMPLACEMENT TABLEAU>

Par ailleurs, les factures de vente versées au dossier établissent que des prix unitaires de vente de 300 F (clients Pizzimenti, Costamagna, Cortelloni), de 290 F (client Travaux du Midi), 280 F (client Oresice) et 305 F (Hôpital de La Seyne) ont été pratiqués au cours du dernier trimestre 1994 pour du béton de type BC 25 livré sur chantiers, ces prix étant du même ordre que ceux pratiqués à l'égard de certains clients par la société Béton Chantiers du Var à compter du mois de novembre 1993 (clients Matéo, SCEB, Cortelloni, Etablissements Kisling, Farini).

E. ­ L'évolution du prix du ciment dans la zone de Toulon en début d'année 1994

Les approvisionnements en ciment des producteurs de béton prêt à l'emploi dans la région PACA sont assurés essentiellement par la société Lafarge Ciments, à partir de son usine de La Malle située entre Marseille et Aix­en­Provence, la société Calcia, à partir de son usine de Beaucaire située près d'Avignon, la société Vicat, à partir de son usine de Nice, et la société Intertitan, filiale du groupe grec du même nom, à partir du terminal de Marseille.

A compter du mois d'octobre 1993, la société SNBT s'est approvisionnée auprès de la société Intertitan, qui a accepté de lui livrer du ciment de type CPA 55 au prix unitaire franco de 500 F la tonne. A compter du mois de janvier 1994, la SNBT a bénéficié d'une remise de 70 F/tonne de ciment sous forme d'avoirs.

La société Lafarge Ciments, qui a déclaré que " la menace de la concurrence du ciment grec était donc bien réelle (....) a conduit les autres producteurs de ciment, et notamment Lafarge Ciments, à adapter ses conditions tarifaires ", a accordé à la société Béton de France une remise supplémentaire de 30 francs par tonne de ciment pour des achats effectués à partir de mars 1994, cette remise consentie pour la fourniture de ciment destiné à la fabrication du béton prêt à l'emploi dans le cadre du marché de la station d'épuration du Cap Sicié se rajoutant à une remise de 80 francs par tonne déjà accordée.

Un avantage de 20 F (février 94) puis de 40 F/tonne (mars à octobre 1994) par rapport à la remise de base de 60 F/tonne a également été accordé par la société Vicat aux sociétés SMB et Béton de France ayant en charge la fourniture du béton pour la trémie Est du chantier de la traversée de Toulon débutant en février 1994.

Une remise de 100 F/tonne de ciment permet à un producteur de béton d'abaisser son prix de revient de 23 F en retenant un dosage de 230 kg de ciment/m3, ce qui correspond au dosage fixé dans la norme actuellement en vigueur.

II. ­ SUR LA BASE DES CONSTATATIONS QUI PRECEDENT, LE CONSEIL

Sur la procédure :

Sur les observations déposées par la société Béton de France Sud-Est :

Considérant que, par lettre enregistrée le 7 avril 1997, la société Béton de France Sud-Est a déposé des observations en réponse au rapport notifié à la société Béton de France et relatif au dossier F 686 ; que, répondant à une lettre du président du Conseil de la concurrence lui demandant si les observations étaient déposées au nom de Béton de France ou au nom de Béton de France Sud-Est, le conseil de la société Béton de France a indiqué, dans une lettre datée du 22 avril 1997, que la société Béton de France Sud-Est s'est, " dans le mémoire du 7 avril 1997, substituée à la société Béton de France " dans la mesure où, selon elle, " l'ensemble des moyens matériels et humains afférents à l'activité béton prêt à l'emploi sud est de la société Béton de France ont été transférés à la société Béton de France Sud-Est " ; qu'enfin, dans une lettre enregistrée le 14 mai 1997 au Conseil de la concurrence, le responsable du service juridique de la société Béton de France a déclaré que " la restructuration de Béton de France commencée en 1995, s'est achevée le 1er avril 1997 " et a versé au dossier une copie du dernier bilan et du compte de résultats 1996 de ladite société faisant ressortir un chiffre d'affaires de 1 023 378 987 F sur le plan national ;

Mais considérant que la société Béton de France, mise en cause dans la présente procédure, n'avait, postérieurement aux faits incriminés, cédé qu'une partie de son activité à la société Béton de France Sud-Est et a subsisté en tant que personne morale et en tant qu'entreprise; qu'elle doit donc répondre de ses propres pratiques ; que la société Béton de France Sud-Est, qui n'est pas partie devant le Conseil dans la procédure F 686, ne saurait se " substituer " à la société Béton de France; qu'il en résulte que les observations déposées par la société Béton de France Sud-Est, qui n'a pas qualité pour intervenir dans la présente procédure, doivent être écartées des débats ;

Sur la mise en cause de la société Unibéton en lieux et place de la société SMB :

Considérant que la société Unibéton, anciennement Unimix, déclare que " la société SMB est une entité juridique à part entière " et une " personne morale indépendante, au sens du droit des sociétés " ; que cette société fait valoir, d'une part, que " c'est d'un commun accord entre les deux associés qu'a été décidée, lors de l'assemblée générale extraordinaire du 17 février 1997, la liquidation amiable de la société SMB " et, d'autre part, que " dès lors que des comportements sont imputables dans les faits à une entité juridique autonome, ces faits doivent être sanctionnés dans le chef de cette entité juridique " ; que la société Unibéton, qui verse au dossier un compte­rendu du Comité de direction du 26 juillet 1994 de la société SMB, déclare que " Monsieur Garassin remplit pleinement son rôle de co­gérant " ;

Mais considérant que le directeur financier de la société en commandite simple Maurice Garassin et Cie (Sotem) a déclaré, par lettre enregistrée au Conseil de la concurrence le 21 février 1996 : " Le groupe Garassin détient (....) 50% des parts de la Sarl SMB par l'intermédiaire de la SCS Sotem (.....). Cette participation a été prise dans le cadre d'une stratégie d'intégration verticale. Le groupe Garassin est en effet producteur de granulats sur le département du Var (.....). Le deuxième associé est la société Unibéton, filiale d'Arena­Ciments Français, dont le métier est l'exploitation de centrale à béton. (....). L'administration de la Sarl SMB a été entièrement confiée à Unibéton­Arena depuis la création de la Sarl. De ce fait, Unibéton assure l'intégralité des fonctions de gestion, tant commerciales, administratives techniques que comptables ou juridiques. Le groupe Garassin n'intervient pas bien entendu dans la formation et la fixation des prix " ;

Considérant par ailleurs que l'un des co­gérants de la SARL SMB a déclaré, par procès­verbal d'audition : " J'occupe également la fonction de directeur régional de la société Unimix pour le sud­est de la France.(....) Le siège social de la société se trouve à l'Ile Saint­Denis (93). Les services administratifs et commerciaux se trouvent à Lambesc (13), dans des locaux qui appartiennent à la société Unimix, où est effectuée la facturation./­La SMB ne dispose pas de personnel en propre. Elle possède les centrales de production./­Il existait une convention d'assistance technique entre la société SMB et la société Unimix. Cette convention n'a pas été formalisée dans un document signé. Elle porte sur la refacturation du personnel, les frais de gestion et de commercialisation, dont l'émission de factures./(....) ­ La société Unimix n'a pas de centrales à béton dans les secteurs où est implantée la société SMB " ;

Considérant en outre que, comme l'admet la société Unibéton dans ses observations écrites, c'est sur l'initiative de M. Garassin qu'a été fermée la centrale de Sanary de la société SMB, à la fin de l'année 1994, le compte­rendu du Comité directeur du 26 juillet 1994 versé au dossier par la société Unibéton établissant qu'en effet, constatant le " trop faible " prix moyen de vente du béton, M. Garassin demandait et obtenait la fermeture de la centrale de Sanary ; qu'enfin, dans la lettre susmentionnée adressée au Conseil de la concurrence le 19 février 1996, le directeur financier du groupe Garassin, qui indiquait que le groupe Garassin " n'intervient pas (....) dans la formation et la fixation des prix " de la société SMB, déplorait les " mauvais résultats de SMB " pour les années 1993, 1994 et 1995, mentionnait également l'intention de son groupe de se retirer du capital de cette entreprise ; qu'ainsi, loin de démontrer la participation active de M. Garassin dans la gestion de la société SMB, les éléments versés au dossier par la société Unibéton établissent au contraire que ce responsable n'est intervenu qu'à la suite des décisions de gestion courante prises par la société Unibéton en matière de fixation de prix, décisions ayant finalement entraîné la liquidation amiable de la société SMB, au début de l'année 1997 ;

Considérant enfin que les autorités de concurrence considèrent que " la circonstance que la filiale a une personnalité juridique distincte ne suffit pas pour écarter la possibilité que son comportement soit imputé à la société mère.Que tel peut être notamment le cas lorsque la filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché mais applique pour l'essentiel les instructions qui lui sont imparties par la société mère " (CJCE, Continental Can, 21 février 1973); qu'au cas d'espèce, il est établi que la société SMB ne déterminait pas sa politique commerciale de manière autonome sur le marché, celle­ci étant décidée par la seule société Unibéton; que c'est donc à bon droit qu'ont été notifiés à la société Unibéton les griefs relatifs aux pratiques mises en œuvre par la SARL SMB;

Sur la présence de la société SNBT parmi les destinataires de la notification de griefs et du rapport :

Considérant que la société Redland Granulats Sud soutient que la société SNBT est un " tiers à la procédure qui n'avait pas vocation à recevoir la notification de griefs et le rapport " ; que la société Super Béton soutient également que la société SNBT ne peut se voir reconnaître la qualité d'" intéressée " au sens de l'article 21 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, dès lors que celle-ci n'est visée par aucun grief ; que la société Redland Granulats Sud déclare que la communication de la notification de griefs et du rapport à la SNBT entache la validité de la procédure ;

Considérant que si l'article 18 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 précise que " l'instruction et la procédure devant le Conseil de la concurrence sont pleinement contradictoires ", l'article 21 de ladite ordonnance précise que " le Conseil notifie les griefs aux intéressés " (...). Le rapport est ensuite notifié aux parties " ; que c'est donc à tort que le rapport a été notifié à la société SNBT, qui n'est ni partie saisissante ni partie en cause dans la présente procédure ;

Mais considérant que la SNBT n'a formulé aucune observation en réponse à la notification de griefs et au rapport ; que cette entreprise n'a ni reçu communication des observations déposées par les sociétés destinataires du rapport ni pris la parole en séance alors, comme l'admet la société Super Béton, que " les pratiques de la SNBT sont effectivement au coeur de certains griefs examinés " et qu'il était légitime qu'elle puisse " à l'audience faire valoir son point de vue sur des arguments de défense formulés par des entreprises visées (...) par des griefs " ; que, dans ces conditions, les sociétés Redland Granulats Sud et Super Béton, dont les droits n'ont pas été méconnus, ne sont pas fondées à invoquer la nullité de " l'intégralité de la procédure " de ce chef ;

Sur la validité des procès­verbaux de M. Mas en date du 5 juillet 1993 :

Considérant que, le 5 juillet 1993, MM. Mas et Engel se sont présentés à la Brigade interrégionale d'enquête (BIE) de Marseille et ont remis aux enquêteurs 44 photocopies de pièces manuscrites constituées, d'une part, de " notes manuscrites prises au cours des réunions de répartition de marché entre le 7 janvier 1993 et le 15 avril 1993 ", d'autre part, d'un document manuscrit intitulé " Réunions de table PACA " et enfin de documents pré­imprimés dénommés " plates­formes affaires " ; qu'à l'issue de leur déposition, deux " procès­verbaux ", l'un manuscrit, l'autre dactylographié, reprenant leurs dénonciations d'ententes anticoncurrentielles dans le secteur du béton prêt à l'emploi, ont été rédigés par les enquêteurs ; que, le 16 août 1993, seize documents intitulés " plates­formes affaires " ont été restitués par les enquêteurs à M. Mas, " en raison de leur appartenance présumée " à la société Unibéton ainsi qu'un feuillet numéroté 37 intitulé " compte­rendu interne à l'entreprise Société Méditerranéenne de Béton " ; qu'à la suite d'une ordonnance rendue le 28 janvier 1994 par le président du tribunal de Grande instance de Marseille, des opérations de visites et de saisies ont été effectuées, le 7 février 1994, dans plusieurs entreprises de production du béton de la région Provence­Alpes­Côte­d'Azur ;

Considérant que les sociétés mises en cause dans la présente procédure font valoir que figurent au dossier deux procès­verbaux distincts, de même date et de même heure, tous deux signés par les mêmes personnes, mais dont le contenu est différent ; qu'elles font valoir que cette différence de contenu devrait conduire le Conseil de la concurrence à écarter lesdits procès­verbaux des débats " ainsi que tous les actes d'enquête et d'instruction subséquents " ;

Considérant que l'article 46 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 dispose que " les enquêtes donnent lieu à l'établissement de procès­verbaux et, le cas échéant, de rapports " ; qu'ainsi que le mentionne le rapport d'enquête rédigé, le 25 juillet 1994, " Le 5 juillet 1993, MM. Jean­François Mas et Gilles Engel (....) se sont présentés dans les locaux de la direction régionale de la Concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à Marseille, pour y faire des déclarations et y apporter des documents " ; que les déclarations enregistrées par les enquêteurs sont précédées de la mention selon laquelle " MM. Mas et Engel se présentent à nous spontanément pour nous remettre les documents ci­joints, dont l'inventaire suit et nous faire les déclarations ci­après (...) " ; que sur le document manuscrit a été rayée la mention pré­imprimée " Nous avons (...) indiqué (...) l'objet de notre enquête ", cette mention n'apparaissant pas davantage sur le document dactylographié ; qu'au surplus, aucune contradiction n'est relevée sur le fond entre l'un et l'autre documents, auxquels étaient annexées des photocopies de pièces manuscrites ; que, par ailleurs, ainsi que l'indique la société Béton Chantiers du Var, les deux versions du document " figurent bien au dossier du Conseil de la concurrence ouvert à la consultation " ; qu'il ne saurait en outre utilement être soutenu que les documents rédigés le 5 juillet 1993 constituaient des procès­verbaux d'enquête au sens des dispositions de l'article 46 de l'ordonnance du 1er décembre 1986; qu'en effet, si deux documents portant chacun la mention pré­imprimée " procès­verbal ", l'un manuscrit, l'autre dactylographié, ont bien été rédigés, le 5 juillet 1993, en des termes identiques, à l'exception de certaines mentions relatives à des lieux dans lesquels seraient susceptibles d'être découvertes les preuves d'une éventuelle concertation prohibée par les dispositions de l'article 7 de ladite ordonnance ainsi qu'un " inventaire " des pièces communiquées apparaissant sur le document dactylographié, il ressort de leur contenu même que les deux documents concernés, rédigés préalablement à l'ouverture d'une enquête par le directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ou son représentant, constituent une déposition de plainte par des personnes physiques, dans le but d'inciter l'administration à déclencher l'ouverture d'une enquête; qu'il résulte de ce qui précède qu'aucune manœuvre déloyale destinée à faire échec aux droits de la défense n'a été mise en œuvre par les agents de l'administration préalablement à l'ouverture de l'enquête ; que les entreprises ne sont, par la suite, pas fondées à demander d'écarter lesdits procès­verbaux et de prononcer la nullité de l'ensemble de la procédure de ce chef ;

Sur l'argument relatif à l'accusation de " vol ou d'un abus de confiance" :

Considérant que la société Béton Chantiers du Var invoque la nullité de la procédure d'enquête en faisant valoir que " le fait pour un salarié de s'emparer de documents appartenant à son employeur constitue un vol ou, le cas échéant, si ces documents lui avaient été confiés pour l'exécution de son travail, un abus de confiance " ; que, selon la société Béton Chantiers du Var, tel serait notamment le cas de " notes prises par le salarié dans l'exercice de ses fonctions au cours de réunions de travail " ; que cette entreprise estime que les documents intitulés " plate­forme affaires " communiqués en photocopie, le 5 juillet 1993, par M. Mas aux enquêteurs, " appartenaient incontestablement à la société Unimix " ; que cette société déclare que " même s'ils ont été restitués le 16 août 1993 par la DGCCRF ", ces documents " ont donc été détenus par celle­ci du 5 juillet 1993 au 16 août 1993, et dès lors ont pu être utilisés par l'administration pour les suites de son enquête " ; que cette société fait en outre valoir que l'un des documents (feuillet n° 26 " plate­forme d'affaire Avignon ") figure toujours au dossier F 686 ; que, par ailleurs, la société Unibéton fait valoir qu'elle a " déposé une plainte pour vol et abus de confiance contre Monsieur Mas " auprès du doyen des juges d'instruction d'Aix­en­Provence au sujet des documents restitués par la DGCCRF, le 16 août 1993 ; que, selon cette société, la restitution des documents concernés " ne purge pas l'irrégularité ainsi commise " ;

Mais considérant que le conseil de la société Unibéton a indiqué le 28 octobre 1996 que les documents visés par la plainte pour vol et abus de confiance avec constitution de partie civile déposée le 19 juillet 1994 et qui n'ont toujours pas donné lieu à décision de justice, sont ceux restitués à M. Mas par la DGCCRF, " en raison de leur appartenance présumée à la société Unimix " ; qu'il a également précisé qu'" à ce jour, la société Unibéton n'a pas déposé de nouvelle plainte pour vol et recel à l'encontre de Monsieur Mas visant d'autres documents ou informations détenus et communiqués par monsieur Mas dans le cadre de cette affaire " ; que les documents ainsi visés par la plainte n'ont, à aucun moment de la procédure, fait partie du dossier F 686, à l'exception d'une photocopie de l'un d'eux intitulé " plate­forme d'affaire Avignon" subsistant au dossier, à la suite d'une erreur matérielle mais qui n'a pas été utilisé par le rapporteur pour fonder les griefs notifiés ; que les sociétés Unibéton et Béton Chantiers du Var reconnaissent elles­mêmes que, " certes, la notification de griefs ne se fonde pas sur ces documents " ; qu'il n'est en outre ni allégué ni établi que les documents litigieux ont été utilisés en cours d'enquête ; que, dès lors les documents visés par la plainte ne faisant pas partie du dossier de l'espèce, une éventuelle condamnation de M. Mas pour vol ou abus de confiance ne saurait avoir d'incidence sur la régularité de la procédure diligentée devant le Conseil ; qu'en tout état de cause, la société Unibéton a déclaré en séance qu'une ordonnance de non lieu avait été rendue par le magistrat instructeur à la suite de la plainte pour vol ; qu'il y a cependant lieu d'écarter du débat contradictoire la pièce cotée 26 intitulée " plate­forme d'affaire Avignon ", dans la mesure où cette pièce ayant été restituée, par procès­verbal du 16 août 1993, elle n'aurait pas dû être versée au dossier, l'original ayant été restitué par procès­verbal du 16 août 1993 ; que, pour le reste, le moyen doit être écarté ;

