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Décisions

Conseil Conc., 25 février 1997, n° 97-D-11

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Décision

Pratiques relevées lors de la passation de marchés d'aménagement des berges de la Seine

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré, sur le rapport de M. Bernard Lavergne, par M. Cortesse, vice-président, présidant, M. Callu, Mme Hagelsteen, MM. Marleix, Rocca, Sloan, Thiolon, membres.

Conseil Conc. n° 97-D-11

25 février 1997

Le Conseil de la concurrence (section I),

Vu la lettre enregistrée le 26 avril 1994 sous le numéro F 677, par laquelle le ministre de l'économie a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques relevées lors de la passation de marchés d'aménagement des berges de la Seine ; Vu l'ordonnance n° 86­1243 du 1erdécembre 1986 modifiée, relative à la liberté des prix et de la concurrence et le décret n° 86­1309 du 29 décembre 1986 modifié, pris pour son application ; Vu les observations présentées par les sociétés Fougerolle­Ballot, Entreprises Morillon Corvol Courbot, Entreprise de travaux publics de l'Ouest, Gascheau, Société générale des entreprises Quillery et compagnie, Société nouvelle Voltaire, Cogere et par le commissaire du Gouvernement ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement et les représentants des sociétés Bouygues Offshore, Fougerolle­Ballot, Entreprises Morillon Corvol Courbot, Entreprise de travaux publics de l'Ouest, Gascheau, Hayet, Le Foll, Société générale des entreprises Quillery et compagnie, Société nouvelle Duflot et Cogere entendus, les sociétés Hayet, Société nouvelle Voltaire et Société nouvelle Leduc ayant été régulièrement convoquées ; Adopte la décision fondée sur les constatations (I) et sur les motifs (II) ci­après exposés.

I­ CONSTATATIONS

A­ Les caractéristiques du secteur

Le département de la Seine­Maritime a décidé, en raison de l'utilité publique de la Seine, de se substituer aux riverains pour l'entretien des berges du fleuve et la réparation des dégradations des berges occasionnées par le trafic maritime et fluvial. Cette remise en état s'inscrit dans des programmes triennaux. La protection des berges s'effectue en utilisant principalement deux procédés techniques : le vannage métallique et la pose de perrés et gabions, procédés qui peuvent être utilisés simultanément. Le vannage métallique consiste à enfoncer dans le sous­sol des palplanches métalliques, dont la partie supérieure constitue le corps de protection de la berge. La réalisation de ces travaux, qui s'effectue par voie terrestre, ne nécessite pas d'utilisation de matériels spécifiques. La pose de perrés et gabions consiste à disposer des moellons naturels sur la partie supérieure de la berge (perré). Ils sont fixés entre eux par du mastic bitumineux. Ce revêtement de moellons repose sur des gabions métalliques, paniers contenant des pierres, disposés en pied de berge. Ces travaux sont réalisés essentiellement à la main par des équipes spécialisées.

Alors qu'en général les travaux pour la protection extérieure de berges existantes ne nécessitent pas d'apport prépondérant de matériaux crayeux, il en va différemment de la construction de digues pour les travaux en estuaire, en raison des courants de marée importants. Ce matériau est un produit de carrière qui se trouve en abondance en Seine­Maritime. Le port autonome de Rouen le privilégie pour certains ouvrages sur les berges de la Seine en raison de sa bonne tenue à l'eau et de sa granulométrie.

B­ Les pratiques relevées

A partir de 1991, les enquêteurs de la direction régionale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de la Haute­Normandie ont recueilli, sur le fondement de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, des éléments relatifs à dix marchés publics auprès d'entreprises appartenant au secteur de l'aménagement de berges.

1. Les marchés de travaux de berges

a) Le document saisi portant la cote 158

Un cahier tenu par M. Cayet, directeur général de la société EMCC, a été saisi au siège de cette entreprise. A la date du 25 avril 1988, l'intéressé a noté (cote 158) le compte rendu d'une réunion commerciale qui s'est tenue à Villeneuve­le­Roi. Parmi les travaux évoqués figure :

"­ (...) poste 27 ­ Rouen (2 M) Quillery EMCC

poste amont 2,5 BOS ETPO

quai CRD ETPO EMCC 5 M

- Ambourville lot 7 BOS ­ 1 M ­ lot 8 1 M

- Sahurs lot 4 EMCC 0,5 (...)

BOS

­ (...)

<EMPLACEMENT TABLEAU>

- Rouen poste amont (2,5) et poste 27 (2) (...)".

Le directeur général de la société EMCC a déclaré le 27 octobre 1992 : "Concernant la cote 158, j'ai listé les affaires obtenues par BOS et EMCC (départements Nord et Sud) à la date du 25/4/1988 pour des montants totaux respectifs de 22,5 millions de francs et 30,3 millions de francs. Au­dessus, il s'agit d'affaires à venir auxquelles nous allons nous intéresser. Les mentions Ambourville lot 7 et lot 8 ainsi que Sahurs lot 4 correspondent aux marchés de berges obtenus le 25 avril 1988". M. Philippe Chalandon, directeur commercial de la société Bouygues Offshore, a déclaré le 19 novembre 1992 : "Concernant la cote 158, je constate que M. Cayet a porté sur ce document des affaires sur lesquelles, pour certaines, BOS a obtenu les travaux. Je ne me souviens plus si ces affaires ont été évoquées à l'occasion d'une rencontre avec M. Cayet".

b) Le lot n° 7 du marché d'Anneville­Ambourville de 1988

Le marché :

Le département de la Seine­Maritime a lancé un appel d'offres restreint pour la réalisation de 300 mètres de vannages métalliques entre les points kilométriques PK 280,245 et PK 280,545. Treize entreprises ont présenté une offre. La date limite de remise des plis a été fixée au 25 avril 1988. La commission d'ouverture des plis s'est réunie le 9 mai 1988. Elle a déclaré attributaire de ce lot le moins­disant : le groupement d'entreprises Marcombe Courtet et Bouygues Offshore (Somaco/Bos), pour un montant de 1 350 870 F HT, comprenant un montant de vannage de 865 250 F, à effectuer par l'entreprise Bouygues Offshore, les travaux d'enrochement étant dévolus à la société Somaco, mandataire du groupement et propriétaire de carrières.

Les éléments recueillis et les déclarations :

La comparaison des offres remises par les treize entreprises fait apparaître une proportionnalité constante (de 1,02) entre les prix unitaires de l'offre du groupement Somaco/Bos et ceux de l'entreprise Hayet, alors qu'il existe une forte dispersion des offres des onze autres candidats, qui s'échelonnent de 1 453 125 F à 2 107 405 F.

EMPLACEMENT TABLEAU

Les sociétés Hayet, Bouygues Offshore et Somaco n'ont pu expliquer les raisons de cette proportionnalité, alors que les structures de coûts des entreprises Somaco et Hayet sont très différentes. Cette proportionnalité n'a pas été constatée dans d'autres marchés du même type, notamment le lot n° 8 du marché d'Ambourville et lot n° 4 du marché de Sahurs de 1988.

EMPLACEMENT TABLEAU

c) Le lot n° 8 du marché d'Ambourville de 1988

Le marché

Le département de la Seine­Maritime a lancé un appel d'offres restreint pour la construction d'un perré avec vannage en amont du point kilométrique PK 283. Sept entreprises ont présenté une offre. La date limite de remise des plis a été fixée au 2 mai 1988. La commission d'ouverture des plis s'est réunie le 9 mai 1988. Elle a déclaré attributaire de ce lot le moins­disant, le groupement d'entreprises Somaco/Bos pour un montant de 2 861 560 F HT, qui comprend un montant de vannage de 1 102 850 F, à effectuer par Bouygues Offshore.

Les éléments recueillis

Le cahier saisi au siège de l'entreprise EMCC (cote 158), qui dresse la liste les affaires qui seront attribuées aux sociétés Bouygues Offshore et EMCC, selon le directeur général de cette société, contient des informations au sujet de ce marché (cf. I­B­1­a ci­dessus). Ce document mentionne, pour ce marché : "­ Ambourville (...) lot 8 1 M" et dans le récapitulatif de bas de page : "BOS (...) Ambourville 8 1,0 / 22,5".

d) Le lot n° 4 du marché de Sahurs de 1988

Le marché

Le département de la Seine Maritime a lancé un appel d'offres restreint pour le vannage, le rempiétement et la surélévation des berges entre les points kilométriques PK 257,375 et PK 257,550. Onze entreprises ont présenté une offre. La date limite de remise des plis a été fixée au 28 avril 1988. La commission d'ouverture des plis s'est réunie le 9 mai 1988. Elle a déclaré attributaire de ce lot le candidat le moins­disant, la société Hayet pour un montant de 910 750 F HT (dont un montant de vannage métallique de 551 250 F). Dans son offre, l'entreprise Hayet a fait part de son intention de sous­traiter la partie vannage métallique de ce lot à la société EMCC, qui avait, par ailleurs, déposé elle­même une offre.

Les éléments recueillis et les déclarations

La comparaison des offres des entreprises EMCC et Société Nouvelle Voltaire (SNV) fait apparaître une identité de sept des huit composantes de ces deux offres.

