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Décisions

Conseil Conc., 17 novembre 1998, n° 98-D-72

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Décision

Pratiques mises en œuvre lors de la passation de six marchés par le Port autonome du Havre

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Vice-président : M. Cortesse ; Membres : MM. Bon, Callu, Marleix, Rocca, Sloan, Thiolon; rapporteur: Mme Picard.

Conseil Conc. n° 98-D-72

17 novembre 1998

Le Conseil de la concurrence (Section I),

Vu la lettre enregistrée le 26 juillet 1996 sous le numéro F 893 par laquelle le ministre délégué aux Finances et au Commerce extérieur a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre lors de la passation de six marchés par le Port autonome du Havre ; Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986, modifiée relative à la liberté des prix et de la concurrence et le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 modifié, pris pour son application (...) ;

I. CONSTATATIONS

La loi n° 65-4498 du 29 juin 1965 a institué un régime particulier pour les six plus grand ports français, dont le Havre, et a prévu que chacun d'eux serait géré par un organisme dénommé Port autonome, qui est un établissement public administratif. Les marchés passés par le Port Autonome du Havre sont ainsi soumis aux règles du Code des marchés de l'Etat.

Les pratiques relevées par la saisine concernent, dans le domaine de la chaudronnerie et mécanique générale, six des dix-sept marchés du Port autonome du Havre passés au cours des années 1992 et 1993 par le service de dragage.

Les cinq marchés ayant fait l'objet de griefs ont été passés dans les conditions suivantes : [...]

Trois sociétés, concernées par les marchés susvisés, font partie du groupe Société Duchesne et Bossière et Augustin Normand (SDBAN). Il s'agit :

- de la société anonyme Etablissements Fouré Lagadec et Cie : entreprise de chaudronnerie mécanique ; la holding SDBAN en est actionnaire à hauteur de 86,5 %. Cette société n'a emporté aucun appel d'offres 93028 et 94005.

- de la Société nouvelle des ateliers et chantiers du havre (SNACH) ; La holding est actionnaire du groupe ACH (Ateliers et Chantiers du Havre) à hauteur de 36,56 % et le groupe ACH est actionnaire de la société SNACH à hauteur de 99,90%. Cette société n'a emporté aucun appel d'offres.

- de la Société industrielle de réparation et d'entretien naval (SIREN) ; Cette société est détenue par la Société de participations, industrielles et navales (SPIN), dont le capital est détenu à 59,6 % par la SNACH, elle-même contrôlée par le groupe ACH. Cette société n'a emporté aucun appel d'offres.

Pour les marchés de chaudronnerie et de mécanique générale passés par le service de dragage du Port autonome du Havre, l'enquête administrative a mis en évidence une concertation entre les trois entreprises précitées du groupe SDBAN.

Ainsi, le 21 novembre 1995, M. Gille Fournier, président du conseil d'administration de la SA Fourré Lagadec, a déclaré par procès-verbal : " Fouré Lagadec, Siren et Snach appartiennent au même groupe, lorsque nous répondons à un appel d'offres, il existe une coordination commerciale à l'intérieur du groupe, et des sous-traitances internes pour la réalisation. Ces éléments sont de notoriété publique au Havre et au Port autonome en particulier. " M. Gilles Bridet, chef du département maintenance de la société Fouré Langadec , a déclaré le 30 mai 1995 par procès-verbal : " (...) Comme vous l'a affirmé M. Fournier, nous nous coordonnons avec les autres sociétés du groupe Sdban (Siren, ACH) lorsque nous sommes en concurrence à l'occasion des consultations lancées par la PAH pour ces marchés. Pour ce faire, j'ai des échanges avec M. Christian Tessandier (Siren) et M. Simon (ACH). Pour ces marchés, il a été choisi conjointement que Fouré Lagadec serait la société du groupe moins-disante, comme auparavant, afin de conserver l'expérience acquise. Les autres sociétés du groupe soit répondent à un prix supérieur, soit déclinent l'offre. Lors de la réalisation des marchés, nous sous-traitons une partie des travaux à réaliser à une des sociétés du groupe, en fonction des disponibilités et des compétences de chacune " ; M. Christian Tessandier, président du conseil d'administration de la SA Siren, a déclaré par procès-verbal du 8 décembre 1995 : " Nous continuons à répondre afin de nous tenir informés du contenu des contrats et pour pouvoir ensuite prétendre obtenir des travaux de sous-traitance dans l'hypothèse où d'autres sociétés du groupe obtiennent les marchés (...). Il n'y a pas de concertation analytique sur les prix. Néanmoins, chaque société établissant ses prix en réactualisant les prix précédents, l'ordre initial n'a pas été modifié ". M. Alain Tessandier, gérant de la société Snach, a déclaré par procès-verbal du 30 mai 1995 : " Pour établir nos offres de prix au Port autonome du Havre nous réactualisons les devis antérieurs. Par ailleurs, nous nous tenons au courant des réponses formulées par les autres sociétés du groupe. Il en résulte que la société du groupe déjà titulaire est reconduite pour les marchés suivants, compte tenu de son expérience des travaux qu'elle a déjà effectués dans le passé. Si nous n'étions pas titulaire, nous répondons, la plupart du temps, avec un devis chiffré. En fonction des besoins, des compétences et de la disponibilité, la société du groupe Ach titulaire du marché peut faire appel dans certains cas à la sous-traitance interne au groupe ".

