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Décisions

Conseil Conc., 16 juillet 1997, n° 97-D-38

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Décision

Saisine et demande de mesures conservatoires présentées par la société CEP Exposium

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré, sur le rapport oral de M. Hubert Grandval, par M. Barbeau, président, M. Cortesse, vice-président, , M. Rocca, membre, désigné en remplacement de M. Jenny, vice-président, empêché.

Conseil Conc. n° 97-D-38

16 juillet 1997

Le Conseil de la concurrence (commission permanente),

Vu la lettre enregistrée le 19 juin 1997 sous les numéros F 969 et M 202 par laquelle la société CEP Exposium a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre par le Syndicat National de la Publicité sur le Lieu de Vente (SNPLV), l'association Point of Purchase Advertising Institute Europe (POPAI Europe) et l'Institut Français de la Communication et de la Publicité sur le Lieu de Vente (IFPCLV­POPAI Europe), qu'elle estime anticoncurrentielles et a sollicité le prononcé de mesures conservatoires ; Vu l'ordonnance n 86­1243 du 1er décembre 1986 modifiée, relative à la liberté des prix et de la concurrence et le décret n 86­1309 du 29 décembre 1986 modifié, pris pour son application ; Vu les observations présentées par la société CEP Exposium, par le Syndicat National de la Publicité sur le Lieu de Vente (SNPLV), l'association Point of Purchase Advertising Institute Europe (POPAI Europe), l'Institut Français de la Communication et de la Publicité sur le Lieu de Vente (IFPCLV­POPAI Europe) et par le commissaire du Gouvernement ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement et les représentants de la société CEP Exposium, de la société Reed­OIP, du SNPLV, de l'association POPAI Europe et de l'IFCPLV entendus ;

Considérant que la société CEP Exposium, qui a pour activité l'organisation de salons et manifestations professionnelles, a absorbé, en 1993, la société MDL, créateur du salon de la publicité sur le lieu de vente, manifestation organisée avec le soutien du Syndicat National de la Publicité sur le Lieu de Vente (SNPLV), qui représente les producteurs de matériels utilisés pour la promotion des produits sur le lieu de vente, ainsi qu'avec celui de l'Institut Français de la Communication et de la Publicité sur le Lieu de Vente (IFCPLV), qui réunit quarante­cinq membres, annonceurs, fournisseurs ou prestataires de services, et le SNPLV ; qu'outre ce salon, qui a lieu tous les deux ans, la société CEP Exposium organise une manifestation annuelle, dénommée les "Oscars européens de la PLV" ; que, pour la promotion de ces manifestations auprès des professionnels, la société CEP Exposium a obtenu par un contrat de collaboration en date du 25 mai 1995, le parrainage de l'association POPAI Europe, "chapitre" européen de l'association POPAI ; que la société CEP Exposium expose qu'au cours de l'année 1996, des discussions ont été engagées avec le SNPLV, l'IFCPLV et POPAI Europe pour le renouvellement de l'organisation de ces manifestations et que, celles­ci n'ayant pu aboutir, le SNPLV, l'IFCPLV et POPAI Europe ont alors décidé de mettre en place, sous leur égide, un nouveau salon dont ils ont confié la réalisation à la société Reed­OIP ;

Considérant que la société saisissante soutient, en premier lieu, que les organisations professionnelles concernées auraient abusé de leur position dominante en exigeant une rémunération excessive en contrepartie de leur parrainage ainsi qu'en appelant au boycott du "salon de la PLV" et des "Oscars européens de la PLV" dont elle a décidé de maintenir l'organisation à Paris du 7 au 10 octobre 1997 ; qu'elle fait valoir, en second lieu, que le jeu de la concurrence sera faussé sur le marché de la publicité sur le lieu de vente en raison des avantages injustifiés réclamés par les organisations professionnelles pour leurs adhérents ; qu'elle sollicite, en outre, en application de l'article 12 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, le prononcé de mesures conservatoires ;

