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Décisions

CCE, 18 juillet 2001, n° 2002-271

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

Électrodes de graphite

CCE n° 2002-271

18 juillet 2001

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

Vu le traité instituant la Communauté européenne, vu l'accord sur l'Espace économique européen, vu le règlement n° 17 du Conseil du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité (1), modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 1216-1999 (2), et notamment ses articles 3 et 15, vu la décision de la Commission du 24 janvier 2000 d'engager la procédure dans cette affaire, après avoir donné aux entreprises concernées l'occasion de faire connaître leur point de vue sur les griefs retenus par la Commission conformément à l'article 19, paragraphe 1, du règlement n° 17 et au règlement (CE) n° 2842-98 de la Commission du 22 décembre 1998 relatif à l'audition dans certaines procédures fondées sur les articles 85 et 86 du traité CE (3), après consultation du comité consultatif en matière d'ententes et de positions dominantes, considérant ce qui suit :

1. FAITS

1.1. RÉSUMÉ DE L'INFRACTION

(1) Les entreprises suivantes sont destinataires de la présente décision infligeant des amendes pour infraction à l'article 81 du traité et à l'article 53 de l'accord EEE :

- SGL Carbon AG (SGL)

- UCAR International Inc. (UCAR)

- VAW Aluminium AG (VAW)

- Showa Denko KK (Showa Denko)

- Tokai Carbon Co., Ltd (Tokai)

- Nippon Carbon Co., Ltd (Nippon)

- SEC Corporation (SEC)

- Carbide/Graphite Group, Inc. (C/G).

(2) L'infraction consiste dans la participation des producteurs d'électrodes de graphite à un accord et-ou une pratique concertée contraires à l'article 81, paragraphe 1, du traité et (depuis le 1er janvier 1994) à l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE, de caractère durable et qui couvraient l'ensemble de la Communauté ainsi que la Norvège, l'Autriche, la Suède et la Finlande. Concrètement, les producteurs concernés se sont entendus pour :

- fixer les prix du produit,

- établir et mettre en œuvre un mécanisme d'augmentation des prix,

- répartir les marchés et attribuer des quotas de parts de marché,

- ne pas augmenter les capacités de production,

- ne pas transférer de technologies en dehors du cercle des participants au cartel,

- établir un mécanisme de contrôle et de mise en application de leurs accords.

(3) Les entreprises ont participé à l'infraction pendant les périodes suivantes :

- SGL : de mai 1992 à mars 1998

- UCAR : de mai 1992 à mars 1998

- VAW : de mai 1992 à fin 1996 au moins

- Showa Denko : de mai 1992 à avril 1997 au moins

- Tokai : de mai 1992 à février 1998

- Nippon : de mai 1992 à février 1998

- SEC : de mai 1992 à février 1998

- C/G : de janvier 1993 à novembre 1996.

1.2. INDUSTRIE DES ÉLECTRODES DE GRAPHITE

1.2.1. MARCHÉ DE PRODUITS

(4) Les électrodes de graphite sont des colonnes de graphite obtenues par moulage céramique qui sont utilisées principalement pour la production d'acier dans les fours électriques à arc, également appelés " mini- aciéries électriques ". Le procédé utilisant l'arc électrique représente actuellement quelque 35 % de la production d'acier dans la Communauté et sa part ne cesse d'augmenter. La fabrication d'acier au moyen du four électrique à arc consiste essentiellement en un processus de recyclage par lequel des déchets d'acier sont convertis en acier neuf. Les électrodes peuvent atteindre 700 mm de diamètre et 2 800 mm de longueur et peser jusqu'à 2 200 kg. Elles sont intégrées à la structure du toit du four. Une fois que le four a été rempli de riblons sélectionnés, les électrodes sont abaissées jusqu'à ce que les pointes viennent presque toucher la ferraille. Le courant traverse l'électrode et passe de la pointe de l'électrode aux riblons. En tant que conducteurs, les électrodes de graphite génèrent suffisamment de chaleur (jusqu'à 3 000 °C) pour fondre la ferraille et affiner l'acier fondu pour en faire un produit fini. Neuf électrodes, rassemblées en colonnes de trois, sont utilisées dans le four électrique type à courant alternatif trois phases pour fondre la ferraille. Étant donné l'intensité du processus de fusion, la consommation d'électrodes atteint environ une unité par tranche de huit heures.

(5) Les électrodes de graphite sont produites à l'aide d'un coke aciculaire spécial, sous-produit de l'industrie pétrolière, et de brai de goudron de houille. Le processus de fabrication comporte six étapes, à savoir le formage, la cuisson, l'imprégnation, la recuisson, la graphitisation et l'usinage. Pendant la graphitisation, le produit est chauffé électriquement à plus de 3 000 °C et il est physiquement transformé en graphite, forme cristalline du carbone et matériau unique, à faible conductibilité électrique mais à forte conductibilité calorifique, très résistant et qui, par sa tenue à température élevée, se prête à l'utilisation dans les fours électriques à arc. La durée de fabrication d'une électrode est d'environ deux mois. Aucun produit n'est substituable aux électrodes de graphite.

1.2.2. OFFRE D'ÉLECTRODES DE GRAPHITE

(6) Les principaux producteurs d'électrodes de graphite dans le monde occidental sont des sociétés multinationales. Il s'agit d'une industrie de dimension essentiellement mondiale et qui se caractérise par une structure oligopolistique et la présence de barrières élevées à l'entrée.

La production mondiale totale d'électrodes de graphite s'est élevée à environ un million de tonnes en 1998. Dans la Communauté, la production a atteint quelque 280 000 tonnes, dont une proportion considérable a été exportée vers des pays tiers.

(7) En 1998, l'industrie comptait une cinquantaine de sites de production dans le monde. Le plus grand producteur d'électrodes de graphite, UCAR, détient une capacité de production totale de [...] (*) répartie entre 12 sites.

Dans la Communauté, il possède trois unités de production (en France, en Espagne et en Italie), avec une capacité d'environ [...]*. Le deuxième plus grand producteur dans le monde est SGL Carbon, avec une capacité de [...]*. Il possède des sites de production en Europe et en Amérique du Nord. Showa Denko se classe en troisième position : il produit au Japon et aux États-Unis d'Amérique, mais ne possède pas d'installations de production en Europe.

1.2.3. DEMANDE D'ÉLECTRODES DE GRAPHITE

(8) La demande d'électrodes de graphite est directement liée à la production d'acier en four électrique à arc. Les principaux clients sont les sidérurgistes, qui représentent environ 85 % de la demande. On recense environ 200 producteurs d'acier électrique dans la Communauté et en Norvège. En 1998, la production mondiale d'acier brut s'est élevée à 800 millions de tonnes, dont 280 millions de tonnes (35 %) produites dans des fours électriques à arc. La production d'acier de la Communauté a atteint au total 160 millions de tonnes, dont 60 millions (38 %) d'acier électrique. Parmi les États membres, le plus gros producteur d'acier est l'Allemagne (1997 : 45 millions de tonnes), mais seul un quart de sa production (11,8 millions de tonnes) provient de fours électriques à arc. L'Italie produit environ 60 % (15 millions de tonnes) de son acier dans des mini-aciéries électriques, c'est-à-dire des aciéries utilisant des fours électriques à arc pour produire de l'acier à partir de riblons (par opposition au procédé classique de production à partir du minerai de fer dans les hauts fourneaux-aciéries à l'oxygène).

(9) Au cours des vingt dernières années, la production par four électrique à arc a gagné en importance (35 % de la production mondiale en 1998 contre 18 % il y a vingt ans).

Dans les années 90 ont été construites des mini-aciéries électriques capables de produire aussi bien des aciers laminés plats que des produits longs. En outre, un certain nombre de grandes aciéries intégrées (utilisant le procédé haut fourneau-conversion à l'oxygène) en Europe sont passées du procédé traditionnel au procédé électrique pour une partie de leur production.

La production mondiale d'acier élaboré au four électrique est passée de 196 millions de tonnes en 1987 à 270 millions de tonnes en 1997, ce qui représente une augmentation de 38 % en dix ans. En 1995, quelque 20 millions de tonnes supplémentaires de capacité nette de production d'acier électrique ont été mises en service à l'échelle mondiale. D'après certaines prévisions, la capacité mondiale de production d'acier électrique aura rattrapé celle d'acier à l'oxygène dans dix ans.

(10) D'après les propres chiffres du cartel [voir Rapport-Prévisions CMS 1995 & 1996, points 72-73, appendice 20 (4)], la demande d'électrodes dans la Communauté en 1996 a été estimée à 160 000 tonnes. En Italie, le plus grand marché national, la demande a été estimée à 44 000 tonnes, en Allemagne à 31 000 tonnes, en Espagne à 24 000 tonnes, en France à 18 500 tonnes et au Royaume-Uni à 16 000 tonnes. (Pour la Norvège, la demande a été estimée à 1 200 tonnes).

