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Décisions

Conseil Conc., 7 avril 1998, n° 98-D-26

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Décision

Pratiques relevées sur le marché de la rénovation des installations de chauffage du parc scientifique technologique de Luminy

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré, sur le rapport de Mme Isabelle Sévajols, par M. Cortesse, vice-président, présidant la séance, MM. Marleix, Rocca, Sloan, Thiolon, membres.

Conseil Conc. n° 98-D-26

7 avril 1998

Le Conseil de la concurrence (section I),

Vu la lettre enregistrée le 5 juillet 1993, sous le numéro F 608, par laquelle le ministre de l'Economie a saisi le Conseil de la concurrence d'un dossier relatif à la situation de la concurrence sur le marché de rénovation des installations de chauffage du parc scientifique technologique de Luminy ; Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 modifiée, relative à la liberté des prix et de la concurrence et le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 modifié, pris pour son application ; Vu les observations présentées par les sociétés Somesys, Société d'investissement en énergie (Sinerg), Beterem bâtiment, Spie Trindel, Danto-Rogeat entreprise, L'Entreprise industrielle, Laurent Bouillet entreprise, Entreprise Lefort Francheteau, Missenard Quint Sud-Est, Rineau, Sodexal, Tunzini SNC, Société générale d'entreprise, Crystal, Bergeon Méditerranée, Climalec, Santerne, Hervé thermique et par le commissaire du Gouvernement ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement et les représentants des sociétés Somesys, Beterem bâtiment, Bencivenga et fils, Spie Trindel, Tunzini SNC, Entreprise Lefort Francheteau, Laurent Bouillet entreprise, Crystal, Bergeon Méditerranée, Rineau, Santerne, Missenard Quint Sud-Est, L'Entreprise industrielle entendus, les sociétés Sinerg, Crudeli, Danto-Rogeat entreprise, L'Industrielle de chauffage, Sodexal, Société générale d'entreprise, Climalec, Bergeon SA, Hervé thermique, SPEL et SOTEC, Me Michel Arnaud, liquidateur de la société Icart, et Me Brignier, commissaire à l'exécution du plan de cession de la société Bergeon, ayant été régulièrement convoqués ; Adopte la décision fondée sur les constatations (1) et sur les motifs (2) ci-après exposés :

I. - CONSTATATIONS

Le parc scientifique et technologique de Luminy à Marseille a été créé en 1966. Il regroupe plusieurs bâtiments dont la faculté des sciences de Luminy de l'université d'Aix-Marseille II, une cité universitaire exploitée par le CROUS et divers organismes publics ou privés à caractère scientifique (CNRS, INSERM, entreprises). Le système de chauffage centralisé du parc scientifique de Luminy était composé de trois chaudières fonctionnant au charbon et d'une chaudière fonctionnant au fioul utilisée pour la production d'eau chaude sanitaire en dehors des périodes de chauffe. Cette chaufferie centrale desservait onze sous-stations par un réseau enterré de trois circuits pour 80 000 m² de bâtiments. La gestion de cet ensemble thermique a toujours été confiée à une entreprise privée. Entre 1974 et 1991, c'est la société Somesys, ou des sociétés du même groupe, qui a exploité cette chaufferie. Dès juin 1987, un rapport du bureau d'études Beterem bâtiment, demandé par le rectorat, concluait à la nécessaire rénovation de l'installation de chauffage qui datait de plus de vingt ans et estimait les travaux à 10 millions de francs.

A. - Les différentes étapes de la procédure de passation des marchés

1. Les études préalables et le choix du maître d'œuvre

Avant d'obtenir des crédits du ministère de l'Education nationale, différentes solutions pour rénover les installations ont été étudiées par l'université et par l'exploitant, la société Somesys. Tout d'abord, un projet de rénovation dans le cadre d'un contrat de concession a été abandonné après un avis défavorable de la commission centrale des marchés. Ensuite, en 1990, la société Somesys s'est rapprochée d'une société de tiers investissement, la société Sinerg, pour proposer à l'université un projet financé en partie par crédit-bail, la majeure partie des travaux ayant pour objet de réaliser des économies d'énergie et de fonctionnement. La société Sinerg, filiale de la Caisse des dépôts et consignations, a établi un projet de convention avec l'université par lequel elle s'engageait à assurer dans le cadre de travaux d'économies d'énergie le montage financier de l'opération, le mandat de maîtrise d'ouvrage, la garantie de résultat sur les économies réalisées et le suivi des consommations d'énergie et de l'exploitation des installations. Pour les travaux de réhabilitation des installations, elle ne devait assurer que le mandat de maîtrise d'ouvrage. L'université n'a finalement pas donné suite à ce projet, le financement pouvant être assuré à hauteur de 12 millions de francs par le ministère de l'Education nationale, ce qui lui conférait la qualité de maître d'ouvrage. Le bureau d'études Beterem bâtiment, qui avait déjà réalisé en 1987 une étude sur les économies d'énergie sur le site de Luminy, a été retenu comme maître d'œuvre après une procédure de marché négocié.

2. L'appel d'offres restreint du 31 janvier 1991

Le choix des candidatures

Un appel de candidatures a été lancé le 31 janvier 1991 pour un marché en lot unique. Il a été publié dans le Moniteur des travaux publics du 8 février et dans le BOAMP du 9 février. La date limite de remise des candidatures était fixée au 25 février 1991 à 17 heures. La commission qui a ouvert les plis s'est réunie le 8 mars et a retenu les dix entreprises suivantes sur les vingt-trois candidatures : Armand interchauffage, Laurent Bouillet entreprise, L'Industrielle de chauffage (IC entreprise), Frangeclim, Missenard Quint Sud-Est, Entreprise Lefort Francheteau, Établissements Rineau frères, Bergeon et Cie, Albouy et un groupement composé des sociétés Somesys, Spie Trindel et Bencivenga et fils.

Les offres des entreprises

Les entreprises retenues devaient faire parvenir une offre pour le 22 avril 1991 à 17 heures. La commission d'ouverture des plis s'est réunie le 23 avril et a constaté que, sur les dix entreprises sélectionnées, seules trois d'entre elles et un groupement avaient présenté des propositions :

EMPLACEMENT TABLEAU

Le compte-rendu de la commission d'ouverture des plis indique : " Ces prix sont très nettement supérieurs à la prévision faite par le maître d'œuvre qui avait, sur la base de l'APS, chiffré le projet à 9,8 MF. De plus, l'écart relativement faible entre les différentes propositions donne à penser qu'il est possible qu'il y ait eu entente entre les entreprises. L'examen du montant de chaque lot (chaufferie, réseaux, sous-stations) semble confirmer cette hypothèse ". Les offres de ces entreprises sont effectivement supérieures de 52,9 % à 69,5 % à l'estimation du maître d'œuvre.

L'appel d'offres a été déclaré infructueux. Le jour même, un avis d'information a été envoyé au BOAMP et un rapport d'analyse des offres a été demandé au maître d'œuvre pour le 26 avril. Selon le rapport présenté au maître d'ouvrage par le bureau d'études Beterem, le niveau élevé des prix s'expliquait principalement par les délais très courts pour la remise des offres et pour la réalisation des travaux.

3. Le marché négocié

Selon l'avis de marché négocié paru au BOAMP du 2 mai 1991, les candidatures devaient parvenir au maître d'ouvrage avant le 10 mai. En fait, la négociation conduite par le maître d'œuvre Beterem bâtiment n'a concerné qu'un seul candidat, le groupement moins-disant. Ce groupement était composé des sociétés Albouy (nouveau mandataire), Spie Trindel, Somesys, Bencivenga et fils, d'une entreprise de terrassement (SPEL) et d'une entreprise de travaux d'électricité (Phibor). À l'issue de la négociation, la solution de base s'élevait à 12,7 MF HT. Elle était supérieure de 1,4 MF à la nouvelle estimation du maître d'œuvre tenant compte de travaux complémentaires et des contraintes de réalisation, soit 11,3 MF. La variante économique que le maître d'œuvre proposait de retenir s'élevait à 11,7 MF. Le maître d'ouvrage n'a pas donné suite à la consultation et a décidé de lancer un nouvel appel d'offres.

4. L'appel d'offres ouvert du 1er octobre 1991

Le 1er octobre 1991, un appel d'offres ouvert en 4 lots séparés a été lancé. Le lot 1 concernait la chaufferie et les sous-stations, le lot 2 le réseau primaire (canalisations enterrées et aériennes), le lot 3 les travaux de terrassement en tranchées et le lot 4 l'électricité (postes de transformation et alimentation électrique des sous-stations). L'avis d'appel d'offres a été publié dans le BOAMP du 10 octobre et dans le Moniteur du 11 octobre. La date limite de réception des offres était fixée au 26 novembre.

Le lot 1 a été attribué à la société L'Entreprise industrielle pour un montant de 4 498 098 F HT, le lot 2 au groupement Albouy, Bencivenga et Somesys pour un montant de 3 823 030 F HT, le lot 3 à la société SNTU pour un montant de 1 706 056 F HT et le lot 4 à la société SNEF pour 728 334,72 F HT. Les marchés ont été signés le 11 février 1992 et les travaux ont été achevés en novembre 1992.

B. - Les pratiques relevées

Une enquête sur ce marché a été effectuée sur le fondement de l'article 47 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Au cours de cette enquête, M. Aubin, directeur de l'agence Somesys de Marseille, a communiqué le 16 décembre 1991 aux enquêteurs de la direction régionale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de Marseille des documents, parmi lesquels figuraient les notes manuscrites, les messages internes de la société Somesys et le protocole d'accord qui sont analysés ci-après.

1. Le protocole d'accord entre les sociétés Somesys et Sinerg

Dès le mois d'août 1990, l'exploitant de la chaufferie, la société Somesys, s'est rapproché de la société Société d'investissement en énergie (Sinerg), société de tiers-investissement, filiale de la Caisse des dépôts et consignations, pour proposer à l'université un projet de modernisation des installations de chauffage financé en partie par crédit-bail. Un message interne du 13 août 1990 de M. Levard à M. Aubin précise : " objet Cremieux " (président de la société Sinerg) Nous partons donc avec Sinerg sur cette affaire : Cremieux a déjà travaillé sur ce dossier....Le principe de base de la manip est le suivant : le rectorat/doyen passent un contrat à Sinerg (non soumis à appel d'offres) les missionnant pour la restructuration des installations de Luminy (y c exploitation), Sinerg s'engage à nous retenir à la suite de l'A O qu'ils lanceront sur nos bases d'étude ".

Un protocole d'accord signé le 11 septembre 1990 entre la société Sinerg, représentée par M. Bernard Jamet, directeur général, et la société Somesys, représentée par M. Philippe Aubin, directeur de l'agence de Marseille, prévoit :

" 1°) Préambule

Sinerg est une société de tiers investissement qui a notamment pour vocation de réaliser en maîtrise d'ouvrage et de financer des travaux de maîtrise de l'énergie sans intervenir directement sur l'exploitation.

Somesys est une société ayant comme activité principale la maintenance et la conduite d'installations de génie climatique.

2°) Objet du protocole

Les deux parties ci-dessus mentionnées conviennent de mettre en commun leur expérience, leur compétence, leurs moyens commerciaux et techniques dans le cadre d'une collaboration sur le projet de rénovation et de maintenance des installations techniques du campus de la faculté de Luminy (Marseille). Cette installation est exploitée depuis 1974 par la société Somesys et les sociétés de son groupe.

3°) Obligations de Sinerg

Sinerg proposera aux clients de l'affaire ci-dessus mentionnée son " Contrat cadre ", ayant notamment pour objet la gestion des appels d'offres de rénovation et d'exploitation des installations thermiques de la Faculté, ainsi que le financement avec garantie de résultat des travaux de rénovation.