EMPLACEMENT TABLEAU

Les documents saisis lors de l'enquête, au siège de la Société Nouvelle Voltaire, contiennent les mentions suivantes dont la signification est précisée : cote 128 : "terr ROUEN" (division territoriale du Port autonome de Rouen, maître d'œuvre du chantier), " 28/4 " (date limite de remise des offres), "lot 4" (numéro du lot concerné), "SAHURS (R1)" (lieu de réalisation des travaux) ; cote 129 : "Rappel Tréguier 35 36 08 03" (responsable local de l'entreprise EMCC) "le 18/4 " (10 jours avant la remise des plis) ; cote 131 : "Tréguier .... lot 4 .... SNV (pas de réponse ... Vannage 500 ... s/traitant EMCC à ces prix)". À la suite de ces annotations, est transcrite une liste de numéros et de nombres correspondant à l'offre déposée par l'entreprise SNV ; le document coté 132 constitue une copie du détail quantitatif estimatif du lot n° 4 ; les prix correspondent à l'offre de l'entreprise Leduc.

Le responsable de la société Leduc a déclaré le 11 octobre 1991 : "Toute la partie hors palplanches devait être sous­traitée à la Société Nouvelle Voltaire". Néanmoins, pour ces prestations, les prix remis par l'entreprise Leduc sont inférieurs à ceux contenus dans l'offre de la société SNV. Le responsable de la Société Nouvelle Voltaire a déclaré le 13 novembre 1991 : "J'ai contacté l'entreprise Leduc qui est spécialiste de palplanches pour avoir des prix de vannage ou pour être sous­traitant. Vous me présentez le document coté 131, il retrace un échange d'informations avec M. Tréguier d'EMCC en vue d'une recherche de sous­traitants".

Par ailleurs, le cahier saisi au siège de l'entreprise EMCC, daté du 25 avril 1988 (cote 158), contient les informations suivantes (cf. I­B­1­a ci­dessus) : "­ Sahurs lot 4 EMCC 0,5 (...)" et dans le récapitulatif de bas de page : "BOS (...) ­ Sahurs 4 0,5/30,3 (...)".

e) Les marchés du port autonome de Rouen

Le port autonome de Rouen a lancé trois consultations pour la réalisation de travaux, sous forme d'appels d'offres restreints.

Les marchés

L'aménagement du poste 27 à Val­de­la­Haye

La réunion de sélection des candidatures, afin d'aménager le poste 27, s'est tenue le 30 mars 1988. La date limite de remise des offres a été fixée au 26 avril 1988. La commission d'ouverture des plis s'est réunie le 27 avril 1988 et a retenu l'offre la moins­disante, celle de l'entreprise Quillery, pour un montant de 1 888 523 F HT. Le marché a été notifié à l'intéressée postérieurement au 11 mai 1988.

EMPLACEMENT TABLEAU

Le poste de dégagement amont

La réunion de sélection des candidatures à l'aménagement du poste de dégagement amont s'est tenue le 27 avril 1988. La date limite de remise des offres a été fixée au 24 mai 1988. La commission d'ouverture des plis s'est réunie le 25 mai 1988 et a retenu l'offre la moins­disante, celle de l'entreprise Bouygues Offshore, pour un montant de 2 308 900 F HT. Le marché a été notifié à l'intéressée postérieurement au 30 mai 1988.

EMPLACEMENT TABLEAU

Le rempiétement du quai CRD

La date limite de remise des offres a été fixée au 7 avril 1988. La commission d'ouverture des plis s'est réunie le 8 avril 1988 et a retenu, après avoir écarté les solutions "variantes", l'offre la moins­disante, celle de l'entreprise ETPO, avec sa solution de "base aménagée", pour un montant de 5 788 571 F HT. Le marché a été notifié à l'intéressée postérieurement au 27 avril 1988.

EMPLACEMENT TABLEAU

Les éléments recueillis et les déclarations :

Le document coté 158, daté du 25 avril 1988, qui représente les "affaires obtenues par BOS et EMCC", comporte les mentions suivantes (cf. I­B­1­a ci­dessus) : "poste 27 ­ Rouen (2 M) Quillery EMCC, poste amont 2,5 BOS ETPO, quai CRD ETPO EMCC 5 M (...)" et après le récapitulatif de bas de page : "­ Rouen poste amont (2,5) et poste 27 (2) (...)". Par ailleurs, M. Bérard, chef du service du domaine et des aménagements du Port autonome de Rouen, membre de la commission d'ouverture des plis, a déclaré le 14 décembre 1992 que "les résultats demeurent confidentiels jusqu'à la désignation du titulaire du marché malgré toutes les demandes des entreprises". La demande d'autorisation de sous­traitance adressée par la société Hayet au maître d'ouvrage, au profit d'EMCC, est datée du 24 juin 1988.

f) Le lot n° 1 du marché de Rouen­Ile­Lacroix de 1990

Le marché :

Le département de Seine­Maritime a lancé un appel d'offres restreint pour le programme 1990 comportant 11 lots. La date limite de remise des candidatures a été fixée au 23 mars 1990, celle pour la remise des plis étant prévue pour le 21 mai 1990. Neuf entreprises ont présenté leur candidature pour le lot n° 1 du marché de Rouen­Ile­Lacroix, qui a été attribué le 22 mai 1990 à la Société nouvelle Voltaire pour un montant de 1 938 950 F HT (2 299 594 F TTC). L'entreprise Bouygues Offshore s'est désistée parce que les travaux ne comprenaient pas de palplanches, ainsi que l'entreprise Tinel car elle ne disposait pas de crayeux.

Les éléments recueillis et les déclarations :

Les résultats de cette consultation révèlent une égalité au franc près des offres de soumission des entreprises EMCC, Le Foll et Ballot.

EMPLACEMENT TABLEAU

Le directeur d'agence de la société Ballot a déclaré le 17 octobre 1991 : "Je suppose que pour répondre "pour la forme", nous avons cherché des prix auprès d'autres entreprises. Je ne puis préciser laquelle". Le directeur général de la société EMCC a déclaré le 27 octobre 1992 : "Sur cette affaire, nous avons repris à l'identique les prix qui nous avaient été donnés par Hayet".

g) Le marché d'Anneville de 1992

Le marché :

Le département de la Seine­Maritime a lancé un appel d'offres restreint pour l'exécution des travaux de remise en état des berges de la Seine sur la commune d'Anneville entre les PK 283,600 et 283,975. Dix entreprises ont présenté leur candidature. Les sociétés Sodranord, Sade, Tinel, Viafrance et Gagneraud se sont excusées. Les entreprises EMCC, Bouygues Offshore, Chantiers modernes, Semip, Leduc, Sogea, Jean Lefebvre et Le Foll qui ont retiré un dossier, n'ont finalement pas répondu à cette consultation. La commission d'appel d'offres qui s'est réunie le 25 mai 1992 a déclaré attributaire de ce marché la société Gascheau, sous réserve de vérifications matérielles, pour un montant de 3 066 500 F HT (soit 3 636 869 F TTC).

Les éléments recueillis et les déclarations

Les sociétés Gascheau et Société Nouvelle Duflot (SND) ont présenté des offres d'un montant identique, qui se sont révélées les moins­disantes. Cependant, l'examen des détails estimatifs remis par les entreprises montre que cette égalité ne se retrouve pas dans les prix unitaires, qui de surcroît sont très dispersés par rapport à la moyenne.

EMPLACEMENT TABLEAU

Le directeur régional de la société Gascheau a déclaré le 28 septembre 1993 : "Je découvre que le montant total de mon offre est égal à celui remis par l'entreprise Société Nouvelle Duflot. J'affirme ne pas connaître cette entreprise, que ce soit son activité et a fortiori ses dirigeants". Le directeur des travaux de la Société Nouvelle Duflot a déclaré le 7 décembre 1993 : "L'égalité du montant total de mon offre avec celle de la société Gascheau résulte d'une coïncidence".

2. Les marchés nécessitant la fourniture de crayeux

Le marché d'Anneville­Ambourville de 1990 et celui d'Oissel de 1991 ont nécessité la fourniture d'un volume important de crayeux, car ce sont des travaux en estuaire qui requièrent la mise en place de nombreux blocs en raison des courants de marée importants. Les cahiers des clauses techniques particulières (CCTP) liés à ces marchés ont imposé la mise en œuvre d'un produit contenant 50 % de blocs d'un poids compris entre 50 et 100 kg. Le poste "fourniture et mise en œuvre de crayeux" a représenté 83,8 % du total du marché d'Anneville­Ambourville de 1990 et 99,2 % de celui d'Oissel de 1991. Les CCTP ont exigé que ces marnes proviennent d'"une carrière ou un lieu d'emprunt régulièrement autorisés ou agréés par le maître d'œuvre". L'exploitation des carrières requiert l'agrément de la Direction Régionale de l'Industrie, de la Recherche et de l'Environnement (DRIRE), en application du titre 1er du décret n° 79­1108 du 20 décembre 1979.