(11) Le prix des électrodes de graphite est fixé dans la monnaie nationale par tonne pour l'électrode standard de 24 pouces de diamètre, franco destination. Au 1er janvier 1998, le prix était de 5 600 marks allemands (DEM) par tonne (ou équivalent). Pour les électrodes de grande dimension (et pour les électrodes DC) le prix est majoré de 15 à 30 %.

1.2.4. RESTRUCTURATION DU SECTEUR

(12) Dans les années 80, des améliorations apportées à la technologie des électrodes et de l'élaboration de l'acier à l'électricité ont permis une réduction substantielle de la consommation d'électrodes par tonne d'acier produite (de 6 kg/tonne en 1979 à 3 kg en 1991 - la moyenne pour l'Europe occidentale s'établit maintenant à environ 2,4 kg).

L'industrie sidérurgique a également connu un important processus de restructuration pendant cette période.

Jusque dans les années 80, l'industrie des électrodes de graphite en Europe comprenait un nombre relativement élevé de producteurs opérant à l'échelon national. En Allemagne, les principaux fabricants étaient Sigri, Conradty et VAW. En France et en Belgique, les producteurs locaux étaient Pechiney et UCF. Les producteurs italiens étaient Union Carbide et Electrocarbonium. Anglo-Great Lakes et Union Carbide produisaient des électrodes au Royaume-Uni. Parmi les autres producteurs figuraient Genosa en Espagne (détenu par Pechiney) et Steeg, détenu en partie par Sigri, en Autriche. Les producteurs américains Airco (détenu par BOC) et Great Lakes Carbon exportaient des électrodes vers le marché de l'Espace économique européen (EEE), de même que les producteurs japonais, dont Showa Denko, Tokai et NCK.

L'affaiblissement de la demande d'électrodes a donné lieu à un processus de restructuration de l'industrie mondiale des électrodes à la charnière des années 80 et 90. Plusieurs usines ont été fermées. Sigri GmbH (filiale à 100 % de Hoechst) a fusionné avec le producteur américain Great Lakes Carbon pour former SGL, qui a acquis SERS, la division graphite de Pechiney, en 1993. En 1990-1991, Union Carbide Corporation a créé sa division des produits de carbone en tant qu'entité séparée, UCAR. Airco a été vendue et restructurée pour constituer Carbide/Graphite Group (C/G).

Les producteurs occidentaux ont cherché à développer leurs ventes sur le marché asiatique pour utiliser les capacités excédentaires. L'industrie japonaise des électrodes de graphite a été mise en difficulté et le nombre de producteurs japonais a été ramené de six à quatre.

(13) Jusqu'en 1991, les deux plus petits producteurs allemands d'électrodes de graphite, VAW Carbon GmbH et C. Conradty Nümberg GmbH, disposaient d'une société de vente commune, Cova GmbH. Celle-ci a cessé ses activités en septembre 1991, mais elle n'a été officiellement liquidée qu'en 1994. Depuis 1991, les deux entreprises disposent chacune de leur propre structure de vente.

La rationalisation de l'industrie mondiale a ramené le nombre de producteurs ouest-européens de 16 à 9, dont deux leaders mondiaux, UCAR et SGL, qui détiennent plus de [...]* % du marché en Europe occidentale et [...]* % à l'échelle mondiale. En 1982, l'industrie tournait à moins de 60 % de sa capacité. En 1996, du fait de la rationalisation et de la restructuration, le taux d'utilisation des capacités était passé à 85 %.

1.2.5. MARCHÉ GÉOGRAPHIQUE EN CAUSE

(14) La Commission considère que le marché des électrodes de graphite est au moins à l'échelle de l'EEE. Plusieurs indicateurs tendent cependant à démontrer qu'il s'agit d'un marché à l'échelle mondiale.

(15) Le processus de restructuration qu'a connu l'industrie mondiale des électrodes de graphite à la fin des années 80 et au début des années 90 a abouti à une réduction sensible du nombre de producteurs occidentaux. Pendant la période considérée dans la présente décision, le marché était dominé par deux leaders mondiaux, UCAR et SGL, qui détenaient plus de [...]*, du marché de l'EEE et plus de [...]* % du marché mondial.

(16) Si les frais de transport et les barrières douanières peuvent quelque peu alourdir les coûts, ils n'empêchent pas les producteurs de nouer des relations commerciales à l'échelle mondiale. On peut en donner pour preuve le fait que Carbide Graphite Group a réussi, sans disposer d'aucun site de production en dehors des États-Unis, à se faire une clientèle en Europe et à y obtenir une part de marché d'environ 7 %.

(17) Enfin, le caractère mondial du marché des électrodes de graphite est également confirmé par la structure, l'organisation et le fonctionnement du cartel lui-même. Les producteurs concernés se sont entendus sur un système global de cartellisation du marché mondial des électrodes de graphite et ont tenu des réunions régulières qui portaient sur le marché mondial (voir, en particulier, les considérants 49, 51 et 55).

(18) La Commission conclut par conséquent à la dimension mondiale du marché des électrodes de graphite.

1.2.6. COMMERCE ENTRE ÉTATS

(19) Le marché des électrodes de graphite de l'EEE s'est chiffré à quelque 420 millions d'euros en 1998. Tous les États membres de la Communauté, plus la Norvège, partie contractante à l'accord EEE, sont producteurs d'acier électrique et consommateurs d'électrodes de graphite. Les deux principaux producteurs d'électrodes, SGL et UCAR, ont des installations de production dans plusieurs États membres. SGL a des usines en Allemagne, en Italie, en France, en Espagne, en Autriche et en Belgique. Les usines d'UCAR sont situées en France, en Italie et en Espagne. Les deux autres producteurs européens, Conradty et VAW Carbon, ne produisent qu'en Allemagne. Les produits sont commercialisés dans tous les États membres et en Norvège (voir tableau figurant ci-dessous). D'après les données fournies à la Commission, sur les électrodes de graphite fournies à l'intérieur de la Communauté à partir d'installations de production situées en Europe, la proportion des livraisons transfrontalières est d'environ 44 %. Les échanges entre États membres et, depuis sa création, à l'intérieur de l'EEE, sont par conséquent substantiels.

Le tableau suivant indique les livraisons cumulées de SGL, VAW Carbon (5), Conradty et UCAR à partir de sites de production communautaires à destination de chacun des États membres en 1996 (6) (les importations en provenance des États-Unis, du Japon et d'autres pays ne sont pas incluses).

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La Norvège produit de l'acier mais n'a pas de production nationale d'électrodes. Le marché norvégien des électrodes, qui oscille entre 1 200 et 2 000 tonnes par an, est alimenté principalement à partir de la Communauté, par UCAR, SGL et VAW. Avant leur adhésion à la Communauté en 1995, la Finlande et la Suède couvraient également la totalité de leur demande à l'aide de produits importés. L'Autriche (dont la production d'acier est relativement peu importante) disposait d'un fournisseur national (SGL) mais importait chaque année quelque 300 tonnes d'électrodes de la Communauté.

1.2.7. PRODUCTEURS

(20) Seuls neuf producteurs occidentaux approvisionnent effectivement le marché européen (EEE) en électrodes de graphite à l'heure actuelle : les deux leaders sont SGL Carbon et UCAR, qui satisfont ensemble [...]* %. Les deux plus petits producteurs européens, VAW et Conradty, tous deux établis en Allemagne, détiennent ensemble environ [...]* % du marché. C/G, avec une part d'environ [...]* %, approvisionne le marché de l'EEE à partir des États-Unis.

Les producteurs japonais détiennent ensemble une part de 3 à 4 % du marché de l'EEE. Les producteurs indiens, chinois et russes satisfont le reste de la demande de la Communauté et de l'EEE.

(21) SGL Carbon AG (SGL) est, avec une part de marché d'environ 20 %, le plus grand producteur mondial de produits de carbone et de graphite. C'est le deuxième plus grand producteur d'électrodes de graphite du monde, juste derrière UCAR. Le siège social de la société est établi à Wiesbaden, en Allemagne.

La structure de SGL est centrée sur trois domaines d'activité : carbone et graphite, graphites de qualité spéciale et produits techniques. Avec une part de 55 % des ventes du groupe, le carbone et le graphite constituent le principal domaine d'activité de la société. Les électrodes de graphite sont le produit leader dans ce domaine.

La société est issue de deux fusions, qui ont eu lieu respectivement en 1992 et 1993. En février 1992, Sigri GmbH, qui était à l'époque une filiale à 100 % de Hoechst AG, a fusionné ses activités de production de carbone et de graphite avec Great Lakes Carbon Group (GLC). En octobre 1993, les activités dans le domaine du graphite de Pechiney SA, grand producteur français d'emballages et d'aluminium, ont été transférées à SGL. En décembre 1994, SGL est passée du statut de société privée à responsabilité limitée (GmbH) à celui de société anonyme (AG). Depuis juin 1996, la société est totalement indépendante de Hoechst AG.