En cas d'accord de ces dits clients sur ce contrat cadre, Sinerg s'engage à faire retenir, sauf volonté déclarée de ses clients, Somesys comme prestataire de services pour la maintenance de ces dites installations, ainsi que pour une partie des travaux concernant directement l'exploitation (par exemple, régulation, système de télégestion, etc.).

À charge pour Somesys de produire des offres compétitives techniquement et financièrement.

4°) Obligations de Somesys

Somesys portera à la connaissance de Sinerg et lui communiquera les différents projets techniques qu'elle a élaborés sur le site de Luminy.

Somesys apportera, de plus, son appui commercial auprès de tous les interlocuteurs qu'elle a eus au cours de ses 16 ans d'exploitation afin de promouvoir le projet commun de rénovation.

5°) Conditions particulières

La société Somesys ne peut prendre d'engagement pour la société Sinerg et réciproquement.

6°) Date d'effet et durée

Le présent protocole prend effet au 01/09/1990 pour une durée de trois ans.

Les deux sociétés sont garantes de sa confidentialité. ".

Un message interne à la société Somesys du 13 décembre 1990 indique : " Quelle position pour Sinerg ? Ils seraient à priori Exclus ; mais s'ils rentrent, nous rentrons aussi... ". Un message du 2 janvier 1991 de M. Aubin à M. Levard précise : " J'en reviens avec l'inévitable " Luminy " qui devait bouger rapidement, maintenant. Je viens de voir Jamet de Sinerg, ce jour, l'info du financement attribué par le ministère pour Luminy est connue de Sinerg. Pour nous positionner rapidement sur le dossier l'action serait la suivante : Au travers de Beterem, faire établir une étude globale qui démontre la nécessité d'un programme de travaux plus ambitieux ; du genre 25MF... L'intervention d'un tiers comme Sinerg permet de boucler l'opération et nous aussi. Nous devons avoir Dionisi (Sinerg Lyon) pour monter un RDV avec Beterem ". Le 3 janvier 1991, M. Aubin a noté que M. Dionisi (Sinerg Lyon) était d'accord sur ce projet : " Sinerg Lyon/ Dionisi le 3.1.91 OK pour montage : RDV Beterem, Sinerg, Somesys à Marseille. Projet + ambitieux ;...etc. ". Le 6 février 1991, malgré le lancement de l'appel d'offres le 31 janvier 1991, M. Aubin a noté que les négociations s'étaient poursuivies entre les sociétés Somesys et Sinerg en association avec le bureau d'études Beterem bâtiment, chargé d'établir l'avant projet sommaire du marché : " Egal a passé une journée avec Cottet ouvrir APS + grand montage mixte / projet plus global ". M. Egal travaillait pour la société Sinerg et M. Cottet était directeur de l'agence Beterem.

Les négociations entre les sociétés Somesys et Sinerg ont conduit Sinerg à proposer à l'université, au cours d'une réunion en date du 7 mars 1991, un projet de convention selon lequel Sinerg s'engageait à faire réaliser les travaux de rénovation avec un financement de 3,9 MF par crédit-bail. Aux termes de ce contrat, la société Sinerg devait assurer notamment un mandat de maîtrise d'ouvrage. Cela permettait à la société Sinerg de contrôler la gestion des marchés de maîtrise d'œuvre, la préparation du choix des entrepreneurs et fournisseurs ainsi que la préparation du choix d'une société d'exploitation de chauffage (article 4 de la convention).

2. Les relations entre le bureau d'études Beterem bâtiment et les entreprises du groupement Spie Trindel, Albouy, Bencivenga et fils, Somesys, SPEL et Phibor

Avant même l'appel de candidatures, la société Somesys a envisagé un rapprochement avec la société Beterem. En effet, dans les messages internes à la société Somesys des 2 et 3 janvier précédemment cités, M. Aubin envisage de prendre concact avec la société Beterem pour faire avancer son projet. Le 6 février 1991, avant la publication de l'appel de candidatures dans le Moniteur des travaux publics et dans le BOAMP, M. Aubin a noté les informations communiquées par la société Beterem : " 6.02.91 Beterem / Ordioni - budget OK - trv appel à candidatures envoyé 31/01 réponse 25/02 lot unique prochain moniteur SPIE/ Albouy/ LB/ etc.- timing : APS 15/02 DCE/APD Fin 15 mars clientAO/ fin mars choix E /in avril. ". Ces notes contiennent également des données relatives au coût de l'énergie qui ont été établies par la société Sergie. Le 7 février 1991, M. Aubin a noté : " PA JCT MB le 7/2/91 Voici les éléments de l'étude tarifaire des différentes énergies possibles, que Lutaud (Sergie) a rédigé pour Beterem... ". Le 13 février 1991, M. Aubin a également noté sous la mention " Beterem/ Ordioni " des données chiffrées sur les différentes énergies. Le 23 avril 1991, date à laquelle s'est réunie la commission qui a décidé de déclarer l'appel d'offres infructueux, un message destiné à M. Aubin précise : " Date : 23.04 heure 17 h 22 à l'attention de M. Aubin M. Cotte Société Beterem merci d'appeler". Ce même jour, M. Aubin a noté : " Ordioni Taillandier (SPIE) 23.4.91 infructueux / coût cher Commission vendredi pour choix Ordioni furax marché négocié ? ! 8h30 Beterem / J 25 ".

Le 25 avril, deux jours après l'ouverture des plis et la veille de la réunion au cours de laquelle le maître d'ouvrage a officiellement demandé au maître d'œuvre d'entreprendre des négociations, M. Aubin a rédigé des tableaux comparatifs entre les prix remis par le groupement et ceux prévus par le maître d'œuvre. M. Aubin a déclaré le 24 juin 1996 : " En ce qui concerne le document daté du 25 avril 1991,... il s'agit d'une réunion organisée par l'université, Beterem et l'ensemble des entreprises de notre groupement ". Sur ces notes, les sociétés SPEL et Phibor apparaissent déjà comme co-traitants. En bas de ce tableau figure un total prévu de " 11.474 ", puis à la page suivante un coefficient de " 1,15 " sur déboursés de " 10,2 ", ce qui amène le total à " 11,7 ". Ce total de 11,7 correspond au résultat du marché négocié avec le groupement : " pour la solution que nous proposons de retenir, le montant de l'offre est ramené à 11 700 000, 00 F HT ". Le 26 avril 1991, M. Aubin a noté que les sous-traitants devenaient co-traitants après l'accord du maître d'œuvre : " groupement avec sous-traitants qui deviennent co-traitants et validés par Beterem ". Ce même jour, M. Ginoux, de la société Albouy, a communiqué par télécopie aux sociétés Beterem et Somesys une nouvelle estimation. Le 30 avril 1991, le rectorat, le bureau d'études Beterem et le groupement se sont à nouveau réunis, comme l'atteste la télécopie sur l'avancée des négociations que M. Ginoux, de la société Albouy, a adressée aux membres du groupement.

Le rapport de négociation rédigé par la société Beterem indique que les négociations n'ont été menées qu'avec ce groupement : " Compte tenu des délais très courts impartis, il n'était pas envisageable de négocier avec toutes les entreprises, celles-ci ont donc été contactées dans l'ordre de leur classement à l'ouverture des plis afin de connaître celles qui étaient disposées à rechercher avec nous les solutions de nature à parvenir aux objectifs fixés. Il est très vite apparu que seul le groupement moins-disant à l'ouverture était prêt à faire avec nous cette démarche approfondie, en raison même de l'importance des écarts constatés ".

3. La constitution d'un groupement d'entreprises entre les sociétés Somesys, Albouy, Bencivenga et fils et Spie Trindel

Alors que l'appel d'offres restreint a été lancé le 31 janvier 1991, dès le 6 février, la société Somesys a envisagé de soumissionner en constituant un groupement avec les sociétés Albouy, Bencivenga et fils et Spie Trindel. Les sociétés Somesys, Bencivenga et fils et Spie Trindel se sont effectivement groupées pour l'appel de candidatures alors que la société Albouy a déposé une candidature séparée. Ces deux candidatures ont été retenues par la commission qui s'est réunie le 8 mars 1991.

Toutefois, le 19 avril 1991, soit trois jours avant la date limite de remise des offres, les sociétés Somesys, Bencivenga et fils et Spie Trindel, auxquelles s'est jointe la société Albouy, ont signé une convention de groupement momentané d'entreprises solidaires suivant le modèle établi par la Fédération nationale du bâtiment. Dans cette convention, le rôle du mandataire était assuré par Spie Trindel et la répartition des prestations était la suivante : " Somesys : régulation (hors vannes) ne dépassant pas 5 % du montant global de l'affaire ; Bencivenga : 13 % des 95 % restants ; Albouy : 29 % des 95 % restants ; Spie Trindel : 29 % des 95 % restants + 80 000 francs ; Les 29 % restants seraient sous-traités à l'extérieur du groupement ". Les 80 000 F de la part de Spie Trindel correspondaient à la rémunération de la mission de mandataire (article II). La société Albouy, qui avait déposé sa candidature et qui avait été retenue, n'a pas déposé d'offre.

4. Les pratiques relevées au cours de l'appel d'offres restreint et de l'appel d'offres ouvert

Les notes manuscrites citées ci-après ont été rédigées par M. Philippe Aubin, directeur de l'agence Somesys de Marseille. Elles font partie des documents communiqués aux enquêteurs le 16 décembre 1991.

Avant le dépôt des candidatures

L'appel de candidatures lancé le 31 janvier 1991 a été publié dans le moniteur du 8 février et dans le BOAMP du 9 février. La date limite de remise des offres était le 25 février et les plis ont été ouverts le 8 mars.

Notes manuscrites datées du 6 février 1991 :

EMPLACEMENT TABLEAU

M. Ordioni travaillait à la société Beterem.

M. Aubin a noté sur un autre document :

EMPLACEMENT TABLEAU

Notes manuscrites datées du 12 février 1991 :

EMPLACEMENT TABLEAU

LB correspond aux initiales de l'entreprise Laurent Bouillet entreprise et AIC à celles de la société Armand interchauffage.

Notes manuscrites datées du 13 février 1991 :

"Benci : 13.2.91

LB : OK

MQ : à sortir

Idex : à sortir

Bergeon/Albouy/Somesys/Ortegal/Benci"

MQ correspond aux initiales de la société Missenard Quint Sud-Est. Ce n'est pas la société Idex mais sa filiale IC entreprise qui a déposé une candidature et a été retenue.

Note manuscrite datée du 21 février 1991 :

EMPLACEMENT TABLEAU

Avant la remise des offres de l'appel d'offres restreint

Les entreprises retenues pouvaient déposer leurs offres jusqu'au 22 avril et la commission s'est réunie le 23 avril 1991.