Le maître d'ouvrage, s'il connaissait les liens entre ces sociétés, ignorait que leurs offres aient pu être concertées. Ainsi, M. Georges Alexandre, qui a été l'adjoint du chef du service de dragage du Port autonome du Havre de 1969 à 1976 et chef de service de 1976 à 1994, a déclaré, selon le procès-verbal du 30 janvier 1996 : " Concernant les marchés de mécanique générale et de chaudronnerie, le port du Havre connaissait les liens organiques des sociétés du groupe Ach (Fouré Lagadec, Snach, Siren) qui soumissionnaient séparément, mais je pensais qu'il n'y avait pas accord de sous-traitance entre ces sociétés dans le cadre de nos marchés. " M. Sanson, responsable du service de dragage depuis le 1er août 1994, interrogé le 9 janvier 1996, a déclaré par procès-verbal : " Concernant des accords de sous-traitance entre les sociétés du groupe Ach soumissionnant aux différents marchés, nous n'avons pas eu d'informations officielles ".

II. - SUR LA BASE DES CONSTATATIONS QUI PRECEDENT, LE CONSEIL,

Sur la prescription :

Considérant que les sociétés en cause font valoir que l'instruction a porté sur l'ensemble des marchés passés par le Port autonome du Havre en matière de chaudronnerie et mécanique, sans qu'il soit " justifié de l'absence de prescription de certains des faits qui remontaient à plus de six ans " ;

Mais considérant que le premier acte d'instruction régulièrement établi est un procès-verbal d'audition en date du 5 octobre 1995 de M. Moisy, chef du service intérieur et des marchés du Port autonome du Havre ; que, par suite, le Conseil peut examiner des pratiques remontant au 5 octobre 1992 ; que, pour le marché n° 92057, la date limite de dépôt des plis était fixé au 7 avril 1992, que ce n'est pas une entreprise du groupe Sdban qui a été déclarée attributaire et qu'il n'y a pas eu de prestations de sous-traitance par une entreprise de ce groupe lors de l'exécution de ce marché ; qu'ainsi la pratique d'entente relevée sur ce marché a été limitée à la période antérieure à sa passation et ne s'est pas poursuivie lors de son exécution ; que, dès lors, au 5 octobre 1992, les faits concernant la passation de ce marché, étaient prescrits ; qu'en revanche, pour les autres appels d'offres, dont la date de réception des plis était fixée au 25 novembre 1992 (n° 93024 et 93028) ou au 15 décembre 1993 (n° 94005 et 94010) ; le Conseil peut valablement examiner les pratiques relevées par l'instruction ;

Sur les pratiques constatées :