Le chiffre d'affaires total de SGL à l'échelle mondiale s'est élevé à 2,56 milliards de DEM (environ 1,262 milliard d'euros) en 2000. L'entreprise estime sa part du marché européen des électrodes de graphite à [...]* % en 1998. Les installations de production de SGL dans l'EEE sont situées en Allemagne, en Italie, en France, en Espagne, en Autriche et en Belgique.

(22) UCAR International Inc. (UCAR) est le plus grand producteur mondial d'électrodes de graphite et l'un des principaux fabricants de produits de graphite et de carbone du monde, avec des ventes couvrant quasiment tous les pays consommateurs et des installations de production en Amérique du Nord et du Sud, en Europe et en Asie. Le quartier général de la société, qui se trouvait auparavant à Danbury, dans le Connecticut (États-Unis) est maintenant établi à Nashville, dans le Tennessee. Son siège central pour l'Europe se trouve à Rungis, en France.

UCAR était auparavant la division des produits de carbone (Carbon Products Division) de Union Carbide Corporation. En février 1991, Union Carbide a vendu une part de 50 % de la société à Mitsubishi Corporation. En 1995, UCAR a réalisé une recapitalisation financée par l'emprunt et a procédé à une émission d'actions ordinaires en souscription publique sur le marché primaire.

(23) La société a pour activité le développement, la fabrication et la commercialisation de produits de carbone et de graphite destinés aux industries sidérurgique, des ferroalliages et de l'aluminium, à l'industrie chimique, à l'aérospatiale et au secteur des transports. Ses principaux produits sont les électrodes de graphite, les électrodes de carbone, les produits spéciaux au graphite et au carbone, les blocs cathodiques et le graphite flexible. Les électrodes de graphite représentaient [...]* % du produit d'exploitation total d'UCAR en 1999.

UCAR fabrique des électrodes de graphite dans huit pays. Géographiquement, ses ventes d'électrodes de graphite se répartissaient comme suit en 1998 : États-Unis et Canada : [...]* %; Afrique et Moyen-Orient : [...]* %; Europe occidentale : [...]* %; Europe orientale : [...]* %; Mexique [...]* %; Amérique du Sud : [...]* % et Asie- Pacifique : [...]* %.

Dans l'EEE, UCAR a des installations de production en France, en Italie et en Espagne.

En 2000, UCAR a réalisé un chiffre d'affaires total de 776 millions de dollars des États-Unis (USD) (environ 841 millions d'euros). Sa part du marché européen des électrodes de graphite était d'environ [...]* % en 1998.

(24) VAW Aluminium AG est un grand groupe industriel, dont les activités sont diversifiées et qui dispose d'un réseau de filiales. Pour les produits de carbone et de graphite, il dispose d'installations de production à Grevenbroich, en Allemagne. VAW Aluminium AG produit de l'aluminium, des produits laminés, des emballages souples, des pièces coulées, etc.

Jusqu'au 31 décembre 1995, VAW Carbon GmbH (ci-après dénommée " VAW Carbon "), filiale à 100 % de VAW Aluminium AG, faisait fonction de société de vente pour les produits de carbone et de graphite fabriqués par VAW Aluminium AG.

Le 1er janvier 1996, l'ensemble des activités de production de carbone et de graphite de VAW Aluminium AG implantées à Grevenbroich ont été transférées à une autre filiale à 100 %, qui a été rebaptisée VAW Carbon GmbH et par la suite absorbée par l'"ancienne" société du même nom. Dans le cadre d'une opération de rachat de l'entreprise par les salariés devenue effective au 1er juillet 1998, tous les actifs de la " nouvelle " VAW Carbon GmbH ont été vendus à une société nouvellement créée, Erftcarbon, dont le capital social était détenu pour 85 % par NatWest Ventures (Nominees) Ltd, de Londres, et pour 15 % par les cadres de l'entreprise.

VAW Carbon détenait une part du marché européen des électrodes de graphite d'environ 6 % en 1997. VAW Aluminium AG a réalisé en 2000 un chiffre d'affaires à l'échelle mondiale de 3,693 milliards d'euros.

(25) Showa Denko KK (SDK), qui fait partie du groupe japonais Fuyo, est l'un des grands de l'industrie chimique japonaise. L'entreprise comprend cinq grandes divisions, spécialisées respectivement dans les domaines de la pétrochimie, des produits chimiques, de l'électronique, des matières inorganiques et de l'aluminium. Pour renforcer et développer encore davantage ses activités dans le domaine de l'aluminium, SDK a fusionné avec Showa Aluminium Corporation le 30 mars 2001. Le siège social de SDK se trouve à Tokyo. SDK possède une filiale à 100 %, Showa Denko Carbon, Inc. (SDC), en Caroline du Sud (États-Unis), et une filiale européenne à Düsseldorf (Showa Denko Europe GmbH).

SDK a réalisé en 2000 un chiffre d'affaires au niveau du groupe de 747 milliards de yens japonais (JPY) (environ 7,508 milliards d'euros) à l'échelle mondiale. De 1992 à 1996, ses ventes d'électrodes en Europe ont été réalisées principalement en Allemagne. En 1995, elle a aussi enregistré des ventes en France, en Suède et au Royaume-Uni.

(26) Tokai Carbon Co., Ltd (Tokai) est l'un des principaux fabricants japonais de noir de carbone, d'électrodes de graphite et de carbone à grain fin. La société a son siège social à Tokyo. Les produits de carbone ont représenté [...]* % de son produit d'exploitation en 1998. La société possède douze filiales consolidées (onze au Japon et une aux États-Unis). Elle est entrée en activité en 1918 et a fusionné avec Toyo Carbon en 1992.

Tokai a fourni des électrodes de graphite au Royaume-Uni (1991-1998), à l'Allemagne (1996-1998), à la France (1997 uniquement), à la Suède (1991-1996) et à l'Autriche (1991 uniquement).

En 2000, Tokai a réalisé un chiffre d'affaires total à l'échelle mondiale de 65 milliards de JPY (environ 471 millions d'euros).

(27) Nippon Carbon Co., Ltd (Nippon), société créée en 1915, fabrique des électrodes et des produits de carbone. Les électrodes de graphite artificiel, le noir de carbone, la fibre de carbone et d'autres produits du carbone ont représenté 93 % de ses produits d'exploitation en 1998. Son siège social se trouve à Tokyo.

En 2000, la société a réalisé un chiffre d'affaires de 19 milliards de JPY (environ 189 millions d'euros). Au cours de la période de 1992 à 1996, les ventes d'électrodes de graphite de Nippon en Europe se sont limitées aux marchés finlandais, britannique et irlandais.

(28) SEC Corporation (SEC) a été créée en 1934 pour fabriquer des électrodes pour fours électriques à arc. La société est affiliée à Ohtani Steel KK, qui détient 23,61 % du capital émis. SEC a acquis Kyowa Carbon, fabricant de produits de carbone en 1986. Les électrodes de graphite ont représenté 45 % des produits d'exploitation non consolidés de l'entreprise au cours de l'exercice fiscal 1999. Le siège social de la société est situé à Amagasaki, Hyogo, Japon.

En Europe, ses ventes d'électrodes de graphite se sont limitées au marché allemand et aux années 1992, 1994 et 1995.

En 2000, SEC a réalisé à l'échelle mondiale un chiffre d'affaires total de 15,4 milliards de JPY (environ 155 millions d'euros).

(29) The Carbide/Graphite Group Inc. (C/G), successeur d'Airco, est un producteur américain d'électrodes de graphite, de coke aciculaire et de produits à base de carbure de calcium. Le groupe a été constitué à la suite d'une opération de rachat d'entreprise financé par l'endettement réalisée par les cadres d'Airco en juin 1988. C/G est le seul fabricant d'électrodes de graphite qui produit son propre coke aciculaire, la principale matière première entrant dans la fabrication des électrodes de graphite. Il vend également du coke aciculaire à d'autres fabricants d'électrodes de graphite. Le siège social de la société est établi à Pittsburgh, en Pennsylvanie.

En 2000, C/G a réalisé un chiffre d'affaires total à l'échelle mondiale de 207 millions d'USD (environ 225 millions d'euros).

C/G ne dispose pas d'installations de production en dehors des États-Unis. En Europe, elle distribue ses produits par l'intermédiaire d'agents. Sa part du marché des électrodes de graphite dans le monde et en Europe est d'environ 7 %.

(30) Le tableau suivant donne un aperçu de l'importance relative des différentes entreprises sur le marché mondial et celui de l'EEE et de leur taille respective.