Mais considérant que le conseil ne peut prononcer les mesures conservatoires mentionnées à l'article 12 de l'ordonnance susvisée que si la demande dont il est saisi au fond est recevable ; qu'aux termes de l'article 19 de la même ordonnance, "le Conseil de la concurrence peut déclarer, par décision motivée, la saisine irrecevable s'il estime que les faits invoqués n'entrent pas dans le champ de sa compétence ou ne sont pas appuyés d'éléments suffisamment probants" ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, qu'alors que le contrat de parrainage conclu avec la société CEP Exposium venait à expiration en janvier 1997, les organisations professionnelles du secteur de la publicité sur le lieu de vente ont conduit des négociations avec cette société en vue de poursuivre leur collaboration ; que les organisations professionnelles concernées ayant rejeté les conditions financières proposées par la société CEP Exposium, ces discussions n'ont pu aboutir ; que, du compte rendu de l'assemblée générale ordinaire de l'IFCPLV du 27 février 1997, il ressort que ses membres ont pris acte de la rupture des relations avec la société CEP Exposium, ratifié les orientations arrêtées par leurs organes dirigeants et décidé de participer aux nouvelles manifestations qu'ils projetaient de mettre en place, plutôt qu'à celles organisées par la société CEP Exposium ; que pour l'organisation de ces nouvelles manifestations, qui devaient mieux répondre aux intérêts de leurs membres, elles ont lancé une consultation auprès d'organisateurs de salons professionnels ; qu'aux termes du compte rendu de l'assemblée générale de l'IFCPLV tenue le 11 juin 1997, la société "CEP Exposium a répondu à l'appel d'offres mais (que) le contrat n'a pu être signé avec cette société, celle­ci n'ayant pas voulu, à l'issue des négociations, s'aligner sur les propositions mieux­disantes d'autres compétiteurs" ; que l'IFCPLV a confié par contrat "l'organisation matérielle et financière, ainsi que la gestion de sa manifestation" à la société Reed­OIP ;

Considérant, en deuxième lieu, que si la société CEP Exposium soutient que le SNPLV, l'IFCPLV et POPAI Europe, qui lui ont retiré leur parrainage, auraient appelé leurs membres au boycott de la manifestation qu'elle organise, il n'est pas contesté qu'il était loisible à ces organisations professionnelles de décider de l'organisation de nouvelles manifestations et d'en confier, en tant que prescripteurs, la réalisation à l'organisateur de leur choix, en lui accordant leur parrainage; que ce choix, qui ne saurait être qualifié en soi de pratique anticoncurrentielle, a eu lieu après une consultation à laquelle la société CEP Exposium a pu participer; que le salon dont la réalisation a été confiée à la société Reed­OIP doit avoir lieu à partir de 1998 et pourrait donc se tenir en alternance avec celui organisé tous les deux ans par la société saisissante ; que, par ailleurs, l'information donnée à leurs membres par l'IFCPLV et POPAI Europe sur l'échec des négociations avec la société CEP Exposium et la mise en place de nouvelles manifestations avec le parrainage de POPAI Europe, leur permettant "à partir de maintenant, à travers leur organisation professionnelle (de) déterminer totalement l'avenir de leur principal moyen de promotion et de commerce" et de "le rendre puissant, international, attirant, intéressant pour un maximum de prospects", comme la diffusion de la liste des entreprises ayant décidé de participer au nouveau salon, ne sauraient être assimilées à des pratiques de boycott de la manifestation dont la société CEP Exposium a décidé de poursuivre l'organisation; qu'enfin, si cette dernière produit des lettres d'entreprises lui faisant fait part de leur intention de ne pas participer au salon de la PLV en octobre 1997, il ne peut être inféré des termes de ces courriers que leur décision résulterait de pressions exercées par les organisateurs des nouvelles manifestations ;

Considérant, en troisième lieu, que la société CEP Exposium n'apporte aucun élément au soutien de ses allégations selon lesquelles, d'une part, la rémunération demandée pour leur parrainage par les organisations professionnelles concernées revêtirait un caractère excessif et, d'autre part, la tarification adoptée par les organisateurs du nouveau salon présenterait un caractère discriminatoire en favorisant leurs adhérents au détriment des petits exposants ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 19 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; que, par voie de conséquence, la demande de mesures conservatoires doit être rejetée,

Décide :

Article 1er ­ La saisine enregistrée sous le numéro F 969 est déclarée irrecevable.

Article 2 ­ La demande de mesures conservatoires enregistrée sous le numéro M 202 est rejetée.