Il existe une relative rareté des lieux d'extraction de crayeux utilisables pour les travaux de berges. La DRIRE a indiqué lors d'une demande de renouvellement d'autorisation d'exploiter une carrière, en citant l'avis du port autonome de Rouen : "(Pour) le prochain programme quinquennal (...) (de 1986 à 1990), les travaux seront principalement concentrés sur la rive gauche de la Seine (communes d'Anneville, Ambourville, Berville et Yville) (...). Actuellement sur la rive gauche, il n'y a que 2 carrières en exploitation ; celle de la commune de Bardouville exploitée par la SA Somaco et celle faisant l'objet de la demande présentée par l'entreprise Hayet. Pour que la concurrence puisse jouer dans les marchés de berges, il y a tout intérêt à ce qu'il y ait au minimum deux carrières régulièrement autorisées sur la rive gauche".

a) Les marchés

Le marché d'Anneville de 1990, lot n° 6 :

Le département de la Seine­Maritime a lancé une consultation, suivant la procédure d'appel d'offres restreint pour la construction d'une digue entre les PK 283,300 et 284,350 sur la commune d'Anneville­sur­Seine. Cette première tranche de travaux a consisté principalement en la mise en place d'un remblai crayeux constituant la partie centrale de la digue. Cinq entreprises ont soumissionné et deux se sont finalement désistées ; le groupement Hayet/Somaco a été déclaré attributaire du marché pour un montant de 3 543 000 F HT (soit 4 201 998 F TTC). Les deux entreprises constituant ce groupement se sont succédées sur le chantier. La société Somaco a fourni 48 445 tonnes de crayeux d'août à novembre 1990 et la société Hayet, 50 555 tonnes de novembre 1990 à mars 1991.

Le marché d'Oissel de 1991

Le département de la Seine­Maritime a lancé une consultation suivant la procédure de l'appel d'offres restreint pour la remise en état des berges de la Seine à Cléon et Oissel entre les PK 225,000 et 227,500, rive gauche. La commission d'ouverture des plis s'est réunie le 29 mai 1991. Elle a déclaré attributaire de ce marché le groupement solidaire d'entreprises Hayet/Somaco pour un montant de 998 000 F HT (soit 1 183 628 F TTC). Les deux entreprises constituant ce groupement se sont succédées sur le chantier. La société Somaco a fourni 22 000 tonnes de crayeux en septembre et octobre 1991, et la société Hayet 22 356 tonnes en novembre et décembre 1991.

b) Les éléments recueillis et les déclarations

Pour les deux marchés en cause (Anneville en 1990 et Oissel en 1991), les entreprises Hayet et Somaco, qui ont été admises séparément à soumissionner dans le cadre de la procédure d'appel d'offres restreint, se sont regroupées pour les consultations et, ayant été moins­disantes, ont été déclarées attributaires.

EMPLACEMENT TABLEAU

Selon les représentants de certaines des entreprises ayant participé aux consultations (sociétés Le Foll TP, Gascheau, Guintoli, Dubois et SMTL), les carrières exploitées par les sociétés Somaco et Hayet étaient les seules à pouvoir fournir de manière compétitive des matériaux crayeux nécessaires à la construction de digues sur cette partie de la Seine. En effet, la proximité des carrières était, selon les entreprises Somaco, Le Foll TP, Dubois et Guintoli un critère de choix décisif. Le président de la société Somaco a déclaré que : "La part du transport dans le prix de vente du matériau crayeux est ainsi de 64 % malgré la proximité entre la carrière et le lieu des travaux (12 km)".

Le président de la société Somaco a justifié le groupement des sociétés Hayet et Somaco en déclarant le 21 octobre 1992 : "Concernant le lot n° 6 de 1990, j'ai répondu en groupement avec Hayet pour trois raisons : ­ Le fait d'être groupés à deux entreprises permet de pouvoir faire face aux cadences imposées par le Port autonome compte tenu de la saison d'hiver pour l'exécution des travaux. ­ La répartition des extractions permet de prolonger la durée d'exploitation des carrières. ­ (...) Nous avons craint que l'entreprise Tinel utilise les remblais crayeux (d'un) chantier pour nous concurrencer sur le lot n° 6 de 1990 (...). En ce qui concerne le marché de Oissel pour 1991 dans lequel il y avait une part importante de remblai crayeux, j'ai répondu conjointement avec l'entreprise Hayet pour les mêmes raisons (...)". Le président de la société Hayet a déclaré le 14 novembre 1991 : "Je me suis groupé avec Somaco parce qu'il y avait des difficultés d'accès (...). Somaco a fait une voie d'accès par appontement et a construit une partie de la digue. La société Hayet a pris la suite de Somaco en empruntant cet accès. De la même manière sur le marché de construction de digue à Oissel/Orival (1991), nous sommes conjoints avec Somaco. En effet, les délais pour réaliser ce marché sont très courts".

Les capacités d'extraction de l'entreprise Somaco étaient de 800 tonnes par jour et celles de Hayet de 500 à 1 000 tonnes par jour. Le marché d'Anneville/Ambourville en 1990 nécessitait l'extraction d'environ 620 tonnes de crayeux par jour et celui d'Oissel en 1991 l'extraction d'environ 550 tonnes par jour. Le projet d'aménagement du chantier de l'entreprise Tinel, d'un cubage d'ailleurs insuffisant, n'avait pas reçu les autorisations administratives nécessaires. En 1987, la société Somaco dispose d'un stock de crayeux évalué à 1,4 millions de tonnes, sur trois sites, et la société Hayet d'un stock évalué à 1,2 millions de tonnes, sur un seul site.

II­ SUR LA BASE DES CONSTATATIONS QUI PRECEDENT, LE CONSEIL,

Sur la procédure :

En ce qui concerne les marchés concernés :

Considérant que la société Bouygues Offshore fait valoir que les trois marchés passés par le port autonome de Rouen (aménagement du poste 27 à Val de la Haye, poste de dégagement amont et rempiétement du quai CRD), ne constitueraient pas des marchés d'aménagement de berges de la Seine ayant pour maître d'ouvrage le département de Seine­Maritime, mais des marchés de travaux de "quais­accostages" ayant pour maître d'ouvrage le port autonome de Rouen, qu'en conséquence les "faits reprochés en l'espèce dépassent le domaine de compétence du rapporteur" ;

Mais considérant qu'il est constant que le ministre de l'économie a réuni dans un même dossier des pratiques constatées sur différents marchés de travaux publics, dont chacun d'eux suppose la mise en œuvre, pour partie au moins, de techniques, de matériels et de qualifications de même nature et qui ont été exécutés par les mêmes entreprises ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que les entreprises présentes sur les marchés d'aménagement de berges de la Seine ayant pour maître d'ouvrage le département de Seine­Maritime sont également soumissionnaires de travaux de "quais­accostages" qui mettent en œuvre les mêmes techniques dont le maître d'ouvrage est le port autonome de Rouen ; que, dès lors, le ministre de l'économie a pu valablement saisir le conseil des pratiques constatées à l'occasion de la passation de l'ensemble de ces marchés ; que le moyen doit donc être écarté ;

En ce qui concerne l'ancienneté des faits :

Considérant que la société EMCC fait valoir que les faits qui sont reprochés sont anciens, puisqu'ils remontent à l'année 1988, et que près de huit ans se sont écoulés entre ces faits et la notification de griefs ; que cette situation ne serait pas conforme aux exigences de la Convention européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales, et notamment des dispositions de son article 6 sur le délai raisonnable du procès ; que l'ancienneté de ces faits entraînerait des difficultés dans l'exercice des droits de la défense de EMCC, notamment en raison du départ de M. Cayet, directeur général de la société EMCC au moment des faits, et de la difficulté de retrouver les pièces relatives aux marchés concernés, d'autant plus que pour les marchés du port autonome de Rouen, l'unique élément opposé à EMCC serait une page de notes manuscrites de M. Cayet, sur laquelle il n'a pas été possible de recueillir les observations de celui­ci ;

Mais considérant que ces faits ont donné lieu à des actes de recherche et de constatation depuis 1991, l'ordonnance de saisie de documents prise par le président du Tribunal de grande instance de Rouen étant datée du 8 février 1991 ; que M. Cayet a été entendu au cours de l'enquête le 27 octobre 1992 et a pu donner toutes informations sur les documents recueillis ; qu'à la suite de cette enquête, le Conseil de la concurrence a été saisi le 26 avril 1994 ; qu'il n'est pas démontré au cas particulier, contrairement à ce que soutient la société EMCC, en quoi les délais qui se sont écoulés entre le déroulement des faits reprochés et, d'une part, l'enquête administrative ainsi que, d'autre part, les étapes de la procédure devant le Conseil de la concurrence auraient porté atteinte aux droits de la défense ; qu'en tout état de cause le moyen soulevé par la société EMCC par référence à l'article 6 de la Convention européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales n'est pas de nature à entacher la procédure de nullité et est, dès lors, inopérant ;

En ce qui concerne la validité des procès­verbaux :

Considérant que la société EMCC soutient que les procès­verbaux de déclaration de M. Bernard Cayet, directeur général d'EMCC, et de M. Philippe Chalandon, directeur commercial de la division Travaux maritimes de Bouygues Offshore, en date respectivement des 27 octobre et 19 novembre 1992 seraient irréguliers au motif qu'ils ne portent pas mention de l'objet de l'enquête ; que M. Chalandon n'a été entendu lors de l'enquête que le 19 novembre 1992, soit plus de quatre ans et demi après les faits ; qu'il y aurait ainsi "violation des exigences posées par la Cour d'appel de Paris (...) quant à l'obligation de loyauté devant présider à la recherche des preuves et au principe selon lequel les enquêtes préalables ne peuvent avoir pour effet de compromettre irrémédiablement les droits de la défense" ;