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1.3. PROCÉDURE

1.3.1. ENQUÊTE ANTÉRIEURE DE LA COMMISSION

(31) La Commission a ouvert une première enquête sur le marché des électrodes de graphite en 1983, après avoir reçu des informations concernant l'existence possible d'une entente sur les prix entre producteurs européens. Parmi les sociétés concernées figuraient des filiales européennes de Union Carbide Corporation, les deux prédécesseurs de SGL (Sigri et Great Lakes Carbon) et la société commune de distribution (Cova) que détenaient à l'époque Conradty et VAW Carbon. L'enquête a révélé une quasi-identité des prix offerts par les principaux producteurs d'électrodes de graphite, mais les éléments de preuve découverts n'ont pas été jugés suffisants pour établir l'existence d'un accord de fixation des prix et le dossier a été classé sans suite en 1986.

1.3.2. ENQUÊTE OUVERTE PAR LA COMMISSION EN JUIN 1997

(32) Le 5 juin 1997, en application de l'article 14, paragraphe 3, du règlement n° 17 (11), des fonctionnaires de la Commission, accompagnés de représentants des autorités nationales de concurrence des États membres concernés, ont procédé à l'improviste à des vérifications simultanées dans les locaux des entreprises suivantes :

- SGL Carbon (Allemagne)

- VAW Carbon GmbH et VAW Aluminium AG (Allemagne)

- Conradty (Allemagne)

- UCAR (France).

Aucune preuve directe de l'existence d'un cartel ou de pratiques illicites n'a été trouvée à l'époque. La Commission a cependant obtenu chez SGL une série de tableaux indiquant les prix, anciens et futurs, des électrodes de graphite sur chaque marché national de la Communauté pour la période du 1er octobre 1994 au 30 septembre 1996, document dont la valeur probante n'est apparue qu'ultérieurement, lorsque des tableaux identiques ou similaires ont été obtenus d'autres producteurs (UCAR, C/G, Showa Denko) (considérants 63 à 65).

(33) Lors de la vérification effectuée chez VAW Carbon, l'un des représentants de la société a admis que celle-ci avait été prévenue par SGL qu'elle devait s'attendre à une vérification de la Commission (Appendice 1 : procès-verbal de notification du 6 juin 1997). SGL a elle-même confirmé, dans sa réponse du 30 juillet 1997, en application de l'article 11, avoir prévenu VAW et Conradty de l'imminence des vérifications. UCAR déclare également [...]* avoir été prévenu par SGL. Avant que les vérifications ne commencent, tous les dossiers pertinents avaient été " passés en revue " et les documents compromettants avaient été détruits ou mis en lieu sûr, ailleurs que dans les bureaux ou les résidences privées.

1.3.3. ENQUÊTES MENÉES DANS D'AUTRES RESSORTS

(34) Aux États-Unis, C/G a été cité à comparaître devant une chambre des mises en accusation (Grand Jury) en mai 1997. Le 5 juin 1997, des agents du Federal Bureau of Investigation ont procédé à des perquisitions dans les locaux de plusieurs producteurs. A la suite de ces perquisitions, des poursuites pénales ont été engagées contre SGL AG, UCAR International Inc., Showa Denko Carbon Inc. et Tokai Carbon Co. Ltd pour entente délictueuse (conspiracy) en vue de fixer les prix en violation de l'article 1er du Sherman Act 1890 (considérant 42).

1.3.4. DEMANDES EN APPLICATION DE L'ARTICLE 11 DU REGLEMENT N° 17

(35) En décembre 1997, la Commission a adressé des demandes de renseignements en application de l'article 11 du règlement n° 17 à quelque 67 consommateurs d'électrodes de graphite, en leur demandant de fournir des informations détaillées sur les fournisseurs, les prix et les rabais.

Une première série de demandes en application de l'article 11 a été envoyée à SGL, VAW Carbon et Conradty entre juin 1997 et juillet 1998, pour inviter ces sociétés à fournir des explications détaillées concernant leurs contacts avec les concurrents, l'alerte donnée par SGL au sujet des vérifications à venir et les relevés de frais de voyage de certains membres du personnel.

En décembre 1997, des demandes en application de l'article 11 (d'ordre général) ont été adressées aux producteurs japonais SDK, SEC, Tokai et Nippon, qui n'étaient pas, à l'époque, soupçonnés d'être directement impliqués dans les accords. Dans leur réponse, les trois dernières sociétés citées ont déclaré qu'elles fixaient leurs prix en Europe sur la base d'informations commerciales (market information) et de négociations avec les clients. De nouvelles demandes de renseignements leur ont été adressées en avril-mai 1998 concernant leur présence aux réunions.

Sur la base des informations reçues en 1998 et début 1999, une nouvelle série de demandes en application de l'article 11 ont été adressées par la Commission à SGL, VAW Carbon et Conradty en mars 1999, et à C/G le 8 juin 1999.

1.3.5. RÉACTIONS DES ENTREPRISES

(36) En février 1998 (après avoir reçu la demande de renseignements), le producteur japonais SDK a pris contact avec la Commission pour lui faire part de son intention de coopérer pleinement à l'enquête. Dans le courant de l'année, il a fourni certaines informations à la Commission (principalement oralement, mais aussi sous la forme de pièces écrites). [...]* contenant des informations détaillées sur le cartel, sa structure, ses règles de base et les réunions entre concurrents.

En mars 1998, UCAR a également pris contact avec la Commission : elle a admis oralement sa participation à une entente illégale et a offert de coopérer à l'enquête. Dans sa réponse du 20 août 1998 à la demande de la Commission en application de l'article 11, UCAR a confirmé sa participation à des " contacts illégaux " entre concurrents. Certaines preuves écrites ont également été fournies par UCAR dans le courant de l'année. Les 25 mars et 22 avril 1999, les conseils juridiques d'UCAR ont soumis au nom de la société des déclarations écrites faites par son [...]* et son [...]*, qui avaient tous deux représenté UCAR à plusieurs réunions du cartel. Le 22 juin 1999, UCAR a soumis une déclaration de la société reprenant les informations divulguées précédemment.

SGL a indiqué à la Commission en avril 1998 qu'elle était disposée à admettre l'infraction et à coopérer à l'enquête. Malgré quatre réunions avec des fonctionnaires de la Commission (les 16 avril, 21 avril, 3 août et 1er décembre 1998), SGL n'a cependant fourni aucune information ni aucun document. Enfin, le 8 juin 1999, après avoir reçu une demande en application de l'article 11, datée de mars de la même année, SGL a soumis une déclaration détaillée concernant le fonctionnement du cartel, en faisant toutefois valoir qu'elle n'était pas légalement tenue de le faire en application de l'article 11.

En juin 1998, le producteur américain Carbide-Graphite Group a pris contact avec la Commission pour offrir sa coopération et, par la suite, il a fourni certains documents concernant le cartel. Le 11 octobre 1999, Carbide-Graphite a soumis à la Commission une déclaration de la société concernant le cartel.

VAW Carbon, qui avait d'abord soutenu ne pas être en mesure, et en tout état de cause ne pas être tenue, de fournir des informations détaillées en réponse à la demande de renseignements de la Commission du 31 mars 1999, a annoncé par lettre du 12 juillet 1999 qu'il souhaitait apporter son concours à l'enquête et a présenté une déclaration concernant sa participation à la mise en œuvre de l'entente.

Conradty n'a jamais admis avoir pris part à de quelconques arrangements collusoires.

Hormis SDK, les producteurs japonais ont commencé par nier toute participation à des accords de fixation des prix en Europe et n'ont fourni que des réponses neutres et évasives. Bien qu'ils aient confirmé certains contacts avec SGL, UCAR et SDK aux dates considérées, ils ont expliqué qu'ils s'inscrivaient dans le cadre de l'objectif d'échange général d'informations (réponse de SEC du 13 juillet en application de l'article 11; réponse de Nippon Carbon du 18 décembre 1998 en application de l'article 11; réponses de Tokai des 18 novembre 1998 et 1er mars 1999 en application de l'article 11).

1.3.6. PROCÉDURE ADMINISTRATIVE

(37) Le 24 janvier 2000, la Commission a adressé une communication des griefs aux destinataires de la présente décision. Compte tenu de l'insuffisance des preuves documentaires directes à l'encontre de Conradty, et de certaines incohérences dans les renseignements recueillis concernant sa participation éventuelle, la Commission n'a pas engagé de procédure à l'encontre de cette entreprise.

(38) Les sociétés ont eu accès au dossier d'instruction de la Commission entre le 14 et le 23 février 2000. VAW Aluminium AG et Nippon n'ont pas consulté le dossier.