Notes manuscrites datée du 13 mars 1991 :

EMPLACEMENT TABLEAU

Notes manuscrites datées du 18 mars 1991 :

EMPLACEMENT TABLEAU

Notes manuscrites datées du 22 mars 1991 :

" pb Rineau "

Notes manuscrites datées du 27 mars 1991 :

EMPLACEMENT TABLEAU

Notes manuscrites datées du 28 mars 1991 :

EMPLACEMENT TABLEAU

Notes manuscrites datées du 8 avril 1991 :

EMPLACEMENT TABLEAU

Notes manuscrites datées du 12 avril 1991 :

"OK/le 12/4/91 : PA

pas de réponse / OK/ il s'efface pas d'offre"

Document daté du 17 avril 1991 :

En haut à droite de ce feuillet, M. Aubin a noté les noms des entreprises suivantes :

" Benci

Frangeclim

LB

Albouy

Cegelec

Armand

Spie "

Il a noté en bas de ce même document :

EMPLACEMENT TABLEAU

Document suivant non daté :

Ce total qui figure dans la rubrique " appui " réapparaît à la page suivante dans une rubrique " honoraires " :

EMPLACEMENT TABLEAU

En haut de ce document, M. Aubin a noté :

EMPLACEMENT TABLEAU

Document suivant non daté :

En bas de ce document, M. Aubin a noté :

" PA = Rineau - ne pas bouger si infructueux

le client le rappelle

si 2e tour - ne bouge pas

OK / courrier / ne bougera pas "

Avant la remise des offres de l'appel d'offres ouvert

Pour l'appel d'offres lancé le 1er octobre 1991, les plis devaient être déposés avant le mardi 26 novembre. Pour les lots 1 et 2, la société Bergeon et Cie s'est présentée comme mandataire d'un groupement comprenant les sociétés Sodexal, Sotec et Crudeli et la société Albouy comme mandataire d'un groupement avec les sociétés Bencivenga et fils et Somesys.

Notes manuscrites datées du 24 octobre 1991 :

EMPLACEMENT TABLEAU

M. Mandicourt travaillait dans la société Bergeon.

Notes manuscrites datées du 31 octobre 1991 :

" Palmieri 31.10

Bergeon donne la 521 au groupement Sodexal Sotec Crudelli + SNTU Blanc - Bertogli et M. Gaudin sont prêts à coopérer avec Somesys réunion mardi 5/11 Somesys dans 2 lots ? "

M. Palmieri était gérant de la société Sotec, M. Bertogli travaillait dans la société Bergeon et Cie, M. Blanc était président de la société Sodexal et M. Gaudin président de la société Crudelli.

Notes manuscrites datées du 4 novembre 1991 :

" 04.11.91 à 17 h 07 à l'attention de M. Aubin

M. Palmieri Crudelli (91 79 80 00).

message :

Pour la réunion de Luminy du 5.11.91 elle a lieu à l'entreprise Crudelli

108 Av. de la Timone à 9 h "

Notes manuscrites datées du 13 novembre 1991 :

EMPLACEMENT TABLEAU

II. SUR LA BASE DES CONSTATATIONS QUI PRECEDENT, LE CONSEIL,

Sur la prescription :

Considérant que la société Spie Trindel soutient que la prescription était acquise à son égard dès lors que depuis la saisine du Conseil de la concurrence, plus de trois années se sont écoulées sans qu'aucun acte tendant à la recherche, à la constatation ou à la sanction des faits n'ait été exécuté à l'égard de Spie Trindel ;

Mais considérant qu'aux termes de l'article 27 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 : " Le Conseil ne peut être saisi de faits remontant à plus de trois ans s'il n'a été fait aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction " ; que le Conseil a été saisi par le ministre chargé de l'Economie par courrier enregistré le 5 juillet 1993 ; que par courrier du 29 mai 1996, le rapporteur a convoqué pour audition M. Bariou, de la société Établissements Rineau frères et le directeur de l'agence de Marseille de la société Somesys ; que le 14 juin 1996, il a auditionné M. Bariou, le 24 juin 1996, M. Aubin de la société Somesys et le 2 juillet 1996 M. Jean Douchy, responsable des services techniques de la faculté des sciences de Luminy ; que les procès-verbaux consignant ces auditions constituent des actes tendant à la recherche, à la constatation ou à la sanction des faits qui ont interrompu la prescription, non seulement à l'égard des pratiques reprochées à ces entreprises, mais aussi de celles pour lesquelles les autres entreprises ont été mises en cause ; qu'ainsi le Conseil peut examiner ces faits et les qualifier ;

Sur la durée de la procédure :

Considérant que la société Crystal, venant aux droits de la société Armand interchauffage, fait valoir que la procédure a été d'une lenteur anormale qui ne serait pas justifiée par l'ampleur du dossier ; que compte tenu de l'ancienneté du dossier, de la durée de la procédure et de l'absence complète d'investigations la concernant, elle serait dans l'impossibilité de présenter efficacement sa défense ; qu'en outre, le fait qu'une période de près de trois ans se soit écoulée sans qu'aucun acte d'instruction n'ait été effectué et la longueur anormale de la procédure constitueraient " une violation des droits de la défense et de l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme et seraient contraires au principe du droit communautaire de respect d'un délai raisonnable " ;

Considérant que, s'il est constant que les faits remontent à 1991, que la société Armand interchauffage n'a pas déposé d'offre et n'a fait l'objet d'aucune investigation lors de l'enquête administrative, la société Crystal ne démontre pas en quoi, en l'espèce, l'ancienneté des faits et la durée de la procédure porteraient atteinte à ses droits de défense ; que le fait qu'elle n'ait pas conservé les documents relatifs à ce marché ne suffit pas à démontrer qu'elle n'aurait pu valablement assurer sa défense, dès lors que, comme toutes les parties en cause, elle a disposé à chaque étape de la procédure des délais prévus à l'article 21 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, pour consulter le dossier et présenter ses observations ;

Considérant, en outre, que le délai raisonnable prescrit par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit s'apprécier au regard de l'ampleur et de la complexité de la procédure; qu'en l'espèce, il y a lieu de relever que l'ampleur et la complexité du dossier qui met en cause vingt-trois entreprises suffit à justifier la longueur de la procédure; qu'en tout état de cause, les moyens soulevés par référence à l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et par rapport au principe général du droit communautaire de respect d'un délai raisonnable sont inopérants dès lors que, si un délai de procédure non justifié peut engager la responsabilité de l'Etat, il n'est pas de nature à entacher la procédure de nullité;

Sur la régularité des procès-verbaux :

Considérant que les sociétés Crystal, Entreprise Lefort Francheteau et Tunzini SNC font valoir que le procès-verbal de communication des pièces communiquées par M. Aubin du 16 décembre 1991 serait irrégulier au motif que M. Tanguy, qui était une personne concernée par les investigations, n'a pas signé le procès-verbal ; que la société Crystal soutient que, de la lecture de ce procès-verbal, il ressort que l'objet de l'enquête n'a pas été indiqué à M. Tanguy et que la mention " M. Aubin nous a communiqué copie des documents énumérés ci-après " ne permet pas de savoir quels sont précisément les documents demandés par les enquêteurs ;

Considérant qu'aux termes de l'article 47 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 : " Les enquêteurs peuvent accéder à tous les locaux, terrains ou moyens de transport à usage professionnel, demander la communication de livres, factures et tous autres documents professionnels et en prendre copie, recueillir sur convocation ou sur place, les renseignements et justifications " ; que l'article 31 du décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 prévoit : " Les procès-verbaux prévus à l'article 46 de l'ordonnance sont rédigés dans le plus court délai. Ils énoncent la nature, la date et le lieu des constatations ou des contrôles effectués. Ils sont signés de l'enquêteur et de la personne concernée par les investigations " ; que sur le procès-verbal d'inventaire des documents communiqués en date du 16 décembre 1991, il est précisé en première page que les enquêteurs " ont été reçus par M. Aubin Philippe, directeur d'agence, puis par M. Tanguy Jean-Claude, chef d'exploitation. Nous avons justifié de notre qualité et indiqué à M. Aubin l'objet de notre enquête.... " ; que sur la seconde page il est noté " M. Aubin nous a communiqué copie des documents énumérés ci-après " et que la dernière page porte la seule signature de M. Aubin qui n'a formulé aucune observation ; qu'en l'espèce M. Aubin, ayant communiqué les pièces, était donc la personne concernée par les investigations à qui il incombait, par suite, de signer le procès-verbal ; qu'il importe peu que le procès-verbal ne précise pas que M. Tanguy a été informé de l'objet de l'enquête, dès lors que n'ayant pas communiqué les pièces, et même s'il a bien reçu les enquêteurs, il n'était pas la personne concernée par les investigations ; qu'en outre, aucune disposition ne prévoit que les procès-verbaux doivent comporter des mentions précisant la liste des documents demandés par les enquêteurs ou indiquant que les enquêteurs auraient demandé de façon précise des livres, factures et autres documents professionnels</ccsdfc>; qu'en conséquence, le procès-verbal d'inventaire des documents communiqués par M. Aubin le 16 décembre 1991 ayant été régulièrement établi, il n'y a pas lieu d'écarter du dossier l'ensemble des pièces communiquées à cette occasion ;

Sur la procédure devant le Conseil de la concurrence :

Considérant que la société Bergeon Méditerranée, venant aux droits de la société Bergeon et Cie, soutient que, ne disposant pas des archives de la société Bergeon SA et le responsable à l'époque des faits ne faisant plus partie de son personnel, elle serait dans l'impossibilité de répondre aux griefs retenus à l'encontre de la société Bergeon et Cie ;

Mais considérant qu'en se bornant à soutenir qu'elle serait dans l'impossibilité de répondre aux griefs retenus à l'encontre de la société Bergeon et Cie dans la mesure où elle ne dispose pas des archives relatives à ce marché et ne peut interroger les responsables de l'époque, la société Bergeon Méditerranée n'apporte pas d'éléments précis démontrant qu'elle n'a pu valablement assurer sa défense, dès lors que comme toutes les parties en cause, elle a disposé à chaque étape de la procédure des délais prévus à l'article 21 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 pour consulter le dossier et présenter ses observations ; qu'ainsi, elle a été à même de préparer sa défense ;

Considérant que la société Spie Trindel fait valoir que, de la saisine du ministre de l'Economie le 5 juillet 1993 jusqu'à la notification de griefs du 27 septembre 1996, elle n'a été destinataire d'aucune lettre du Conseil de la concurrence et n'a fait l'objet ni d'aucun acte de procédure et qu'aucun de ses dirigeants et salariés n'a été interrogé ou entendu par le rapporteur ;

Mais considérant que, si en application de l'article 20 du décret du 29 décembre 1986, le rapporteur peut, s'il l'estime opportun, procéder à des auditions, aucune disposition législative ou réglementaire ne lui impose d'y procéder ni d'entendre toutes les parties ou personnes concernées ; que la phase contradictoire de la procédure ne débute qu'à compter de la notification de griefs ; qu'en conséquence, le fait que la société Spie Trindel n'ait reçu aucun document du Conseil de la concurrence et que ses représentants n'aient pas été entendus par le rapporteur avant la notification de griefs est sans influence sur la régularité de la procédure ;

Considérant que les sociétés Tunzini SNC, venant aux droits de la société Albouy, et Spie Trindel font valoir qu'en distinguant les différentes étapes de la procédure de passation des marchés, il est opéré dans la notification de griefs une distinction et une multiplication artificielle des griefs au regard de faits concernant un seul marché, dans des conditions contraires au principe selon lequel les mêmes faits ne peuvent être retenus à l'appui de plusieurs infractions distinctes en vertu du principe " non bis in idem" ;

Mais considérant que l'article 21 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 prévoit : " Sans préjudice des mesures prévues à l'article 12, le Conseil notifie les griefs aux intéressés ainsi qu'au commissaire du Gouvernement qui peuvent consulter le dossier et présenter leurs observations dans un délai de deux mois " ; qu'aucune règle particulière de présentation n'est prévue par l'ordonnance s'agissant des griefs notifiés ; qu'au cas présent, si l'ensemble des pratiques concertées ne concerne qu'un seul et même marché, celui de la rénovation des installations de chauffage centralisé du parc de Luminy, et si le rapporteur a rédigé la notification de griefs en distinguant les différentes étapes de la procédure, le dépôt des candidatures lors de l'appel d'offres restreint, la remise des offres lors de l'appel d'offres restreint et enfin l'ouverture des plis de l'appel d'offres ouvert, il a pu, ainsi, valablement qualifier les pratiques en mettant en cause différentes entreprises lors de concertations successives et distinctes et notifier les griefs correspondant à celles-ci ;