Mais considérant que la preuve que les enquêteurs ont fait connaître clairement aux personnes interrogées l'objet de leur enquête peut être rapportée par la mention faisant foi jusqu'à preuve contraire, que les agents de contrôle ont fait connaître cet objet à l'intéressé, sans qu'il y ait lieu de décrire cet objet ; qu'à défaut de visa de l'ordonnance du 1er décembre 1986, ainsi que de mention de l'objet ou à tout le moins de l'indication que celui­ci a été porté à la connaissance des personnes interrogées, la preuve de l'accomplissement des formalités peut être recherchée dans d'autres énonciations du procès­verbal ou dans des éléments extrinsèques à celui­ci ; qu'il doit à cette fin être vérifié, par l'examen des déclarations, que l'agent verbalisateur n'a pas laissé la personne auditionnée dans l'ignorance de l'objet du contrôle ou ne l'a pas trompée sur son contenu ;

Considérant que si le procès­verbal de déclaration du 27 octobre 1992 de M. Bernard Cayet ne porte pas la mention de l'objet du contrôle ou que celui­ci a été indiqué, il fait suite à une saisie de documents effectuée dans les locaux de la société EMCC le 19 février 1991 dans le cadre de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986; que les déclarations recueillies le 27 octobre 1992 constituent des demandes de précisions sur les documents régulièrement saisis dans le cadre de l'enquête portant sur les travaux de berges de la Seine, dont certaines opérations avaient été autorisées sur le fondement de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986;

Considérant que, si le procès­verbal de déclaration de M. Philippe Chalandon du 19 novembre 1992 ne porte pas la mention de l'objet du contrôle ou que celui­ci a été indiqué, il porte expressément la mention de l'article 47 de l'ordonnance et constitue une demande de précisions à propos de documents régulièrement saisis dans le cadre de l'enquête portant sur les travaux de berges de la Seine diligentée sur le fondement de l'article 48;

Considérant, en conséquence, que les personnes ainsi auditionnées ne pouvaient ignorer l'objet de l'enquête; que, dès lors, ces procès­verbaux ne doivent pas être écartés de la procédure ;

Sur les pratiques constatées :

Considérant qu'un cahier tenu par M. Bernard Cayet, directeur général de l'entreprise EMCC, saisi au siège de cette société, contient le compte-rendu d'une "réunion commerciale" qui s'est tenue le 25 avril 1988 à Villeneuve­le­Roi ("VLR"), siège de la société (cote 158) ; que, parmi les travaux évoqués, figurent notamment en partie supérieure du document les mentions suivantes : "poste 27 ­ Rouen (2 M) Quillery EMCC, poste amont 2,5 BOS ETPO, quai CRD ETPO EMCC 5 M, ­ Ambourville Lot 7 BOS ­ 1M Lot 8 1M, ­ Sahurs Lot 4 EMCC 0,5 (...)" ; que la partie inférieure contient les indications suivantes : "BOS (...) Rouen CRD 2,5 ­ Sahur 4 0,5/30,3 (...) Ambourville 7 1,0 Ambourville 8 1,0/22,5", puis "­ Rouen poste amont (2,5) et poste 27 (2)" ;

Considérant que le directeur général de la société EMCC a déclaré le 27 octobre 1992 : "J'ai listé les affaires obtenues par BOS et EMCC (départements Nord et Sud) à la date du 25 avril 1988 pour des montants totaux respectifs de 22,5 millions de francs et 30,3 millions de francs. Au­dessus, il s'agit d'affaires à venir auxquelles nous allons nous intéresser. Les mentions Ambourville lot 7 et lot 8 ainsi que Sahurs lot 4 correspondent aux marchés de berges obtenus le 25/4/1988" ; que M. Philippe Chalandon, directeur commercial de la division travaux maritimes de la société Bouygues Offshore, a déclaré le 19 novembre 1992 : "Je constate que M. Cayet a porté sur ce document des affaires sur lesquelles, pour certaines, BOS a obtenu les travaux. Je ne me souviens plus si ces affaires ont été évoquées à l'occasion d'une rencontre avec M. Cayet" ;

Considérant que les indications portées sur le cahier de M. Cayet à la date du 25 avril 1988 sont corroborées par les faits ; que le marché d'Anneville­Ambourville, lot n° 7, de 1988 a été attribué le 9 mai 1988 au groupement constitué par les sociétés Somaco et Bouygues Offshore et que la fourniture et le battage de palplanches a représenté 865 250 F, montant proche de l'arrondi de 1 million de francs contenu dans le document ; que le marché d'Ambourville, lot n° 8, de 1988 a été attribué le 9 mai 1988 au groupement Somaco­Bouygues Offshore et que la fourniture et le battage de palplanches s'est élevé à 1 102 850 F, montant proche de l'arrondi de 1 million de francs contenu dans le document ; que le marché d'aménagement du poste 27 a été attribué le 27 avril 1988 à l'entreprise Quillery pour un montant de 1 888 523 F HT et que le marché du poste de dégagement amont a été attribué le 25 mai 1988 à la société Bouygues Offshore pour un montant de 2 308 900 F HT, montants voisins des 2 millions et 2,5 millions de francs indiqués ;

Considérant que le directeur général de la société EMCC, pour établir le 25 avril 1988 la liste des marchés d'aménagement des berges de la Seine avec, en regard de chacun d'eux, le nom de l'entreprise attributaire, ainsi que le montant arrondi de l'offre retenue ou du lot sous­traité, alors que les dates limites de dépôt des offres pour ces marchés étaient fixées respectivement aux 25 avril, 2 mai, 26 avril et 24 mai 1988, avait nécessairement connaissance à cette date du 25 avril des offres déposées par ces entreprises ou qu'elles se proposaient de déposer ; que cette liste n'a pu être établie qu'à la suite d'une concertation entre les entreprises mentionnées, en vue de se répartir entre elles ces marchés ;

Considérant que si les sociétés EMCC et Bouygues Offshore font valoir qu'il ne s'agirait que d'une réunion "interne" à la société EMCC, à laquelle le directeur commercial de la division travaux maritimes de la société Bouygues Offshore n'a jamais indiqué avoir participé, il est constant que le document coté 158 porte mention de la société Bouygues Offshore et lui est donc opposable ; que la circonstance qu'aucun représentant de la société Bouygues Offshore n'ait participé à la réunion du 25 avril 1988 n'est pas ainsi de nature à ôter au document saisi au siège de l'entreprise EMCC son caractère probant ;

En ce qui concerne le lot n° 7 du marché d'Anneville­Ambourville de 1988 :

Considérant que le département de la Seine­Maritime a lancé un appel d'offres restreint pour la réalisation du lot n° 7 du marché d'Anneville­Ambourville de 1988, pour la réalisation de trois cents mètres de vannages métalliques ; que treize entreprises ont présenté une offre avant la date limite de remise des plis fixée au 25 avril 1988 ; que la commission d'ouverture des plis, qui s'est réunie le 9 mai 1988, a déclaré attributaire de ce lot le moins­disant le groupement constitué par les sociétés Somaco et Bouygues Offshore, pour un montant de 1 350 870 F HT, dont 688 500 F de fourniture de palplanches et 176 750 F de battage de palplanches ;

Considérant, en premier lieu, que le document coté 158 daté du 25 avril 1988 établit que les sociétés EMCC et Bouygues Offshore ont échangé, avant la date limite de remise des plis, des informations relatives au lot n° 7 du marché d'Ambourville ; que le groupement constitué des sociétés Somaco et Bouygues Offshore a effectivement été attributaire de ce marché et a réalisé la fourniture et le battage de palplanches pour un montant de 865 250 F, proche du montant de un million de francs mentionné sur le document ;

Considérant, en second lieu, qu'une stricte proportionnalité a été constatée entre l'offre du groupement Somaco­Bouygues Offshore et celle de la société Hayet, qui comporte un écart constant de 2 % pour chacune des huit séries de prix unitaires de ce marché, le prix unitaire relatif à la fourniture et à la mise en œuvre de remblais crayeux ayant fait l'objet d'un arrondi (1,58 %), alors qu'il existe une forte dispersion entre les offres des onze autres candidats ;

Considérant que, si le responsable de la société Somaco justifie cet écart par l'existence de coûts identiques à ceux de l'entreprise Hayet, les éléments des bilans et comptes d'exploitation des sociétés Somaco et Hayet figurant au I­B­1­b de la présente décision font apparaître des divergences très importantes ; qu'ainsi la parfaite proportionnalité des deux offres ne peut s'expliquer que par une concertation entre les deux entreprises, préalable au dépôt des offres, l'entreprise Hayet ayant déposé une offre de couverture au bénéfice du groupement Somaco­Bouygues Offshore effectivement moins­disant;

Considérant que la société Bouygues Offshore fait valoir son rôle limité lors de l'appel d'offres relatif au lot n° 7 ; qu'elle n'était intéressée que par la fourniture et le battage des palplanches, les travaux d'enrochement étant dévolus à la société Somaco, propriétaire de carrières, qui était mandataire du groupement ;