Sur l'argument relatif à l'accusation de faux en écriture :

Considérant que la société Unibéton indique que si la plainte pour vol et abus de confiance déposée en juillet 1994 à l'encontre de M. Mas ne concerne que les documents par la suite restitués par la DGCCRF, " l'examen des pièces du dossier tout au long de la procédure devant le Conseil de la concurrence a mis en lumière les invraisemblances et les doutes sérieux qui pèsent sur l'authenticité des autres documents remis par M. Mas aux enquêteurs, le 5 juillet 1993, et au rapporteur, le 8 novembre 1995 " ; qu'elle précise qu'une plainte pour faux et usage de faux contre X a été déposée, le 4 avril 1997, devant le Doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance de Paris, et demande au Conseil, dans l'hypothèse où il s'estimerait incompétent pour constater l'irrégularité de la procédure, de surseoir à statuer, dans l'attente d'une décision du juge pénal ; que la société Béton Chantiers du Var déclare que le document intitulé " Réunions de table PACA " remis en photocopie aux enquêteurs, le 5 juillet 1993, relève manifestement de la définition de faux en écriture et que, si ces documents ne devaient pas être considérés comme des faux, ils ne pourraient alors " résulter que d'un vol ou d'un abus de confiance " ;

Considérant que, lors de sa déposition, le 5 juillet 1993, M. Mas a déclaré : " Je vous remets ce jour copie de mes notes manuscrites prises au cours des réunions de répartition de marché entre le l7 janvier 1993 et le 15 avril 1993. J'ai conservé les originaux de ces documents et j'ai remis copie du dossier que je vous donne à mon avocat " ; qu'en annexe à sa plainte, M. Mas a communiqué des photocopies de documents intitulés " Réunions de table PACA " et " Plate­forme affaires " ; que si M. Mas a, par la suite, précisé avoir " reconstitué " le document intitulé " Réunions de table PACA " à partir de son agenda, la lecture de ces photocopies montre qu'il s'agit de listes de dates, de noms de responsables et de lieux sans qu'il soit possible d'inférer de ses déclarations qu'il avait présenté ces documents comme étant des notes prises au cours de réunions entre sociétés concurrentes ; que celles­ci correspondent d'ailleurs aux documents dénommés " Plate­forme affaires " qui comportent seuls les pourcentages et suivis des parts de marché ainsi que le prix " déterminé à l'avance par client et prix des entreprises couvrant l'attributaire pré­désigné " ;

Considérant qu'il est constant que la société Unibéton n'a déposé aucune plainte pour vol, recel ou abus de confiance à l'encontre de M. Mas, au sujet des documents remis en copie aux enquêteurs, le 5 juillet 1993, et au rapporteur, le 8 novembre 1995, à l'exception des documents restitués par la DGCCRF à M. Mas, antérieurement à la saisine du Conseil par le ministre de l'économie ; que si la société Unibéton soutient qu'une plainte contre X pour faux et usage de faux a été déposée, le 4 avril 1997, cette entreprise n'a produit aucun élément permettant de considérer que sa plainte vise les documents remis aux enquêteurs le 5 juillet 1993 et au rapporteur le 8 novembre 1995 ;

Considérant enfin que M. Fernandez, ancien collaborateur de M. Mas au sein de la société Unimix, a expressément reconnu être l'auteur d'une pièce manuscrite figurant parmi les pièces versées au dossier par M. Mas ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'aucun élément ne venant au soutien de l'accusation de " faux en écriture " portée contre X par la société Unibéton, il n'y a pas lieu pour le Conseil de la concurrence de surseoir à statuer dans l'attente d'une décision du juge pénal, comme le demande la société Unibéton ;

Sur la validité des documents remis au rapporteur, le 8 novembre 1995 :

Considérant que, le 8 novembre 1995, M. Mas a remis au rapporteur plusieurs cahiers à spirales de couleur en indiquant qu'ils constituaient les originaux des pièces remises en photocopies aux enquêteurs le 5 juillet 1993 ainsi qu'un agenda personnel ; que, par lettre en date du 11 octobre 1995, il a déclaré que le document intitulé " Réunions de table PACA " remis aux enquêteurs le 5 juillet 1993 avait été reconstitué par lui­même, d'après son agenda personnel versé au dossier en original le 8 novembre 1995 ; que la société Béton Chantiers du Var soutient que la remise des documents originaux au rapporteur est irrégulière dans la mesure notamment où " la remise des originaux n'aurait évidemment pas pu être faite si les copies n'avaient pas à l'origine de l'enquête été communiquées à la DGCCRF " ;

Mais considérant que les arguments tirés de l'absence de validité des pièces communiquées aux enquêteurs, le 5 juillet 1993, en raison des prétendus chefs de vol et abus de confiance et de faux en écriture, ne pouvant être retenus, aucune contestation relative à la remise des documents originaux au rapporteur ne peut utilement être soutenue, et ce, d'autant plus que la remise au rapporteur de documents pouvant constituer des indices matériels anticoncurrentiels n'implique pas forcément que ces documents aient été préalablement communiqués en photocopies à des enquêteurs ;

Sur les arguments relatifs à l'absence de validité des pièces communiquées au juge ainsi que des pièces saisies sur le fondement des dispositions de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 :

Considérant que les sociétés Unibéton, Béton Chantiers du Var et Super Béton contestent la validité des conditions dans lesquelles le magistrat concerné a été amené à rendre une ordonnance de visite sur le fondement de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; que la société Unibéton soutient que " l'examen des pièces auquel procède le magistrat qui autorise les saisies, sous le contrôle de la Cour de cassation, ne peut en aucun cas valoir reconnaissance définitive de la licéité de ces pièces " ; que la société Béton Chantiers du Var déclare également que " le juge, dans le cadre de son pouvoir de l'article 48, ne peut exercer qu'un contrôle de l'apparence de la licéité des documents qui lui sont présentés " ; que la société Super Béton affirme que le Conseil de la concurrence " ne pourra (.....) se contenter de vérifier l'apparence de l'origine licite des documents sur le fondement desquels (....) la procédure d'enquête article 48 et la notification de griefs ont été établis ou conduits " ; que ces entreprises, qui soutenaient devant la Cour de cassation que la restitution de pièces " présumées " appartenir à la société Unimix, ne pouvait " purger " l'irrégularité commise, demandent au Conseil de tirer les conséquences de l'irrégularité de la détention des pièces sur lesquelles s'est fondé le juge pour autoriser les saisies et, par voie de conséquence, d'écarter les pièces, selon elles, irrégulièrement saisies sur le fondement de l'article 48 de l'ordonnance ; qu'elles font valoir à cet égard que, dans son arrêt en date du 3 octobre 1995 relatif à l'examen de la validité de la procédure menée sur le fondement de l'article 48 de l'ordonnance, la Cour de cassation a indiqué, au sujet des pièces en cause : que " Tout autre contestation au fond sur la licéité des ces documents relève [relevant] des juridictions compétentes pour apprécier la régularité de la procédure " ;

Considérant par ailleurs que la société BCCA soutient que l'ordonnance rendue par le président du tribunal de tribunal de grande instance de Marseille ne faisait entrer dans son champ d'application ni le département des Alpes­Maritimes ni la société BCCA ; qu'elle demande au Conseil de la concurrence de constater l'irrégularité de la saisie et, par voie de conséquence d'abandonner le grief la concernant dans la mesure où ce grief repose sur des pièces irrégulièrement saisies ;

Mais considérant que, selon l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, l'ordonnance du président du tribunal de tribunal de grande instance autorisant les visites et saisies, lesquelles s'effectuent sous l'autorité de ce magistrat, n'est susceptible que d'un pourvoi en cassation et que ce pourvoi n'est pas suspensif ; que dans son arrêt en date du 3 octobre 1995 susvisé, la Cour de cassation a jugé qu'en fixant un délai de six mois pour la présentation des requêtes tendant à l'annulation des opérations achevées, le président du tribunal de grande instance de Marseille avait excédé ses pouvoirs et violé l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et cassé et annulé l'ordonnance rendue le 28 janvier 1994 en ce qu'elle avait fixé un délai de six mois pour la présentation des requêtes tendant à l'annulation des opérations de visites et saisies domiciliaires et, pour le reste, rejeté les pourvois ; que, par ailleurs, le Conseil de la concurrence n'a compétence pour se prononcer ni sur la validité des pièces soumises à l'appréciation du juge pour délivrer son ordonnance ni sur la régularité des visites et saisies effectuées sur le fondement de l'article 48 de l'ordonnance, ni, partant, pour écarter les pièces qui auraient été irrégulièrement appréhendées, ces contestations relevant, aux termes de l'ordonnance du 1er décembre 1986, du contentieux réservé aux juridictions de l'ordre judiciaire ; que dès lors, le Conseil ayant été saisi par le ministre chargé de l'économie de pratiques mises en œuvre dans le secteur du béton prêt à l'emploi dans la région Provence­Alpes­Côte­d'Azur, les arguments des sociétés Unibéton, Béton Chantiers du Var et Super Béton, d'une part, et BCCA, d'autre part, doivent être écartés ; que, s'agissant des autres pièces utilisées dans la procédure, il appartient au Conseil d'apprécier leur validité au regard du respect de la procédure prévue par l'article 47 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Sur la validité du procès­verbal de M. Ridolfi, agent commercial de la société Béton Chantier Prêt, en date du 20 septembre 1993 :

Considérant que la société Béton Chantier Prêt (BCP) soutient que les enquêteurs de la DGCCRF ont, à l'occasion de l'enquête effectuée le 20 septembre 1993 auprès de M. Rifolfi, agent commercial de l'entreprise, excédé les limites des pouvoirs dont ils peuvent faire usage en application des dispositions de l'article 47 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; que, selon cette société qui se fonde sur une attestation écrite rédigée par M. Ridolfi, ils auraient, le 9 juillet 1996, procédé à une " fouille " des locaux et à la saisie de documents professionnels, sans les avoir préalablement demandés ;

Mais considérant que les procès­verbaux d'enquête établis conformément à l'article 47 de l'ordonnance font foi jusqu'à preuve du contraire ; que, dans l'attestation établie près de trois ans après les faits, M. Ridolfi déclare que les enquêteurs lui ont " présenté leur carte " et lui ont " donné un texte à lire, " Ordonnance relative à la liberté des prix et de la concurrence ", sur lequel apparaissaient des articles 45 à 52 " ; qu'au surplus, le procès­verbal établi à l'issue de l'enquête précise que l'intéressé a été informé de son objet, ce que la société BCP ne conteste pas ; qu'en outre, à la rubrique " observations " du procès­verbal, M. Ridolfi n'a formulé aucune observation et a reçu copie du procès­verbal qui indique que " pour les besoins de notre enquête, M. Ridolfi nous a remis et communiqué les documents ci­après " ; qu'aucun élément du procès­verbal rédigé à l'issue des investigations ne permet de mettre en doute la validité des opérations effectuées, comme l'indique le procès­verbal, " avec les pouvoirs de l'article 47 de l'ordonnance " ; qu'il s'en suit qu'aucun autre élément, y compris les déclarations postérieures de l'intéressé, n'apportant la preuve de ce que la procédure d'enquête n'a pas été respectée, le moyen invoqué par la société BCP doit être écarté ;

Sur la validité du procès­verbal de M. Patrick Deverne, chef de secteur commercial de la société Béton de France, en date du 20 septembre 1993 :

Considérant que la société Béton de France a contesté, en cours d'instruction, la validité du procès­verbal d'audition et de communication de documents du 20 septembre 1993 de M. Patrick Deverne, chef de secteur commercial de la société Béton de France, direction régionale Vaucluse­Gard, au motif que, selon elle, les enquêteurs auraient procédé à une véritable " fouille " des locaux ainsi que du véhicule de l'intéressé ; que cette entreprise, qui a versé au dossier une attestation établie par M. Deverne dans laquelle l'intéressé déclare notamment ne pas avoir été informé de l'objet de l'enquête et de M. Pancin, directeur délégué de la société Béton de France, conteste également la durée de l'enquête qui se serait poursuivie pendant près de cinq heures ;

Mais considérant qu'il ressort des déclarations convergentes de M. Deverne et de M. Pancin, son supérieur hiérarchique, que les enquêteurs se sont présentés dans la société Béton de France à 10 heures, ainsi que le mentionne le procès­verbal rédigé à l'issue des investigations ; que M. Pancin, qui a reçu les enquêteurs dans l'entreprise, a reconnu avoir été informé de l'objet de l'enquête relative à " l'activité du béton prêt à l'emploi dans le département du Vaucluse " ; que le procès­verbal, qui mentionne également que l'objet de l'enquête a été indiqué à M. Deverne, précise : " Je vous remets ci­après copie des documents que vous m'avez demandés " ; qu'à la rubrique " observations " du procès­verbal, M. Deverne, qui soutient que le procès­verbal était rédigé en des termes qu'il n'avait pas tenus, n'a porté aucune observation et a signé le procès­verbal sans réserves ; qu'aucun moyen ne saurait enfin valablement être tiré de la durée de l'enquête dès lors qu'il a été reconnu que l'enquête a débuté pendant les heures normales d'ouverture de l'entreprise et ne s'est pas poursuivie au­delà de quinze heures ; qu'aucun autre élément du procès­verbal rédigé à l'issue des investigations ne permet de mettre en doute la validité des opérations effectuées, comme l'indique le procès­verbal, " avec les pouvoirs de l'article 47 de l'ordonnance " ; qu'il s'ensuit que les moyens invoqués par la société Béton de France du dossier doivent être écartés ;

Sur l'enquête effectuée auprès de la société Express Béton :

Considérant que la société Express Béton, qui invoque la nullité du procès­verbal de M. Tallon en date du 20 septembre 1993, soutient que l'enquête effectuée le même jour dans l'entreprise, sur le fondement de l'article 47 de l'ordonnance, serait irrégulière au motif que les enquêteurs auraient procédé à une véritable " fouille " des locaux et à un détournement de pouvoir ; que la société SBBA. soutient que l'agenda de M. Tallon, agent commercial de la société Express Béton, communiqué aux enquêteurs, le 20 septembre 1993, est un document " mixte " et non un document " professionnel ", dans la mesure où ce document comporte des annotations personnelles ; que, selon cette entreprise, l'inventaire du procès­verbal rédigé à l'issue de l'enquête mentionne la communication d'un " agenda personnel " ; que la société SBBA. demande au Conseil de la concurrence d'écarter ladite pièce du dossier ;

Mais considérant que le procès­verbal de déclaration et de communication de documents rédigé le 20 septembre 1993, après avoir mentionné l'indication de l'objet de l'enquête à M. Tallon ainsi que l'article 47 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 précise : " Nous avons demandé à M. Tallon de nous présenter son agenda professionnel et nous avons relevé la présence de réunions à l'extérieur de l'entreprise. M. Tallon nous a répondu que ces réunions étaient des réunions de travail internes au groupe Lafarge " ; qu'ainsi, si " l'inventaire " des pièces communiquées par M. Tallon mentionne des " copies d'agenda personnel numérotées de 1 à 6 ", la société SBBA. ne peut utilement soutenir que la demande ne portait pas sur un agenda à caractère professionnel ; que la simple présence de cinq annotations, en partie illisibles comme le reconnaît la société SBBA, interprétées par elle comme étant des annotations personnelles, parmi de multiples annotations liées de manière quasiment exclusive à l'activité professionnelle de l'intéressé, ne suffit pas à enlever un caractère " professionnel " aux extraits du document, communiqués en copies aux enquêteurs; que l'enquête effectuée dans la société Express Béton ayant été régulièrement effectuée, il n'y a donc pas lieu d'écarter le procès­verbal et ses annexes du dossier;

Sur la validité de la communication de l'agenda de M. Crohem par M. Marsaudon :

Considérant que la société SBBA soutient que la communication de l'agenda de M. Crohem par M. Marsaudon, le 20 septembre 1993, a donné lieu à de " graves irrégularités ", les enquêteurs ayant procédé, selon cette entreprise à " une véritable fouille " des locaux en demandant la communication systématique de tous les documents ainsi qu'à une atteinte au secret professionnel en permettant à un tiers de photocopier les documents ;

Considérant que le procès­verbal de déclaration et de communication de documents de M. Marsaudon, chef de secteur de la société SBBA., rédigé le 20 septembre 1993 mentionne : " Je découvre avec vous les documents de travail de M. Crohem et vous communique en copie ces documents que nous avons consultés ensemble " ; que si l'article 47 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 autorise les enquêteurs à demander la communication de " livres, factures et tous autres documents professionnels ", en aucun cas, ils ne peuvent procéder à une demande générale et imprécise des documents présents dans l'entreprise, sans connaître préalablement l'existence des documents demandés; que, dans ces conditions, ce procès­verbal rédigé à la suite des investigations doit être écarté du dossier ainsi que les pièces communiquées aux enquêteurs par M. Marsaudon ;

Sur les marchés :