Considérant que le Port autonome du Havre a lancé entre 1992 et 1993 les marchés précités de chaudronnerie et de mécanique générale, selon la procédure de l'appel d'offres restreint ; qu'il ressort de l'instruction que, pour trois de ces marchés (93024, 93028 et 94005), les sociétés Fouré Lagadec, Snach et Siren, appartenant au groupe Sdban, ont présenté chacune une offre ; que, pour le marché n° 94010, les sociétés Fouré Lagadec et Siren ont seules répondu, la société Snach, sollicitée, s'étant abstenue de répondre ; que la société Fouré Lagadec a emporté deux de ces marchés (93028 et 94005), dont elle était déjà titulaire tandis que les deux autres sociétés n'en emportaient aucun ;

Considérant qu'il ressort de l'analyse des offres que, pour les deux marchés emportés par la société Fouré Lagadec, moins-disante, l'écart entre l'offre de cette société et celles des sociétés Snach et Siren est de plus de 20 % pour le marché n° 93028, de plus de 10 % pour le marché n° 94005, et que pour les autres marchés, si la société Fouré Lagadec est présente, son offre est toujours la plus faible que celles des deux autres entreprises du groupe avec des écarts d'environ 10 % ;

Considérant que les dirigeants des trois entreprises en cause ont reconnu qu'il existait " une coordination commerciale à l'intérieur du groupe et des sous-traitances internes pour la réalisation " des marchés ; que, s'agissant précisément des marchés de chaudronnerie et mécanique en cause, M. Birdet, chef du département maintenance de la société Fouré Lagadec, a indiqué que : " Nous nous coordonnons avec les autres sociétés du groupe Sdban (Siren, Ach) lorsque nous sommes en concurrence à l'occasion des consultations lancées par le Port autonome du Havre pour ces marchés " et que : " (...) Pour ces marchés, il a été choisi conjointement que Fouré Lagadec serait la société du groupe moins-disante, comme auparavant, afin de conserver l'expérience acquise. Les autres sociétés du groupe soit répondent à un prix supérieur, soit déclinent l'offre " ; Qu'il résulte de ces déclarations que les trois entreprises Fouré Lagadec, Siren et Snach se sont concertées pour déterminer l'entreprise du groupe, en l'occurrence la société Fouré Lagadec, qui serait la moins-disante, les deux autres déposant des offres de principe ou prenant des décisions d'abstention avec, en corollaire, des accords de sous-traitance internes au groupe et ignorés du maître d'ouvrage ;

Considérant que, pour échapper à l'application de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, les entreprises concernées soutiennent, en premier lieu, qu'aucune preuve n'a été apportée de l'existence d'une concertation anticoncurrentielle entre elles, que leur appartenance à un groupe était connue du maître d'ouvrage et que la sous-traitance conclue après passation des marchés n'était pas occulte ;

Mais, considérant que les déclarations des dirigeants des trois entreprises en cause suffisent en elles-mêmes à établir la preuve de l'entente et sont en outre corroborées par l'analyse des offres, révélant des écarts de prix très importants, plaçant la société Fouré Lagadec en situation d'être toujours la moins-disante ; que le fait que l'appartenance de ces entreprises à un même groupe soit connue du maître d'ouvrage est sans incidence dans la mesure où ces entreprises, qui disposent d'une autonomie commerciale, se sont présentées comme des entreprises concurrentes, alors même qu'elles avaient organisé une concertation avant la remise des plis pour déterminer celle d'entre elles qui serait la moins-disante; qu'enfin il résulte des propres déclarations des responsables de ces entreprises que des accords de sous-traitance permettaient de répartir les travaux entre elles, alors même que le maître d'ouvrage ignorait leur existence, comme l'ont indiqué les responsables du service de dragage cités ci-dessus;

Considérant que les entreprises concernées relèvent, en second lieu, que la société Fouré Lagadec n'a présenté l'offre la plus basse que dans deux appels d'offres pour en déduire l'absence, de " concertation qui aurait limité la concurrence entre les soumissionnaires " ;