Mais considérant que, si la constitution, par des entreprises indépendantes et concurrentes, d'un groupement en vue de répondre à un appel d'offres ne constitue pas, en soi, une pratique prohibée par l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, le recours à une telle structure ne fait pas obstacle à l'application des dispositions de cet article lorsqu'il est établi qu'elle a été utilisée pour mettre en œuvre des pratiques concertées ayant eu pour objet ou ayant pu avoir pour effet de limiter le libre exercice de la concurrence lors de l'appel d'offres; que, nonobstant la circonstance que les entreprises Somaco et Bouygues Offshore étaient spécialisées dans des secteurs d'activité différents, il est établi qu'à la suite d'une concertation préalable au dépôt des offres, le groupement composé des entreprises Somaco et Bouygues Offshore a bénéficié d'une offre dite "de couverture" de la société Hayet, qui avait pour objet de faire attribuer le marché aux membres du groupement; que, par suite, chacune d'entre elles doit être regardée comme ayant pris part à la concertation anticoncurrentielle avec la société Hayet ;

Considérant que les offres déposées par les sociétés Hayet, EMCC et le groupement Somaco­Bouygues Offshore résultent d'une concertation en vue de faire apparaître le groupement comme moins­disant, les sociétés EMCC et Hayet déposant des offres de couverture ; que ces pratiques, qui étaient de nature à tromper le département de la Seine­Maritime sur la réalité de l'étendue de la concurrence, ont eu pour objet et ont pu avoir pour effet de fausser le jeu de la concurrence sur ce marché ; qu'elles sont prohibées par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

En ce qui concerne le lot n° 8 du marché d'Ambourville de 1988 :

Considérant que le département de la Seine­Maritime a lancé un appel d'offres restreint pour la réalisation du lot n° 8 du marché d'Ambourville de 1988 pour la construction d'un perré avec vannage ; que sept entreprises ont présenté une offre avant la date limite de remise des plis fixée au 2 mai 1988 ; que la commission d'ouverture des plis, qui s'est réunie le 9 mai 1988, a déclaré attributaire de ce lot le moins­disant, le groupement constitué par les sociétés Somaco et Bouygues Offshore, pour un montant de 2 861 560 F HT, dont 1 102 850 F de fourniture et de battage de palplanches ;

Considérant que le document coté 158 daté du 25 avril 1988 établit que les sociétés EMCC et Bouygues Offshore ont échangé des informations relatives au lot n° 8 du marché d'Ambourville, en prévoyant, avant la date limite de remise des plis fixée au 2 mai 1988, que ce marché serait attribué à la société Bouygues Offshore pour un montant d'environ un million de francs ; que l'analyse des offres a effectivement conduit la commission d'ouverture des plis à attribuer le marché au groupement constitué par les sociétés Somaco et Bouygues Offshore, cette dernière ayant à réaliser un montant effectif de fourniture et de battage de palplanches de 1 102 850 F ;

Considérant qu'il résulte de ces éléments que les pratiques de concertation préalablement à la remise des offres auxquelles se sont livrées la société EMCC et le groupement constitué par les sociétés Somaco et Bouygues Offshore, qui étaient de nature à tromper le département de la Seine­Maritime sur la réalité de l'étendue de la concurrence, ont eu pour objet et ont pu avoir pour effet de fausser le jeu de la concurrence sur ce marché ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les pratiques auxquelles se sont livrées les sociétés EMCC, Bouygues Offshore et Somaco sont prohibées par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

En ce qui concerne le lot n° 4 du marché de Sahurs de 1988 :

Considérant que le département de la Seine­Maritime a lancé un appel d'offres restreint pour la réalisation de travaux de vannage, de rempiétement et de surélévation de berges à Sahurs en 1988 ; que onze entreprises ont présenté une offre avant la date limite de dépôt des offres fixée au 28 avril 1988 ; que la commission d'ouverture des plis, qui s'est réunie le 9 mai 1988, a déclaré attributaire de ce lot l'entreprise la moins­disante, la société Hayet, pour un montant de 910 750 F HT, dont 551 250 F de vannage métallique ;

Considérant, en premier lieu, que les offres des sociétés EMCC et Société Nouvelle Voltaire (SNV), dont le président est M. Roger Duwelz, font apparaître une identité de sept des huit séries de prix de ce marché, à l'exception du vannage métallique ;

Considérant que des documents saisis lors de l'enquête au siège de la Société Nouvelle Voltaire contiennent les mentions suivantes : "lot 4 Sahurs (R1)" (cote 128), "18/4 Rappel Tréguier" (responsable local de l'entreprise EMCC) (cote 129), "Tréguier .... lot 4 .... SNV (pas de réponse ... Vannage 500 ... s/traitant EMCC à ces prix)" (cote 131) ; qu'il ressort de ces éléments que la société SNV a échangé des informations au sujet du lot n° 4 de Sahurs avec la société EMCC avant le dépôt des offres ;

Considérant par ailleurs que le document coté 158, daté du 25 avril 1988, saisi au siège de la société EMCC, confirme que cette dernière savait, avant la date de remise des plis fixée au 2 mai 1988, qu'elle était assurée de réaliser des travaux de vannage d'un montant de 0,5 million de francs pour ce marché ; que celui­ci a été effectivement attribué le 9 mai 1988 à la société Hayet et contient un montant de vannage métallique de 551 250 F ;

Considérant, en second lieu, qu'il a été saisi au siège de la Société Nouvelle Voltaire un détail estimatif coté 132, dont les différents postes correspondent exactement à ceux de l'offre déposée par la Société Nouvelle Leduc ; que ce document porte également le nom et l'adresse de cette dernière, dont le siège est situé à Saint­Marcel (Eure) ; que la Société Nouvelle Voltaire, qui connaissait ainsi le détail de l'offre de la Société Nouvelle Leduc avant la date de remise des offres, a déposé une offre dont le détail estimatif est supérieur, à l'exception du vannage, à celui remis par l'entreprise Leduc ;

Considérant qu'il résulte de ces éléments que les sociétés EMCC et Société Nouvelle Voltaire, d'une part, et les entreprises Société Nouvelle Voltaire et Société nouvelle Leduc, d'autre part, se sont concertées préalablement à la remise des offres ;

Considérant que les sociétés EMCC et SNV ne contestent pas ces échanges, mais justifient ces contacts par un projet d'accord de sous­traitance ;

Mais considérant que l'existence éventuelle d'un projet de sous­traitance n'implique pas de porter à la connaissance de l'entreprise sous­traitante pressentie l'intégralité des prix de la société donneur d'ordre ; qu'en l'espèce, les entreprises n'apportent aucun élément permettant d'établir qu'elles aient engagé une réelle négociation en vue d'organiser une collaboration industrielle effective ; qu'en outre, lorsque plusieurs entreprises ont étudié la possibilité d'établir entre elles des liens de donneur d'ordre à sous­traitant à l'occasion d'un marché et qu'elles présentent ensuite des offres distinctes en s'abstenant de mentionner le fait qu'elles ont échangé des informations, de telles pratiques sont prohibées par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 dans la mesure où elles faussent le jeu de la concurrence en limitant l'indépendance des opérateurs dans leurs décisions et en tentant d'induire ou en induisant en erreur le maître d'ouvrage sur la réalité et l'étendue de ses choix ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que les échanges d'informations auxquels se sont livrées les sociétés EMCC, Société Nouvelle Leduc et Société Nouvelle Voltaire préalablement à la remise des plis, qui étaient de nature à tromper le département de la Seine­Maritime sur la réalité de l'étendue de la concurrence, ont eu pour objet et ont pu avoir pour effet de fausser le jeu de la concurrence sur ce marché; qu'elles sont donc prohibées par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986.

Considérant, en revanche, que les éléments concernant les entreprises Bouygues Offshore, Hayet et Somaco sont insuffisants pour établir que ces sociétés auraient participé à ces échanges d'informations avant la date de remise des offres ; que dès lors il n'est pas établi que ces sociétés aient enfreint les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 à l'occasion de la passation du marché d'aménagement des berges de la Seine à Sahurs, lot n° 4, de 1988 ;

En ce qui concerne les trois marchés du port autonome de Rouen :

Considérant que le port autonome de Rouen a procédé à trois appels d'offres restreints pour l'aménagement du poste 27 à Val­de­la­Haye, l'aménagement du poste de dégagement amont et le rempiétement du quai CRD ;

Considérant en premier lieu que, pour le marché du rempiétement du quai CRD, treize entreprises ont remis des offres à la date limite fixée au 7 avril 1988, dont les sociétés Quillery, EMCC, Bouygues Offshore et ETPO ; que la commission d'ouverture des plis qui s'est réunie le 8 avril 1988 a déclaré attributaire de ce marché la société ETPO (solution de base aménagée), pour un montant de 5 641 085 F HT, qui lui a été notifié après le 27 avril 1988 ; que la société ETPO a demandé l'agrément d'un sous­traitant au port autonome de Rouen le 24 juin 1988 pour la "fourniture, (la) préparation et (le) battage de palplanches" pour un montant correspondant à 2 768 043 F HT ;

Considérant toutefois que le document coté 158 qui comporte la mention "Quai CRD ETPO EMCC 5M" a été établi le 25 avril 1988 ; que la commission d'ouverture des plis qui s'est réunie le 8 avril 1988 a déclaré attributaire de ce marché la société ETPO pour sa solution de "base aménagée", qui a donné lieu à de nombreux ajustements entre la société et le maître d'ouvrage jusqu'à la notification définitive du marché le 27 avril 1988 ; que les éléments recueillis lors de l'instruction sont insuffisants pour établir que les sociétés Bouygues Offshore, EMCC, Quillery et ETPO se soient concertées préalablement à la remise de leurs offres concernant ce marché, examinées dès le 8 avril 1988 par la commission d'ouverture des plis ;