Considérant que le béton prêt à l'emploi est un produit pondéreux qui nécessite une livraison dans un délai d'une heure et demie au maximum; qu'il n'est pas contesté qu'en raison de ces caractéristiques les marchés géographiques du béton prêt à l'emploi sont des zones géographiques d'un rayon de 25 à 30 km autour des unités de fabrication généralement situées à proximité des centres urbains; qu'au cas d'espèce, les différents marchés géographiques concernés par la saisine, qui se situent tous dans la région Provence­Alpes­Côte­d'Azur, sont ceux de Toulon, de Fréjus­Saint­Raphaël, de Cavaillon, d'Avignon, d'Aix­en Provence et de Nice ; que, sur plusieurs de ces marchés, interviennent notamment des filiales de groupes cimentiers Lafarge, qui possède une cimenterie à La Malle, Vicat, qui possède une usine à Nice, Calcia (Ciments Français), qui possède une usine à Beaucaire, ainsi que la société Béton de France, filiale du groupe Ready Mix Concrete (RMC), et Redland Granulats Sud, filiale du groupe Redland ;

Sur les pratiques :

Considérant qu'il résulte d'une jurisprudence constante que la preuve d'actions concertées peut être apportée par un faisceau d'indices graves, précis et concordants tels que ceux susceptibles de résulter de la confrontation de témoignages, de documents manuscrits ou dactylographiés, même non datés, avec les résultats de consultations organisées par des maîtres d'œuvre publics ou privés; qu'il est indifférent que ces documents aient été saisis dans des entreprises autres que celles mises en cause à l'occasion desdites concertations ou que les entreprises mentionnées sur les pièces manuscrites n'aient finalement pas remis d'offres lors de la consultation, dès lors que le recoupement de ces pièces avec d'autres indices concordants permet de démontrer la participation des entreprises à la concertation;

Sur les pratiques concertées de fixation de prix et de quotas en région Provence Alpes­Côte­d'Azur :

En ce qui concerne les pratiques relevées sur le marché de Toulon, de janvier à mai 1993 :

Considérant, en premier lieu, qu'un document manuscrit relatif à l'attribution du marché de la station d'épuration du cap Sicié à la fin de l'année 1993 et au début de l'année 1994 décrit dans la partie I de la présente décision, rédigé de la main de M. Arrieta, en tant que directeur de la société Super Béton et saisi le 7 février 1994 dans l'entreprise Super Béton à La Seyne­sur­Mer, fait apparaître différents chiffres en regard de chacun des sigles BF, BCV, B 83 et SMB ; que le rapport des chiffres 2100, 1900, 1900, 1200, inscrits respectivement au regard des sigles BF, BCV, B 83 et SMB, et du total 7 200 donne les pourcentages respectifs de 29,2 %, 26,4 %, 26,4 %, 16,7 % pour chacun des sigles susmentionnés ; que ces pourcentages sont quasiment identiques à ceux de 29, 27, 27 et 17 attribués aux sigles BF, BCV, B 83 et Unimix sur une pièce manuscrite versée au dossier par M. Mas en photocopie le 5 juillet 1993 et qui apporterait, selon ce dernier, la preuve de l'existence d'une répartition de marché avec " suivi des parts de marché " et " écarts par rapport aux objectifs " ; que la découverte de cette pièce manuscrite dans une entreprise concurrente de celle dans laquelle M. Mas exerçait la fonction de directeur commercial tend à accréditer les affirmations de l'intéressé au sujet de l'existence d'une entente généralisée de quotas entre les sociétés Béton de France, Béton Chantiers du Var, Super Béton et SMB en 1993 sur le marché de Toulon du béton prêt à l'emploi ;

Considérant que la société Super Béton soutient que, outre le fait que " le recoupement n'est pas aussi exact que le suggère le rapporteur ", " le document de M. Arrieta ne constitue rien d'autre qu'une simple estimation, élaborée à un moment donné, en tenant compte des prévisions des ventes de ses concurrents " ou à un " suivi de chantiers " ; qu'elle fait valoir que M. Arrieta " de par sa connaissance du marché " est " vraisemblablement en mesure de connaître avec une précision relative sa part de marché et celle de ses principaux concurrents " ;

Mais considérant que s'il existe une différence entre les pourcentages susmentionnés, celle­ci résulte de l'erreur commise par M. Arrieta lors de l'addition des chiffres de 2 100, 1900, 1900 et 1200, dont la somme est égale à 7 100 au lieu de 7 200 ; qu'un autre document manuscrit rédigé par M. Mas fait d'ailleurs apparaître les chiffres de 27, 29 et 17 ; qu'en outre le document rédigé par le directeur général de la société Super Béton fait état d'un " cumul " négatif ou positif pour chacun des sigles BF (­2600), BCV (+ 1450), B 83 (+ 1950) et SMB (­ 900), révélant l'existence d'un système d'" avances­retards " ; que l'expression " Médiathèque ­ rendu 1500 m3 " utilisée par M. Arrieta dans l'une de ses notes confirme le fait que les membres de l'entente respectaient les quotas qui leur avaient été attribués ; que, comme le souligne la société Super Béton dans ses observations écrites, lesdits quotas permettaient à M. Arrieta, " en appliquant à une date donnée, auxdits tonnages, les pourcentages de parts de marché des quatre principales entreprises, (d')en déduire les tonnages que pourraient réaliser lesdites quatre entreprises " ; que, par ailleurs, contrairement à ce que laisse entendre la société Super Béton, la seule connaissance de l'existence de chantiers " à venir " ne peut permettre à une entreprise, en l'absence de concertation, de prévoir à l'avance les parts de marché futures des différents opérateurs, la décision de l'attribution d'un marché à un fournisseur relevant du libre choix du consommateur de béton ; qu'ainsi se trouve contredite l'affirmation de cette société selon laquelle les chiffres se rapporteraient à des estimations des parts des " quatre entreprises concernées " dont il n'est pas contesté qu'il s'agit des sociétés Béton Chantiers du Var (BCV), Béton de France (BF), Super Béton (B 83) et Société Méditerranéenne de Béton (SMB) ;

Considérant, en second lieu, que, sur les notes manuscrites communiquées en photocopie aux enquêteurs lors de sa déposition le 5 juillet 1993, M. Mas avait indiqué, à la date du 2 février 1993 et à la rubrique " SPIE Citra M. Marteau Déviation du Las 2 800 m3 " les chiffres 475, 474, 485 et 485, respectivement pour les sigles " SMB ", " BF ", " B83 " et " BC " ; que, le 23 mai 1995, les enquêteurs se sont présentés à la société SPIE Citra et ils s'y sont faits communiquer les offres remises lors de la consultation " Déviation du Las" ; que les montants des offres initiales s'élevaient respectivement à 475 F, 485 F et 474 F pour les sociétés SMB, Super Béton et Béton de France, pour la fourniture de béton dosé à 350 kg CPA ; qu'en revanche le montant de l'offre de la société BCV s'élevant à 490 F, la société SPIE Citra a finalement négocié un prix de 470 F avec cette dernière entreprise ; que les indications données par M. Mas ne peuvent donc traduire le résultat de la consultation, le maître d'œuvre ayant choisi de retenir, après négociations, l'entreprise ayant fait l'offre initiale la plus élevée ; qu'à la date du 5 février 1993, M. Mas avait notamment attribué aux sigles " SMB ", " B83 " et " BC ", les chiffres respectifs de 450, 440 et 445 au sujet du chantier " QUEYRAS La Coudoulière ", le sigle " BF " se voyant attribuer un sigle de forme rectangulaire non chiffré ; que le responsable de la société Queyras a déclaré que la société Béton de France avait été retenue pour la réalisation du chantier susmentionné, les autres entreprises ne s'étant " pas manifestées " ; qu'enfin, l'enquête a établi qu'aux dates des 2 et 5 février 1993 s'étaient tenues des réunions, respectivement à l'" Orée du bois " au Muy et à l'hôtel Climat de France à La Farlède (83), M. Mas ayant informé les enquêteurs le 5 juillet 1993 de la tenue de réunions entre représentants de sociétés concurrentes aux dates et lieux susmentionnés ; que l'enquête a permis d'établir que la réservation auprès de l'hôtel Climat de France à La Farlède avait été effectuée par la société Béton de France ; que, par ailleurs, la société Super Béton ne conteste pas avoir effectué une réservation à l'hôtel Campanile de La­Seyne­Sur­Mer pour une réunion le 8 janvier 1993, cette date ayant également été mentionnée par M. Mas comme étant une date de réunion entre sociétés concurrentes ;

Considérant que ces éléments constituent un ensemble d'indices précis, graves et concordants établissant l'existence d'une concertation relative à une répartition de marché du béton prêt à l'emploi entre les sociétés Béton de France, Béton Chantiers du Var, Super Béton et Unibéton dans la zone géographique de Toulon, de janvier 1993 jusqu'au départ de M. Mas de la société Unimix en mai 1993 ; que cette pratique entre les quatre entreprises susmentionnées ayant eu pour objet et pour effet de fausser le jeu de la concurrence sur un marché est prohibée par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

En ce qui concerne les pratiques qui se sont poursuivies sur le marché de Toulon après le départ de M. Mas de la société Unimix, en mai 1993,

Considérant que les travaux relatifs à la traversée souterraine de Toulon ont donné lieu, à partir du mois de décembre 1992 et jusqu'en début d'année 1994, à des consultations des fournisseurs potentiels de béton par les différentes entreprises de BTP chargées de la réalisation des travaux ;

Considérant, s'agissant des travaux de la partie Ouest de la traversée souterraine de Toulon, que des consultations ont été organisées par les société GTM et Bachy pour l'attribution de marchés du béton prêt à l'emploi des tranches respectives " génie civil " et " parois moulées " ; que les sociétés Béton de France et SMB ont répondu séparément à ces deux consultations, en décembre 1992, en proposant un prix unitaire de 490 F pour du béton de type 25 ; que si la société S.M.B a remis une nouvelle offre pour la tranche " parois moulées ", le 16 mars 1993, la société Béton de France a reconnu, dans ses observations en réponse à la notification de griefs, ne pas avoir " répondu aux nouvelles consultations lancées en mars 1993 par les sociétés GTM et Bachy " ; que la société SMB avait présenté une nouvelle offre à la société G.T.M., le 19 mars 1993 ; que la société Bachy a finalement attribué le marché " parois moulées " à la société Béton Chantiers du Var au prix unitaire de 410 F, le 20 avril 1993 ; que la société G.T.M. a quant à elle retenu l'offre de la société Super Béton au prix unitaire de 410 F, le 12 juillet 1993, en dépit du fait que la société Béton Chantiers du Var avait également présenté une offre du même montant ;

Considérant que M. Arrieta, directeur de la société Super Béton a déclaré par procès­verbal d'audition en date du 27 février 1996 : " S'agissant de la tranche parois moulées, nous avions fait une offre au maître d'œuvre, la société Bachy qui ne l'a pas retenue. Nous avons cependant fourni du béton en quantité importante pour ce chantier pour Bachy " ; que la société Super Béton a par ailleurs reconnu que " les travaux de génie civil ont fait l'objet d'une attribution à la société Super Béton par décision de GTM en date du 12 juillet 1993 au prix unitaire de 410 F, soit bien après que, selon la notification de griefs, il serait établi avec certitude qu'un représentant de Super Béton ait pris part à des réunions avec des entreprises concurrentes " ; qu'il ressort en effet des pièces versées au dossier que des réunions se sont tenues, en début d'année 1993, entre des entreprises concurrentes au sujet du béton destiné aux chantiers de la traversée souterraine de Toulon ; qu'ainsi, MM. Gaillot et Giraudo, respectivement directeur et directeur commercial de la société Béton Chantier du Var, ont déclaré, par procès­verbal d'audition en date du 20 septembre 1993, que " les réunions organisées avec les confrères locaux des sociétés Béton 83, SMB et Béton de France avaient pour objet principal la préparation du futur chantier de la traversée de Toulon ­ logistique, prix proposés " et précisé que des réunions s'étaient notamment tenues les 16 mars et 19 mars 1993, jours coïncidant avec la remise d'une offre concurrente par la société SMB pour les tranches " parois moulées " et " génie civil " ; que les annotations portées par M. Giraudo de la société Béton Chantiers du Var sur son éphéméride aux dates des 19 mars, 9 avril et 10 mai 1993 font état respectivement de " RV Bachy­10h30 Reynier ", " réunion confrères " et de " RV 15 h tour Blanche CLUB " ;

Considérant par ailleurs qu'un tableau intitulé " prévisions volumes trimestrielles " relatif aux centrales de Sanary et de La Garde de la société SMB adressé, le 22 décembre 1993, à la société Unimix par la société SMB faisait notamment apparaître, dans les " chantiers à traiter " en janvier­février­mars 1994, la " traversée de Toulon trémie " pour des volumes de 1 500 m3 en janvier et février 1994 et la " Paroi moulée " de " Bachy " pour un volume de 500 m3 en mars 1994 ; que la société SMB n'a été attributaire d'aucun des marchés relatifs au béton destiné au génie civil ou aux parois moulées de la partie Ouest ; que cette entreprise n'a pas davantage été désignée comme entreprise sous­traitante de ces marchés ; que le document susmentionné ne pouvait donc constituer des prévisions de volumes de béton à livrer dans le cadre d'un marché ou en tant qu'entreprise sous­traitante ; qu'en revanche, un document manuscrit portant la date du 9 avril 1993 versé au dossier par M. Mas et portant la mention " BACHY 12 000 BC BF....pilote BC " mentionnait également les sigles " SMB " et " B 83 " au sujet de la consultation effectuée par la société Bachy ; que le rapprochement des deux documents susmentionnés et des déclarations de M. Arrieta permet ainsi d'établir que, dès le 9 avril 1993, les entreprises titulaires du marché envisageaient de confier aux sociétés SMB et Super Béton, non retenues par le maître d'œuvre, la fourniture d'une partie du béton nécessaire à la réalisation du chantier ;

Considérant que la société Béton Chantiers du Var déclare que " les différentes réunions invoquées dans le rapport s'expliquent et se justifient par les contacts inévitables " relatifs à des groupements " ou projets de groupements " ; que la société Super Béton déclare que " des réunions ont pu avoir lieu à l'époque des faits entre certains opérateurs à raison des importants marchés du tunnel de Toulon " ; que la société Béton de France avait, quant à elle, justifié, dans son mémoire en réponse à la notification de griefs, la tenue de réunions entre sociétés concurrentes, par l'existence de " cadences de livraison instantanées insoutenables " et par la nécessité de " lutter (...), contre la concurrence des centrales de chantier afin de préserver leurs centrales de production " ;

Mais considérant que s'il est loisible aux entreprises de se grouper pour présenter des offres conjointes, en raison par exemple de difficultés de réalisation du marché et de se réunir pour préparer de telles offres, en aucun cas de telles réunions ne doivent avoir pour objet ou pour effet de tromper le maître d'œuvre sur la réalité de la concurrence ; qu'en l'espèce, les représentants des sociétés Béton Chantiers du Var et Super Béton ont reconnu par procès­verbal d'audition avoir participé à des réunions communes auxquelles assistaient également leurs concurrents Béton de France et SMB ; que, s'il apparaît que les maîtres d'œuvre ont, après avoir refusé des offres conjointes, finalement accepté que des groupements soient constitués entre les sociétés Super Béton et Béton Chantiers du Var pour la tranche " génie civil " de la partie Ouest, Béton Chantiers du Var et Béton de France pour la tranche " parois moulées " et Béton de France et SMB pour la trémie Est, il résulte du dossier qu'à aucun moment n'a été envisagée la constitution d'un groupement d'entreprises unique entre les sociétés Super Béton, Béton Chantiers du Var, Béton de France et SMB pour la fourniture de béton prêt à l'emploi sur les différents chantiers ;

Considérant que, s'agissant de la consultation organisée au sujet de la fourniture de béton pour la trémie Est de la traversée souterraine de Toulon, le responsable de la société Nicoletti déclare avoir à l'origine " consulté Béton de France, Béton 83, Béton Chantiers du Var, SMB, Redland ", les prix remis étant " de 450 F le m3 et plus " ; qu'ainsi, des offres distinctes de 490,50 F et de 480,50 F pour du béton de type B 30 dosé à 400 kg de ciment ont été présentées respectivement par les sociétés Béton de France et Béton Chantiers du Var en août 1993 ; que le maître d'œuvre a déclaré : " nous avons reconsulté les fabricants de béton, les mêmes, plus SNBT qui avait ouvert une centrale à Ollioules en octobre 1993. (.......) seule la société Béton de France a suivi en compétition pendant un mois et demi avec SNBT. C'est finalement Béton de France qui a remporté le marché, SNBT ne pouvant plus baisser ses prix " ; qu'à partir du 27 décembre 1993, des offres distinctes ont été présentées par les sociétés Béton de France, Super Béton, Béton Chantiers du Var et Redland ; que, parmi les pièces saisies dans la société Unibéton, le 7 février 1994 figure un tableau intitulé " prévisions volumes trimestrielles ", adressé le 22 décembre 1993 à cette entreprise par la société SMB ; que, parmi les " chantiers à traiter " en janvier­février­mars 1994, figuraient la " traversée de Toulon trémie " pour des volumes de 1 500 m3 en janvier et février 1994 ; qu'à la date du 22 décembre 1993, la société SMB, qui n'avait pas présenté d'offre individuelle, en dépit du fait qu'elle dispose, selon la société Béton Chantiers du Var, d'une " situation géographique privilégiée par rapport au lieu de ce futur chantier de la trémie est ", ne pouvait savoir qu'elle serait admise à fournir du béton en groupement avec la société Béton de France, dans la mesure où la consultation des fournisseurs de béton par le maître d'œuvre n'était pas encore terminée ;