(39) SGL fait valoir qu'elle n'a pas eu un accès complet au dossier, la Commission ayant refusé de lui communiquer ses documents internes. SGL soutient en outre que la Commission ne lui a pas fourni de liste ni de description de ses documents internes. Il ne lui a donc pas été possible d'avoir une vue d'ensemble des contacts qui ont eu lieu entre la Commission et les autres sociétés dans le contexte de leur coopération (lettre de SGL du 9 mars 2000, réponse de SGL à la communication des griefs, p. 23).

Cet argument doit être réfuté. Selon une jurisprudence constante (voir les arrêts du Tribunal de première instance dans l'affaire T-7-89 Hercules contre Commission, Recueil 1991, p. II-1711, point 54 et les affaires jointes T-25-95, etc., Cimenteries CBR et autres contre Commission, non encore publiées au Recueil, point 420), la Commission n'est pas tenue, au titre du droit de défense, de fournir l'accès à ses dossiers internes pendant la procédure. Une liste et une description des documents internes, telles que demandées par SGL, ne contribueraient donc pas à l'exercice par l'entreprise de son droit de défense.

En ce qui concerne les contacts qui ont eu lieu avec les entreprises dans le contexte de leur coopération, la Commission considère que le raisonnement de SGL se fonde sur une prémisse totalement erronée. Ces contacts avec d'autres sociétés ne font en fait pas partie du dossier interne. Les documents sont conservés dans le dossier d'instruction normal auquel les parties ont eu accès. Plusieurs documents ont toutefois fait l'objet d'un traitement confidentiel, à la demande des sociétés concernées.

(40) Après avoir répondu par écrit à la communication des griefs, tous les destinataires de la présente décision, sauf Nippon Carbon, ont pris part à l'audition concernant l'affaire, qui a eu lieu le 25 mai 2000. Lors de l'audition, les entreprises ont également eu la possibilité de commenter les réponses écrites des autres parties, qui leur avaient été communiquées trois semaines auparavant.

(41) Dans leurs réponses écrites à la communication des griefs, aucun des producteurs n'a contesté la matérialité des faits sur lesquels la Commission a fondé sa communication des griefs.

1.3.7. POURSUITES ENGAGÉES DANS D'AUTRES RESSORTS

(42) A la suite des enquêtes menées aux États-Unis par le ministère de la justice et le Federal Bureau of Investigation, quatre producteurs, à savoir SDK Carbon Inc., filiale américaine de SDK, Tokai Carbon Co. Ltd (Japon), UCAR International Inc. et SGL Carbon AG, ont été inculpés d'infraction pénale à l'article 1er du Sherman Act. En outre, le président-directeur général de SGL a aussi été accusé personnellement d'entente délictueuse.

C/G a bénéficié de l'immunité de poursuites en vertu du régime d'amnistie applicable aux entreprises (corporate amnesty programme) mis en œuvre par le ministère.

Tous les accusés ont plaidé coupables des faits qui leur étaient reprochés et ont accepté de payer des amendes fixées respectivement à 32,5 millions d'USD pour SDK, 6 millions d'USD pour Tokai Carbon, 110 millions d'USD pour UCAR et 135 millions d'USD pour SGL.

En novembre 1999, SEC et Nippon ont également plaidé coupable et accepté de payer des amendes fixées respectivement à 4,8 millions d'USD et 2,5 millions d'USD.

Outre les amendes infligées à la société, le président directeur général de SGL, M. Robert Köhler, s'est vu infliger, à titre personnel, une amende de 10 millions d'USD, qu'il a accepté de payer. Dans une série de procès ultérieurs, l'ancien président et président directeur général d'UCAR, M. Robert Krass, a accepté, après négociation, de plaider coupable d'entente délictueuse, de purger une peine d'emprisonnement de dix sept mois et de s'acquitter d'une amende de 1,25 million d'USD. L'ancien directeur général d'UCAR a également été condamné sur la base d'un marchandage judiciaire à une peine d'emprisonnement de neuf mois et à une amende de 1 million d'USD.

En janvier 2000, la société japonaise Mitsubishi Corporation, qui détenait 50 % du capital d'UCAR de 1991 à 1995, a également été inculpée d'infraction pénale. En février 2000, UCAR a porté plainte au civil contre Mitsubishi Corporation et Union Carbide pour récupérer des fonds qui lui avaient, selon ses allégations, été soustraits en violation de la loi américaine sur les sociétés. En février 2001, Mitsubishi a été condamnée au terme d'un procès avec jury de deux semaines pour avoir favorisé et soutenu l'entente délictueuse entre producteurs d'électrodes de graphites. Elle s'est vu infliger une amende de 134 millions d'USD.

Des actions en triples dommages-intérêts (triple damages) ont également été intentées contre UCAR, SGL, C/G et SDK devant des tribunaux de district aux États-Unis pour le compte d'un groupe d'acheteurs. Le 18 mars 1999, UCAR a été condamnée à une amende de 11 millions de dollars canadiens (CAD) pour infraction pénale aux articles 45 et 46 de la loi canadienne sur la concurrence. Le 18 juillet 2000, SGL a également plaidé coupable et accepté de payer une amende de 12,5 millions de CAD. Des actions en triples dommages-intérêts ont été intentées contre UCAR, SGK, C/G et SDK par des acheteurs (producteurs d'acier) au Canada le 18 juin 1998 pour entente délictueuse et violation de la loi canadienne sur la concurrence. Dans certains cas, la restitution a été négociée.

Le 18 mars 1999, l'autorité de concurrence japonaise (Japan Fair Trade Commission) a adressé des avertissements à quatre fabricants japonais (Tokai, SDK, Nippon et SEC) pour infraction présumée à la loi antitrust japonaise.

1.4. DESCRIPTION DE L'INFRACTION

1.4.1. OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES : PREUVES DOCUMENTAIRES

(43) La relation des faits figurant ci-dessous aux considérants 44 à 93 se fonde principalement sur les documents suivants :

- [...]*

- [...]*

- [...]*

- [...]*

- [...]*

- [...]*

- [...]*

- [...]*

- [...]*

- [...]*.

1.4.2. PREMIERS CONTACTS

(44) Les contacts entre les principaux producteurs en vue de conclure des accords de répartition des marchés et de fixation des prix en Europe et ailleurs remontent à 1991.

Ils se sont déroulés dans un premier temps sur une base bilatérale entre Sigri (par la suite SGL) et UCAR. (SGL est issue de la fusion entre Sigri et GLC, devenue effective en février 1992). D'après la [...]* d'UCAR (confirmée indirectement par VAW), l'initiative aurait été prise par Sigri [...]*.

Lors de la première rencontre connue, au cours de laquelle les directeurs des ventes de Sigri et UCAR ont constaté qu'il était " nécessaire " d'augmenter les prix, il a été convenu que lorsque Sigri annoncerait une prochaine augmentation des prix en Allemagne, UCAR ferait de même, ce qui s'est effectivement passé.

Après cette première rencontre bilatérale, les mêmes personnes ont également organisé des réunions avec des représentants des autres producteurs européens, Pechiney et VAW Carbon [...]*.

(45) Des contacts avaient également été noués entre les producteurs occidentaux et japonais, à la fin de 1991, au sujet du marché mondial.

Des réunions se sont tenues à New York (entre UCAR, SDK, Tokai, Nippon et SEC), à Milan en septembre 1991 (entre UCAR et SDK, cette dernière représentant tous les producteurs japonais), et à Tokyo en avril 1992 (SGL, SDK, Tokai, Nippon et SEC).

Ces réunions ont été l'occasion de discussions sur les prix et les conditions en vigueur sur le marché du graphite dans le monde [...]*.

(46) Le projet de création d'un cartel à l'échelle mondiale entre UCAR, SGL et les producteurs japonais a vu le jour en mars 1992. Les [...]* d'UCAR et de SGL se sont rencontrés à Zurich le 15 mars. Le lendemain, les deux [...]* se sont réunis à Wiesbaden et ont convenu d'organiser une " réunion au sommet " avec leurs homologues japonais en vue de s'entendre sur un système mondial de contrôle du marché. SGL rejette sur le [...]* d'UCAR en poste à l'époque la responsabilité d'en avoir pris l'initiative [...]*. Qu'il en ait été ainsi ou pas, en réalité, c'est le [...]* de SGL qui a présenté le projet aux Japonais lors de sa visite à Tokyo, du 6 au 8 avril 1992, et qui a effectivement envoyé des invitations écrites [...]*.

Ces contacts ont débouché sur la rencontre à Londres, le 21 mai 1992, à l'invitation de SGL, des dirigeants des principaux producteurs mondiaux d'électrodes de graphite, qui se sont mis d'accord sur la structure, le mode de fonctionnement et l'organisation d'un cartel mondial destiné à contrôler le marché (considérants 49 et 50).