Considérant en second lieu que, pour le marché d'aménagement du poste 27, dix entreprises ont remis des offres à la date limite fixée au 26 avril 1988, dont les sociétés Quillery, EMCC, Bouygues Offshore et ETPO ; que la commission d'ouverture des plis qui s'est réunie le 27 avril 1988 a déclaré attributaire de ce marché la société Quillery, moins­disante, pour un montant de 1 888 523 F HT (solution variante), qui lui a été notifié après le 11 mai 1988 ; que, pour le marché du poste de dégagement amont, douze entreprises ont remis des offres à la date limite fixée au 24 mai 1988, dont les sociétés Quillery, EMCC, Bouygues Offshore et ETPO ; que la commission d'ouverture des plis qui s'est réunie le 25 mai 1988 a déclaré attributaire de ce marché la société Bouygues Offshore moins­disante, pour un montant de 2 308 000 F HT (solution de base), résultat qui lui a été notifié après le 30 mai 1988 ;

Considérant que le document coté 158, daté du 25 avril 1988, établit que, d'une part, les sociétés EMCC et Bouygues Offshore ont échangé des informations relatives à l'aménagement du poste 27, en prévoyant que les entreprises Quillery et Bouygues Offshore seraient attributaires de ce marché pour un montant d'environ 2 millions de francs ; que, d'autre part, les sociétés EMCC et Bouygues Offshore ont échangé des informations relatives à l'aménagement du poste amont en prévoyant que les entreprises Bouygues Offshore et ETPO seraient attributaires de ce marché pour un montant d'environ 2,5 millions de francs ; qu'ainsi les sociétés Bouygues Offshore et EMCC avaient antérieurement aux dates limites de remise des plis, fixées au 26 avril 1988 pour le marché d'aménagement du poste 27 et au 11 mai 1988 pour le marché d'aménagement du poste amont, désigné en concertation les entreprises qui, moins­disantes, devaient emporter ces marchés ;

Considérant que la société Bouygues Offshore fait valoir que les chiffres figurant dans le document coté 158 "ne représentent que des estimations et ne reflètent en rien la réalité" ;

Mais considérant que les chiffres transcrits représentent des montants arrondis des offres effectivement déposées et retenues ; que le marché relatif à l'aménagement du poste 27 a été attribué à la société Quillery pour un montant de 1 888 523 F HT, la cote 158 indiquant "poste 27 ­ Rouen (2 M) Quillery, EMCC" ; que le marché relatif au poste de dégagement amont a été attribué à la société Bouygues Offshore pour un montant de 2 308 000 F HT, la cote 158 mentionnant "poste amont 2,5 BOS ETPO" ;

Considérant que la société EMCC fait valoir qu'elle n'a été attributaire d'aucun de ces deux marchés ; que certaines offres avaient dû être déposées antérieurement au 25 avril 1988, comme pour le rempiétement du quai CRD pour lequel la date limite de remise des plis avait été fixée au 7 avril 1988 et pour l'aménagement du poste 27, pour lequel la date limite des offres était fixée au 26 avril 1988, "les offres étant en réalité fréquemment remises au moins la veille ou l'avant­veille" ;

Mais considérant que le fait que certaines entreprises déposent leurs offres avant la date limite fixée par le maître de l'ouvrage ne les autorisent pas à échanger des informations avec d'autres entreprises, dont certaines d'entre elles peuvent ne pas avoir encore remis leur offre ; que de tels échanges sont de nature à induire en erreur le maître d'ouvrage sur la réalité de la concurrence ou l'étendue de ses choix ; qu'en outre, en ce qui concerne l'aménagement du poste 27, le document coté 244, qui arrête la liste des dix offres parvenues dans les délais fixés montre que les sociétés en cause ont déposé leurs offres le 26 avril 1988, soit à la date limite fixée par l'appel d'offres ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les sociétés Bouygues Offshore, EMCC et Quillery se sont concertées en vue de se répartir deux marchés du port autonome de Rouen relatifs respectivement à l'aménagement du poste 27 à Val­de­la­Haye et à celui du poste de dégagement amont, en déposant des offres de couverture ; que ces pratiques, qui ont eu pour objet et ont pu avoir pour effet de fausser le jeu de la concurrence sur ces marchés, sont prohibées par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

En ce qui concerne le lot n° 1 du marché de Rouen Ile­Lacroix de 1990 :

Considérant que le département de la Seine­Maritime a lancé un appel d'offres restreint pour la réalisation du lot n° 1 du marché de Rouen Ile­Lacroix de 1990 ; que neuf entreprises ont présenté une offre ; que la commission d'ouverture des plis, qui s'est réunie le 21 mai 1990, a déclaré attributaire de ce lot la Société Nouvelle Voltaire pour un montant de 1 938 950 F HT ;

Considérant que les offres de trois soumissionnaires, les entreprises EMCC, Le Foll et Ballot sont identiques (2 940 470 F HT), de même que leurs quatorze composantes définissant la nature des ouvrages ;

Considérant que le directeur général d'EMCC a reconnu dans ses déclarations du 27 octobre 1992 que sur cette affaire, nous avons repris à l'identique les prix qui nous avaient été donnés par Hayet" ; que la société Ballot a reconnu qu'elle a été conduite à consulter d'autres entreprises de façon à "faire une offre réaliste" ;

Mais considérant que, lorsque plusieurs entreprises ont étudié la possibilité d'établir entre elles des liens de donneur d'ordre à sous­traitant à l'occasion d'un marché et qu'elles présentent ensuite des offres distinctes en s'abstenant de mentionner le fait qu'elles ont échangé des informations, de telles pratiques sont prohibées par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 dans la mesure où elles faussent le jeu de la concurrence en limitant l'indépendance des opérateurs dans leurs décisions et en tentant d'induire ou en induisant en erreur le maître d'ouvrage sur la réalité et l'étendue de ses choix;

Considérant qu'en l'espèce les sociétés EMCC, Le Foll et Ballot ont établi une concertation préalablement au dépôt de leurs offres ; que la société EMCC a reconnu avoir contacté la société Hayet ; que la société Ballot a reconnu l'existence de consultations, sans préciser l'identité des entreprises consultées ; que les entreprises interviennent dans le même secteur d'activité et qu'elles se sont présentées comme des sociétés concurrentes sur le même marché ; que de telles pratiques ont eu pour objet et ont pu avoir pour effet de fausser le jeu de la concurrence sur le marché ;

Considérant que la société EMCC fait valoir qu'elle avait répondu à cet appel d'offres, qui ne comportait pas de travaux de vannage, pour ne pas risquer de ne plus être consultée par le maître de l'ouvrage ; que la société Le Foll soutient que les offres litigieuses n'étaient pas moins­disantes et n'ont de ce fait profité à aucune des entreprises en cause ;

Mais considérant que si les offres de principe, dites carte de visite, ne constituent pas en elles­mêmes une pratique anticoncurrentielle, il n'en va pas de même lorsque ces offres sont établies en concertation avec d'autres entreprises; qu'il n'est pas contesté, d'une part, que les entreprises Le Foll et Ballot n'ont jamais été titulaires dans un passé récent de ce type de marchés de travaux et que, d'autre part, ce marché, qui ne comprend pas de vannage métallique, n'était pas susceptible d'intéresser la société EMCC, spécialiste dans ce domaine ; qu'il ne peut être utilement invoqué, pour réfuter le caractère anticoncurrentiel de la concertation, que l'entreprise impliquée n'a pas été finalement attributaire du marché, puisqu'une telle circonstance, qui n'est pas de nature à effacer l'objet anticoncurrentiel de la concertation, peut précisément en être la conséquence recherchée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les pratiques auxquelles se sont livrées les sociétés EMCC, Ballot, Le Foll et Hayet, qui étaient de nature à tromper le département de la Seine­Maritime sur la réalité de l'étendue de la concurrence, ont eu pour objet et ont pu avoir pour effet de fausser le jeu de la concurrence sur ce marché et qu'elles sont ainsi prohibées par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986.