Considérant qu'un document manuscrit, relatif à la fourniture de béton aux sociétés Bachy et GTM pour les tranches respectives " parois moulées " et " génie civil " de l'accès Ouest du tunnel, décrit dans la partie I de la présente décision et versé au dossier en copie par M. Mas le 5 juillet 1993 indique, au sujet des " parois moulées Bachy " : " 1200 mètres cube 6000 BC 6000 Béton de France " ; que le même document mentionne : " BACHY 12000 BC BF .... pilote BC SMB­B83 BCS 350 (...) " ainsi que " GTM et C Moderne 41 000 CUOGHI Pilote BC (.....) à la demande de BF facturer (.....°) 9 avril 1993 " ; qu'ainsi que l'avait relevé la société Super Béton dans ses observations en réponse à la notification de griefs, " contrairement aux indications figurant dans la note manuscrite de M. Mas, c'est Super Béton, et non Béton de France ni Béton Chantiers du Var, qui a été retenue pour réaliser ce marché " ; que la même société a également relevé que " contrairement aux indications figurant dans la note manuscrite de M. Mas en date du 9 avril 1993, (.....) aux termes d'une note manuscrite versée au dossier par le maître d'œuvre, (....°) c'est à Béton 83 que seront passées les commandes " ; qu'ainsi se trouve confirmé le fait qu'à la date du 9 avril 1993, date à laquelle les marchés n'étaient pas encore attribués, les sociétés Béton de France, Super Béton, Béton Chantiers du Var et SMB envisageaient de confier à la société Béton Chantiers du Var (BC) le pilotage des opérations dans le cadre des chantiers " génie civil " et " parois moulées " alors que des offres avaient été présentées en concurrence par certaines de ces entreprises, la société Béton de France ayant reconnu s'être volontairement abstenue de répondre à la nouvelle consultation lancée par la société GTM, en mars 1993 ; que si la société Bachy a retenu l'offre de la société Béton Chantiers du Var, la société GTM a décidé de retenir comme entreprise pilote la société Super Béton au lieu de la société Béton Chantiers du Var ;

Considérant qu'il ressort de ce qui précède que les sociétés Béton Chantiers du Var, Béton de France, Super Béton et Unibéton, qui se sont présentées comme entreprises concurrentes lors de consultations organisées par les maîtres d'œuvre pour la fourniture de béton à l'occasion de la construction de la traversée souterraine de Toulon, se sont concertées, non dans le but de présenter une offre commune mais dans celui de se répartir les marchés ; que ces entreprises ont faussé le jeu de la concurrence et ainsi trompé les maîtres d'œuvre sur la réalité et l'étendue de la concurrence ; que cette pratique concertée, qui a pris naissance au cours de l'année 1993 et qui s'est poursuivie au cours de l'année 1994, ayant pour objet et pour effet de fausser le jeu de la concurrence est prohibée par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Sur les pratiques relevées sur d'autres marchés géographiques :

Sur le marché de Nice :

Considérant que, lors de la visite effectuée, le 7 février 1994, dans la société Super Béton sur le fondement de l'article 48 de l'ordonnance, différentes pièces manuscrites et dactylographiées ont été saisies dans cette entreprise ; que les indications contenues dans les tableaux manuscrits et dactylographiés saisis dans la société Super Béton permettent de chiffrer les parts attribuées à chacune des sociétés Béton Contrôlé de la Côte d'Azur (BCCA), filiale de la société Vicat, Béton Chantiers Nice, filiale de la société Lafarge Ciments et Béton de France respectivement à 38,5 %, 36,5 % et 25 % ; que cette information se trouve corroborée par les indications figurant sur un document manuscrit révélant l'existence d'une répartition ponctuelle d'une liste de chantiers, représentant au total 37 700 mètres cubes de béton, entre les trois entreprises susmentionnées au prorata des parts attribuées à chacune d'entre elles, à savoir respectivement, 14 514, 13 760 et 9 425 mètres cubes ; qu'un autre document manuscrit saisi dans la même entreprise, qui comporte une liste de chantiers en partie identiques à ceux figurant sur le document susmentionné ainsi que leur répartition chantier par chantier sous les sigles " BCCA ", " BF " et " B " ou " BC ", donne également une répartition globale d'un total de 42 600 en trois parts respectives de 38,5, 36,5 et 25 % et précise, au sujet du chantier " Balcon bleu " de Villefranche non attribué : " pas tout de suite­ne pas le compter " ; que des indications figurant sur un autre document manuscrit (cote 884) portant la mention " à faire ", attribue à la société Béton de France les chantiers " MCB La Trinité ", " La Palestre, Le Canet " et " MGE Jardin Bleu ", tandis qu'il préconise en revanche de " laisser à LBN ou Balbiano " le chantier " Spiridos, Olivetto à Cannes " car " mauvais payeur ", les entreprises LBN et Balbiano étant des concurrentes des sociétés BCCA, BCN et Béton de France ;

Considérant que la société BCN soutient que les tableaux susmentionnés, saisis dans la société Super Béton mais relatifs à la société BCCA, seraient, soit des tableaux de " suivi de chantiers ", soit des tableaux de " production de béton par centrale à béton " ;

Mais considérant que, si des tableaux dactylographiés datés des 7 septembre 1993, 16 octobre 1993, 22 novembre 1993, 8 décembre 1993 et 29 janvier 1994, saisis dans les locaux de la société Super Béton, sont effectivement intitulés " suivi des chantiers ", le rapport du total attribué à chacun des trois sigles " BCCA ", " BCN " et " BF " à la somme des trois chiffres totaux demeure constant sur chacun des tableaux, soit respectivement 38,5, 36,5 et 25 %, alors que la liste des chantiers est différente et que les chantiers portent sur des volumes de béton différents ; qu'en outre, la société BCN déclare, dans ses observations écrites, " en ce qui concerne les tableaux de suivi de chantiers précités, cinq des chantiers prétendument attribués à la société Béton Chantiers Nice n'ont jamais été effectués par cette entreprise " ; qu'au surplus, la même entreprise admet que seulement " douze chantiers prétendument affectés à la société Béton Chantiers Nice ont été livrés à des dates antérieures à celles qui figurent sur les tableaux de " suivi de chantiers " et de " mise à jour ", alors qu'au total 29 chantiers sont attribués à la société BCN sur lesdits tableaux ; que, dès lors, ces documents ne peuvent, comme le prétend cette entreprise constituer des " suivis de chantiers " après attribution des marchés ; que, s'agissant des documents intitulés " suivi des production", la précision apportée dans la réalisation de ces tableaux, qui révèlent la production mensuelle des centrales à béton des groupes Vicat, Lafarge et Béton de France sur le marché de Nice ainsi que les " résultats ", établit que la confection desdits documents n'a pu résulter que d'échanges d'informations entre sociétés concurrentes ; qu'il est indifférent, pour la qualification de la pratique, que la quantité globale de béton produite en 1993 par la société BCN, à savoir 115 800 mètres cubes, selon cette entreprise, soit " différente du chiffre total figurant sur le tableau évoqué à la page 67 du rapport ", à savoir 61 500 m3, dans la mesure où, d'une part, ce dernier chiffre est une mise à jour au 22 novembre 1993 et que, d'autre part, les tableaux intitulés " suivi des chantiers " ne concernent manifestement que la partie de la production de ces entreprises relative aux seuls chantiers recensés, à l'exclusion des livraisons dites de " diffus ", effectuées le plus souvent en petites quantités mais en nombre important auprès d'utilisateurs occasionnels ;

Considérant que, de l'examen de ces documents, il ressort qu'une concertation a été mise en œuvre en 1993 sur le marché du béton prêt à l'emploi dans la zone de Nice entre les sociétés Béton Contrôlé de la Côte d'Azur (BCCA), Béton Chantiers Nice (BCN) et Béton de France ; que cette pratique concertée de fixation de quotas avec système d'avances­retards, destinée à se répartir le marché, ayant eu pour objet et pour effet de fausser le jeu de la concurrence, est prohibée par l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Sur les marchés d'Avignon et de Cavaillon :

Considérant qu'il ressort des constatations mentionnées dans la partie I de la présente décision que M. Thierry Fernandez, ancien collaborateur de M. Mas au sein de la société Unimix, a reconnu être l'auteur d'un tableau manuscrit daté du 5 février 1993 et faisant apparaître des éléments chiffrés relatifs à l'activité des sociétés Béton Chantier Prêt, filiale du groupe Lafarge Ciments, Redland Granulats Sud, Unibéton et Sylvestre ; que, s'agissant du marché d'Avignon, ledit document, après avoir mentionné des volumes totaux pour chacune des centrales des sociétés Béton de France, Redland, BCP et Unimix en janvier 1993, affecte à chacune de ces sociétés les quotas résultant des parts qui leur sont attribuées, à savoir 33,6 % pour chacune des sociétés Béton de France et Redland et 16,4 % pour chacune des sociétés BCP et Unimix ainsi que les écarts entre la réalisation et le quota théorique ; que, s'agissant du marché de Cavaillon, ledit document énonce les mêmes éléments au sujet des sociétés Béton Granulats Sylvestre, BCP, Redland et Unimix qui se voient attribuer les parts respectives de 13 % pour Redland et de 29 % pour chacune des autres ; que l'auteur de ce document a déclaré que M. Mas lui avait alors demandé de " faire le point sur la situation du marché Avignonnais avec mes (ses) confrères " ;

Considérant en outre qu'un tableau interne à la société Unimix, décrit dans la partie I de la présente décision, intitulé " rapport concurrence Vaucluse " et daté du 21 décembre 1993, fait apparaître des volumes de béton pour différentes entreprises concurrentes au cours des mois de janvier à septembre 1993 ; que, s'agissant de la " zone Avignon ", ledit document fait apparaître des volumes pour les centrales d'Avignon de la société Unimix, de Sorgues et de Rognonas pour la société Redland, ainsi que des " volumes estimés " pour chacune des sociétés GMB, Béton Sud 84, Béton Provence et BCTG, aucune de ces dernières entreprises n'appartenant à un groupe d'importance nationale au moment des faits ; que, s'il ne peut être exclu que les informations relatives à la zone d'Avignon constituent des estimations portées sur les volumes de béton produits par des entreprises concurrentes, les données relatives à l'activité des sociétés Unimix, Redland et Bétons Granulats Sylvestre dans la " zone Cavaillon " ne sont en revanche pas présentées comme étant des estimations ; qu'en outre, ledit document fait apparaître la " part de marché " de la société Bétons Granulats Sylvestre pour chacun des mois de janvier à septembre 1993, alors que, s'agissant des autres sociétés " indépendantes " des groupes d'importance nationale, à savoir GMB, Béton Sud 84, Béton Provence et BCTG, n'apparaissent que la " part de marché estimée " ;

Considérant par ailleurs, que M. Patrick Deverne, chef de secteur commercial de la société Béton de France, a reconnu avoir rencontré MM. Mas et Ridolfi, responsables respectifs des sociétés Unimix et BCP, le 22 mars 1993 à l'hôtel Mercure de Lançon de Provence, date qui avait été mentionnée par M. Mas, le 5 juillet 1995, comme étant une date de réunion entre sociétés concurrentes ; que l'enquête effectuée auprès de l'établissement hôtelier a également permis d'établir que la réservation de la salle de réunion, pour le 22 mars 1993, avait été effectuée par la société Redland Granulats Sud pour 8 à 10 personnes ; qu'en outre, le propriétaire de l'hôtel Araxe à l'Isle­sur­la­Sorgue a également déclaré avoir loué une salle de réunion à différentes reprises à la société Béton de France et en particulier, le 3 février 1993, date qui avait également été mentionnée par M. Mas comme étant une date de réunion entre sociétés concurrentes ; qu'enfin, un document saisi dans la société Unimix et reproduit dans la partie I de la présente décision confirme l'existence d'un système de gestion de quotas dans cette zone entre les différents membres de l'entente ;

Considérant enfin que, lors de sa déposition, le 5 juillet 1993, M. Mas avait dénoncé l'existence d'une entente de prix et de quotas entre producteurs de béton dans la zone d'Avignon et de Cavaillon ; que, lors de son audition au Conseil de la concurrence, le 8 novembre 1995, M. Mas avait précisé que l'entente entre les sociétés Unimix, Redland, Béton de France et BCP dans la région du Vaucluse concernait 3 zones ; que, selon ce responsable, la zone I située au nord, concernait la région du Pontet et d'Entraigues, zone dans laquelle intervenait, outre les membres de l'entente, la société GM Béton ; que, selon lui, la zone II concernait la région d'Avignon, dans laquelle les membres de l'entente n'étaient concurrencés par aucun indépendant, ce qui explique, selon M. Mas, que les prix étaient supérieurs à ceux des autres zones ; que, selon ce même responsable, la zone III concernait la région de Cavaillon, zone dans laquelle la société Béton de France n'était pas présente mais où intervenait la société Sylvestre, entreprise indépendante ;

Considérant que la société Béton Granulats Sylvestre déclare que la preuve de sa participation à une entente anticoncurrentielle ne serait pas rapportée, M. Mas ne l'ayant pas citée dans sa dénonciation ; qu'elle déclare que " le tableau dactylographié daté du 21 décembre 1993 relatif aux volumes réalisés par chacun des intervenants du marché correspond bien, pour les mois de janvier à mai aux tonnages déclarés à l'UNICEM " ; qu'elle précise que, contrairement aux sociétés GMB, Béton Sud, Béton Provence et BCTG, elle était adhérente à l'UNICEM, ce qui pourrait expliquer le fait que les tonnages étaient estimés pour ces entreprises ; qu'elle déclare qu'en revanche les tonnages relatifs aux mois de juin à septembre n'ont " aucun rapport avec ceux que nous avons réalisés et déclarés " ; qu'en outre, elle conteste le fait que M. Fernandez aurait reconnu être l'auteur du tableau daté du 5 février 1993 ainsi que la " véracité " du document, au motif que l'" on voit mal l'intérêt de se réunir au mois de février sur des informations relatives au mois de janvier voire au mois d'août pour s'organiser afin de répartir un marché " ; que la société Unibéton soutient également que M. Fernandez n'" a (...) pas reconnu formellement être l'auteur de la totalité des mentions " figurant sur le tableau daté du 5 février 1993, ajoutant que " ce document ayant été communiqué par monsieur Mas aux enquêteurs puis au rapporteur dans les conditions que l'on sait, on ne peut exclure que ce dernier l'ait complété ou modifié pour lui donner un sens particulier " ;

Mais considérant que M. Fernandez, ancien collaborateur de M. Mas au sein de la société Unimix, a déclaré, ainsi que le relèvent les sociétés Béton Granulats Sylvestre et Unibéton dans leurs observations en réponse au rapport : " Après analyse de cette copie, je ne peux avoir noté toutes les informations qui y figurent mais compte tenu de la date à laquelle je l'ai écrit, je ne puis être affirmatif sur ce point " ; qu'il ressort explicitement des termes " je l'ai écrit " que M. Fernandez a admis être l'auteur du document manuscrit, l'intéressé ayant précisé que M. Mas lui avait demandé de faire le point sur le marché avignonnais " avec mes (ses) confrères " ; qu'il existe par ailleurs une concordance entre plusieurs chiffres mentionnés sur le document manuscrit daté du 5 février 1993 et de ceux figurant sur le tableau dactylographié daté du 21 décembre 1993, en dépit de la non concordance de temps ; que la participation de la société Béton Granulats Sylvestre à l'entente se trouve attestée par la mention selon laquelle " Sylvestre avait fait une erreur de 1 000 m3" ; que si M. Mas a effectivement omis de citer la société Béton Granulats Sylvestre dans ses déclarations comme étant membre de l'entente, le nom de cette entreprise apparaît sur le cahier à spirales versé au dossier, l'entreprise intéressée ayant d'ailleurs reconnu, dans ses observations en réponse au rapport, avoir " coulé du béton " pour le chantier " CES Paul Gauthier " à un prix unitaire de 277 F, soit à un prix très proche de celui de 280 F qui était mentionné par M. Mas pour cette société ;

Considérant que la société Redland Granulats Sud fait valoir que le nom des responsables de l'entreprise ne sont jamais cités dans le document intitulé " Réunion de table PACA " ; que MM. Deverne et Ridlofi n'ont pas cité le nom d'un responsable de Redland Sud ; qu'il n'est pas établi qu'un responsable de la société Redland Sud se soit rendu à la réunion du 22 mars 1993 à l'hôtel Mercure de Lançon de Provence ; que cette société soutient que " la seule indication du nom de Redland Sud " sur les tableaux datés du 5 février 1993 et du 21 décembre 1993 ou " les déclarations tardives et contradictoires de Monsieur Mas quant à la participation à une entente " ne permettent pas à eux seuls d'établir la participation à une entente ; qu'elle affirme que " la comparaison des volumes figurant sur ces notes avec les véritables volumes de production démontre que ces tableaux sont totalement incohérents dans le cas de Redland Sud " ;

Mais considérant que la circonstance que M. Mas ait omis de mentionner la société Redland Granulats Sud comme membre de l'entente dans sa déposition le 5 juillet 1993 est sans incidence sur la preuve de la participation de cette entreprise à la concertation, dans la mesure où, d'une part, les mentions " R " et " Red " apparaissent dans les notes prises par M. Mas lors des réunions avec des entreprises concurrentes et où, d'autre part, M. Mas a déclaré, le 8 novembre 1995, que la société Redland Granulats Sud faisait partie de l'entente ; que M. Deverne, chef de secteur commercial de la société Béton de France, a reconnu avoir assisté à une réunion, le 22 mars 1993 à l'hôtel Mercure de Lançon de Provence ; que le fait que l'intéressé ait déclaré y avoir rencontré MM. Mas et Ridolfi, responsables d'entreprises concurrentes, n'exclut nullement qu'un ou plusieurs représentants de la société Redland Granulats Sud aient pu assister à la réunion, d'autant plus, ainsi que le reconnaît cette société dans ses observations écrites, que " l'enquête a établi que Redland Sud a réservé une salle pour le 22 mars 1993 à l'hôtel Mercure de Lançon de Provence pour 8 à 10 personnes " ; que, s'agissant des volumes figurant sur les pièces datées des 5 février 1993 et du 21 décembre 1993, la société Redland Granulats Sud admet, dans ses observations écrites, l'identité des chiffres la concernant pour le mois de janvier ; que, pour ce qui concerne les autres mois, M. Mas a expliqué que les différences pouvaient résulter du fait que " les entreprises étaient tentées de sous­estimer leurs productions respectives auprès des autres membres de l'entente " ; qu'enfin, l'argument selon lequel le sigle " Red " n'est désigné comme attributaire que de trois chantiers représentant un volume de 970 m3 au total, " soit un peu plus de 4 % " au lieu des 33,6 % mentionnés sur le document manuscrit dont M. Fernandez a reconnu être l'auteur, ne peut valablement être retenu dans la mesure où les pourcentages de 33,6 % et de 13 % indiqués pour la zone de Cavaillon et d'Avignon, d'une part, et la seule zone de Cavaillon, d'autre part, sont des parts moyennes " fixes " qui ne peuvent résulter de calculs effectués à l'occasion de répartitions ponctuelles de certains chantiers entre les membres des ententes, lesquelles répartitions peuvent aboutir à des variations dans le temps, en fonction de l'intérêt porté par chaque membre de l'entente à tel ou tel chantier particulier ;