Mais considérant qu'il ressort des déclarations des dirigeants ou responsables des sociétés en cause, reproduites au I de la présente décision, que la concertation visait les marchés de chaudronnerie et mécanique sans autre précision ; qu'en outre si la SA Fouré Lagadec n'a présenté l'offre, la moins-disante, parmi toutes les offres que dans deux marchés (93028 et 94005), il est établi que, pour tous les marchés considérés, y compris les marchés n° 93024 et 94010, elle a présenté systématiquement une offre moins élevée et avec des écarts importants que celle de l'autre ou des deux autres entreprises concernées du groupe ; que, dès lors, il est établi que la concertation a porté également sur ces deux derniers marchés, alors même qu'ils n'ont pas été attribués à la SA Fouré Lagadec ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la concertation mise en œuvre entre les trois entreprises du groupe Sdban à l'occasion des appels d'offres des marchés n° 93024, 93028,94005 et 94010 passés par le service des dragages du Port autonome du Havre a eu pour objet et pu avoir pour effet de fausser le jeu de la concurrence sur ces marchés ; que de telles pratiques sont prohibées par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986;

Sur la notification d'un grief supplémentaire demandée par le commissaire du Gouvernement :

Considérant que le commissaire du Gouvernement soutient que les pratiques constatées concernent aussi le marché n° 94004, également passé par le service de dragage du port autonome du Havre dans le domaine de la chaudronnerie mécanique, même si la société Fouré Lagadec n'avait pas présenté d'ordre parce que la concertation reconnue n'était pas conditionnée par la présence de cette dernière société ;

Mais, considérant que les entreprises nient toute concertation sur le marché susvisé en faisant valoir qu'il n'existe aucune déclaration précise de reconnaissance de concertation sur ce marché, auquel la société Fouré Lagadec n'a pas participé et qui a été remporté par une entreprise n'appartenant pas au groupe ;

Considérant que les déclarations des dirigeants ou responsables des sociétés en cause, reproduites au I de la présente décision, sont insuffisantes à elles seules à établir que l'entente aurait également porté sur le marché n° 94004 ; que, dès lors, il n'y a pas lieu à notification d'un grief supplémentaire ;

Sur l'effet sensible :

Considérant que les entreprises contestent l'existence d'un effet sensible en relevant qu'un seul des quatre marchés, le n° 93028, a été exécuté, et en faisant référence à la faiblesse du chiffre d'affaires réalisé avec le Port autonome du Havre ;

Mais, considérant que, sans qu'il soit besoin de rechercher si les marchés considérés ont fait l'objet d'une exécution effective, il est établi par les déclarations des responsables ci-dessus reproduites que les pratiques incriminées avaient un objet anticoncurrentiel ; que, en outre, l'effet potentiel sensible de celles-ci résulte du caractère systématique de la concertation et des modalités de sa mise en œuvre, les dirigeants des entreprises en cause ayant reconnu avoir établi leurs offres en appliquant des coefficients de majoration aux prix proposés dans des offres antérieures de telle sorte que " l'ordre initial n'a pas été modifié " ; que, enfin, la circonstance que les entreprises concernées n'auraient réalisé qu'un chiffre d'affaires réduit avec le Port autonome du Havre est sans incidence sur le caractère sensible de l'effet des pratiques dont il s'agit ;

Sur l'imputabilité :

Considérant que les entreprises concernées par les pratiques constatées sont la société Siren, la société Ach construction navale à la suite du changement de dénomination de la société Snach, et la SA Etablissements Fouré Lagadec et Cie ; que, toutefois, cette dernière a fait enregistrer au registre du commerce, le 1er février 1995, une modification portant " cessation complète d'activité avec maintien de l'immatriculation au RCS à compter du 1er février 1995 suite à l'apport partiel d'actif effectué au profit de la SARL Fouré Lagadec, à la suite d'une modification du 2 février 1995 : " Mise en activité de la société (Chaudronnerie mécanique tuyauterie électricité) suite à l'apport partiel d'actifs des éléments du fonds de commerce sis 2, rue de la Vallée, 76600 Le Havre, par les Etablissements Fourré Lagadec et Cie pour un montant de 10 950 000 F " ;