En ce qui concerne le marché d'Anneville de 1992 :

Considérant que le département de la Seine­Maritime a lancé un appel d'offres restreint pour la réalisation du marché d'Anneville de 1992 ; que dix entreprises ont présenté une offre ; que la commission d'ouverture des plis, qui s'est réunie le 25 mai 1992, a déclaré attributaire de ce marché la société Gascheau pour un montant de 3 066 500 F HT, sous réserve de vérifications matérielles ;

Considérant que les sociétés Gascheau et Société Nouvelle Duflot ont présenté deux offres identiques, à partir de montants de composantes différents ; que la société Gascheau soutient que son offre est fondée sur des "éléments sérieux, objectifs et chiffrés" ; qu'elle fait valoir que s'il existe une stricte identité des offres faites par les sociétés Gascheau et Société Nouvelle Duflot, à partir de prix unitaires différents, la probabilité de parvenir sans calculs à un montant global identique, à partir de ces prix unitaires, est à ce point infime qu'elle exclut l'hypothèse d'une concertation portant sur le prix global ; que la Société Nouvelle Duflot justifie les montants de neuf des quatorze rubriques de son offre par la refacturation des prix des fournisseurs ;

Mais considérant qu'il existe de nombreuses différences entre les montants des composantes de l'offre des deux sociétés et les éléments explicatifs, au demeurant imprécis, qu'elles fournissent ; qu'eu égard à la complexité des travaux en cause, l'identité parfaite du montant global des offres des deux sociétés Gascheau et Société Nouvelle Duflot à partir de montants de composantes différents ne peut résulter du seul hasard et ne peut s'expliquer que par un échange préalable d'informations ; que les informations ainsi échangées, qui étaient de nature à tromper le département de la Seine­Maritime sur la réalité de l'étendue de la concurrence, ont eu pour objet et ont pu avoir pour effet de fausser le jeu de la concurrence sur ce marché ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les pratiques mises en œuvre par les sociétés Gascheau et Société Nouvelle Duflot sont prohibées par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

En ce qui concerne les marchés nécessitant la fourniture de crayeux :

Considérant que le département de la Seine­Maritime a lancé deux appels d'offres restreints pour la réalisation du marché d'Anneville de 1990 destiné à la construction d'une digue et du marché d'Oissel de 1991 pour la remise en état de berges ; que pour le marché d'Anneville de 1990, cinq entreprises ou groupement ont présenté une offre et que le groupement constitué des sociétés Hayet et Somaco, le moins­disant, a été déclaré attributaire de ce marché pour un montant de 3 543 000 F HT ; que pour le marché d'Oissel de 1991 la commission d'ouverture des plis, qui s'est réunie le 29 mai 1991, a déclaré attributaire de ce marché le groupement Hayet­Somaco, le moins­disant, pour un montant de 998 000 F HT ;

Considérant que les sociétés Hayet et Somaco, qui exploitaient chacune une carrière de crayeux, ont présenté des offres conjointes sur les deux marchés en cause, alors qu'elles avaient été admises séparément dans le cadre de la procédure d'appel d'offres restreint ; que ces marchés nécessitaient la fourniture d'un volume important de crayeux représentant respectivement 83,8 % et 99,2 % du montant des travaux ; que les cahiers des clauses techniques particulières (CCTP) liés à ces marchés ont imposé la mise en œuvre d'un produit contenant 50 % de blocs d'un poids compris entre 50 et 100 kg, ainsi que leur provenance d'"une carrière ou un lieu d'emprunt régulièrement autorisés ou agréés par le maître d'œuvre" ; que les services de la Direction Régionale de l'Industrie, de la Recherche et de l'Environnement (DRIRE), chargée de l'agrément des carrières, et du port autonome de Rouen ont considéré que les carrières exploitées par les sociétés Somaco et Hayet étaient les seules compétitives pour la fourniture des matériaux crayeux nécessaires à la construction de digues dans cette partie de la Seine, ce qu'ont confirmé les entreprises soumissionnaires, en raison de l'importance des coûts de transport, qui représentent plus de la moitié du prix de vente du matériau crayeux ;

Considérant que le fait pour des entreprises de se grouper pour répondre à des appels d'offre n'est pas en soi anticoncurrentiel ; qu'il convient cependant de rechercher si, sous couvert d'un tel groupement, ces entreprises n'ont pas mis en œuvre une entente ayant pour objet ou pouvant avoir pour effet de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence ;

Considérant, qu'au cas d'espèce, la société Hayet a justifié notamment ce groupement par les délais de réalisation du chantier et que la société Somaco a fait valoir, d'une part, les cadences importantes exigées par le maître d'œuvre et, d'autre part, la protection de la durée de vie des carrières ;

Mais considérant que les capacités d'extraction de ces deux entreprises sont de 800 tonnes par jour pour la société Somaco et de 500 à 1 000 tonnes par jour pour la société Hayet alors que la réalisation des marchés en cause a nécessité l'extraction d'environ 620 tonnes de crayeux par jour pour le marché d'Anneville/Ambourville en 1990 et celle d'environ 550 tonnes par jour pour celui d'Oissel en 1991 ; qu'il résulte de l'instruction que, lors de l'exécution de ces deux marchés, chacune des entreprises a été, successivement, capable de répondre seule à la demande totale ; que, notamment, la société Somaco a fourni 48 445 tonnes de crayeux d'août à novembre 1990 et la société Hayet 50 555 tonnes de novembre 1990 à mars 1991 pour le marché d'Anneville de 1990 ; que la société Somaco a fourni 22 000 tonnes de crayeux en septembre et octobre 1991 et la société Hayet, 22 356 tonnes en novembre et décembre 1991 pour le marché d'Oissel de 1991 ; qu'ainsi, il est établi que chacune des deux entreprises pouvait faire une offre indépendante, en exploitant ses seules capacités d'extraction ;

Considérant que le regroupement des sociétés Hayet et Somaco pour la réalisation des deux marchés en cause n'était donc pas imposé par des considérations techniques ; qu'elles ont ainsi entendu par leur groupement faire échec à la mise en concurrence que souhaitait le maître d'ouvrage, alors que seules leurs carrières étaient en mesure de fournir de manière compétitive des matériaux crayeux nécessaires à la construction d'ouvrages sur cette partie de la Seine ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les pratiques mises en œuvre par les sociétés Hayet et Somaco ont eu pour objet et ont pu avoir pour effet de fausser le jeu de la concurrence sur ce marché et, par suite, sont prohibées par l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

En ce qui concerne l'imputabilité des pratiques :

Considérant que la Société générale des entreprises Quillery & Cie fait valoir qu'à la suite de l'extension qu'a connue le groupe Quillery durant ces dernières années, elle a décidé de filialiser ses activités de production à la fin de l'année 1995 ; qu'après une décision du conseil d'administration de la Société nationale de construction Quillery SA, un contrat d'apport a été signé le 19 mars 1996 entre, d'une part, la Société générale des entreprises Quillery & Cie et, d'autre part, la Société générale des entreprises Quillery travaux publics/génie civil ; que ce contrat prévoit expressément que "la Société générale des entreprises Quillery & Cie apportera à la Société générale des entreprises Quillery Travaux publics/génie civil la branche complète d'activité correspondant à son agence de Travaux publics/génie civil Normandie" ; que ce contrat a été approuvé par l'assemblée générale extraordinaire de la Société générale des entreprises Quillery & Cie du 5 avril 1996 et par l'assemblée générale mixte de la Société générale des entreprises Quillery Travaux publics/génie civil du 5 avril 1996 ; qu'ainsi, l'agence de Travaux publics/génie civil Normandie ayant été transférée avec effet rétroactif au 1er janvier 1996, avec l'ensemble des éléments matériels et humains, la Société générale des entreprises Quillery & Cie devrait être mise de ce fait hors de cause ;

Mais considérant que si une entreprise cède tout ou partie de son activité mais subsiste en tant qu'entreprise, elle doit répondre des pratiques anticoncurrentielles auxquelles elle a participé antérieurement à la cession; que c'est seulement si elle disparaît en tant qu'entreprise que l'entreprise qui a acquis les éléments matériels et humains ayant servi à la commission des faits sera considérée comme responsable de la pratique incriminée; qu'en l'espèce, la Société générale des entreprises Quillery & Cie, qui est désormais une société "holding" en charge de la détention et de la gestion de titres de participation, n'a pas cessé d'exister juridiquement; que c'est donc à bon droit qu'ont été imputées à la Société générale des entreprises Quillery & Cie les pratiques en cause;

Sur les suites à donner :

En ce qui concerne la société Ballot :

Considérant que la société SA Ballot a fusionné avec la société SA Fougerolle en mars 1994, pour devenir la société SA Fougerolle­Ballot ; que la société qui doit être mise en cause comme venant aux droits et obligations de la SA Ballot est la SA Fougerolle­Ballot ;

En ce qui concerne la société Somaco :

Considérant que la société Somaco s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles dans quatre des dix marchés examinés par le Conseil de la concurrence ; qu'elle a échangé des informations préalablement à la remise des plis pour les marchés d'Anneville­Ambourville, lot n° 7, d'Ambourville, lot n° 8 du 9 mai 1988 ; qu'elle a constitué un groupement solidaire visant à empêcher toute concurrence pour les appels d'offres des marchés d'Anneville, lot n° 6, de 1990 et d'Oissel de 1991 ;

Considérant que la société Somaco, qui a adopté le nom social de Cogere en remplacement de celui de Somaco le 13 novembre 1992, a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 28 juin 1996 à compter du 30 décembre 1995, date de la clôture de la liquidation ; que, dans ces circonstances, il n'y a pas lieu de prononcer de sanction à l'égard de la société Cogere ;

En ce qui concerne la société Hayet :

Considérant que la société Hayet s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles à l'occasion de quatre des dix marchés examinés par le Conseil de la concurrence ; qu'elle a échangé des informations préalablement à la remise des plis pour le marché d'Anneville­Ambourville, lot n° 7, du 9 mai 1988 ; qu'elle s'est concertée préalablement à la remise des plis pour que d'autres entreprises présentent des offres de couverture à son avantage pour le marché de Rouen­Ile­Lacroix, lot n° 1, de 1990 ; qu'elle a constitué un groupement solidaire visant à empêcher toute concurrence pour les marchés d'Anneville, lot n° 6, de 1990 et d'Oissel de 1991 ;

Considérant que cette société a été reprise, dans le cadre d'un plan de cession totale, par la Société routière Beugnet selon un jugement du 19 décembre 1995; qu'en application de l'alinéa 3 de l'article 62 de la loi du 25 janvier 1985, dont il résulte qu'un cessionnaire ne peut être tenu des charges non prévues dans le plan de cession, la société repreneur ne peut se voir infliger une sanction pécuniaire pour les faits antérieurs à la cession;

En ce qui concerne la Société Nouvelle Leduc :

Considérant que la Société Nouvelle Leduc s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles dans un des dix marchés examinés par le Conseil de la concurrence ; qu'elle a échangé des informations préalablement à la remise des plis pour le marché de Sahurs, lot n° 4, du 9 mai 1988 ;

Considérant que la Société Nouvelle Leduc a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 31 janvier 1997 ; que dans ces circonstances, il n'y a pas lieu de prononcer de sanction à l'égard de cette société ;

Sur les sanctions :

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 : "Le Conseil de la concurrence peut ordonner aux intéressés de mettre fin aux pratiques anticoncurrentielles dans un délai déterminé ou imposer des conditions particulières. Il peut infliger une sanction pécuniaire applicable soit immédiatement, soit en cas d'inexécution des injonctions. Les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie et à la situation de l'entreprise ou de l'organisme sanctionné. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction. Le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 5 % du montant du chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France au cours du dernier exercice clos".