1.4.3. ORGANISATION ET PARTICIPANTS

1.4.3.1. Structure

(47) Les producteurs ont reconnu que le secteur des électrodes de graphite dans le monde reposait désormais sur trois " piliers " : SGL représentant l'Europe, UCAR les États-Unis, et le groupe constitué par SDK, Tokai, Nippon et SEC, le Japon [...]*. La structure, l'organisation et le fonctionnement du cartel se sont inspirés de cette appréciation commune du marché.

Les réunions du cartel se tenaient à plusieurs niveaux différents :

- réunions périodiques " des patrons " (Top guy), regroupant les [...]*, les [...]* ou les [...]* d'UCAR, de SGL et des producteurs japonais (une fois par an ou plus souvent si nécessaire),

- réunions " de travail " (Working Level) régulières des [...]* des producteurs et, parfois, de VAW Carbon (deux ou trois fois par an),

- réunions du groupe des producteurs " européens ", sans les Japonais (une ou deux fois par an),

- réunions nationales ou régionales consacrées à des marchés spécifiques,

- contacts bilatéraux entre les sociétés.

1.4.3.2. Participants aux réunions

(48)

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[...]*.

Les indications concernant les dates et les lieux de la plupart des réunions du cartel, ainsi que les personnes présentes, figurent à [...]*, également à [...]*.

La participation aux réunions de représentants de Tokai, Nippon et SEC est soit reconnue par ces derniers soit attestée par leurs notes de frais (voir les réponses de Tokai du 18 novembre 1998 et du 1er mars 1999, de Nippon du 18 décembre 1998 et de SEC du 13 juillet 1998 et leurs réponses à la communication des griefs).

1.4.4. PRINCIPES DIRECTEURS DU CARTEL

(49) Lors de la première réunion " des patrons ", le 21 mai 1992, à Londres, les grands producteurs se sont entendus sur le système global de cartellisation du marché mondial des électrodes de graphite. Les participants à cette réunion étaient SGL, UCAR, Mitsubishi (à l'époque, un actionnaire important d'UCAR et de son agent commercial, ainsi que producteur en son nom propre), SDK et Tokai (cette dernière représentant également les intérêts de Nippon et SEC).

VAW Carbon et C/G n'étaient pas invités et n'étaient pas présents.

Le [...]* SGL, qui dirigeait la réunion, parlait aussi au nom d'UCAR : les deux producteurs occidentaux ont adopté une position commune vis-à-vis de leurs homologues japonais. En fait, SDK et Tokai soutiennent tous deux que SGL et UCAR ont menacé les producteurs japonais et se sont comportés de manière franchement agressive envers eux ([...]* réponse de Tokai à la communication des griefs, p. 10).

(50) Durant la réunion, les principes directeurs suivants ont été exposés et adoptés [...]* :

- les prix des électrodes de graphite devaient être fixés au niveau mondial,

- les décisions relatives aux prix de chaque société devaient être arrêtées non par les directeurs commerciaux mais exclusivement par le président ou les directeurs généraux,

- le " producteur domestique " (home producer, leader du marché) devait fixer le prix du marché sur son " territoire " et les autres producteurs " suivraient " ensuite. (UCAR a été désignée leader aux États-Unis et dans certaines parties de l'Europe, SGL était responsable pour le reste de l'Europe, et les quatre producteurs japonais étaient chefs de file au Japon et dans certaines parties de l'Extrême-Orient),

- en ce qui concerne les marchés " non domestiques " (marchés d'exportation sur lesquels aucun producteur " domestique " ou leader du marché n'était présent), les prix seraient fixés par consensus,

- les producteurs " non domestiques " ne devaient pas exercer une concurrence agressive. Les parts de marché seraient attribuées, les producteurs " non domestiques " devant, en fin de compte, se retirer des marchés " domestiques " des autres (l'attribution des marchés " non domestiques " ou d'exportation devait être décidée lors des réunions " de travail " régulières),

- la capacité ne devait pas augmenter (les Japonais étaient censés réduire la leur),

- aucun transfert de technologie ne devait avoir lieu en dehors du cercle des producteurs participant au cartel.

Les réunions ultérieures du cartel ont porté sur la mise en application, la surveillance et, si nécessaire, la modification du système de base adopté par les " patrons " lors de cette réunion.

1.4.5. MISE EN APPLICATION DE L'ACCORD DE CARTEL

1.4.5.1. Réunions du cartel

i) Réunions " des patrons " et réunions " de travail "

(51) La réunion " des patrons " à Londres a été suivie presque immédiatement d'une réunion " de travail " à Zurich le 25 mai 1992. Des représentants [...]* des sociétés suivantes y participaient : SGL, UCAR, SDK, Tokai, SEC, Nippon, Pechiney et VAW Carbon.

Le marché mondial du graphite a été examiné région par région (Extrême-Orient, Moyen-Orient et Afrique, Europe occidentale, Europe orientale, Amérique latine et Amérique du Nord : voir appendice 20). Des parts ont été attribuées sur différents marchés [...]*. Le [...]* de SGL a été désigné comme partenaire de contact des producteurs japonais pour le marché de l'EEE ([...]* réponse de SGL à la communication des griefs, p. 11).

(52) La première réunion de fixation des prix pour le territoire européen a eu lieu à Berlin le 3 juin 1992, en présence [...]* de SGL et d'UCAR. Les producteurs se sont mis d'accord entre autres sur des prix cibles pour le marché de l'EEE [...]*. SGL conteste l'existence d'un tel accord (réponse de SGL à la communication des griefs, p. 11 et 12). Comme SGL admet, cependant, que des responsables de sa société se trouvaient à Berlin pour une réunion d'une organisation professionnelle [...]*, la Commission considère que la déclaration d'UCAR [...]* est plus convaincante sur ce point.

Le 28 août 1992, des directeurs de SGL et d'UCAR se sont rencontrés à Paris (Hôtel Sofitel) pour une autre réunion de haut niveau portant sur le marché européen et la fixation des prix [...]*.

Une deuxième réunion " de travail " a eu lieu à Lugano le 19 septembre 1992 en présence des producteurs japonais. UCAR et SGL s'étaient rencontrées peu de temps auparavant pour convenir des prix minimaux à appliquer sur le marché européen et les prix ont ensuite été communiqués aux participants japonais lors de la réunion de Lugano. Lors de cette même réunion, des volumes et des quotas ont été fixés pour les régions autres que l'Europe (Moyen-Orient, Extrême-Orient et Amérique latine) [...]*.

(53) Une autre réunion [...]* d'UCAR et de SGL a eu lieu à Milan entre le 27 et le 30 octobre 1992, ou vers ces dates, pour débattre de la question du marché européen : l'organisation quelque peu furtive de cette rencontre est décrite dans la [...]* (le [...]* n'avait même pas été prévenu de la tenue de cette réunion par son supérieur). Voir aussi [...]*.

La réunion suivante a été une nouvelle réunion " de travail ", qui s'est déroulée à Vienne le 3 mars 1993, en présence de représentants de SGL, UCAR, Tokai, SEC, Nippon et SDK. Les participants ont procédé à un échange général d'informations sur le marché des électrodes de graphite région par région. Des informations sur les prix et sur certains clients ont également été échangées et examinées [...]*.

(54) Les réunions " de travail " suivantes dont l'existence est connue ont eu lieu entre SGL, UCAR et le groupe des producteurs japonais en juillet 1993 à Singapour, le 8 septembre 1993 à Zurich, les 16 et 17 novembre 1993 à Zurich, le 25 juillet 1994 à Zurich, le 6 février 1995 à Tokyo, les 11 et 12 septembre 1995 à Rohrschach, en avril 1996 à Kyoto, en juillet 1996 à Meitingen, les 12 et 13 septembre 1996 à Rohrschach, en avril 1997 à Tokyo, en août 1997 en Asie du Sud-Est, en novembre 1997 à Hong Kong et en février 1998 à Bangkok [...]*.

UCAR, SGL et les producteurs japonais ont assisté à l'ensemble des réunions " de travail ". VAW Carbon reconnaît avoir participé à ces réunions jusqu'à la fin de 1996, mais un peu moins souvent que les autres participants. Elle n'a pas pris part aux réunions en dehors de l'Europe [...]*.

(55) Ces réunions " de travail " avaient généralement pour thème le marché mondial, chaque région géographique (Amérique du Nord, Amérique latine, Europe occidentale, Europe orientale, Asie-Pacifique et Moyen-Orient/ Afrique du Nord) étant examinée séparément. Outre les discussions relatives aux prix et à certains clients, les participants y échangeaient des renseignements sur leurs volumes de ventes respectifs, qui couvraient plusieurs exercices, à savoir l'année précédente, l'année en cours et les prévisions pour l'année suivante. Les données étaient additionnées par région et ventilées pays par pays pour chaque producteur, les Japonais formant un seul groupe [...]*. A chaque réunion, les données en volume étaient actualisées et revues pour toutes les régions, y compris l'Europe.