Sur l'administration de la preuve :

Considérant que les sociétés Laurent Bouillet entreprise, Tunzini SNC et Etablissements Rineau frères font valoir que les preuves proviennent exclusivement des notes manuscrites de M. Aubin, que rien ne permet d'affirmer à la lecture de ces documents que les mentions y figurant ont été écrites après prise de contact avec les sociétés citées et que ces documents ne permettent pas de prouver la participation d'une entreprise citée à une concertation ; qu'elles considèrent qu'en l'espèce, " il aurait fallu que d'autres éléments viennent démontrer leur participation à un échange d'informations et que si le Conseil devait retenir des griefs sur la base de documents émanant d'une seule et même entreprise, il ouvrirait la voie à une dérive dangereuse dans l'administration de la preuve " ;

Mais considérant, d'une part, qu'en matière de marchés publics ou privés sur appel d'offres, il est établi que des entreprises ont conclu une entente anticoncurrentielle dès lors que la preuve est rapportée soit qu'elles sont convenues de coordonner leurs offres, soit qu'elles ont échangé des informations antérieurement à la date où le résultat de l'appel d'offres est connu ou peut l'être, qu'il s'agisse de l'existence de compétiteurs, de leur nom, de leur importance, de leur disponibilité en personnel et en matériel, de leur intérêt ou de leur absence d'intérêt pour le marché considéré, ou des prix qu'ils envisageaient de proposer ; que la preuve de telles pratiques, qui sont de nature à limiter l'indépendance des offres, condition normale du jeu de la concurrence, peut résulter soit de preuves suffisantes en elles-mêmes, soit d'un faisceau d'indices constitué par le rapprochement de divers éléments recueillis au cours de l'instruction, même si chacun de ces éléments pris isolément n'a pas de caractère suffisamment probant ;

Considérant, d'autre part, qu'un document régulièrement saisi, quel que soit le lieu où il l'a été, est opposable à l'entreprise qui l'a rédigé et à celles qui y sont mentionnées et peut être utilisé comme preuve, ou pour le rapprochement avec d'autres indices graves, précis et concordants, comme élément de preuve d'une concertation ou d'un échange d'informations entre entreprises ;

Sur les pratiques relevées :

En ce qui concerne le protocole d'accord entre les sociétés Somesys et Sinerg :

Considérant que le 11 septembre 1990, les sociétés Somesys et Sinerg ont signé un protocole aux termes duquel : " Sinerg s'engage à faire retenir, sauf volonté déclarée de ses clients, Somesys comme prestataire de services pour la maintenance de ces dites installations, ainsi que pour une partie des travaux concernant directement l'exploitation (par exemple, régulation, système de télégestion, etc.) " ; que ce contrat précisait : " Les deux sociétés sont garantes de sa confidentialité " ;

Considérant que la société Somesys fait valoir qu'elle a été incitée par le maître d'ouvrage à trouver un financement pour rénover les installations de chauffage de l'université, que les pourparlers et la convention étaient connus de l'université et du ministère, que le protocole n'a pas pu avoir pour objet de restreindre la concurrence puisqu'il prévoyait expressément le libre choix du client et une consultation, et qu'enfin il n'a pas eu d'effet anticoncurrentiel puisque le projet n'a pas eu de suite ;

Considérant que la société Sinerg rappelle que ce protocole s'inscrivait dans le cadre de l'application de la loi sur la maîtrise d'ouvrage publique, dite loi MOP, et que toutes les règles applicables au mandant, en particulier les règles relevant de la passation des marchés, devaient être appliquées par le mandataire ; qu'elle soutient que, si la convention avec l'université avait été signée, elle n'aurait eu aucun pouvoir de décision sur le choix des entreprises attributaires des marchés car sa mission se limitait à la stricte organisation administrative de l'appel d'offres et à la tenue du secrétariat de la commission, que ce protocole n'a eu aucun effet puisqu'aucune convention n'a été signée entre elle et l'université et que l'esprit dans lequel elle a conclu ce protocole ne correspondait pas à la lettre de celui-ci et qu'elle n'a pas su justement apprécier la portée des engagements pris ;

Considérant que la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'œuvre privée fixe les conditions selon lesquelles le maître d'ouvrage peut confier à un mandataire une partie de ses attributions ; que cette loi prévoit que les personnes morales dont la moitié au moins du capital est directement, ou par personne interposée, détenue par l'Etat, les collectivités territoriales et leurs établissements publics, peuvent se voir confier des attributions de la maîtrise d'ouvrage ; que la société Sinerg remplissait ces conditions ; que, dans ce cas, les règles de passation des contrats signés par le mandataire sont les règles applicables au maître de l'ouvrage ; qu'en l'espèce, il n'est pas contestable que l'université n'ignorait pas que les sociétés Somesys et Sinerg avaient étudié ensemble un projet de rénovation ; que d'ailleurs, un projet de convention entre l'université et la société Sinerg lui a été présenté ; qu'aux termes de cette convention, la société Sinerg assurait notamment pour le compte de l'université, le mandat de maîtrise d'ouvrage ; Mais considérant qu'aucun élément du dossier ne permet de considérer que le maître d'ouvrage a été informé des dispositions du protocole signé le 11 septembre 1990 entre les sociétés Somesys et Sinerg ; que, bien au contraire, l'article 6 du protocole prévoyait que : " Les deux sociétés sont garantes de sa confidentialité " ; que de plus, le bureau d'études Beterem, qui a communiqué des informations à la société Sinerg pour qu'elle puisse faire des propositions de financement, a indiqué dans ses observations : " Beterem a découvert dans le dossier mis à sa disposition dans le cadre de la présente notification de griefs, qu'un protocole d'accord liait Sinerg et Somesys " ;

Considérant qu'aux termes mêmes du protocole, la société Sinerg s'est engagée " à faire retenir, sauf volonté déclarée de ses clients, Somesys comme prestataire de services pour la maintenance de ces dites installations, ainsi que pour une partie des travaux concernant directement l'exploitation (par exemple, régulation, système de télégestion, etc...) " ; que l'article 4 du projet de convention entre l'université et la société Sinerg énonce les missions de la société Sinerg parmi lesquelles figurent la préparation du choix des entrepreneurs et fournisseurs ainsi que la préparation du choix d'une société d'exploitation de chauffage ; que la société Sinerg devait établir le dossier de consultation, proposer à l'université une procédure et un calendrier, lancer la consultation et organiser les opérations de réception des candidatures et des offres ainsi que le secrétariat de la commission éventuelle ; qu'aucun document ne précise toutefois les moyens que devait mettre en œuvre la société Sinerg pour respecter son engagement lorsque les appels d'offres auraient été organisés ; que le protocole précise simplement : " À charge pour Somesys de produire des offres compétitives techniquement et financièrement " ;

Considérant que la signature de ce protocole n'avait d'intérêt pour la société Somesys que si elle obtenait une contrepartie à son apport technique et commercial ; que la seule contrepartie prévue par le contrat était la garantie d'obtenir la maintenance et une partie des travaux ; que, d'ailleurs, cet objectif est affirmé dès le 13 août 1990 dans un message interne à la société Somesys qui précisait : " Sinerg s'engage à nous retenir à la suite de l'AO qu'ils lanceront sur nos bases d'étude " ; qu'un autre message interne du 13 décembre 1990 indiquait : " Quelle position pour Sinerg ? Ils seraient à priori exclus ; mais s'ils rentrent, nous rentrons aussi... " ; que cette concertation en vue d'obtenir une part du marché est confirmée dans les messages internes de la société Somesys du 2 janvier 1991 dans lesquels M. Aubin envisage, au travers de la société Beterem, de faire une étude qui démontrerait qu'un programme plus ambitieux, de l'ordre de 25MF, serait nécessaire ; que le coût d'un tel projet rendait alors indispensable le recours à un tiers (Sinerg) pour financer l'opération et permettait à Somesys, par l'intermédiaire de Sinerg, d'obtenir une partie des marchés : " L'intervention d'un tiers comme Sinerg permet de boucler l'opération et nous aussi " ; que, dès le 3 janvier, M. Aubin a noté que M. Dionisi, de la société Sinerg, était d'accord sur ce projet ; qu'ainsi, le protocole conclu entre les sociétés Somesys et Sinerg avait un objet anticoncurrentiel ;

Considérant qu'il est constant que ce protocole n'a pas été appliqué, l'université ayant obtenu les crédits nécessaires pour organiser un appel d'offres restreint et qu'elle n'a pas fait appel à la société Sinerg ;

Mais considérant que sont prohibées par l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, les pratiques anticoncurrentielles qui " ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché " ; que ce protocole avait pour objet de fausser la concurrence en garantissant à la société Somesys qu'elle obtiendrait une partie des marchés de travaux et la maintenance des installations dans le cadre de la procédure d'appel d'offres pour la rénovation de ces installations ; que cette concertation entre les sociétés Somesys et Sinerg est, dès lors, contraire aux dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

En ce qui concerne les relations entre la société " Beterem bâtiment " et les entreprises du groupement Spie Trindel, Albouy, Bencivenga et fils, Somesys, SPEL et Phibor :

Considérant que la société Beterem bâtiment, bureau d'études de l'opération, et la société Somesys ont échangé des informations privilégiées tout au long de la procédure et que les négociations conduites par le bureau d'études n'ont concerné que le groupement Spie Trindel, Albouy, Bencivenga et fils, Somesys, SPEL et Phibor ;

Sur les échanges d'informations privilégiées entre le bureau d'études Beterem bâtiment et le groupement :

Considérant que le bureau d'études Beterem bâtiment et la société Somesys ont échangé des informations tout au long de la procédure ; qu'avant même l'appel de candidatures, les sociétés Somesys et Sinerg ont envisagé de contacter le bureau d'études Beterem pour que le projet soit modifié ; que dès le 6 février 1991, la société Beterem bâtiment a informé M. Aubin de la société Somesys du déroulement de la procédure ; que les 3, 7 et 13 février 1991, elle lui a communiqué des données relatives au coût de l'énergie ; que le 23 avril 1991, date à laquelle s'est réunie la commission qui a décidé de déclarer l'appel d'offres infructueux, la société Beterem bâtiment a informé immédiatement la société Somesys des résultats de la consultation ;

Considérant que les sociétés Beterem bâtiment et Somesys soutiennent que le fait même que la société Somesys ait exploité à compter de 1974 les installations thermiques dont la rénovation a fait l'objet des marchés en cause lui conférait une meilleure connaissance du dossier ; que, de par sa connaissance du site, certains échanges d'informations entre Somesys et le bureau d'études étaient donc nécessaires et connus du maître d'ouvrage ; que, si le bureau d'études a fourni quelques renseignements à la société Somesys (planning de l'étude, forme de la consultation, dates prévisionnelles de l'appel d'offres, consistance des travaux en fonction des énergies susceptibles d'être retenues et le prix des énergies prises en compte dans les coûts prévisionnels d'exploitation), c'est surtout la société Somesys qui lui a communiqué des informations techniques (études réalisées depuis 1989, défauts de fonctionnement, etc) ; que les informations communiquées par Beterem bâtiment n'auraient pas eu de caractère confidentiel, qu'elles auraient été communiquées à tous les candidats qui en ont fait la demande et qu'aucune n'était susceptible de nuire à la régularité de la procédure ;