Considérant qu'il ressort des indices graves, précis et concordants recueillis lors de l'enquête que des concertations visant à se répartir des quotas de béton et à fixer des prix en commun ont été mises en œuvre dans le courant du premier semestre 1993 sur chacun des marchés d'Avignon et de Cavaillon ; que ces concertations ayant eu pour objet et pour effet de fausser le jeu de la concurrence, qui concernaient respectivement les sociétés Unibéton, Redland Granulats Sud, Béton de France et Béton Chantiers Prêt (BCP) dans la zone d'Avignon et les sociétés Unibéton, Redland Granulats Sud, BCP et Béton Granulats Sylvestre dans la zone de Cavaillon, sont prohibées par l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Dans la zone d'Aix­en­Provence :

Considérant que l'enquête effectuée auprès de l'établissement " Les Relais Bleus " à Aix­en­Provence a établi qu'une salle de réunion avait été réservée et louée à la date du 18 janvier 1993 par la société Redland Sud dans cet établissement ; que dans les listes de chantiers à se répartir communiquées par M. Mas lors de sa plainte apparaissaient, pour le chantier " Bruno Rostand centre des impôts ", à la date du 18 janvier 1993, les chiffres respectifs de " 390 " et de " 392 " pour les sigles " MID " et " SMB " ; que les sigles " BF " et " BGP " étaient affectés respectivement des signes " " et " ? " ; que l'enquête effectuée auprès de la société Bruno Rostand a confirmé que, d'une part, les prix offerts par les sociétés Redland et SMB, lors de la consultation, le 15 février 1993, correspondaient aux chiffres susmentionnés et affectés aux sigles " MID " et " SMB " et que, d'autre part, le GIE BGP avait été retenu, car " moins­disant " et la société Béton de France s'était abstenue ; que la société Redland Granulats Sud reconnaît d'ailleurs avoir présenté une offre de 390 F lors de la seconde consultation, le 15 février 1993 ; que l'enquête a également établi que M. Mari du GIE BGP avait réservé une salle de réunion pour quatre personnes, à la date du 7 janvier 1993, à l'hôtel Campanile de La Penne­sur­Huveaune ; que le responsable de l'établissement a déclaré que le " séminaire de M. Mari " avait dû se tenir dans la chambre n° 1 de l'établissement, dans la mesure où la salle de réunion était déjà réservée, l'intéressé ayant toutefois refusé d'admettre avoir procédé à une telle réservation lors de son audition, le 19 octobre 1993 ; que, lors du dépôt de sa plainte, le 5 juillet 1993, M. Mas avait déclaré avoir participé à une réunion, le 7 janvier 1993, avec MM. Mari, du GIE BGP, et Bicchi de la société Béton de France ; que dans ses listes de chantiers remises en photocopies aux enquêteurs, le 5 juillet 1993 puis en original au rapporteur, M. Mas avait noté, à la date du 7 janvier 1993, au sujet du chantier " Quillery, pôle d'échange Parking de la Rotonde " les chiffres 380, 385, 390 et 387 dans les colonnes respectivement intitulées " BF ", " BGP ", " MID " et " SMB " ; que le responsable de la société Quillery a remis aux enquêteurs un document daté du 11 janvier 1993 sur lequel est porté la mention " BPE 380 ", sans qu'y soit mentionné le nom de l'entreprise attributaire du marché ; que ledit responsable a toutefois déclaré qu'" en règle générale " il consultait la société Béton de France " à ce stade des études " ; que l'enquête a également établi que la société Redland Granulats Sud avait réservé une salle de réunion à l'hôtel Les Relais Bleus à Aix­en­Provence pour la date du 18 janvier 1993, cette date ayant également été mentionnée par M. Mas comme étant une date de réunion entre sociétés concurrentes ; que d'ailleurs, sur les listes de chantiers à se répartir entre les sociétés Béton de France, BGP, Midimix et SMB, remises aux enquêteurs par M. Mas, apparaissent plusieurs chantiers, à la date du 18 janvier 1993 ;

Considérant par ailleurs que, lors du dépôt de sa plainte, le 5 juillet 1993, M. Mas avait déclaré que l'entente de prix et de quotas entre producteurs de béton dans la zone d'Aix­en­Provence concernait le GIE Bétons Granulats Phocéens (BGP), les sociétés Béton de France et Unimix ; que, selon les notes communiquées par M. Mas, les parts de marché attribuées aux membres de l'entente s'élevaient respectivement à 58,5 % pour la société Béton de France, 24 % pour le GIE BGP, 9,5 % pour la société Midimix, société absorbée par la société Redland Granulats Sud, et 8 % pour la société SMB ; qu'au vu des photocopies de pièces manuscrites présentées aux enquêteurs et des déclarations de M. Mas, un système d'" avances­retards " était géré dans le cadre de l'entente ;

Considérant que la société Redland Granulats Sud déclare qu'aucune preuve de sa participation à une entente n'a pu être trouvée dans les agendas des responsables de Redland Sud ; que dans le document intitulé " Réunion de table PACA ", le nom de Redland Sud n'est jamais cité ; que, s'agissant des 18 janvier 1993 et 14 avril 1993, elle fait valoir qu'" aucune preuve d'une participation de Redland Sud à des discussions de nature anticoncurrentielle n'a pu être établie " ; que les dates des 22 mars et 25 mars n'apparaîtraient pas dans le cahier de M. Mas appelé " Aix " ; qu'au sujet des tableaux de chantiers figurant dans le cahier de M. Mas, elle fait valoir que, dans plusieurs cas, elle avait déposé une offre avant la date mentionnée dans le cahier de M. Mas et cite plusieurs exemples tendant, selon elle, à démontrer qu'il n'a pu y avoir concertation de nature anticoncurrentielle ;

Mais considérant que la société Redland Granulats Sud reconnaît, à la page 30 de ses observations écrites, que " l'un de ses représentants s'est rendu à une réunion le 18 janvier " dans l'hôtel " les Relais Bleus " à Aix­en­Provence ; que, s'agissant du chantier " Bruno Rostand centre des impôts ", l'entreprise en cause admet avoir remis une offre de 390 F, le 15 février 1993, soit postérieurement à la date du 18 janvier 1993 mentionnée sur le cahier de M. Mas et au prix indiqué sur ledit document ; qu'ainsi que le souligne la société Redland Granulats Sud, un " carré avec un point d'interrogation " figurait en face du groupement BGP, bénéficiaire du marché, dans le cahier de M. Mas, qui a déclaré en cours d'instruction que l'attributaire du marché était désigné par un rectangle ; que la société Redland Granulats Sud reconnaît que l'enquête a établi que le GIE BGP, mentionné sur la liste de M. Mas à la date du 18 janvier 1993, comme devant être attributaire du chantier " Routière du midi, ZAC Eiffel " a bien obtenu le chantier, la société Redland Granulats Sud admettant avoir également bénéficié de livraisons de béton destinées à ce chantier avec la société Béton de France et le groupement BGP ; qu'enfin , au sujet du chantier " Ciebat îles vertes Jas de Bouffan " mentionné à la date du 12 mars 1993 sur le cahier de M. Mas intitulé " SMB Aix ", si l'enquête a bien établi que les sociétés Béton de France et BGP avaient présenté une offre antérieurement à la date du 12 mars, la société SMB, contrairement à l'indication figurant sur le cahier, n'a pu présenter une offre de 403 F, n'ayant pas été contactée par la société Ciebat ; que le fait que M. Mas ait omis de citer la société Redland Granulats Sud parmi les membres de l'entente ne peut constituer une preuve de la non participation de cette entreprise à la concertation dans la mesure où les sigles " MID " et " RD " ainsi que le nom " REDLAND " figurent sur les pièces versées au dossier par M Mas ;

Considérant qu'il ressort des indices graves, précis et concordants réunis lors de l'enquête qu'une concertation visant à se répartir des quotas de béton et à fixer des prix en commun a été mise en œuvre au courant du premier semestre 1993 sur le marché d'Aix­en­Provence entre la société Béton de France, la société Midimix, société absorbée par la société Redland Granulats Sud, la société Unibéton et le GIE BGP, aujourd'hui dissous ; que cette pratique, ayant eu pour objet et pour effet de fausser le jeu de la concurrence, est prohibée par l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Sur le marché de l'est du département du Var :

Considérant que, lors du dépôt de sa plainte, le 5 juillet 1993, M. Mas avait déclaré que l'entente de prix et de quotas entre producteurs de béton dans la zone " Muy­Saint­Raphaël­Fréjus ", située dans la partie Est du département du Var, concernait les sociétés Unimix, Béton de France, Express Béton, filiale commune des groupes Lafarge et Vicat ; que, dans cette zone géographique, la société Béton de France intervient par l'intermédiaire de la société SBBA, Sarl qu'elle détient à 50% ; que la société Redland Granulats Sud, dirigée par M. Sylvian Lucas, a par ailleurs installé une centrale à béton dans la ville de Fréjus, en mars 1992,

Considérant, d'une part, qu'une pièce manuscrite saisie dans la société Unibéton sur le fondement de l'article 48 de l'ordonnance indique : " place faite à Redland sur Fréjus. Partie à récupérer ailleurs " ; qu'un autre document, saisi dans les locaux de la société Unimix mentionne : " 1 pt de perte sur Var RED (1) il faut récupérer 6 000 mètres cubes sur St Raphaël sans réponse sous 8 jours (....) plutôt sur Bouches­du­Rhône " ; que les annotations portées par M. Mas sur un cahier intitulé " Le Muy, Saint­Raphaël­Frejus " au sujet d'une répartition de marché dans la zone géographique considérée font apparaître la société Redland à compter du mois de janvier 1993 ; que des annotations figurant dans le même cahier et datées du 1er mars 1993 mentionnent le chiffre " 6000 ", affecté de 11,5% , pour le sigle " Red ", les sigles " Unimix ", " SBBA " et " EB " se voyant crédités des pourcentages respectifs de 32,5, 28,1 et 27,9 ; qu'un tableau saisi dans la société Unimix intitulé " chantiers en cours " fait apparaître le chantier " Dumez Bleu Marine " parmi les chantiers traités par cette entreprise en janvier­février­mars 1994, au prix unitaire de 340 F, alors que les offres respectives des sociétés Unimix (Uni), Béton de France (BF), Express Béton (EB) et Redland Granulats Sud (RED) pour ce chantier étaient présentées dans le cahier de M. Mas comme étant 378, 380, 380 et 382 F ; qu'ainsi, les chiffres figurant sur la pièce interne à la société Unimix ne peuvent constituer les résultats de la consultation organisée pour la réalisation de ce chantier ;

Considérant, d'autre part, que sur les extraits d'agenda communiqués en photocopie par M. Tallon, agent commercial de la société Express Béton, apparaissent des réunions aux dates des 20 janvier, 2 février, 2 mars, 18 mars, 15 avril et 27 avril 1993 ; que ces dates concordent toutes avec des dates mentionnées par M. Mas, lors de sa déposition, le 5 juillet 1993, comme étant des dates de réunions entre représentants de sociétés concurrentes afin de se répartir les marchés ; qu'ainsi, la date du 2 mars était mentionnée par M. Mas comme étant la date d'une réunion à la " Maison des vins " avec notamment les sociétés Express Béton, Béton de France et Unimix ; qu'à la date du 2 mars 1993, M. Tallon avait inscrit " Maison des vins " sur son agenda ; que, de la même manière, la date du 15 avril 1993 avait été mentionnée par M. Mas comme étant une date de réunion à Lorgues avec les mêmes entreprises, ce que confirme la mention " Lorgues " sur l'agenda de M. Tallon à cette même date ; qu'il est donc établi que des réunions étaient organisées en 1993 entre des sociétés concurrentes intervenant dans l'Est du département du Var ;

Considérant que la société Unibéton soutient que l'expression " sans réponse sous 8 jours " ne traduit aucune idée de " négociation avec un concurrent " mais traduit la possibilité pour le commercial concerné de trouver une solution de remplacement, à la suite de la fermeture de la centrale de Fréjus, en janvier 1993, dans le cadre de la préparation budgétaire ; que les sociétés SBBA, Redland Granulats Sud et Express Béton déclarent que les deux documents manuscrits cités dans le rapport et saisis chez Unimix le 7 février 1994 sont des documents internes à la société Unimix qui n'apportent pas la preuve de leur participation à une entente anticoncurrentielle ; que la société Redland Granulats Sud précise que l'expression " place faite à Redland " n'implique en rien que Redland avait " acquiescé à ce propos " ;

Mais considérant qu'il est constant que la société Redland a ouvert une centrale à Fréjus en mars 1992 ; que la société Unibéton a reconnu avoir fermé une centrale à Fréjus au mois de janvier 1993 ; qu'il ressort du rapprochement des différents documents versés au dossier que l'entrée de la société Redland Granulats Sud dans l'entente sur le marché de Fréjus s'est opérée avec l'accord des membres de l'entente en janvier 1993, seules les sociétés Unimix, Express Béton et SBBA faisant partie de la concertation dans la période antérieure ; que l'expression " place faite à Redland sur Fréjus " ne saurait dès lors, comme l'affirment les sociétés Unibéton et Redland Granulats Sud dans leurs observations écrites, traduire le simple " constat de l'entrée incontestable de la société Redland sur le marché du Var­est " ; que le document manuscrit daté du 19 octobre 1993 saisi dans la société Unimix souligne d'ailleurs le " poids de la négociation pour obtenir en 94 les volumes souhaités " ; que la circonstance selon laquelle la société Redland Granulats Sud a décidé de fermer la centrale de Fréjus à la fin de l'année 1994 est sans portée sur la qualification de la pratique ;

Considérant que la société SBBA soutient, dans ses observations en réponse au rapport, que " le but du rapporteur est de démontrer que l'entrée de la société Redland en 1992 a fait l'objet d'un " deal " : l'entrée de la société Redland sur le marché de Fréjus n'était admise qu'à la condition que les producteurs déjà présents puissent récupérer des parts de marché sur d'autres zones " ; qu'elle indique à ce sujet que ses prix moyens de vente sont ainsi passés de 337 F en mars 1992 à 248 F en décembre 1992 et verse au dossier un tableau intitulé " prix moyen de vente de la centrale de Fréjus pour les années 1991, 1992 et 1993 " ; qu'elle déclare que " la société Redland (....) confirme cette guerre des prix " ; que la société Redland Granulats Sud indique en effet, dans ses observations en réponse au rapport, que le prix moyen de vente de la centrale de Fréjus est passé de 463,20 F en mars 1992, date de son implantation, à 310,10 F en décembre 1992 ; que cette entreprise affirme que "cette décroissance des prix démontre que Redland Sud a dû affronter une véritable concurrence " ;

Mais considérant que si le tableau versé au dossier par la société SBBA. en annexe 3 à ses observations écrites établit que le prix moyen de vente du béton de cette entreprise a subi une baisse entre le mois de janvier 1992 et le mois de décembre 1992, le même tableau démontre que le prix moyen de vente départ est passé de 248 F en décembre 1992 à 325 F en décembre 1993 ; que si la baisse des prix coïncide en partie avec l'entrée de la société Redland sur le marché en mars 1992, la hausse des prix, en janvier 1993, coïncide avec l'entrée de la société Redland dans l'entente, ainsi que le démontrent les notes manuscrites prises lors des réunions communes par M. Mas ; qu'un document saisi dans la société Unimix (cote 3634) mentionne d'ailleurs, " augmentation des prix sur Var Est aux alentours de 400 à 440 F/m3 (supérieur à 92) : + 46 F/m3 depuis janvier 1993 " ; qu'ainsi se trouve dénuée de portée l'argumentation développée par les sociétés SBBA et Redland Granulats Sud au sujet de la variation des prix ;

Considérant que ces différents indices graves, précis et concordants établissent l'existence d'une concertation, dénoncée par M. Mas dans sa déposition du 5 juillet 1993 et relative à une répartition de marché entre des entreprises concurrentes dans la partie Est du département du Var entre les sociétés Unimix, SBBA., Redland Granulats Sud et Express Béton, de janvier 1993 à mai 1993 ; que cette concertation, ayant eu pour objet et pour effet de fausser le jeu de la concurrence sur le marché, est prohibée par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Sur l'existence d'une concertation étendue à l'ensemble de la région Provence­Alpes­Côte­d'Azur :

En ce qui concerne les liens tissés entre les groupes Lafarge, Vicat, Béton de France, Redland et Unibéton dans la région PACA :