(56) On sait que des réunions " des patrons " ont eu lieu le 20 août 1994 ou aux environs de cette date, à Zurich, les 5 et 6 février 1995 à Tokyo et les 14 et 15 mars 1995 à Paris. (Quelques " patrons " se seraient également retrouvés à Londres le 13 novembre 1993, [...]*).

Certaines réunions ont été l'occasion de réaffirmer les principes adoptés à Londres en mai 1992 et de rappeler aux participants la nécessité de se conformer aux décisions arrêtées à ce moment-là.

Les " patrons " ont également convenu d'imposer certaines majorations de prix sur les électrodes de grande taille, c'est-à-dire un supplément par rapport au prix des électrodes standard de 24 pouces (par exemple, des majorations respectivement de 10 et de 40 % pour les électrodes de 28 et de 30 pouces).

Parmi les autres questions traitées lors de ces réunions figuraient la production et la commercialisation par SDC, filiale américaine de Showa Denko, d'électrodes de 28 3/4 pouces. Les autres producteurs y étaient opposés, car bien que le produit de SDC fût en concurrence avec leurs électrodes de 30 pouces, le prix pratiqué par SDC correspondait à celui (moins élevé) des électrodes de 28 pouces. SGL et UCAR auraient exercé des pressions sur SDK pour que cette dernière soit cesse de vendre le produit, soit le commercialise au prix des électrodes de 30 pouces et non de celles de 28 pouces. (SDC a finalement abandonné la production de ce modèle, après que SDK eut donné des garanties dans ce sens en avril 1995, [...]*).

ii) Réunions du groupe européen

(57) A partir de 1992, en plus de ces rencontres " des patrons " et de ces réunions " de travail " avec les producteurs japonais, des réunions de " groupe " concernant la fixation des prix pour l'Europe occidentale ont eu lieu, principalement à Zurich et à Lugano, auxquelles ont participé des représentants des deux grands producteurs, UCAR et SGL, ainsi que de VAW Carbon.

Selon UCAR, ces réunions du " groupe européen " ont cessé au bout d'un an environ [...]*. Après l'acquisition par SGL des intérêts de Pechiney dans le secteur des électrodes de graphite en 1993, les producteurs européens ont estimé (au dire d'UCAR) qu'il n'était plus nécessaire de se réunir tous ensemble en tant que groupe. D'après UCAR, SGL était en étroite relation avec les deux autres producteurs allemands, VAW Carbon et Conradty. Sans en avoir eu directement connaissance, UCAR s'est déclarée convaincue que SGL communiquait directement avec ces derniers lorsque le besoin de coordonner les prix en Europe se faisait sentir [...]*.

VAW Carbon indique [...]* qu'elle a pris part à ces réunions " une ou deux fois par an " (ce qui sous-entend qu'elles ont continué après 1993).

iii) Contacts bilatéraux

(58) UCAR et SGL ont continué à entretenir de nombreux contacts bilatéraux, tant à l'occasion de réunions que par le biais de conversations téléphoniques, afin de coordonner leurs prix et leur comportement commercial en Europe. Non seulement ces contacts avaient lieu régulièrement au niveau des [...]* pour l'Europe, mais ils comportaient également de fréquentes réunions et conversations téléphoniques entre les [...]* respectifs d'UCAR et de SGL [...]*.

Pour que ces contacts restent secrets, le [...]* des ventes de SGL avait fait installer à son domicile un téléphone réservé à cet effet et équipé d'un télécopieur. Les conversations avaient lieu deux ou trois fois par mois et débouchaient sur un accord concernant les " paramètres du marché à prendre en considération " (relevant market parameters, selon les termes employés par SGL).

Des rencontres personnelles, au rythme de deux ou trois par an, complétaient les contacts téléphoniques bilatéraux entre UCAR et SGL : elles ont eu lieu à plusieurs reprises à l'hôtel Hilton de l'aéroport de Zurich, dans un hôtel proche de l'aéroport de Genève, à l'hôtel Holiday Inn et au Sofitel à Paris. Ces réunions avaient habituellement lieu à l'automne, au moment de la programmation des hausses de prix pour l'année suivante.

D'après SGL, l'ordre du jour des réunions était invariablement le même. Les participants procédaient à des échanges de données commerciales, y compris des renseignements sur le volume de leurs ventes et les niveaux des prix. Ils débattaient également des prix pouvant être obtenus et des prévisions de ventes. A partir de ces informations, UCAR et SGL définissaient les nouveaux prix cibles pour chaque marché national. Ils se sont également en partie (Italie) mis d'accord sur le respect des " marchés domestiques " et la conservation des " gros clients " [...]*.

iv) Précautions prises pour dissimuler les réunions et les contacts

(59) Afin de masquer ou de dissimuler leurs contacts et leurs réunions, les participants ont pris des précautions bien étudiées [...]* :

- les documents n'étaient pas distribués lors des réunions ou étaient ensuite détruits,

- les frais occasionnés par les réunions étaient payés en espèces, sans mention explicite de ces réunions sur les demandes de remboursement de frais de voyage,

- pour les conversations téléphoniques, les dirigeants des sociétés s'appelaient directement, sans passer par des secrétaires (au début, le [...]* de SGL avait par mégarde été identifié par son nom lors d'un appel téléphonique à UCAR et par la suite, il a toujours dû se faire appeler laconiquement " [...]* ")

- les concurrents étaient contactés par le biais de téléphones mobiles et de télécopieurs privés (fonctionnant sur des lignes séparées exclusivement réservées à cet effet). Une fois que les autorités ont commencé leurs vérifications, les contacts n'ont plus été pris que lorsqu'ils étaient absolument nécessaires (le [...]* d'UCAR [...]* a reçu un téléphone mobile fonctionnant sur un réseau suisse),

- un système de noms de code a été imaginé pour dissimuler la véritable identité des sociétés et de certaines personnes. SGL était dénommée " BMW "; UCAR " Pinot "; le groupe des Japonais était surnommé " Cold ", acronyme composé à partir de la première lettre de leurs noms de code respectifs " Chivas ", " Ocean ", " Lawn " et " Dry ". VAW Carbon était appelée " Wave ". Les personnes avaient également des noms de code : le [...]* d'UCAR [...]* était connu sous le nom d'´Artemis ", d'autres étaient appelés " Moustache " et " Taurus " [...]*.

1.4.5.2. Accord sur les prix européens

(60) Entre 1992 et 1998, UCAR et SGL ont eu de nombreux contacts bilatéraux pour fixer et surveiller les prix en Europe (ils sont énumérés dans [...]*). Le [...]* ou le [...]* pour l'Europe des deux sociétés (qui assistaient également aux réunions " de travail " du cartel) élaboraient des recommandations de prix, basées généralement sur des renseignements fournis par les directeurs des ventes des différents pays. Ces " recommandations " étaient discutées entre UCAR et SGL, soit lors de rencontres personnelles, soit par téléphone (considérant 58). UCAR et SGL abordaient également la question des prix lors des réunions " de travail " avec les producteurs japonais, ou en marge de celles-ci : les Japonais étaient informés des prix européens au cours des réunions au niveau mondial, qui donnaient aussi lieu à des discussions sur les prix dans d'autres régions du monde.

Dans le cadre de leurs contacts bilatéraux, SGL et UCAR convenaient des prix pour l'Europe occidentale en utilisant le mark allemand comme monnaie de référence. Les prix correspondants pour chaque marché national étaient ensuite fixés dans la monnaie voulue, l'idée de base étant de garantir que les écarts de prix en Europe restent dans une fourchette de 5 à 10 % (voir, par exemple, [...]*).

En cas de désaccord sur les prix entre [...]* SGL et [...]* UCAR, la décision revenait aux [...]* des deux sociétés.

(61) UCAR a transmis à la Commission un tableau présentant pour chaque région géographique et pour chaque État membre de l'Union européenne les prix à appliquer à compter du 1er juillet 1992 et du 1er janvier 1993 (appendice 4).

Dans la plupart des cas, les prix figurent dans la monnaie nationale du pays. Pour les Pays-Bas, le Portugal et la Grèce, la monnaie utilisée est le mark allemand. En ce qui concerne le Danemark, la Finlande et la Norvège, le prix correspond au prix en couronnes suédoises converti dans la monnaie nationale voulue.

SGL a probablement télécopié le document à UCAR. (Toutefois, il se peut très bien qu'il s'agisse aussi en réalité de la liste de prix qui avait fait l'objet d'un accord lors de la réunion " de travail " du 25 mai 1992 ou de la rencontre à Berlin entre SGL et UCAR le 3 juin 1992.)