Considérant que certains échanges d'informations entre les sociétés Somesys et Beterem bâtiment étaient nécessaires compte tenu des connaissances techniques de la société exploitante ; que les renseignements communiqués par Beterem bâtiment à la société Somesys avant le marché négocié ont porté, selon les notes manuscrites de M. Aubin, sur le déroulement de la procédure, les études tarifaires en fonction des différentes énergies réalisées par la société Sergie, le budget disponible et les résultats de l'ouverture des plis ; qu'aucun élément du dossier ne permet de considérer que Beterem bâtiment a communiqué à Somesys et aux entreprises du groupement constitué par cette société des informations confidentielles de nature à favoriser le groupement par rapport aux entreprises concurrentes ; que si le groupement a pu bénéficier de l'avantage concurrentiel provenant de la position particulière de la société Somesys qui assurait la maintenance des installations, il n'est pas établi que les échanges d'informations entre le bureau d'études et la société Somesys avaient pour objet ou pouvaient avoir pour effet de fausser la concurrence sur ce marché ;

Sur les négociations avec le seul groupement moins-disant :

Considérant que, dès le 25 avril, avant même que le bureau d'études ne présente son rapport d'analyse des offres au maître d'ouvrage et que ce dernier ne décide officiellement d'entreprendre les négociations, les entreprises du groupement Somesys, Spie Trindel, Bencivenga et fils et Albouy ont participé à une réunion organisée par le maître d'œuvre ; qu'au cours de cette réunion, la société Beterem bâtiment et le groupement ont comparé les prix de l'estimation avec ceux déposés par le groupement ; qu'ils sont convenus du niveau de prix auquel ils devaient aboutir, soit 11,7 MF, et ont décidé de faire appel aux sociétés SPEL et Phibor pour les travaux de terrassement et d'électricité ; que les négociations n'ont été conduites qu'avec ce groupement et qu'aucun autre candidat n'a été consulté ;

Considérant que la société Spie Trindel conteste le fait que les négociations ont débuté dès le 25 avril et qu'elles n'ont concerné que le groupement moins-disant ; qu'elle considère que le représentant du maître d'ouvrage pouvait en toute légalité négocier librement et qu'il n'y aurait eu aucune éviction illicite des autres concurrents ; que, selon le bureau d'études, les décisions de négocier immédiatement après l'ouverture des plis et de ne négocier qu'avec le groupement moins-disant, auraient été prises par M. Landeroin, représentant du rectorat, et que les actions auraient été dictées par le contexte d'urgence de cette opération ; qu'il soutient qu'en sa qualité de maître d'œuvre, il ne pouvait ni contester cette décision, ni prendre l'initiative d'entamer des négociations avec d'autres entreprises et que l'ensemble des négociations auraient été menées sous le contrôle du rectorat ; que la société Somesys indique quant à elle que ce sont le bureau d'études et le maître d'ouvrage qui ont déclaré qu'il n'était pas envisageable de négocier avec toutes les entreprises ; que la société Tunzini, venant aux droits et obligations de la société Albouy, fait valoir qu'aucun élément du dossier n'établit que les sociétés membres du groupement savaient que les négociations n'étaient menées qu'avec le seul groupement moins-disant et que la société Albouy ignorait totalement les conditions dans lesquelles le bureau d'études Beterem bâtiment, agissant pour le compte et sur instruction du maître d'ouvrage, menait les négociations ;

Considérant que, si l'instruction a permis d'établir que le bureau d'études Beterem bâtiment et les entreprises membres du groupement, Spie Trindel, Albouy, Bencivenga et fils et Somesys se sont réunis dès le 25 avril 1991 et que les négociations n'ont été conduites par le bureau d'études qu'avec le seul groupement moins-disant, aucun élément du dossier ne permet de considérer que la décision de ne négocier qu'avec le groupement, et donc d'écarter les entreprises concurrentes qui avaient déposé leurs candidatures, a été prise par le bureau d'études en concertation avec les entreprises du groupement ; qu'il n'est donc pas établi que la société Beterem bâtiment et les sociétés appartenant au groupement Spie Trindel, Albouy, Bencivenga et Somesys, élargi aux sociétés SPEL et Phibor, se sont entendues pour évincer des négociations les entreprises concurrentes ;

En ce qui concerne la constitution d'un groupement d'entreprises entre les sociétés Albouy, Bencivenga et fils, Spie Trindel et Somesys :

Considérant que les sociétés Somesys, Bencivenga et fils, Spie Trindel et Albouy ont signé le 19 avril 1991 une convention de groupement momentané d'entreprises et ont déposé une offre commune alors même que la candidature du groupement constitué par les sociétés Somesys, Spie Trindel et Bencivenga et celle indépendante de la société Albouy avaient été retenues ;

Considérant que les sociétés Tunzini SNC, Spie Trindel et Somesys font valoir que la constitution du groupement était rendue nécessaire compte tenu des spécificités du marché et des délais très courts fixés pour la réponse et la réalisation des travaux et qu'il ne présenterait donc pas de caractère anticoncurrentiel ; que la société Tunzini SNC, venant aux droits de la société Albouy SNC, précise que lorsqu'elle a déposé sa candidature seule, elle ne connaissait pas les caractéristiques du marché, et que ce n'est qu'après avoir retiré et étudié le dossier qu'elle a découvert son importance et a considéré qu'elle ne pouvait pas en assumer seule la charge ;

Considérant que le fait de se grouper pour répondre à un appel d'offres ne constitue pas en soi une pratique prohibée par l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; que, toutefois, le recours à un groupement peut être prohibé s'il est établi qu'il a été utilisé pour mettre en œuvre des pratiques concertées ayant pour objet ou pouvant avoir pour effet de limiter le libre exercice de la concurrence lors d'un appel d'offres ; qu'au cas présent, lorsqu'elle a déposé sa candidature, la société Albouy ne pouvait ignorer ni la nature des travaux, ni les délais d'exécution des travaux ; qu'en effet, l'avis d'appel de candidatures publié dans le Moniteur des travaux publics du 8 février et dans le BOAMP du 9 février précisait d'une manière succincte la nature de ces travaux, indiquait que le délai d'exécution envisagé était de cinq mois et que l'époque prévisible du chantier était le mois de mai 1991 ; qu'aucun élément du dossier ne permet d'établir que les travaux auraient présenté un caractère de difficulté particulière ; que, du reste, le groupement constitué par les sociétés Spie Trindel, Bencivenga et fils et Somesys d'une part et la société Albouy d'autre part entendaient initialement présenter des offres indépendantes puisqu'elles avaient déposé des candidatures distinctes ; que la commission d'ouverture des plis et le maître d'ouvrage ont retenu la candidature du groupement ainsi que la candidature de la société Albouy ; qu'ils considéraient donc que ces deux candidats avaient les capacités techniques pour réaliser les travaux ; que la société Albouy avait décidé dans un premier temps de déposer une offre distincte puisqu'elle avait calculé ses propres prix de revient ; que le maître d'ouvrage, qui avait retenu dix candidatures, n'a finalement disposé que de quatre offres, puisque seuls trois entreprises et le groupement, étendu à la société Albouy, ont déposé une offre ;

Considérant qu'en élargissant ainsi ce groupement à la société Albouy, les sociétés Somesys, Spie Trindel, Bencivenga et fils et Albouy se sont concertées ; que cette concertation a eu pour effet de restreindre la concurrence sur ce marché en limitant le nombre d'offres indépendantes ; que cette concertation est dès lors prohibée par l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

En ce qui concerne les pratiques relevées à l'occasion de l'appel d'offres restreint :

Considérant que M Aubin a communiqué aux enquêteurs le 16 décembre 1991 des notes manuscrites sur lesquelles figurent notamment des listes d'entreprises, des prix et diverses mentions ; que plusieurs entreprises qui ont fait acte de candidature et dont certaines ont déposé des offres apparaissent à plusieurs reprises dans ces notes ; qu'il s'agit soit d'entreprises concurrentes, soit d'entreprises qui ont constitué un groupement avec la société Somesys pour cet appel d'offres ;

En ce qui concerne les pratiques antérieures au dépôt des candidatures :

Considérant que les sociétés Somesys et Laurent Bouillet entreprise font valoir que ces listes d'entreprises correspondent aux réflexions personnelles de M. Aubin sur les entreprises susceptibles de concourir et de constituer un groupement ; que les sociétés Tunzini SNC, venant aux droits de la société Albouy, et Spie Trindel font valoir que les documents illustrent des contacts légitimes dans la perspective du groupement qui allait être constitué ; que les sociétés Laurent Bouillet entreprise et Crystal relèvent qu'à la lecture des notes du 6 et 12 février 1991 figurant au IB ci-dessus, il apparaît que la société Somesys, vraisemblablement en liaison avec la maîtrise d'ouvrage et le maître d'œuvre, pouvaient imaginer la manière dont seraient traitées les candidatures de ses principaux concurrents par la commission d'ouverture des plis ;

Mais considérant, en premier lieu, que la liste des entreprises susceptibles de déposer leur candidature, établie par M. Aubin, ne comprenait pas plusieurs entreprises importantes qui ont effectivement déposé leur candidature, dont M. Aubin ne pouvait ignorer qu'elles avaient la capacité d'exécuter le marché et qu'au total vingt-trois entreprises ont déposé leur candidature ; qu'en deuxième lieu toutes les entreprises figurant à plusieurs reprises (Bergeon et Albouy à quatre reprises, Spie à trois reprises) dans les notes de M. Aubin des 6, 12, 13 et 21 février ont toutes effectivement présenté leur candidature ; qu'ainsi, sur les notes datées du 21 février, soit plus de quatre jours avant la date limite de dépôt des candidatures, les sociétés " Bergeon, LB, Icart, TNEE, Crudelli, Leffort, AIC, Frangeclim " dont les noms apparaissent dans la colonne "réponse" avec une croix, le nom de la société Crudeli étant entre parenthèses, déposeront toutes des candidatures ; qu'en troisième lieu en regard du nom des entreprises Armand, TNEE, Tunzini et Crudeli sur la note du 21 février, est notée la mention " OK " ; que, sur la note du 21 février, sous la colonne " Réponse " figure le nom des entreprises Bergeon, LB, Icart, TNEE (Crudeli), Leffort, AIC, Frangeclim, suivis, sauf Crudeli, d'un X ; que sur cette même note figurent en colonne sour la rubrique " Candidature ", les noms des sociétés Spie/Somesys/Bencivenga, Albouy, Bergeon ; qu'en quatrième lieu à l'issue de l'appel d'offres le groupement constitué par les quatre premières d'entre elles, Spie, Albouy, Somesys, Bencivenga, sera le moins-disant et qu'en face du nom de la société Bergeon figurait dans la colone " Réponse " la mention " Absent/Battu (mais atout) " ; qu'en cinquième lieu dans la note datée du 6 février le nom de " Rineau " est précédé du sigle " PA ", initiales de Philippe Aubin et que la note datée du 13 février comporte la mention " LB.OK ", LB étant les initiales de Laurent Bouillet ; que ces éléments constituent un faisceau d'indices précis et concordants d'une concertation entre les sociétés Somesys, Bergeon, Laurent Bouillet, ICART, TNEE, Crudeli, Lefort, AIC, Frangeclim, Spie Trindel, Bencivenga et Rineau ;

Considérant que les sociétés Crystal et Laurent Bouillet soutiennent que les notes de M. Aubin correspondent à des projections qu'il aurait faites à partir d'informations privilégiées qu'il aurait obtenues du maître d'ouvrage ;