Considérant que, pour apprécier le dommage à l'économie résultant des pratiques constatées, il y a lieu de tenir compte du fait que ces ententes ont constitué une entrave au libre jeu de la concurrence dans plusieurs marchés, qui portaient sur des infrastructures d'aménagement des berges de la Seine, indispensables au trafic maritime et fluvial et présentant un caractère d'utilité publique ; que ce dommage ne résulte pas seulement du montant global des marchés en cause, soit 18 millions de francs, mais s'apprécie également en fonction de l'inscription des travaux de berges dans des programmes triennaux, qui se sont élevés, pour la période de 1987 à 1989, à 45 millions de francs et, pour la période de 1990 à 1992, à 48 millions de francs ;

Considérant que, pour apprécier la gravité des pratiques constatées, il convient de prendre en compte, en premier lieu, le fait que les pratiques mises en œuvre par les entreprises parties à ces ententes tendaient à évincer les entreprises n'y ayant pas pris part ; qu'elles peuvent avoir pour effet de les convaincre que ce type de comportement est général et les inciter soit à l'adopter, soit à renoncer à faire des offres sur ces marchés, en deuxième lieu, le rôle qu'a pu jouer chaque soumissionnaire, alors que certaines des sociétés en cause appartiennent à des groupes importants dans le secteur du bâtiment et des travaux publics et, en dernier lieu, le fait que les maîtres d'ouvrage, conduits à croire que les entreprises avaient établi leurs offres séparément, ont été trompés sur la réalité et l'étendue de la concurrence ;

Considérant que le chiffre d'affaires réalisé au cours du dernier exercice clos est celui qui a été approuvé par la dernière assemblée générale des associés ;

En ce qui concerne la société Bouygues Offshore :

Considérant que la société Bouygues Offshore, qui appartient à un groupe important du secteur du bâtiment et des travaux publics, s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles dans quatre des dix marchés examinés par le Conseil de la concurrence ; qu'elle a échangé des informations préalablement à la remise des plis pour les marchés d'Anneville­Ambourville, lot n° 7 et d'Ambourville, lot n° 8 du 9 mai 1988, qu'elle s'est concertée préalablement à la remise de plis en vue d'un partage de marchés, pour deux marchés relevant de la maîtrise d'ouvrage du port autonome de Rouen, en déposant des offres de couverture au bénéfice de chaque société finalement attributaire de chaque marché ; que le montant des travaux à l'occasion desquels ont été relevées les pratiques en cause s'élève à 8 409 853 F ; que la société a été attributaire de trois de ces marchés ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1995, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 224 964 180 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 1 350 000 F ;

En ce qui concerne la société Fougerolle­Ballot :

Considérant que la société SA Ballot, aux droits et obligations de laquelle vient la société SA Fougerolle­Ballot, qui appartient à un groupe important du secteur du bâtiment et des travaux publics, s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles dans un des dix marchés examinés par le Conseil de la concurrence ; qu'elle s'est concertée préalablement à la remise des plis en vue de présenter une offre de couverture au bénéfice de la société Hayet pour le marché de Rouen-Ile­Lacroix, lot n° 1, du 22 mai 1990 ; que le montant des travaux à l'occasion desquels ont été relevées les pratiques en cause s'élève à 1 938 950 F ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1995, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 254 150 145 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 760 000 F ;

En ce qui concerne la société Entreprises Morillon Corvol Courbot :

Considérant que la société EMCC, qui appartient à un groupe important du secteur du bâtiment et des travaux publics, s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles dans six des dix marchés examinés par le Conseil de la concurrence ; qu'elle a échangé des informations préalablement à la remise des plis pour les marchés d'Anneville­Ambourville, lot n° 7, d'Ambourville, lot n° 8, et de Sahurs, lot n° 4, du 9 mai 1988, qu'elle s'est concertée préalablement à la remise de plis en vue d'un partage de marchés, pour deux marchés relevant de la maîtrise d'ouvrage du port autonome de Rouen, en déposant des offres de couverture au bénéfice de chaque société finalement attributaire de chaque marché, ainsi que préalablement à la remise des plis en vue de présenter une offre de couverture au bénéfice de la société Hayet pour le marché de Rouen-Ile­Lacroix, lot n° 1, du 22 mai 1990 ; que le montant des travaux à l'occasion desquels ont été relevées les pratiques en cause s'élève à 11 259 553 F ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1995, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 222 758 939 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 2 230 000 F ;

En ce qui concerne la société Gascheau :

Considérant que la société Gascheau s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles dans un des dix marchés examinés par le Conseil de la concurrence ; qu'elle a échangé des informations préalablement à la remise des plis pour le marché d'Anneville du 25 mai 1992 ; que le montant des travaux à l'occasion desquels ont été relevées les pratiques en cause s'élève à 3 066 500 F ; que la société a été attributaire de ce marché ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1995, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 124 471 806 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 250 000 F ;

En ce qui concerne la société Le Foll :

Considérant que la société Le Foll s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles dans un des dix marchés examinés par le Conseil de la concurrence ; qu'elle s'est concertée préalablement à la remise des plis en vue de présenter une offre de couverture au bénéfice de la société Hayet pour le marché de Rouen­Ile­Lacroix, lot n° 1, du 22 mai 1990 ; que le montant des travaux à l'occasion desquels ont été relevées les pratiques en cause s'élève à 1 938 950 F ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1996, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 294 707 984 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 590 000 F ;

En ce qui concerne la Société générale des entreprises Quillery et compagnie :

Considérant que la Société générale des entreprises Quillery et compagnie, qui appartient à un groupe important du secteur du bâtiment et des travaux publics, s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles dans deux des dix marchés examinés par le Conseil de la concurrence ; qu'elle s'est concertée préalablement à la remise de plis en vue d'un partage de marchés, pour deux marchés relevant de la maîtrise d'ouvrage du port autonome de Rouen, en déposant des offres de couverture au bénéfice de chaque société finalement attributaire de chaque marché ; que le montant des travaux à l'occasion desquels ont été relevées les pratiques en cause s'élève à 4 197 423 F ; que la société a été attributaire de l'un de ces marchés ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1995, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 236 174 706 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 710 000 F ;

En ce qui concerne la Société Nouvelle Duflot :

Considérant que la Société Nouvelle Duflot s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles dans un des dix marchés examinés par le Conseil de la concurrence ; qu'elle a échangé des informations préalablement à la remise des plis pour le marché d'Anneville du 25 mai 1992 ; que le montant des travaux à l'occasion desquels ont été relevées les pratiques en cause s'élève à 3 066 500 F ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1995, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 22 887 988 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 50 000 F ;

En ce qui concerne la Société Nouvelle Voltaire :

Considérant que la Société Nouvelle Voltaire s'est livrée à des pratiques anticoncurrentielles dans un des dix marchés examinés par le Conseil de la concurrence ; qu'elle a échangé des informations préalablement à la remise des plis pour le marché de Sahurs, lot n° 4 du 9 mai 1988 ; que le montant des travaux à l'occasion desquels ont été relevées les pratiques en cause s'élève à 910 750 F ;

Considérant que cette entreprise a réalisé en France, au cours de l'exercice 1996, dernier exercice clos disponible, un chiffre d'affaires hors taxes de 4 384 544 F ; qu'en fonction des éléments généraux et individuels, tels qu'ils sont appréciés ci­dessus, il y a lieu de lui infliger une sanction pécuniaire de 4 000 F ;

Décide :

Article 1er : ­ Il est établi que les sociétés Bouygues Offshore, Fougerolle­Ballot, Entreprises Morillon Corvol Courbot, Gascheau, Hayet, Société Nouvelle Leduc, Le Foll, Société générale des entreprises Quillery et compagnie, Société Nouvelle Duflot, Société Nouvelle Voltaire et Cogere ont enfreint les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986.

Article 2 : ­ Sont infligées les sanctions pécuniaires suivantes :

1 350 000 F à la société Bouygues Offshore ;

760 000 F à la société Fougerolle­Ballot ;

2 230 000 F à la société Entreprises Morillon Corvol Courbot ;

250 000 F à la société Gascheau ;

590 000 F à la société Le Foll ;

710 000 F à la Société générale des entreprises Quillery et compagnie ;

50 000 F à la Société Nouvelle Duflot ;

4 000 F à la Société Nouvelle Voltaire.