Considérant que, dans le groupe Lafarge, M. Alain de Philip exerçait les fonctions de " directeur de bassin de l'activité béton­granulats de la région PACA en 1993­1994 " ; que ce même responsable occupait également les fonctions de président­directeur général de la société Béton Chantiers Nice (BCN), filiale du groupe Lafarge, membre d'une entente anticoncurrentielle sur le marché de Nice, et d'administrateur de la société Béton Chantiers Prêt (BCP), autre filiale du groupe Lafarge, également membre d'une entente sur les marchés de Cavaillon et d'Avignon ; que M. de Philip siégeait également au conseil d'administration de la société Super Béton, anciennement " Béton 83 " et filiale commune des groupes Lafarge et Vicat, membre de l'entente sur le marché de Toulon, filiale au sujet de laquelle l'actuel président, M. Arrieta, a déclaré qu'il décidait de la fixation des prix et qu'il rendait compte au conseil d'administration ainsi qu'au groupe Vicat de la " politique générale de prix suivie par l'entreprise " ;

Considérant par ailleurs que M. Ricolfi, directeur régional de la société Lafarge Béton Granulats, occupe la fonction de président de la société Express Béton, autre filiale commune des groupes Lafarge et Vicat, membre de l'entente sur le marché de l'est du Var avec les sociétés Redland Granulats Sud, SBBA. et Unibéton ; que la comptabilité client de la société Express Béton a été centralisée auprès de la société Béton Chantiers Nice, filiale du groupe Lafarge, à compter du mois de septembre 1993 en raison d'une " centralisation des services administratifs de Lafarge Béton Granulats à Nice " ; que les sociétés Super Béton et Express Béton, filiales communes à 50/50 des groupes Lafarge et Vicat, étaient également signataires de conventions d'assistance, la première avec Béton Travaux, la seconde avec Lafarge Béton Granulats ; qu'il ressort des déclarations de M. Tallon, agent commercial de la société Express Béton, que des réunions de travail auxquelles participaient les revendeurs des sociétés Béton Chantiers Nice et Express Béton étaient organisées par sa direction ;

Considérant que M. Boisselon, directeur général de la société Béton Contrôlé de la Côte d'Azur (BCCA), société membre de l'entente sur le marché de Nice, a déclaré que le fait que des documents relatifs à la société BCCA se trouvaient dans la société Super Béton, membre de l'entente sur le marché de Toulon, s'explique " par le fait qu'à l'époque (début 1994), M. Arrieta occupait les fonctions de directeur des deux sociétés " ; que ce même responsable a indiqué que c'est la société Béton Travaux qui assure la fonction de " holding " dans le secteur du béton prêt à l'emploi du groupe Vicat et que la présidence du conseil d'administration de la société BCCA est assurée par le responsable de la région " hors Rhône­Alpes " de la société Béton Travaux ; que M. Arrieta a quant à lui déclaré qu'il avait " personnellement été nommé par le groupe Vicat " pour gérer la société Super Béton, filiale commune des groupes avec les sociétés Béton de France, Unibéton et Béton Chantiers du Var, société au sujet de laquelle MM. Gaillot et Giraudo ont déclaré qu'elle était " associée juridiquement par la maison mère, soit Lafarge et Vicat ", avec la société Super Béton ;

Considérant en outre que M. Arrieta a déclaré qu'à sa connaissance des " réunions avec des confrères, sous l'égide du syndicat professionnel UNICEM pour la promotion du béton de voirie " avaient pu se tenir " courant 92­93 " ; qu'il est constant que l'Union Régionale des Industries de Carrières et Matériaux de la Région Provence­Alpes­Côtes­d'Azur­Corse, dénommée UNICEM PACAC, était présidée, en décembre 1993, par M. Alain de Philip et que parmi les membres du collège béton prêt à l'emploi figuraient M. Auzas de la société Unimix, membre de l'entente sur cinq marchés géographiques distincts, MM. Pancin et Fèvre, respectivement directeur délégué et directeur de zone de la société Béton de France, membre de l'entente sur quatre marchés géographiques distincts, M. Gasperi, au moment des faits président de la société BCCA, filiale de Béton de France, membre de l'entente sur le marché du Var Est, M. Lucas, directeur régional de la société Redland Granulats Sud , membre de l'entente sur quatre marchés géographiques distincts, et M. Ricolfi de la société Béton Chantiers Nice, membre de l'entente sur le marché de Nice ; que M. Auzas était le supérieur hiérarchique de M. Mas, directeur commercial de la société Unimix, lequel a déclaré avoir reçu l'ordre de M. Auzas " d'organiser la répartition du marché du béton prêt à l'emploi de la région PACA " ;

Considérant qu'il est constant que M. Mas a participé, en tant que directeur commercial de la société Unimix à des réunions avec des responsables de différentes sociétés faisant partie d'ententes locales, à l'exception de celle mise en œuvre sur le marché de Nice, révélée lors des opérations de visite et de saisie effectuées dans la société Super Béton ; qu'en effet, M. Deverne, chef de secteur commercial de la société Béton de France pour le secteur du Vaucluse a reconnu avoir rencontré MM. Mas et Ridolfi, des " confrères d'entreprises concurrentes ", le 22 mars 1993 à l'hôtel Mercure de Lançon de Provence dans le département des Bouches­du­Rhône, pour faire, selon lui, " le point des différentes actions menées par chacun d'entre nous pour le développement du béton prêt à l'emploi " ; que l'intéressé a reconnu avoir également rencontré les mêmes personnes " en début d'année 1993 " dans le département du Vaucluse à l'hôtel Araxe de l'Isle­sur­la­Sorgue et à l'hôtel Cristel de Cavaillon ; que M. Ridolfi,de la société BCP, également membre de l'entente sur les marchés de Cavaillon et d'Avignon, a également reconnu avoir rencontré MM. Deverne et Mas à plusieurs reprises dans des établissements hôteliers de la région PACA les 3 février, 10 mars et 22 mars 1993 ; que MM. Gaillot et Giraudo de la société Béton Chantiers du Var, membre de l'entente sur le marché de Toulon, ont également reconnu par procès­verbal d'audition, le 20 septembre 1993, avoir participé à des réunions, les 16 et 19 mars, 9 et 30 avril et 10 mai 1993, avec les représentants des sociétés Béton de France, SMB et Super Béton ; que M. Sylvian Lucas, directeur du bassin méditerranéen de la société Redland Granulats Sud, membre de plusieurs ententes locales, a également reconnu qu'il était informé de la tenue de réunions, en 1993, dans la région PACA entre sociétés concurrentes, réunions destinées, selon lui, à définir de nouvelles normes dans le béton prêt à l'emploi, réunions auxquelles participait " parfois " M. Nervi de la société Redland Granulats Sud ; que M. Arrieta, alors­directeur des sociétés Super Béton et BCCA, chacune membre de l'entente sur les marchés respectifs de Toulon et de Nice, a également reconnu avoir participé à des réunions avec les représentants des sociétés Béton de France, SMB et Super Béton ; que M. Tallon de la société Express Béton, membre de l'entente sur le marché du Var Est, a reconnu avoir participé en 1993 à des réunions tenues dans des établissements hôteliers du département du Var et au sujet desquelles M. Mas avait mentionné sa participation ; que ces éléments sont de nature à établir que M. Mas a participé, en tant que salarié de la société Unimix, à des réunions avec des représentants de sociétés concurrentes présentes sur des marchés géographiques distincts ; qu'il résulte d'ailleurs du témoignage de M. Fernandez que M. Mas lui avait demandé de faire le point sur le marché Avignonnais " avec mes (ses) confrères " ;

Considérant qu'une pièce manuscrite saisie dans la société Unimix sur le fondement de l'article 48 de l'ordonnance précise : " place faite à Redland sur Fréjus. Partie à récupérer ailleurs " ; que la société Redland Granulats Sud, qui avait ouvert une centrale à Fréjus en mars 1992, s'est jointe aux membres de l'entente sur le marché de " Var­est " en janvier 1993, période durant laquelle la société Unimix a fermé sa centrale à Fréjus ; que des notes personnelles prises par M. Alain de Philip, directeur des filiales du groupe Lafarge Ciments pour la région Sud­Est, saisies dans les locaux de cette entreprise à Marseille, datées du 17 septembre 1992, indiquent par ailleurs : " AR suite réunion BPE + LUCAS /­FREJUS à GRANULATS CANTAREL /­Veut 3000 à FREJUS­ PANCIN dit 15 / ­ 28 09 CF + REDLAND " ; que les expressions " Lucas (....) veut 3000 à Fréjus " et " Pancin dit 15 ", utilisées par le directeur de bassin de la région PACA du groupe Lafarge, traduisent l'existence d'une négociation en cours entre MM. Lucas, directeur régional de la société Redland Granulats Sud, et Pancin, directeur délégué de la société Béton de France, au sujet de l'activité de leur entreprise dans la zone de Fréjus ; qu'un autre document, saisi dans les locaux de la société Unibéton mentionne : " 1 pt de perte sur Var RED (1) il faut récupérer 6000 mètres cubes sur St Raphaël sans réponse sous 8 jours (....) plutôt sur Bouches­du­Rhône (Lambesc, Miramas, pas Venelle car 50/50 )" ; qu'il est constant que la centrale de Venelle située dans le département des Bouches­du­Rhône, appartenait à la société SMB, Sarl détenue à 50 % par la société Unibéton et à 50 % par le groupe Garassin, et que la société Redland Granulats Sud s'est installée à Fréjus au courant de l'année 1992 ; qu'un document manuscrit daté du 6 septembre 1993 saisi dans les locaux de la société Unimix mentionne au sujet de la zone de Brignole, zone dans laquelle Unimix exploitait alors une centrale à béton : " prévision de cession à Lafarge 06.94 " ; que, lors de son audition au Conseil de la concurrence, le 8 novembre 1995, M. Mas avait déclaré, au sujet des parts de marché attribuées aux différents membres des ententes : " Les parts indiquées pour chacune des centrales et pour chaque société concernée (...) étaient fixes. Elles pouvaient varier lors de fermeture de centrales (exemple lors de la fermeture de la centrale de Fos par la société Unimix, cette entreprise a bénéficié d'une augmentation de part de marché de 2% à Toulon en compensation, dans la mesure où à Toulon se pratiquaient les prix les plus élevés du secteur) " ; que les pièces saisies dans les locaux de la société Unimix établissent que la centrale de Fos de cette entreprise a cessé son activité au courant de l'année 1993 ;

Considérant en outre que, lors de leur audition, MM. Gaillot et Giraudo ont versé au dossier une carte géographique " précisant la zone commerciale privilégiée " de la société Béton Chantiers du Var ; que cette carte fait apparaître une zone délimitée à l'ouest de la ville d'Ollioules, au sud de la ville de Solliès Pont et à l'est de la ville de La Londe­les­Maures ; que, lors de son audition au Conseil de la concurrence, le 8 novembre 1995, M. Mas avait versé au dossier copie d'une carte géographique relative aux différents marchés du béton prêt à l'emploi dans le département du Vaucluse ; que l'intéressé avait précisé que l'entente entre les sociétés Unimix, Redland, Béton de France et BCP dans la région du Vaucluse concernait trois zones ; que, selon ce responsable, la zone I située au nord concernait la région du Pontet et d'Entraigues, zone dans laquelle intervenait, outre les membres de l'entente, la société GM Béton ; que, selon lui, la zone II concernait la région d'Avignon, dans laquelle les membres de l'entente n'étaient concurrencés par aucun indépendant, ce qui explique, selon M. Mas, que les prix étaient supérieurs à ceux des autres zones ; que, selon ce même responsable, la zone III concernait la région de Cavaillon, zone dans laquelle la société Béton de France n'était pas présente mais où intervenait la société Sylvestre, entreprise ne faisant pas partie d'un groupe d'importance nationale ; qu'ainsi, des zones géographiques " privilégiées " étaient affectées aux membres des différentes ententes sur chacun des marchés géographiques concernés, pour lesquels des parts étaient attribuées à chacun des membres ;

Considérant que la société Redland Granulats Sud déclare que la " pluralité d'ententes locales " ne suffirait pas à établir la preuve d'une entente au niveau régional ; que la société Unibéton soutient que les documents saisis le 7 février 1994 dans ses locaux ne constitueraient pas des indices de concertation, étant des documents établis dans le cadre de la préparation du budget 1994 ; que le document faisant état de la " place faite à Redland. Partie à récupérer ailleurs ", traduirait " le constat de l'entrée incontestable de Redland sur le marché du Var­est et de la nécessité pour la société Unibéton, afin de respecter les objectifs fixés par le budget, de mener les actions commerciales propres à permettre de récupérer les volumes ainsi perdus " ;

Mais considérant, ainsi que l'a reconnu la société Unibéton dans ses observations en réponse au rapport qu'" au mois de janvier 1993 la société Unibéton avait fermé sa centrale de Fréjus (....). Par conséquent, le maintien de la part de marché sur la zone nécessitait de récupérer les volumes perdus en priorité sur Saint­Raphaël " ; que cette même société a précisé qu'en cas d'impossibilité de " compenser " la baisse d'activité de 1% en volume sur le Var, " il a été décidé que les efforts devraient porter sur le département des Bouches­du­Rhône " ; que la société Redland, qui avait ouvert une centrale en mars 1992, s'est jointe à l'entente de quotas en janvier 1993 sur le marché du Var­est, à savoir au même moment où la société Unibéton décidait la fermeture de sa centrale à béton sur le marché concerné ; qu'ainsi que l'établit le constat fait par la société Unibéton : " place faite à Redland ", l'entrée de la société Redland, en 1993, dans l'entente organisée sur le marché de Fréjus ne peut être regardée comme étant une décision prise isolément des autres accords de quotas existant déjà sur d'autres marchés géographiques du béton prêt à l'emploi de la région PACA tel celui des " Bouches­du­Rhône nord ", accord auquel participait activement la société Midimix, devenue par la suite Redland Granulats Sud, avec les sociétés Béton de France, Unibéton et BGP , en 1992 et 1993 ;

Considérant que la société Lafarge Béton Granulats soutient que ne peut être retenue comme indice de concertation anticoncurrentielle la participation des groupes Lafarge et Vicat dans les sociétés Express Béton et Super Béton ainsi que le fait que la gestion de la société Express Béton lui ait été confiée et la gestion de la société Super Béton au groupe Vicat, par l'intermédiaire de Béton Travaux dans la mesure où la participation respective de chacun de ces groupes dans l'une des deux sociétés n'était qu'une " participation strictement capitalistique et passive de partenaire dormant " ; que la société Lafarge Béton Granulats déclare que le groupe Vicat n'a plus, à ce jour, de participation dans le capital de la société Express Béton et le groupe Lafarge de participation dans le capital de la société Super Béton ; que, de la même manière, ne saurait être retenu à son encontre le fait que des réunions aient eu lieu entre des représentants des sociétés Express Béton et Béton Chantiers Nice ;

Mais considérant, ainsi que l'a précisé la Cour de Justice des communautés européennes (CJCE, British American Tobacco Company Ltd, Reynolds Industries, Inc., 17 novembre 1987) que les autorités de concurrence doivent s'assurer si " un investissement passif dans une entreprise concurrente, ne vise pas en réalité à (....) instaurer une coopération entre les entreprises en vue d'un partage de marché " ; qu'au cas d'espèce, la participation de représentants des groupes Lafarge et Vicat aux conseils d'administration de chacune des sociétés Express Béton et Super Béton, détenues à 50/50, a pu favoriser la concertation sur différents marchés sur lesquels intervenaient ces deux sociétés ; qu'ainsi, il a notamment été établi que, sur le marché de Toulon, la société Super Béton, filiale commune de Lafarge et de Vicat, et la société Béton Chantiers du Var, appartenant au groupe Lafarge, ont participé à la concertation ; que de même, sur le marché de Nice la société BCCA, filiale du groupe Vicat alors dirigée par M. Arrieta, également directeur de Super Béton, filiale commune de Vicat et de Lafarge, et la société BCN, autre filiale du groupe Lafarge, ont participé à la concertation ; que doit donc être écarté le moyen invoqué en séance par les entreprises selon lequel des participations croisées entre des groupes ne peut s'analyser que dans le cadre de concentrations ;

Considérant que, s'agissant des groupes Lafarge et Vicat, les différentes filiales impliquées dans des ententes sur des marchés locaux du béton prêt à l'emploi étaient rattachées respectivement à deux sociétés " holdings " intermédiaires, les sociétés Lafarge Béton Granulats et Béton Travaux, lesquelles étaient en outre liées à leurs filiales respectives par des conventions d'assistance technique et administrative ; qu'il est de jurisprudence constante, tant communautaire que nationale, que la notion d'entreprise ne se confond pas nécessairement avec la personnalité juridique; que cette notion est applicable à toute entité exerçant des activités de nature commerciale et, s'il s'agit d'un grand groupe industriel, il peut être justifié de l'appliquer à une société mère ou à une filiale; que la pratique susmentionnée ayant été mise en œuvre au niveau de chacun de ces groupes c'est à bon droit que le grief a été notifié aux entités juridiques concernées, à savoir aux sociétés " holdings " intermédiaires spécialisées dans le secteur du béton prêt à l'emploi, les sociétés Lafarge Béton Granulats et Béton Travaux; qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède qu'une concertation destinée à cloisonner et à se répartir différents marchés géographiques locaux du béton prêt à l'emploi, ayant eu pour objet et pour effet de fausser le jeu de la concurrence sur le marché et prohibée par l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 a été mise en œuvre dans la région Provence­Alpes­Côte­d'Azur au cours du premier semestre 1993 entre les sociétés Béton de France, Redland Granulats Sud, Unibéton et les groupes Lafarge et Vicat ;

Sur la pratique d'éviction à l'égard de la SNBT après son installation à Ollioules :