Mais considérant, d'une part, que les sociétés Crystal et Laurent Bouillet n'apportent aucun élément de preuve à l'appui de leur affirmation, que, d'autre part, l'appel à candidatures a été publié dans le Moniteur des travaux publics du 8 février et dans le BOAMP du 9 février et que les candidatures pouvaient être déposées jusqu'au 25 février ; qu'ainsi il ne peut être valablement soutenu que le maître d'œuvre et le maître d'ouvrage connaissaient le 6 février, c'est-à-dire deux jours avant la publication de l'appel à candidature, l'identité des sociétés qui y répondraient ; qu'en tout état de cause, à supposer même que M. Aubin ait obtenu des informations du maître d'ouvrage sur l'identité de certaines des entreprises qui avaient l'intention de déposer leur candidature en vue du futur appel d'offres, cette circonstance serait sans incidence sur la qualification des échanges d'information entre Somesys et les entreprises avant le dépôt des candidatures ;

Considérant que la société Laurent Bouillet entreprise soutient qu'il ne peut lui être fait grief de s'être entendue avec d'autres entreprises pour déposer sa candidature alors qu'il s'agit d'un acte de concurrence ;

Mais considérant qu'une concertation entre entreprises avant le dépôt des candidatures a pour objet et peut avoir pour effet de porter atteinte à la concurrence ; qu'en acceptant à la demande d'un concurrent d'être candidate alors qu'elle n'est pas intéressée par le marché, une entreprise met en œuvre une pratique qui a pour objet et peut avoir pour effet de fausser la concurrence sur ce marché ; qu'en l'espèce, la société Somesys avait intérêt à se concerter dès ce stade de la procédure pour inciter les entreprises qui ne s'opposaient pas à sa stratégie à se porter candidates ; qu'ainsi, elle augmentait la probabilité que le maître d'ouvrage retienne les candidatures d'entreprises qui ne seraient pas concurrentes ; que cette concertation faciliterait en outre l'organisation de l'entente au stade du dépôt des offres ; qu'en effet, à défaut du dépôt de candidatures "amies", la commission d'appel d'offres aurait pu être conduite à choisir une entreprise qui n'aurait pas été contactée auparavant par la société Somesys et qui aurait pu ultérieurement faire échouer la concertation organisée par la société Somesys ; que cette stratégie était d'autant plus efficace qu'elle s'appuyait sur des relations privilégiées avec le maître d'ouvrage et le maître d'œuvre ;

En ce qui concerne les pratiques antérieures au dépôt des offres :

Considérant que sur une note manuscrite non datée cote 213 en annexe au rapport, M. Aubin a noté des noms d'entreprises précédés d'un nombre allant de 15 à 17,9 ainsi que la mention " pb terrasst pb électrique, 2 postes vont éclater " ;

Considérant que les sociétés Somesys et Laurent Bouillet entreprise font valoir que ce document aurait été rédigé après l'ouverture des plis ;

Mais considérant tout d'abord qu'en ce qui concerne l'ordre dans lequel les pièces ont été communiquées aux enquêteurs, ce document suit un document daté du 17 avril 1991 et précède un document, lui même non daté, mais dont la rédaction est antérieure au 19 avril 1991 puisqu'il mentionne " protocole à signer " et que la convention de groupement entre les entreprises visée par ce protocole a été signée le 19 avril ; qu'ensuite, les différences entre les notes de M. Aubin et le résultat de la consultation permettent d'établir qu'il ne s'agit pas d'informations communiquées après l'ouverture des plis ; qu'ainsi, sur les notes de M. Aubin, la société Armand interchauffage arrive en quatrième position avec un montant de " 17 ", la société Établissements Rineau frères arrive en sixième position avec un montant de " 17,9 " alors que ces deux entreprises n'ont pas déposé d'offres ; que, de même, sur les notes de M. Aubin, la société Frangeclim est en cinquième position avec un montant de " 17,2 ", alors que la commission d'appel d'offres n'a pas pris en compte sa proposition de 17 654 374,00 F HT qui apparaît sur le devis communiqué au bureau d'études Beterem bâtiment le 25 avril ; qu'enfin, les notes de M. Aubin n'évoquent pas l'offre de la société IC entreprise qui est pourtant arrivée en troisième position avec une offre de 15 958 530 F HT ; que, de plus, l'emploi du futur par M. Aubin qui indique : " 2 postes vont éclater " corrobore les indices-ci dessus analysés permettant d'établir que ce document est antérieur à l'ouverture des plis ;

Considérant que la société Laurent Bouillet entreprise fait valoir que la preuve de l'entente n'est pas apportée compte tenu des différences entre les notes de M. Aubin et les résultats de la consultation et que le document en cause peut traduire des estimations effectuées par M. Aubin ou des informations qu'il aurait reçues d'un tiers ; qu'ainsi, seules les offres du groupement et de la société Bergeon et Cie seraient relativement proches des chiffres mentionnés par M. Aubin ; qu'elle ajoute que trois des six entreprises citées par M. Aubin n'ont pas déposé d'offres et que la société L'Industrielle de chauffage, non citée par M. Aubin, a déposé une offre ; que l'offre de la société Laurent Bouillet entreprise a été supérieure de 610 000 F au montant figurant sur le document de M. Aubin alors qu'entre le 17 et le 19 avril, la date limite de remise des offres étant le 22 avril, elle connaissait le montant exact de son offre et que M. Aubin aurait dû noter 16,6 et non 16 ;

Mais considérant que la société Bergeon est mentionnée sur les notes de M. Aubin en seconde position avec un montant de " 15,6 ", montant très proche de l'offre déposée par la société Bergeon et Cie qui s'élevait à 15 580 000 F HT ; que pour la société Laurent Bouillet entreprise, M. Aubin avait consigné un montant de " 16 ", montant également très proche de l'offre de cette entreprise, soit 16 610 833,16 F HT ; que pour la société Frangeclim M. Aubin avait noté " 17,2 ", l'offre parvenue à la société Beterem le 25 avril s'élevant à 17 654 374 F ; que le document " non daté " étant antérieur à la remise des plis, le fait que M. Aubin ait classé les entreprises qui allaient déposer des offres en mentionnant à côté de leurs noms un montant d'offre et que les offres de ces entreprises soient proches ou légèrement supérieures à ce qui avait été noté par M. Aubin constituent des indices d'échanges d'informations entre la société Somesys et les sociétés Bergeon et Cie, Laurent Bouillet entreprise et Frangeclim ;

Considérant que la société Beterem bâtiment a indiqué dans son mémoire en réponse : " Quant aux trois autres entreprises ayant remis une offre dans le cadre de l'appel d'offres restreint (Bergeon, IC Entreprise et Laurent Bouillet), nous confirmons qu'elles ont été contactées téléphoniquement dans les jours qui ont suivi la réunion du 26 avril 1991 afin de connaître leurs intentions respectives quant à une éventuelle procédure de marché négocié. Toutes les réponses orales que nous avons obtenues étaient évasives et ont fait apparaître que ces entreprises étaient peu disposées à négocier " ; que cette absence de volonté concurrentielle de ces trois entreprises qui ont pourtant déposé une offre constitue un indice supplémentaire selon lequel ces entreprises se sont concertées avec la société Somesys ;

Considérant que la société Crystal, venant aux droits de la société Armand interchauffage, fait valoir qu'il n'y a aucune preuve de sa participation à une entente anticoncurrentielle et que l'absence de soumission n'est pas un indice d'entente ;

Mais considérant que, si la société Armand interchauffage n'a pas déposé d'offre alors que sur le document cote 213 en annexe au rapport elle est classée en quatrième position avec un montant de " 17 ", ce document n'est pas le seul indice permettant d'établir qu'elle s'est concertée avec la société Somesys ; qu'en effet, le nom de la société Armand interchauffage (AIC), apparaît sur cinq notes manuscrites, notamment celle du 6 février avec la mention " OK ", celle du 12 février avec une croix et la lettre "N", celle du 21 février dans la colonne réponse et sur le document coté 213, non daté ; qu'en ne déposant pas d'offre, elle a participé à l'entente, son abstention permettant d'obtenir le même résultat que si elle avait déposé l'offre figurant dans les notes de M. Aubin, pour un montant de 17 millions de francs ;

En ce qui concerne la société Etablissements Rineau frères :

Considérant que les notes manuscrites de M. Aubin des 6 et 12 février 1991, des 13, 18, 22, 27 et 28 mars 1991 et des 8, 12 et 17 avril 1991 ainsi que sur des notes manuscrites non datées, ci-dessus reproduites, établissent que la société Établissements Rineau frères a fait l'objet de plusieurs contacts de la part de M. Aubin avant la remise des offres ;

Considérant que la société Rineau soutient qu'elle souhaitait constituer un groupement avec la société Somesys ; que ce n'est que le 12 avril que cette dernière l'a informée qu'elle avait déjà constitué un groupement avec d'autres entreprises et qu'elle n'avait pas l'intention d'y inclure la société Rineau ; qu'à cette date, elle ne disposait plus du temps nécessaire pour répondre à l'appel d'offres et qu'elle a donc informé le maître d'ouvrage qu'elle ne déposerait pas d'offre ;

Mais considérant qu'il ressort des notes de M. Aubin reproduites à la partie I de la présente décision que la société Rineau a été contactée à plusieurs reprises par M. Aubin, qui, le 22 mars 1991 a noté " problème Rineau " ; qu'en effet, d'un contact en date du 18 mars, il ressort que " Rineau ne peut pas perdre " ce chantier et a souhaité que puisse lui être réserv(ée) une petite partie ! ! 20 % " selon les indications données par son représentant, M. Bariou ; que le 28 mars suivant, M. Aubin a noté un dédommagement de " 200 HT " et le 8 avril de " 300 HT " ; que le 12 avril, sous les mentions précédentes, il a été indiqué " pas de réponse/OK/il s'efface pas d'offre ", mention étant faite de l'entreprise Rineau suivie de l'indication " appui 300 " ; qu'ainsi, même si la preuve du versement effectif d'une contrepartie ne figure pas au dossier, ces notes constituent ensemble un faisceau d'indices graves, précis et concordants d'une entente entre la société Somesys et la société des Etablissements Rineau frères pour que cette dernière ne présente pas d'offre, moyennant un dédommagement qui a été finalement convenu pour un montant de 300 000 F HT ; qu'en outre, les explications de la société Rineau sont contredites par celles de la société Somesys qui a indiqué que : " cette société a voulu s'imposer en formulant certaines demandes de Rineau que le rédacteur réprouvait " ; qu'enfin, lors de la séance du Conseil, le représentant de la société Somesys a reconnu que la société Rineau avait demandé à être dédommagée et qu'il faisait amende honorable des " débordements " constatés sur ce marché ;

En ce qui concerne les sociétés du groupement Somesys, Spie Trindel, Albouy et Bencivenga et fils :

Considérant que les sociétés Spie Trindel et Tunzini, venant aux droits de la société Albouy, font valoir qu'il est normal que M. Aubin ait connu l'offre du groupement dont était membre son entreprise et que leurs noms aient été mentionnés puisqu'elles faisaient partie du groupement ; que leur participation à une concertation avec d'autres entreprises concurrentes ou la connaissance de tels contacts n'est pas établie ;

Considérant, en effet, que la mention du nom de certaines entreprises sur les notes de M. Aubin peut être expliquée par la volonté de la société Somesys de constituer un groupement ; que notamment les mentions " Spie, Albouy, Somesys et Bencivenga " sur la feuille datée du 6 février, la mention " Spie Somesys " sur la feuille datée du 12 février, la mention " Bergeon/ Albouy/ Somesys/ Ortega/ Benci " du 13 février, la mention " Spie/ Somesys/ Benci " sur la feuille datée du 21 février et la mention " Somesys Spie Albouy Ben " sur les notes manuscrites non datées se rapportent à la constitution du groupement auquel participait la société Somesys ; qu'il est constant que les sociétés Spie Trindel, Albouy et Bencivenga et fils faisaient partie du groupement de la société Somesys ;