Considérant qu'alors que le grief de concertation a été notifié, afin de préserver le principe du contradictoire, à la SA et à la SARL Fouré Lagadec, ces entreprises estiment que les pratiques incriminées doivent être imputées non à la SARL Fouré Lagadec mais à la SA Fouré Lagadec qui a maintenu son immatriculation au registre du commerce et a conservé une activité ;

Considérant qu'en vertu d'une jurisprudence constante dégagée notamment par le tribunal de première instance des communautés européennes dans son arrêt Enichem, Anic Spa, si une entreprise cède tout ou partie de son activité, mais subsiste en tant qu'entreprise, elle doit répondre des pratiques anticoncurrentielles auxquelles elle a participé antérieurement à la cession ; que c'est seulement si l'auteur des pratiques disparaît en tant que personne juridique que l'entreprise, qui a acquis les moyens matériels et humains ayant servi à la commission des faits, sera considérée comme responsable de la pratique incriminée ;

Considérant que la SA Etablissements Fouré Lagadec et Cie, qui figure au registre du commerce en 1995, 1996 et 1997, a fait l'objet le 2 juillet 1998, d'une mention dans le registre portant " remise en activité de la société-activité chaudronnerie mécanique, tous travaux métallurgiques pour la marine et l'industrie " ; que, dès lors, si postérieurement à la commission des pratiques constatées, la SA Fouré Lagadec a cédé une partie de son actif, en l'occurrence son fonds de commerce, à la SARL Fouré Lagadec, elle n'a jamais cessé d'exister et a été maintenue en activité avec reprise de son activité de chaudronnerie mécanique en juillet 1998 ; qu'en conséquence les pratiques relevées doivent être imputées à la SA Fouré Lagadec et que le grief notifié à la SARL Fouré Lagadec doit être abandonné ;

Sur les sanctions :

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 : " Le Conseil de la concurrence peut ordonner aux intéressés de mettre fin aux pratiques anticoncurrentielles dans un délai déterminé ou imposer des conditions particulières. Il peut infliger une sanction pécuniaire applicable soit immédiatement, soit en cas d'inexécution des injonctions. Les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie et à la situation de l'entreprise ou de l'organisme sanctionné. Elles sont déterminées individuellement pour chaque sanction. Le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 5 % du montant du chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France au cours du dernier exercice clos " ;

Considérant que la gravité des faits reprochés résulte du caractère systématique de la concertation organisée par les trois entreprises Fouré Lagadec, Snach et Siren sur les marchés de chaudronnerie mécanique passés par le Port autonome du Havre, ainsi que leurs dirigeants l'ont reconnu, même si le maître d'ouvrage, n'ignorait pas que ces entreprises appartenaient au groupe Sdban ;

Considérant que, pour apprécier le dommage causé à l'économie par les pratiques constatées, il y a lieu de tenir compte du montant total des marchés estimé à 4 600 000 F ;

Considérant que la SA Etablissements Fouré Lagadec a réalisé en France au cours de l'exercice 1997, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaire de 8 200 000 F avec un résultat négatif de 18 655 000 F ; qu'elle a remporté deux des quatre marchés considérés, le n° 93028, dont le montant estimé était de 800 000 F et le n° 94005, dont le montant estimé était de 2 000 000 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels tels qu'ils sont appréciés ci-dessus il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 100 000 F ;

Considérant que la société ACH construction navale, anciennement dénommée Snach, a réalisé au cours de l'exercice 1997, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires de 50 377 745 F avec une perte de 68 732 140 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels tels qu'ils sont appréciés ci-dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 20 000 F ;

Considérant que la société Siren a réalisé au cours de l'exercice 1997, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires de 37 514 147 F avec une perte de 12 054 821 ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels tels qu'ils sont appréciés ci-dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 20 000 F,

Décide :

Art. 1er. - Il est établi que la SA Etablissements Fouré Lagadec et Cie, la société Siren et la société ACH construction navale ont enfreint les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986.

Art. 2. - Sont infligées les sanctions pécuniaires suivantes :

100 000 F à la SA Etablissements Fouré Lagadec et Cie ;

20 000 F à la société Siren ;

20 000 F à la société Ach construction navale.