Considérant que le fait pour des producteurs ayant adopté une politique de répartition systématique de marchés de se trouver confrontés à l'apparition d'un nouvel entrant de réagir en pratiquant des prix inférieurs à leurs coûts moyens variables de production peut être regardé comme une entente anticoncurrentielle s'il est établi que cette stratégie avait pour objet ou pouvait avoir pour effet d'interdire ou de limiter l'accès du marché au nouvel entrant ; que le fait, pour des producteurs, de commercialiser du béton à des prix de vente inférieurs aux coûts moyens totaux mais supérieurs à leurs coûts moyens variables peut également être constitutif d'une entente prohibée par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance, s'il est établi que cette stratégie commune avait pour objet d'éliminer un concurrent en pratiquant une concurrence qui ne relève pas d'une concurrence par les mérites ; qu'en effet, des entreprises détenant la quasi­totalité du marché et se livrant à une répartition dudit marché n'ont pas intérêt à pratiquer des prix inférieurs à leurs coûts totaux et a fortiori à leurs coûts moyens variables si ce n'est pour éliminer un ou des concurrents, pour pouvoir par la suite relever le niveau des prix et tirer parti de la rente ainsi constituée ; qu'en outre, de telles pratiques peuvent revêtir un caractère dissuasif vis­à­vis d'autres entreprises extérieures à l'entente qui seraient tentées de s'implanter sur le marché ou sur des marchés géographiquement voisins ; que, pour apprécier la volonté d'éviction, il y a notamment lieu de tenir compte de la durée des pratiques, de leur constance et de l'ampleur des ventes à perte opérées ;

En ce qui concerne les éléments de calcul à retenir dans la comparaison des prix de vente du béton prêt à l'emploi et des coûts variables :

Considérant, ainsi que l'a reconnu la société Béton Chantiers du Var, que le coût moyen variable du béton varie peu au cours d'un même exercice, les prix des composants du béton, à savoir le ciment, les granulats et les agrégats, étant négociés en début d'exercice avec les fournisseurs, ce qui explique que les entreprises déterminent généralement des " coûts standards " par types de béton, variables selon le dosage en liants ; que, de la même manière, la société SMB a déclaré que " les coûts d'achat des matières premières étant fixés en général pour une période de 6 mois ou plus, le coût moyen en matières premières d'un mètre cube de béton de type UNI 25 ne varie pas pendant cette période " ; que la comparaison de tels coûts moyens standards variables de production du béton par types de béton avec les prix de vente facturés permet donc, en l'absence d'informations plus précises, d'apprécier la politique de prix suivie par l'entreprise ;

Considérant par ailleurs que la comparaison du coût moyen variable du béton et du prix de vente du béton prêt à l'emploi peut, dans l'hypothèse dans laquelle l'entreprise ne dispose pas des moyens lui permettant de calculer des coûts unitaires pour chaque livraison, s'effectuer en retenant d'une part le coût moyen variable mensuel, tous bétons confondus, et d'autre part le prix moyen de vente tous bétons confondus ; qu'une telle méthode appliquée sur plusieurs mois, outre le fait qu'elle permet de rapprocher des notions parfaitement homogènes, présente l'avantage d'obtenir des écarts moyens structurels représentatifs de la stratégie de l'entreprise pour l'ensemble de sa production ; que, dans un tel cas, il y a lieu de tenir compte des coûts totaux de transport si l'entreprise procède à des ventes sur chantier, livraison comprise ; que, d'ailleurs, la société Béton de France avait déclaré, lors de l'examen de la demande de mesures conservatoires par le ministre, qu'" il convient (...) de s'en tenir à l'examen de moyennes : d'une part des prix rendus (....) et d'autre part des coûts variables moyens (essentiellement coûts matières et coûts de livraison, puisque le coût de fabrication proprement dit est composé d'éléments négligeables et de coûts quasi­fixes en courte période : un employé qui serait encore là si l'activité tombait quasiment à zéro ) " ; qu'en revanche, une comparaison du coût moyen variable mensuel, tous bétons confondus, et de prix de vente unitaires du béton ne permet pas de tirer de conclusions au sujet de la politique de prix suivie par une entreprise, en raison des différences importantes de coûts pouvant intervenir entre les catégories de béton ; qu'une telle méthode ne peut donc être retenue ;

Considérant, enfin, que la comparaison du coût moyen variable du béton et du prix de vente facturé peut toutefois s'apprécier à l'occasion de chaque transaction si l'entreprise dispose de la décomposition des coûts nécessaires aux calculs ; que cette méthode peut en particulier présenter un intérêt s'il s'avère que le prix du béton s'entend " livré sur chantier ", en raison de la variation des distances propres à chaque chantier et de la répercussion des coûts de livraison, laquelle est fréquemment assurée par des " locatiers " extérieurs à l'entreprise ; que l'entreprise peut toutefois décider, en l'absence d'éléments lui permettant de déterminer des coûts unitaires par type de béton et par chantiers, de retenir comme éléments de comparaison, les coûts moyens variables mensuels par types de béton et les prix unitaires de vente ;

En ce qui concerne l'origine de la baisse des prix dans la zone de Toulon :

Considérant qu'il ressort des constatations consignées dans la partie I de la présente décision qu'une baisse des prix du béton prêt à l'emploi est intervenue à partir de la fin du mois d'octobre 1993 dans la région de Toulon, à l'époque où la société SNBT a mis en activité la centrale à béton qu'elle avait installée à Ollioules ; que les factures de vente établissent qu'alors que les prix les plus bas pour du béton courant de type B 25 pratiqués par les sociétés Béton de France, SMB, Super Béton et Béton Chantiers du Var en septembre et octobre 1993 étaient supérieurs ou égaux à 360 F par mètre cube, les prix enregistrés en novembre et décembre 1993 de la part de ces entreprises atteignent brusquement un niveau proche de 300 F, des prix inférieurs étant constatés dans plusieurs cas ; qu'ainsi en novembre 1993 un prix de 250 F pour du béton livré est facturé au client GC Bruno à la Valette par la société Béton de France, des prix de 275 F (Sogéa) et 280 F (Blonna) par la société Super Béton, plusieurs prix de 300 F pour du béton livré et un prix de 240 F sous centrale par Béton Chantiers du Var et des prix de 270 F (Dumez) et 290 F (Dehe Cogifer) par la société SMB ;

Considérant que la société Super Béton déclare que " c'est bien SNBT, en s'implantant sur le marché et en pratiquant des prix inférieurs à ceux observés auparavant sur celui­ci qui est à l'origine du mouvement de baisse des prix observée à cette époque " ; que la société Béton Chantiers du Var déclare que " le rapport fait l'impasse totale sur l'absence de vérification complète des factures, et de toute vérification des offres de la SNBT pour la région de Toulon " ; que cette même société allègue que les factures de la SNBT versées au dossier auraient été " sélectionnées " par ses représentants ;

Mais considérant que, dans le rapport, aux pages 85 et suivantes, se trouve analysée " l'origine de la baisse des prix " à partir des factures de vente figurant au dossier pour les mois de septembre et octobre 1993 ainsi qu'au cours des mois suivants pour les sociétés Béton de France, Béton Chantiers du Var, Super Béton, SMB et SNBT, laquelle n'a ouvert sa centrale à Ollioules qu'à la fin du mois d'octobre 1993 ; que si la société Béton Chantiers du Var a produit une offre de prix de la SNBT datée du 15 décembre 1993 faisant apparaître un prix unitaire de 300 F, elle a également versé au dossier des factures de vente établissant qu'en novembre 1993 elle avait elle même déjà accordé des prix de 300 F à plusieurs clients (Cortelloni, Farini, Serpat) ; que la société Béton Chantiers du Var a d'ailleurs reconnu avoir facturé un prix unitaire de 280 F au client Hermite concerné par l'offre de 300 F de la société SNBT ; que, par ailleurs, en annexe à ses observations en réponse à la notification de griefs, la société Béton Chantiers du Var a produit un document relatant le témoignage de plusieurs de ses commerciaux ; qu'il ressort des déclarations de l'un de ces commerciaux, M. Diaz, qu'" en décembre 1993, le prix du marché était passé à 280 F ", ce qui démontre que l'offre de 300 F de la SNBT n'était nullement inférieure aux " prix du marché " ;

Considérant par ailleurs que, contrairement à ce qu'allègue la société Béton Chantiers du Var, les enquêteurs se sont fait remettre les factures de vente de la société SNBT pour le béton fabriqué dans la centrale d'Ollioules ; que le procès­verbal d'enquête en date du 24 décembre 1993 indique en effet : " A notre demande MM. Mas et Engel nous remettent spontanément copies des factures de la centrale d'Ollioules (VAR), depuis son ouverture fin octobre 1993. ces factures ci­jointes sont numérotées de 1 à 28 " ; que les allégations selon lesquelles les responsables de la société SNBT auraient dissimulé des factures de vente ou auraient procédé à des avoirs ultérieurs n'étant assorties d'aucun commencement de preuve, il y a lieu de les écarter ; que les factures de la société SNBT datées du 29 octobre 1993 mentionnent un prix unitaire de 365 F, ce prix constituant le prix le plus bas facturé au cours de ce mois, le prix le plus bas facturé au cours du mois de novembre 1993 pour du béton de type BT 25 livré s'élevant à 350 F ;

En ce qui concerne les prix pratiqués par la société Béton de France après l'installation de la SNBT à Ollioules :

Considérant que la société Béton de France a pratiqué des prix de vente unitaires inférieurs à ses coûts moyens variables unitaires à l'occasion de la commercialisation de béton prêt à l'emploi en fin d'année 1993 et en début d'année 1994 ainsi qu'au cours du dernier trimestre 1994 dans la zone de Toulon ; qu'en effet, selon les calculs effectués par son commissaire aux comptes, des marges négatives sur coûts variables ont été pratiquées par cette entreprise pour les clients Senec, Longhi, SECP, GC Bruno, Allamandi, Scappini Minasso, Comasud, à l'occasion de plusieurs chantiers livrés en 1993­1994 ; que des marges négatives sur coûts unitaires variables supérieures à 59 F pour un prix unitaire de vente de 250 F ont ainsi été enregistrées en décembre 1993 et janvier 1994 à l'occasion de l'approvisionnement du chantier " Hôtel du département " livré par la centrale de La Seyne­sur­Mer de la société Béton de France ; qu'en outre, cette entreprise a pratiqué des prix unitaires de vente se situant juste au dessus de ses coûts moyens variables de fabrication et ne prenant pas en compte la totalité des frais fixes supportés pour la fixation de ses prix de vente ;

En ce qui concerne les prix pratiqués par la société Super Béton après l'installation de la société SNBT à Ollioules :

Considérant qu'il ressort des constatations mentionnées dans la partie I de la présente décision que la société Super Béton a pratiqué des prix unitaires de vente se situant juste au­dessus de ses coûts moyens variables de fabrication du béton, sans tenir compte, pour la détermination de ces prix, de la totalité des frais fixes supportés ; que la société Super Béton ne conteste d'ailleurs pas avoir commercialisé du béton à des prix de vente inférieurs à ses coûts totaux après l'installation de la société SNBT à Ollioules, cette société déclarant que " Super Béton a en réalité maintenu l'essentiel de ses prix au­delà de ses coûts moyens variables " ; qu'en outre, cette entreprise a pratiqué, pour le béton standard de type VIC 25, des prix de vente unitaires inférieurs à ses coûts moyens variables mensuels à l'occasion de la commercialisation de béton prêt à l'emploi au cours du dernier trimestre 1994 dans la zone de Toulon ;

En ce qui concerne les prix pratiqués par la société Unibéton après l'installation de la société SNBT à Ollioules :

Considérant qu'il ressort des constatations mentionnées dans la partie I de la présente décision que la société Unibéton a, par l'intermédiaire de la société SMB, pratiqué des prix de vente unitaires inférieurs aux coûts variables unitaires à l'occasion de la commercialisation de béton prêt à l'emploi au cours du dernier trimestre 1994 dans la zone de Toulon ; qu'en outre, cette entreprise a pratiqué des prix moyens de vente mensuels inférieurs au coût moyen variables mensuels de production au cours du premier semestre 1994 dans la centrale de Sanary et sur l'ensemble des deux centrales de production de La Garde et de Sanary ;

En ce qui concerne les prix pratiqués par la société Béton Chantiers du Var après l'installation de la société SNBT à Ollioules :

Considérant que, selon les chiffres certifiés par le commissaire aux comptes de la société Béton Chantiers du Var, le coût moyen variable de production du béton de type BC 25 destiné aux sociétés Sogea et Van Acker pour les chantiers " Hermès " et " Ciel d'Azur ", en 1994, s'est élevé à 207,50 F par mètre cube ; que la société Béton Chantiers du Var a déclaré que ce coût est identique au " coût moyen variable du BC 25 produit par la centrale de La Seyne pour les mois de septembre à décembre 1994 ", dans la mesure où, selon cette société, " ce coût de production varie rarement au cours d'une même année, puisque le coût d'achat des matières premières est négocié au début de chaque année " et " qu'il est resté stable tout au long de l'année 1994 " ; que le prix du béton de type BC 25 fixé contractuellement et facturé en 1994 aux sociétés Sogea et Van Acker pour les chantiers " Hermès " et " Ciel d'Azur " s'est élevé à 255 F par mètre cube, de février à décembre 1994 pour le premier chantier et de mars à décembre 1994 pour le second ; que la marge sur coût variable s'est donc élevée à 47,50 F pour chacun de ces chantiers, soit 18,6 % du prix de vente ; que le rapprochement de ce pourcentage avec les éléments figurant dans le compte d'exploitation générale de l'exercice 1994 de la société Béton Chantiers du Var, qui fait apparaître une perte d'exploitation de 3 348 722 F, établit que ce pourcentage de 18,6 % était insuffisant pour couvrir les charges d'exploitation hors coût d'achat des marchandises vendues, qui s'élevaient à 35 % du chiffre d'affaires ; que la même observation peut d'ailleurs être faite en ce qui concerne le béton normalisé de type 350 CPJ 45 commercialisé aux prix de 290 et 330 F aux sociétés Sogea et Van Acker ; qu'un tableau versé au dossier par la société Béton Chantiers du Var, le 23 août 1995, fait par ailleurs ressortir une marge sur coût variable variant entre 32,15 F et 60,56 F pour la période couvrant les mois de juillet à décembre 1994, chiffres qui correspondent respectivement à 10,17 % et 18,1 % du prix moyen de vente estimé respectivement à 316 F et 333 F pour chacun des mois concernés ; que cette marge était insuffisante pour couvrir les charges d'exploitation de l'entreprise telles qu'elles apparaissent dans la comptabilité générale de la société ;

Considérant par ailleurs que, selon les chiffres certifiés par le commissaire aux comptes de la société Béton Chantiers du Var, le coût moyen variable de production du béton de type BC 25 au cours des mois de novembre et décembre 1993 s'est élevé respectivement à 274,74 F et 272,35 F ; que le prix moyen de vente au cours des mêmes mois s'est élevé respectivement à 374,99 F et 352,60 F ; que la marge sur coût variable au cours de ces deux mois s'est élevée respectivement à 100,25 F et 80,25 F, soit respectivement 26,7 % et 22,7 % du prix moyen de vente ; que le rapprochement de ces pourcentages avec les éléments figurant dans le compte de résultat de l'exercice 1993 de la société Béton Chantiers du Var établit que ces pourcentages étaient manifestement insuffisants pour couvrir les charges d'exploitation hors coût d'achat des marchandises vendues, qui s'élevaient à 44 % du chiffre d'affaires ; que d'ailleurs, des offres de prix aux clients Mateo et Solindus en novembre et décembre 1993, Farini, Omnium Dallage et Vernin en décembre 1993, font état de marges négatives estimées à 126,05 F par mètre cube pour le béton de type 25 proposé aux sociétés Vernin et Mateo au prix unitaire de vente de 300 F livré sur chantiers, faisant ressortir une perte de 42 % ;

Considérant qu'il ressort de ce qui précède que la société Béton Chantiers du Var a pratiqué des prix de vente inférieurs à ses coûts totaux au cours des exercices 1993­1994 ;

Sur la volonté d'éviction des sociétés Béton de France, Unibéton, Super Béton et Béton Chantiers du Var à l'égard de la SNBT :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des déclarations du gérant de la société Béton Provence recueillies par procès­verbal : " M. Pancin, directeur régional de Béton de France est venu me voir sur le site lors de notre installation et m'a dit qu'il nous ferait disparaître si nous nous installions.(.......) Lors de leurs livraisons, nos camions ont été suivis régulièrement par des employés de Béton de France jusqu'à ce qu'un incident se produise entre un de nos chauffeurs et un salarié de Béton de France. Ces filatures avaient pour but de repérer nos (ses) clients et de proposer ensuite des prix de dumping " ; qu'un compte­rendu établi par M. Pancin, de la société Béton de France, établit que l'un des salariés de cette entreprise avait reçu pour mission de " surveiller discrètement le niveau d'activité et les chantiers servis par un nouveau concurrent, la société Béton Provence " ; que M. Galibert, qui exploite la société GM Béton desservant les marchés de Cavaillon et d'Avignon, a également déclaré que des " mesures d'intimidation " avaient été mises en œuvre à son encontre par ses concurrents BCP, Béton de France, Unimix et Redland ainsi que des " matraquage " sur les prix, les prix qui étaient antérieurement de l'ordre de 380 à 500 F par mètre cube ayant atteint le niveau de 300 F/m3ou moins après son installation ; qu'un document saisi dans la société Unimix relatif au secteur du Vaucluse, évoque l'" accentuation de la dégradation à 300F/m3 à partir d'octobre " et fixe comme " objectif du secteur ", le " maintien de la part de marché au prix du marché " ; que cet exploitant a précisé que " le même phénomène s'était produit dans les années 89­90 quand l'indépendant PRADIER de Madrague (86) a été repris par Lafarge " ; qu'un document saisi dans la société Unimix mentionne d'ailleurs au sujet du " démarrage concurrent Galibert " : " Baisse du PMV + marge/ prévoir encore ­ 20 F sur 2 mois à venir " ; que M. Bonifay, autre producteur de béton indépendant sur le marché de Toulon, a également déclaré par procès­verbal d'audition au sujet des sociétés Béton Chantiers du Var, Béton de France, Super Béton et SMB : " Simultanément avec l'ouverture de la centrale à béton SNBT d'Ollioules nos 4 concurrents précités ont simultanément et immédiatement fait volontairement chuter les prix au niveau de 300 F puis un mois ou deux après à 250­280 F. /­ Nous avons le sentiment que par la même occasion ils ont décidé de nous éliminer également puisque nos 4 concurrents ont démarché certains de nos clients à ces prix de 250 ­ 280 F " ; que M. Mas a déclaré, lors de son audition, le 30 septembre 1993, en parlant du rôle de la société Unimix dans l'entente : " En général, lors de l'implantation d'un indépendant, nous baissions les prix (...) pour le couler " ; que l'intéressé a également déclaré, le 11 juillet 1994, au sujet de l'implantation de la SNBT à Ollioules : " Sur cette zone, dès notre arrivée nous avons été confrontés à une concurrence acharnée de la part du cartel qui organise les prix et à une dégradation immédiate des prix qui sont passés de 400 F à 250 environ " ; qu'il ressort des déclarations convergentes de plusieurs exploitants de sociétés de béton prêt à l'emploi intervenant sur différents marchés géographiques que des entreprises dont il est établi qu'elles se trouvaient en entente de répartition de marché en début d'année 1993 ont adopté, à partir du mois d'octobre 1993, une stratégie de prix bas visant à limiter systématiquement l'accès aux marchés des nouveaux entrants ;