Considérant qu'en l'espèce, aucun élément du dossier ne permet d'établir que les sociétés Albouy, Spie Trindel et Bencivenga et fils ont participé, directement ou indirectement, ou ont été informées des pratiques concertées entre la société Somesys et les entreprises concurrentes ;

En ce qui concerne l'analyse des offres des entreprises :

Considérant que la société Spie Trindel fait valoir que l'absence de corrélation entre les prix du groupement et les offres des autres entreprises démontrerait que le groupement n'a pas participé aux échanges d'informations ; qu'elle soutient que, s'il y avait eu une entente entre les douze entreprises, l'offre n'aurait pas été supérieure de 3,7 MF au montant de l'estimation et que pour une entreprise, il n'y a aucun avantage à provoquer artificiellement un appel d'offre infructueux ;

Mais considérant que si des corrélations ou des similitudes entre les offres de différentes entreprises peuvent constituer des indices selon lesquels les entreprises se sont concertées pour répondre à un marché, des entreprises peuvent également s'être entendues sans qu'il y ait de corrélation ou de similitude entre leurs offres ; qu'au cas présent, la preuve de la concertation ne résulte pas seulement de l'analyse des différentes offres, mais des documents recueillis au cours de l'enquête auprès de la société Somesys ; qu'il ne peut être déduit d'un écart entre les offres et l'estimation qu'il n'y a pas eu de concertation ; qu'en effet, la concertation sur les prix a permis au groupement de Somesys d'être moins-disant tout en proposant un prix élevé, les autres candidats ayant accepté de ne pas déposer d'offre ou de répondre avec des prix supérieurs ; que, nonobstant le fait que l'appel d'offres a été déclaré infructueux, la concertation entre la société Somesys et les autres entreprises garantissait au groupement d'obtenir le marché dans le cadre du marché négocié ; que le fait d'avoir répondu à l'appel d'offres restreint avec un montant nettement supérieur à celui de l'estimation a permis au groupement de négocier sur la base d'un prix élevé et donc favorable au groupement ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient la société Spie Trindel, la société Somesys et le groupement avaient intérêt à proposer un prix élevé même si le niveau de l'offre moins-disante était de nature à entraîner l'échec de l'appel d'offres ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède qu'il existe un faisceau d'indices graves, précis et concordants de pratiques anticoncurrentielles permettant d'établir que les sociétés Somesys et Armand interchauffage, Bergeon et Cie, Frangeclim, Laurent Bouillet entreprise et Établissements Rineau frères se sont concertées au cours de l'appel d'offres restreint ; qu'avant le dépôt des candidatures elles ont échangé des informations et ont défini une stratégie commune pour que le groupement auquel participait Somesys obtienne le marché ; que préalablement à la remise des offres, elles se sont concertées pour définir le montant des offres et une stratégie pour permettre au groupement d'être le moins-disant ; que les sociétés Bergeon et Cie, Laurent Bouillet Entreprise et Frangeclim ont remis des offres de couverture au profit du groupement ; que les sociétés Armand interchauffage et Établissements Rineau frères n'ont pas déposé d'offres ; que cette concertation avait pour objet et a pu avoir pour effet de fausser la concurrence sur ce marché et de tromper le maître d'ouvrage sur la réalité et l'étendue de la concurrence ; qu'elle est, par suite, prohibée par l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Considérant en revanche, que l'instruction n'a pas permis d'établir en l'espèce que les autres membres du groupement, les sociétés Albouy, Bencivenga et fils et Spie Trindel, ainsi que les sociétés Crudeli, Bergeon, L'Industrielle de chauffage (IC entreprise), Entreprise Lefort Francheteau, Missenart Quint Sud-Est et Tunzini ont mis en œuvre des pratiques concertées anticoncurrentielles au cours de la procédure d'appel d'offres restreint ;

En ce qui concerne les pratiques relevées à l'occasion de l'appel d'offres ouvert :

Considérant que les notes manuscrites de M. Aubin établissent que, le 24 octobre, les sociétés Somesys, Albouy et Bergeon et Cie ont échangé des informations sur l'appel d'offres ouvert ; que le 31 octobre, les sociétés Somesys, Sotec, Bergeon et Cie, Sodexal, Crudeli, se sont contactées, ont échangé des informations sur l'appel d'offres et ont décidé de se réunir le 5 novembre suivant ; que le 5 novembre, M. Aubin (Somesys), M. Palmieri (Sotec), M. Blanc (Sodexal), M. Bertogli (Bergeon et Cie) se sont réunis dans les locaux de l'entreprise Crudeli au sujet du marché de Luminy ; que le 13 novembre, M. Aubin de la société Somesys a contacté M. Ginoux de la société Albouy qui lui a indiqué : " Position de Bergeon ? Bergeon-Crudelli " et M. Mandicourt de la société Bergeon et Cie ; que, si les sociétés Bergeon et Cie, Crudeli, Sodexal et Sotec ont constitué un même groupement, Somesys, Albouy et Bencivenga et fils ont constitué un groupement concurrent ;

Considérant que la société Somesys et la société Tunzini SNC, venant aux droits de la société Albouy, soutiennent que ces échanges d'informations correspondaient aux contacts nécessaires à la constitution de groupements ;

Considérant que la constitution par des entreprises indépendantes et concurrentes d'un groupement en vue de répondre à un appel d'offres ne constitue pas en soi une pratique prohibée au sens de l'article 7 de l'ordonnance et qu'il ne peut être fait grief aux entreprises de s'être contactées en vue de présenter une offre groupée ; qu'en l'espèce, il n'est pas établi que les contacts entre ces sociétés avaient un autre objet que la recherche de partenaires pour répondre à l'appel d'offres ; qu'il n'est donc pas établi qu'en échangeant des informations avant de remettre leurs offres pour l'appel d'offres ouvert, les sociétés Somesys, Albouy et Bencivenga et fils d'une part, et les sociétés Bergeon et Cie, Sodexal, Sotec et Crudeli d'autre part, qui ont constitué deux groupements pour répondre à l'appel d'offres, ont enfreint les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Sur l'imputabilité des pratiques :

En ce qui concerne la société SNC Albouy :

Considérant que la société SNC Albouy a été radiée le 28 janvier 1994 du registre du commerce à la suite d'une fusion-absorption par la société Tunzini SNC ; qu'en conséquence, la société Tunzini SNC a assuré la continuité économique et fonctionnelle et vient aux droits et obligations de la SNC Albouy ;

En ce qui concerne la société Armand interchauffage :

Considérant que la SA Armand interchauffage a été radiée du registre du commerce à la suite de la fusion-absorption par la société CGE entreprise, qui a elle-même été absorbée par la société Crystal ; qu'en conséquence, la société Crystal a assuré la continuité économique et fonctionnelle et vient aux droits et obligations de la société Armand interchauffage ;

En ce qui concerne la SA Bergeon et Cie :

Considérant que le " groupe Icart " était constitué de la maison mère, la SA Icart et de quatre filiales : la SA Bergeon et associés (fonds de commerce de Toulouse), la SA Bergeon et Cie (fonds de commerce de Lyon et d'Aubagne), la SA Bergeon Icart (Montreuil) et la SA Icart Méditerranée (fonds de commerce de St Laurent-du-Var et de la Réunion) ; que le 31 décembre 1993, les sociétés Bergeon et associés, Bergeon et Cie et Bergeon Icart ont fait l'objet d'une fusion-absorption par la SA Icart Méditerranée, qui a pris la dénomination de Bergeon SA ; que la société Bergeon et Cie, dont le siège et le principal établissement étaient situés à Aubagne, a été radiée du registre du commerce le 12 avril 1994 à la suite de cette fusion ; que, le 22 juin 1994, la société Bergeon SA a vendu les éléments du fonds de commerce de son agence d'Aubagne à la société Armand interchauffage, et celui de l'agence de St Laurent-du-Var à la société Capelier, toutes deux filiales de la société Compagnie générale de chauffe ; que le 23 août 1994, la société Bergeon Méditerranée a été constituée par la société Armand interchauffage pour exploiter les actifs acquis par cette dernière ; que le 30 décembre 1997 la société Crystal a absorbé la société Bergeon Méditerranée ;

Considérant que si le fonds de commerce d'Aubagne a été cédé à la société Armand interchauffage, la société Bergeon SA a poursuivi son activité ; que le 1er mars 1995, elle a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire ; que le 10 mai 1995, le Tribunal de commerce de Bobigny a arrêté un plan de cession de la société Bergeon SA au profit de la SA Hervé thermique ;

Considérant que la société Bergeon Méditerranée et la société Crystal soutiennent que, si une entreprise ne cède qu'un secteur de son activité mais subsiste en tant qu'entreprise, elle doit répondre des pratiques anticoncurrentielles auxquelles elle avait participé dans ce secteur antérieurement à la cession ; qu'en conséquence, la société Bergeon SA ayant subsisté en tant qu'entreprise après la vente du fonds de commerce de l'agence d'Aubagne à la société Armand interchauffage, la société Bergeon SA vient aux droits et obligations de la société Bergeon et Cie ; qu'elles ajoutent que la société Armand interchauffage n'a pas acquis " l'ensemble des moyens matériels et humains " ayant concouru à l'infraction alléguée mais seulement un fonds de commerce, c'est à dire des éléments d'actifs et des salariés exploitant une activité ; qu'elles considèrent que la continuité de la société Bergeon et Cie a été assurée par la société Bergeon SA, puis par la société Hervé thermique qui a repris l'ensemble des éléments de la société Bergeon SA à l'exception de ceux ayant fait l'objet d'une cession à la société Armand interchauffage et Capelier ;

Considérant que la société Hervé thermique fait valoir qu'elle n'est pas cessionnaire de la SA Bergeon, mais seulement du fonds de commerce de l'agence de Toulouse de cette société, qu'elle n'est pas concernée par les faits reprochés à une entité sans liens avec elle ; qu'elle soutient que le fait qu'elle ait acquis des éléments des divers fonds appartenant à la société Bergeon SA n'est pas suffisant pour la rendre responsable des pratiques qui incomberaient aux responsables des fonds autres que celui de Toulouse ;

Considérant que l'auteur des pratiques prohibées, la société Bergeon et Cie, a fait l'objet d'une fusion-absorption par la société Icart-méditerranée devenue Bergeon SA, qui en a assuré ainsi la continuité économique et fonctionnelle ; que la société Bergeon SA a continué d'exister après avoir cédé son agence d'Aubagne et devait donc répondre des pratiques en cause ; que la société Bergeon SA a fait l'objet le 1er mars 1995 d'une procédure de redressement judiciaire, aux termes de laquelle a été arrêté un plan de cession de cette entreprise au profit de la société Hervé thermique ; que cette dernière société doit donc être regardée comme ayant assuré la continuité économique et fonctionnelle de la société Bergeon SA ;

En ce qui concerne la société Compagnie française de climatique (Frangeclim) :

Considérant que, dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire, le Tribunal de commerce de Nanterre a arrêté, le 5 juillet 1995, un plan de cession de la société Frangeclim ; que, contrairement à ce que soutient la société Climalec, cette dernière a repris les actifs de la société Frangeclim, qu'elle a assuré la continuité économique et fonctionnelle et donc qu'elle vient aux droits et obligations de la société Frangeclim ; que, le 12 novembre 1997, le Tribunal de grande instance de Montbrison a déclaré la liquidation judiciaire de la société Climalec ;