Considérant, en second lieu, qu'avant l'installation de la centrale d'Ollioules de la SNBT, postérieure de quelques mois du départ de M. Mas de la société Unimix, les sociétés Béton de France, Unimix, par l'intermédiaire de la société SMB, Super Béton et Béton Chantiers du Var se répartissaient le marché du béton prêt à l'emploi dans la zone de Toulon à un niveau de prix artificiellement élevé ; que, confrontées à l'apparition d'un nouvel entrant sur le marché, les sociétés Béton de France, Unibéton, Super Béton et Béton Chantiers du Var ont décidé de poursuivre la concertation, ainsi que l'établit la répartition de marché opérée notamment à l'occasion de la fourniture de béton pour la trémie Est du tunnel de Toulon, et d'abaisser brutalement leurs prix de vente à un niveau artificiellement bas, dans le but d'évincer leur nouveau concurrent, ceci à compter du mois d'octobre 1993, alors qu'un document interne à la société Unimix faisait état, à la fin du mois de septembre, d'un " effet conjoncturel avec prise de gros chantiers (4 000 + 3 000 m3 " et d'une " augmentation des prix sur Var Est aux alentours de 400 à 440 F m3 " ainsi que d'une " stabilité des prix " et d'une " stabilité des volumes avec prévision intéressantes en fin d'année " pour la zone de Toulon ;

Considérant, ainsi que le reconnaît la société Béton Chantiers du Var, que " si un parallélisme de comportement peut être constaté quant à une baisse des prix des entreprises ", ledit parallélisme de comportement constaté en matière de prix n'est pas à lui seul suffisant pour apporter la preuve d'une politique concertée de prix d'éviction à l'encontre de la SNBT ; qu'en revanche, la conjonction du parallélisme de comportements et de la preuve de la poursuite de l'entente entre les sociétés Béton de France, Unibéton, Super Béton et Béton Chantiers du Var suffit, même en l'absence d'autres facteurs, à caractériser une action concertée destinée à limiter l'accès au marché de la SNBT et le libre jeu de la concurrence ; qu'il n'est, en effet, pas nécessaire que la preuve soit apportée que la coordination des comportements ainsi observés ait abouti à la mise au point d'une convention dès lors que ladite coordination a abouti à des " conditions de concurrence qui ne correspondent pas aux conditions normales du marché " (CJCE, 16 décembre 1975, aff. Suiker Unie) ; que la persistance des prix inférieurs aux coûts ainsi que l'ampleur des pertes supportées par les entreprises à compter de la mise en œuvre de la pratique témoignent de la volonté d'éviction affichée par les entreprises susmentionnées à l'égard de la SNBT ;

Considérant que les calculs effectués par le commissaire aux comptes de la société Béton de France apportent la preuve que cette société a pratiqué des prix unitaires de vente inférieurs aux coûts unitaires variables de production à la fin de l'année 1993 ainsi qu'au cours de l'année 1994 ; qu'il ressort de ces mêmes calculs que des prix très proches des coûts unitaires variables ont été pratiqués par cette même entreprise dans la période considérée ; qu'ainsi des prix de vente de 278 F, de 300 F, de 303 F, de 301 F et de 303 F par mètre cube ont été pratiqués par Béton de France pour des coûts unitaires variables s'élevant respectivement à 277,78 F, 277,78 F, 283,35 F, 283,35 F, 277,78 F, et 294,49 F ; qu'il est également établi qu'au cours du mois de décembre 1993, le prix moyen du béton prêt à l'emploi au départ de la centrale de Sanary, à savoir 246,52 F, était inférieur au coût moyen des matières premières ressortant de la comptabilité analytique de l'entreprise, à savoir 266,03 F ; qu'en outre, au premier semestre 1994, le prix moyen de vente du béton commercialisé par la société SMB était inférieur au coût moyen variable au cours de la même période dans la centrale de Sanary et sur l'ensemble des deux centrales de Sanary et de La Garde ; que des prix unitaires de vente inférieurs aux coûts unitaires variables de production ont également été pratiqués par la société SMB ; que la société Super Béton, qui a reconnu avoir dans plusieurs cas pratiqué un prix de vente supérieur d'environ 1 franc au coût moyen variable, ne conteste pas avoir commercialisé du béton prêt à l'emploi à un prix de vente inférieur au coût total ; que, par ailleurs, la société Super Béton a commercialisé du béton prêt à l'emploi de type VIC 25 à des prix unitaires de vente inférieurs aux coûts moyens variables au cours du dernier trimestre 1994 pour du béton livré sur chantiers ; que, même si, comme l'a déclaré la société Super Béton, la comparaison est " encore très imparfaite ", cette méthode, qui s' apparente à l'utilisation de coût standards de production, permet­ en l'absence d'informations relatives aux coûts des matériaux relatifs à chaque chantier d'effectuer une comparaison " plus juste " que celle consistant à rapprocher les coûts moyens variables tous bétons confondus des prix unitaires de vente ; que la société Béton Chantiers du Var a également pratiqué des prix moyens de vente inférieurs aux coûts moyens totaux mensuels au cours du dernier semestre 1994 ; qu'en outre, des prix de vente unitaires inférieurs aux coûts totaux unitaires ont été pratiqués par cette entreprise après l'installation de la SNBT sur le marché concerné à l'occasion des chantiers " Hermès " et " Ciel d'Azur " dans la période courant de mars à décembre 1994 ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les sociétés Béton de France, Unibéton, Super Béton et Béton Chantiers du Var ont pratiqué des prix de vente unitaires inférieurs à leurs coûts totaux pour éliminer la société SNBT du marché ; qu'en outre, certaines de ces entreprises ont pratiqué des prix de vente inférieurs aux coûts moyens variables unitaires de production à l'occasion de la commercialisation de béton prêt à l'emploi dans la zone de Toulon au cours de la période ayant suivi l'installation de la centrale de la société SNBT à Ollioules ; que ces pratiques, qui ont eu pour objet et ont pu avoir pour effet de limiter l'accès du marché à une entreprise concurrente, sont constitutives d'une entente anticoncurrentielle prohibée par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Considérant en revanche qu'il n'est pas établi que la pratique des sociétés Lafarge Ciments et Vicat consistant à octroyer des remises à la société Béton de France lors de la consultation organisée pour la réalisation de la station d'épuration du Cap Sicié ait eu pour objet ou ait pu avoir pour effet de fausser le jeu de la concurrence sur le marché du béton prêt à l'emploi dans la région de Toulon ;

Sur les sanctions :

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 : " Le Conseil de la concurrence peut ordonner aux intéressés de mettre fin aux pratiques anticoncurrentielles dans un délai déterminé ou imposer des conditions particulières. Il peut infliger une sanction pécuniaire applicable soit immédiatement, soit en cas d'inexécution des injonctions. Les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie et à la situation de l'entreprise ou de l'organisme sanctionné. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction. Le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 5 p. cent du montant du chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France au cours du dernier exercice clos (....). Le Conseil de la concurrence peut ordonner la publication de sa décision dans les journaux ou publications qu'il désigne, l'affichage dans les lieux qu'il indique (...). Les frais sont supportés par la personne intéressée " ;

Considérant que la gravité des pratiques doit être appréciée en tenant compte du fait qu'elles ont été mises en œuvre par des entreprises qui, pour certaines d'entre elles, appartiennent à des groupes multinationaux qui exercent leur activité dans la production de ciment ou des granulats, matières premières du béton prêt à l'emploi, et se sont concertées pour se répartir les marchés et maintenir des prix artificiellement élevés dans une aire géographique étendue pour ensuite évincer du marché la SNBT en pratiquant des prix de prédation de manière à assurer la pérennité de l'entente; que le dommage à l'économie doit s'apprécier en tenant compte du fait que, s'agissant d'un matériau d'un emploi très étendu dans le bâtiment et les travaux publics, pour lequel il n'y a ni substitut, ni possibilité de recourir à des fournisseurs géographiquement éloignés, les entreprises de gros œuvre, qui ne peuvent mettre en œuvre des centrales de chantier dans des conditions d'efficacité et de coût comparables, et les maîtres d'ouvrage publics ou privés, qui ont eu recours à ces entreprises, ont été victimes des ces pratiques; que ces pratiques ont concerné six marchés géographiques dans les départements des Bouches du Rhône, du Var, du Vaucluse et des Alpes Maritimes ;

Considérant, par ailleurs, que pour prévenir la poursuite de toute pratique anticoncurrentielle de même nature, il convient également d'informer les clients et les professionnels de ce secteur du caractère illicite de ces pratiques ; qu'en conséquence, il y a lieu d'ordonner la publication de la deuxième partie et du dispositif de la présente décision par les sociétés concernées dans les quotidiens " La Tribune " et " Les Echos " ;

En ce qui concerne la société Béton de France :

Considérant que la société Béton de France, qui est présente dans le secteur du béton prêt à l'emploi sur le plan national, s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles de répartition de marché au cours de l'année 1993 sur quatre des six marchés locaux du béton prêt à l'emploi examinés par le Conseil de la concurrence ; qu'elle a par ailleurs participé à une entente organisée sur le plan régional au cours de la même année ; qu'elle a également participé à une entente spécifique organisée à l'occasion des consultations organisées par les maîtres d'œuvre lors de la construction de la traversée souterraine de Toulon à la fin de l'année 1993 ; que cette entreprise a en outre contribué activement à la concertation visant à exclure la société SNBT du marché local de Toulon en pratiquant des prix d'éviction ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1996, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 1 023 378 987 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 30 millions de francs ;

En ce qui concerne la société Unibéton :

Considérant que la société Unibéton, qui est présente dans le secteur du béton prêt à l'emploi sur le plan national, s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles de répartition de marché au cours de l'année 1993 sur cinq des six marchés locaux du béton prêt à l'emploi examinés par le Conseil de la concurrence ; qu'elle a par ailleurs participé à une entente organisée sur le plan régional au cours de la même année ; qu'elle a également participé à une entente spécifique organisée à l'occasion des consultations organisées par les maîtres d'œuvre lors de la construction de la traversée souterraine de Toulon à la fin de l'année 1993 ; que cette entreprise a en outre contribué activement à la concertation visant à exclure la société SNBT du marché local de Toulon en pratiquant des prix d'éviction ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1996, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 1 506 720 138 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 40 millions de francs ;

En ce qui concerne la société Béton Chantiers du Var :

Considérant que la société Béton Chantiers du Var, qui appartient au groupe Lafarge Ciments, s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles de répartition de marché au cours de l'année 1993 sur un des six marchés locaux du béton prêt à l'emploi examinés par le Conseil de la concurrence ; qu'elle a également participé à une entente spécifique organisée à l'occasion des consultations organisées par les maîtres d'œuvre lors de la construction de la traversée souterraine de Toulon à la fin de l'année 1993 ; que cette entreprise a en outre contribué activement à la concertation visant à exclure la société SNBT du marché local de Toulon en pratiquant des prix d'éviction ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1996, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 24 555 226 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire 750 000 francs ;

En ce qui concerne la société Super Béton :

Considérant que la société Super Béton, qui appartient aux groupes Lafarge Ciments et Vicat, s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles de répartition de marché au cours de l'année 1993 sur un des six marchés locaux du béton prêt à l'emploi examinés par le Conseil de la concurrence ; qu'elle a également participé à une entente spécifique organisée à l'occasion des consultations organisées par les maîtres d'œuvre lors de la construction de la traversée souterraine de Toulon à la fin de l'année 1993 ; que cette entreprise a en outre contribué activement à la concertation visant à exclure la société SNBT du marché local de Toulon en pratiquant des prix d'éviction ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1996, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 23 571 281 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 700 000 francs ;

En ce qui concerne la société Redland Granulats Sud :

Considérant que la société Redland Granulats Sud, qui appartient au groupe Redland, s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles de répartition de marché au cours de l'année 1993 sur deux des six marchés locaux du béton prêt à l'emploi examinés par le Conseil de la concurrence ; qu'elle a par ailleurs participé à une entente organisée sur le plan régional au cours de la même année dans la région Provence­Alpes­Côte­d'Azur ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1996, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 522 754 944 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 10 millions de francs ;

En ce qui concerne la société Béton Chantiers Prêt :

Considérant que la société Béton Chantiers Prêt, qui appartient au groupe Lafarge Ciments, s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles de répartition de marché au cours de l'année 1993 sur un des six marchés locaux du béton prêt à l'emploi examinés par le Conseil de la concurrence ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1996, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 181 440 365 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 3 millions de francs ;

En ce qui concerne la société Express Béton :

Considérant que la société Express Béton, qui appartient au groupe Lafarge Ciments, s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles de répartition de marché au cours de l'année 1993 sur un des six marchés locaux du béton prêt à l'emploi examinés par le Conseil de la concurrence ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1996, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 22 595 470 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 400 000 francs ;

En ce qui concerne la Société Brignolaise de Béton et d'Agglomérés (SBBA) :

Considérant que la société SBBA., qui appartient au groupe Lafarge Ciments, s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles de répartition de marché au cours de l'année 1993 sur un des six marchés locaux du béton prêt à l'emploi examinés par le Conseil de la concurrence ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1996, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 20 445 028 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 300 000 francs ;

En ce qui concerne la société Béton Chantiers Nice :

Considérant que la société Béton Chantiers Nice, qui appartient au groupe Lafarge Ciments, s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles de répartition de marché au cours de l'année 1993 sur un des six marchés locaux du béton prêt à l'emploi examinés par le Conseil de la concurrence ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1996, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 54 105 133 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 800 000 francs ;

En ce qui concerne la société Béton Contrôlé de la Côte d'Azur (BCCA) :

Considérant que la société BCCA, qui appartient aux groupe Lafarge Ciments et Vicat, s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles de répartition de marché au cours de l'année 1993 sur un des six marchés locaux du béton prêt à l'emploi examinés par le Conseil de la concurrence ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1996, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 48 194 460 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 800 000 francs ;

En ce qui concerne la société Béton Travaux :

Considérant que la société Béton Travaux, qui appartient au groupe Vicat, s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles de répartition de marché au cours de l'année 1993 sur le marché régional du béton prêt à l'emploi dans la région Provence­Alpes­Côte­d'Azur ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1996, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 60 527 054 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 1,2 million de francs ;

En ce qui concerne la société Lafarge Béton Granulats :

Considérant que la société Lafarge Béton Granulats, société holding intermédiaire qui appartient au groupe Lafarge Ciments et qui, selon elle, ne procède pas à la consolidation du chiffre d'affaires de ses filiales, s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles de répartition de marché au cours de l'année 1993 sur le marché régional du béton prêt à l'emploi dans la région Provence­Alpes­Côte­d'Azur ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1996, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 1 508 551 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 50 000 francs ;

En ce qui concerne la société Béton Granulats Sylvestre :

Considérant que la société Béton Granulats Sylvestre s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles de répartition de marché au cours de l'année 1993 sur un des six marchés locaux du béton prêt à l'emploi examinés par le Conseil de la concurrence ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1996, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 26 157 995 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 200 000 francs ;

Décide :

Article 1er. ­ Il est établi que les sociétés Béton de France, Béton Chantiers Prêt (BCP), Unibéton, Redland Granulats Sud, Béton Granulats Sylvestre, Béton Chantiers du Var (BCV), Super Béton, Express Béton, Société Brignolaise de Béton et d'Agglomérés (SBBA), Béton Chantiers Nice (BCN), Béton Contrôlé de la Côte d'Azur (BCCA), Béton Travaux et Lafarge Béton Granulats ont enfreint les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986.

Article 2.­ Sont infligées les sanctions pécuniaires suivantes :

30 000 000 F à la société Béton de France,

40 000 000 F à la société Unibéton,

750 000 F à la société Béton Chantiers du Var,

700 000 F à la société Super Béton,

10 000 000 F à la société Redland Granulats Sud,

3 000 000 F à la société Béton Chantiers Prêt,

400 000 F à la société Express Béton,

300 000 F à la Société Brignolaise de Béton et d'Agglomérés (SBBA),

800 000 F à la société Béton Chantiers Nice,

800 000 F à la société Béton Contrôlé de la Côte d'Azur (BCCA),

1 200 000 F à la société Béton Travaux,

50 000 F à la société Lafarge Béton Granulats,

200 000 F à la société Béton Granulats Sylvestre.

Article 3. ­ Dans un délai maximum de trois mois suivant sa notification, le texte de la deuxième partie et du dispositif de la présente décision sera publié par les sociétés susmentionnées, à frais communs et à proportion des sanctions pécuniaires qui leur sont infligées, dans les quotidiens La Tribune et Les Échos. Cette décision sera précédée de la mention : " Décision du Conseil de la concurrence relative à des pratiques mises en œuvre par différentes entreprises dans le secteur du béton prêt à l'emploi ".