En ce qui concerne la société Spie Trindel :

Considérant que la société Spie Trindel fait valoir que les pratiques ont été mises en œuvre par son établissement régional " Fédération Provence-Méditerranée ", qui, en tant qu'entreprise ayant son autonomie de gestion, aurait du être destinataire de la notification de griefs ; qu'elle soutient que la notion d'entreprise ne se confond pas avec la personnalité juridique et que son établissement a une autonomie réelle économique ;

Mais considérant qu'une entité économique ne constitue une entreprise que si ses organes dirigeants sont à même de déterminer librement une stratégie industrielle, financière et commerciale pleinement autonomes ; qu'il appartient à la société Spie Trindel d'apporter la preuve que son agence locale bénéficiait à la date des faits de l'autonomie commerciale financière et technique ; qu'en l'espèce, le marché, qui concernait un environnement économique régional, a été traité par " la fédération Provence-Méditerranée " et si la société Spie Trindel a justifié que M. Lombardo, en qualité de directeur délégué, avait compétence, dans le cadre de sa région, pour signer les contrats et disposait du personnel, du matériel et du bureau d'études nécessaires à l'exécution du marché, ces éléments ne permettent pas d'établir que " la fédération Provence-Méditerranée " constitue une entreprise autonome ; qu'en effet, même si cette fédération disposait du pouvoir de représenter la société, d'engager le personnel, de faire et signer les offres, de passer les commandes, de contrôler les chantiers, ateliers et bureaux, il n'est pas démontré qu'elle pouvait déterminer librement sa stratégie industrielle, financière et économique ;

Sur les suites à donner :

En ce qui concerne la société Bencivenga et fils :

Considérant que la société Bencivenga et fils s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles en acceptant, avant la remise des offres, la participation de la société Albouy au groupement qu'elle avait constitué avec les sociétés Somesys et Spie Trindel, alors même que la candidature du groupement dans sa composition initiale et celle indépendante de la société Albouy avaient été retenues par le maître d'ouvrage et le maître d'œuvre ;

Considérant que le 2 janvier 1997, certains éléments du fonds ont été vendus à la société Cie nationale des fluides et que le 23 mars 1998 les opérations de liquidation de la société Bencivenga et fils ont été clôturées ; que la société a été radiée du registre du commerce le 2 avril 1998 ; que la société Bencivenga et fils ayant cessé d'exister et n'exerçant plus aucune activité économique, il n'y a pas lieu de prononcer de sanctions à son encontre ;

En ce qui concerne la société Compagnie Française de climatique (Frangeclim) :

Considérant que la société Frangeclim s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles en se concertant avec la société Somesys au cours de l'appel d'offres restreint ;

Considérant que dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire, le Tribunal de commerce de Nanterre a arrêté le 5 juillet 1995 un plan de cession de la société Frangeclim à la société Climalec ; que la société Climalec, qui a assuré la continuité économique et fonctionnelle de la société Frangeclim, doit répondre des pratiques relevées à l'encontre de cette dernière ; que, toutefois, en application de l'alinéa 3 de l'article 62 de la loi du 25 janvier 1985, dont il résulte qu'un cessionnaire ne peut être tenu de charges non prévues au plan de cession, la société Climalec ne peut se voir infliger une sanction pour des faits antérieurs à la cession ; qu'au surplus, par jugement du 12 novembre 1997, la société Climalec a elle-même été déclarée en état de liquidation judiciaire ;

En ce qui concerne la société Bergeon et Cie :

Considérant que la société Bergeon et Cie s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles en se concertant avec la société Somesys avant le dépôt des candidatures et préalablement à la remise des offres de l'appel d'offres restreint ;

Considérant que la société Hervé thermique, qui a assuré la continuité économique et fonctionnelle de la société Bergeon SA, doit répondre des pratiques imputées à cette dernière ; que, toutefois, le cessionnaire ne pouvant être, aux termes de l'alinéa 3 de l'article 62 de la loi du 25 janvier 1985, tenu de charges non prévues au plan de cession, la société Hervé thermique ne peut se voir infliger une sanction pour des faits antérieurs à la cession ;

Sur les sanctions :

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 : Le Conseil de la concurrence peut : " infliger une sanction pécuniaire applicable soit immédiatement, soit en cas d'inexécution des injonctions. Les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie et à la situation de l'entreprise ou de l'organisme sanctionné. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction. Le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 5 % du montant du chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France au cours du dernier exercice clos. Si le contrevenant n'est pas une entreprise, le maximum est de dix millions de francs " ;

Considérant que, pour apprécier le dommage à l'économie, il convient de tenir compte du montant du marché ; que la concertation des entreprises au cours de l'appel d'offres restreint a eu pour objet d'augmenter les prix de façon importante ; qu'ainsi lors de cette consultation, le prix proposé par le groupement moins-disant s'élevait à 14 987 682 F HT, qu'à l'issue des négociations, ce montant a été ramené à 11 700 000 F HT, alors que lors de l'appel d'offres ouvert, l'offre globale s'élevait à 10 755 518 F HT ; que l'écart de prix entre les deux appels d'offres s'élevait ainsi à 4 232 164 F, le prix le plus bas d'avril 1991 dépassant de près de 40 % les prix obtenus en novembre 1991 ; que compte tenu du niveau élevé des prix, les marchés n'ont pas été passés et qu'il a été nécessaire de procéder à un appel d'offres ouvert le 1er octobre 1991 ; qu'en conséquence, les travaux ont été réalisés avec une année de retard et l'université n'a pas pu bénéficier, pendant cette période, des économies d'énergie et d'exploitation qui devaient résulter de la nouvelle installation ; qu'en outre, il y a lieu de prendre en compte le fait que les pratiques anticoncurrentielles relevées ont pu tromper le maître d'ouvrage sur la réalité et l'étendue de la concurrence et qu'elles ont eu pour objet de faire supporter à l'université d'Aix-Marseille II un coût de réhabilitation des installations de chauffage anormalement élevé ;

Considérant que, pour apprécier la gravité des pratiques en cause, il y a lieu de tenir compte de la spécificité du marché, notamment du rôle du maître d'ouvrage et du maître d'œuvre ainsi que du rôle qu'a pu jouer chaque soumissionnaire, de la circonstance que des concertations ont eu lieu à un stade précoce de la procédure administrative et se sont poursuivies à tous les stades de la passation des marchés pour faire échec au jeu normal de la concurrence ; qu'il y a lieu, en particulier, de souligner le rôle de la société Somesys tout au long de la procédure de passation des marchés, tant par ses liens, en tant qu'exploitant de la chaufferie, avec le maître d'ouvrage et le maître d'œuvre, que par ses contacts avec la société Sinerg et les entreprises concurrentes ; que, de plus, une procédure de " compensation " avait été mise en place au bénéfice des entreprises participant à la concertation ;

En ce qui concerne la société Somesys :

Considérant que la société Somesys s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles en signant le 11 septembre 1990 un protocole confidentiel avec la société Sinerg, en intégrant au groupement qu'elle avait constitué avec les sociétés Spie Trindel et Bencivenga et fils la société Albouy avant la remise des offres de l'appel d'offres restreint et en se concertant avec les sociétés Armand interchauffage, Bergeon et Cie, Frangeclim, Laurent Bouillet entreprise et Etablissements Rineau frères au cours de l'appel d'offres restreint pour que le groupement obtienne une partie des travaux ;

Considérant que cette société a réalisé en France, entre le 30 juin 1996 et le 30 juin 1997, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires de 256 771 139 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels tels qu'appréciés ci-dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 2 500 000 F ;

En ce qui concerne la société Sinerg :

Considérant que la société Sinerg s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles en s'engageant dans un protocole confidentiel signé le 11 septembre 1990 à faire retenir la société Somesys pour la maintenance et une partie des travaux ; que cet accord avait un objet anticoncurrentiel mais n'a pas été mis en œuvre ;

Considérant que cette société a réalisé en France en 1997, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires de 129 867 038 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels tels qu'appréciés ci-dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 200 000 F ;

En ce qui concerne la société Tunzini SNC venant aux droits de la société Albouy :

Considérant que la société Albouy s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles avant la remise des offres de l'appel d'offres restreint en intégrant le groupement constitué par les sociétés Somesys, Spie Trindel et Bencivenga et fils alors même que sa candidature indépendante avait été retenue ;

Considérant que la société Tunzini SNC, qui a assuré la continuité économique et fonctionnelle de la société Albouy, doit répondre des pratiques relevées à l'encontre de cette dernière ;

Considérant que la société Tunzini SNC a réalisé en France en 1997, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires de 16 182 781 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels tels qu'appréciés ci-dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 200 000 F ;

En ce qui concerne la société Spie Trindel :

Considérant que la société Spie Trindel s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles en se concertant avec la société Albouy, avant la remise des offres de l'appel d'offres restreint, pour qu'elle participe au groupement qu'elle avait constitué avec les sociétés Somesys et Bencivenga et fils, réduisant ainsi le nombre d'offreurs ;

Considérant que cette société a réalisé en France en 1996, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires de 5 374 748 799 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels tels qu'appréciés ci-dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 500 000 F ;

En ce qui concerne la société Crystal venant aux droits de la société Armand interchauffage :

Considérant que la société Armand interchauffage s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles en se concertant avec la société Somesys avant le dépôt des candidatures et préalablement à la remise des offres de l'appel d'offres restreint ; que sa candidature a été retenue mais qu'elle n'a pas déposé d'offre ;

Considérant que la société Crystal, qui a assuré la continuité économique et fonctionnelle de la société Armand interchauffage, doit répondre des pratiques relevées à l'encontre de cette dernière ;

Considérant que la société Crystal a réalisé en France en 1996, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires de 714 754 048 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels tels qu'appréciés ci-dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 700 000 F pour les pratiques mises en œuvre par la société Armand interchauffage ;

En ce qui concerne la société Laurent Bouillet entreprise :

Considérant que la société Laurent Bouillet entreprise s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles en se concertant avec la société Somesys avant le dépôt des candidatures et avant la remise des offres de l'appel d'offres restreint ;

Considérant que cette société a réalisé en France en 1996, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires de 382 041 975 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels tels qu'appréciés ci-dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 1 000 000 F ;

En ce qui concerne la société Établissements Rineau frères :

Considérant que la société Établissements Rineau frères s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles en se concertant avec la société Somesys et en acceptant de ne pas présenter d'offres contre un dédommagement de l'ordre de 300 000 F ; que cette société a changé de dénomination le 27 juin 1997 pour prendre le nom de SA Rineau ;

Considérant que la SA Rineau a réalisé en France en 1997, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires de 839 599 974 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels tels qu'appréciés ci-dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 1 500 000 F,

Décide :

Article 1er .- Il est établi que les sociétés Somesys, Sinerg, Albouy, Spie Trindel, Bencivenga et fils, Armand interchauffage, Bergeon et Cie, Frangeclim, Laurent Bouillet entreprise, Etablissements Rineau frères ont enfreint les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986.

Article 2.- Sont infligées les sanctions pécuniaires suivantes :

2 500 000 F à la société Somesys,

200 000 F à la société Sinerg,

200 000 F à la société Tunzini SNC pour les pratiques mises en œuvre par la société Albouy,

500 000 F à la société Spie Trindel,

700 000 F à la société Crystal pour les pratiques mises en œuvre par la société Armand interchauffage,

1 000 000 F à la société Laurent Bouillet entreprise,

1 500 000 F à la société Etablissements Rineau frères.