(62) Si SGL et UCAR étaient les véritables décideurs en matière de prix en Europe, des contacts et des réunions avaient également lieu à ce sujet entre les deux grands producteurs et les petits fournisseurs du marché de l'Europe occidentale.

VAW Carbon indique dans sa déclaration [...]* que, à l'occasion des réunions européennes auxquelles elle a assisté, les participants échangeaient leurs points de vue sur l'ampleur de l'augmentation de prix que le marché pourrait supporter dans les différents pays (apparemment, SGL menait toujours les discussions). D'après VAW Carbon, l'un ou l'autre des deux grands producteurs se chargeait de prendre l'initiative d'annoncer la hausse des prix.

C'est SGL qui communiquait aux autres producteurs les prix à appliquer et les " objectifs " à atteindre pour chaque marché national en Europe.

(63) Lors de ses vérifications dans les locaux de SGL en juin 1997, la Commission a découvert plusieurs tableaux de prix pour la période de 1994 à 1997 indiquant les prix des électrodes par pays et région du monde. Dans le cadre de l'exercice de fixation des prix, les objectifs des futures augmentations étaient définis bien à l'avance.

On a trouvé un tableau (daté du 12 août 1996) indiquant les prix qui étaient entrés en vigueur ou devaient être appliqués à sept dates différentes entre le 1er octobre 1994 et le 1er juillet 1996.

La partie relative à l'Europe occidentale est reproduite ci-après.

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(64) La principale valeur probante de ce tableau (qui, de prime abord, ne laissait pas présumer l'existence d'une collusion entre les producteurs et pouvait être présenté comme un document purement interne) réside dans le fait que d'autres producteurs étaient en possession de tableaux pratiquement identiques, qui ont maintenant été transmis à la Commission.

Le 13 mars 1998, SDK a remis à la Commission une version quasiment identique du tableau (référence : 13- 6-95-GV) [...]*. Une version ultérieure, datée du 2 août 1995, a été télécopiée à SDK par SGL Carbon le 23 août (appendice 7).

Le 25 août 1995, SGL a télécopié au président d'UCAR exactement le même tableau que celui adressé à SDK le 23 août (appendice 8).

Le 24 octobre 1995, le même document a été télécopié au groupe Carbide-Graphite par son agent commercial allemand, qui l'avait reçu par télécopieur de VAW Carbon (appendice 9; réponse fournie par C/G en application de l'article 11 le 22 juillet 1999, p. 6).

Des tableaux de prix similaires trouvés lors des vérifications effectuées chez SGL sont annexés (appendices 10 à 14).

Ces tableaux faisaient de toute évidence partie de l'exercice de fixation des prix pour les marchés européens et peuvent être considérés comme étant caractéristiques des documents que le cartel a produits et utilisés pendant toute la durée de son fonctionnement.

(65) [...]* a également fourni des tableaux établis à la main par [...]* (appendices 15 et 16), qu'elle explique comme suit :

"Il s'agit d'exemples de listes de marchés mondiaux d'électrodes de graphite indiquant les objectifs actuels et futurs en matière de prix [...]*. SGL élaborait périodiquement les listes de prix et les distribuait aux producteurs d'électrodes de graphite. "

([...]*, pièce jointe II, p. 6)

L'appendice 17, une note rédigée par le président directeur général de C/G en poste à l'époque au sujet d'une conversation téléphonique avec [...]* SGL concernant des prix cibles pour le marché européen, confirme le rôle actif joué par SGL dans la diffusion du prix à appliquer en Europe (p. 3 et 4 de la réponse de C/G du 22 juillet 1999 en application de l'article 11).

1.4.5.3. Mise en application des augmentations de prix

(66) Afin d'appliquer les prix convenus entre eux (et communiqués aux autres producteurs), SGL et UCAR décidaient au préalable laquelle des deux sociétés interviendrait en premier pour annoncer l'augmentation aux clients. Une fois que le prix était fixé, les producteurs ne pouvaient plus vendre moins cher.

Ce système avait été adopté dans son principe lors d'une réunion à Genève en octobre 1992 entre les [...]* de SGL et UCAR. (Ils avaient également convenu de respecter la " structure de la clientèle " existante, c'est-à-dire de ne pas chercher à attirer par des offres attractives les clients " établis " de la société rivale.)

Les positions respectives des deux producteurs sur un marché national donné en Europe déterminaient le choix de celui qui " mènerait " une hausse de prix sur ce marché.

Étant donné que SGL était plus fortement présente qu'UCAR en Allemagne et en Scandinavie, il lui incombait d'annoncer et de " mener " la hausse des prix sur ces marchés. UCAR était généralement chef de file pour les augmentations de prix en France et au Royaume-Uni.

Pour l'Italie et l'Espagne, les deux autres principaux marchés communautaires des électrodes, où UCAR et SGL détenaient des parts de marché approximativement égales, ils décidaient coup par coup laquelle des deux sociétés prendrait " publiquement " l'initiative d'imposer le nouveau prix sur le marché [...]*.

(67) Les hausses de prix étaient annoncées aux clients dans chaque pays par les directeurs des ventes au niveau national, qui étaient en contact avec certains de leurs homologues pour l'application de ces prix [...]*.

Habituellement, les producteurs ne distribuaient pas de listes de prix écrites aux clients (voir cependant, en ce qui concerne l'Italie, le considérant 77). Les hausses de prix étaient apparemment annoncées oralement, même si, parfois, elles étaient confirmées par lettre à la demande du client [...]*.

(68) UCAR et SGL ont invariablement appliqué à leurs clients les prix de catalogue convenus. Dans certains cas, une remise confidentielle, qui ne figurait pas sur la facture ou n'était pas mentionnée par écrit, était accordée.

D'après UCAR, les augmentations de prix " ont " généralement été " appliquées à la lettre " après 1992, contrairement à la période 1987-1991, avant la création du cartel [...]*.

(69) Les augmentations de prix étaient souvent " échelonnées " et entraient en vigueur à des dates différentes selon les pays ou groupes de pays. Dans les pays où le produit était facturé en marks allemands, l'augmentation de prix avait lieu au même moment qu'en Allemagne. En France, en Belgique et au Luxembourg, la hausse intervenait normalement à une date différente et elle avait pour effet de niveler, pour quelque temps, les prix dans l'ensemble de l'Europe (jusqu'à ce que le processus redémarre et que les prix soient relevés, en commençant par la zone ("DEM"). A l'occasion, une hausse de prix prévue pouvait être reportée. Ainsi, au début de 1997, UCAR a proposé d'appliquer une hausse de prix en Europe à compter du 1er juillet 1997. Une augmentation avait déjà eu lieu le 1er janvier de cette même année et SGL n'était " pas enthousiaste ", mais a néanmoins accepté de soutenir UCAR si celle-ci procédait à une hausse. En fin de compte, la majoration n'a cependant pas été appliquée [...]*.

Dès que les clients acceptaient l'augmentation de prix annoncée par les leaders des marchés, les petits producteurs " emboîtaient le pas " aux grands et appliquaient les nouveaux prix [...]*.

1.4.5.4. Augmentations de prix entre 1992 et 1997

(70) Au moment où le cartel a commencé de fonctionner (mai 1992), le prix " européen " des électrodes de graphite s'élevait à 3 600 DEM/tonne (les marchés utilisant le mark allemand étaient l'Allemagne, la Scandinavie, les Pays-Bas, la Grèce, le Portugal et la Suisse).

Le prix en marks allemands a augmenté par plusieurs " paliers " successifs (on peut en recenser neuf environ), pour atteindre 5 400 DEM le 1er juillet 1996, soit une hausse de 50 % en cinq ans (appendice 14).

En 1997, l'imminence de l'enquête sur l'entente a occasionné le report à 1998 de la hausse de prix prévue pour le 1er juillet 1997. En 1997-1998, les prix auraient stagné au niveau de 5 500 DEM/tonne. Au 1er janvier 1998, le prix s'établissait à 5 600 DEM/tonne.

1.4.5.5. Répartition des marchés

(71) Les quotas de parts de marché dévolus aux différents producteurs avaient été fixés à Zurich en mai 1992 [...]*.

Les véritables quotas adoptés à cette réunion ne sont consignés dans aucun document rédigé à l'époque.

Il est toutefois significatif qu'un document interne de SGL daté de novembre 1996, décrivant sa stratégie jusqu'à l'an 2000 (appendice 18), contienne les observations suivantes :

"Part de marché-concurrence

Les parts de marché resteront stables, avec 25 % pour SGL, 31 % pour UCAR et 24 % pour les Japonais "

et préconise plus loin :

"poursuivre l'équilibre, avec des parts de marché stables pour SGL (25 %), UCAR (31 %) et les Japonais (24 %) ".

[Les chiffres renvoient aux parts de marché à l'échelle mondiale].

En Europe occidentale, les prévisions pour 1996 attribuaient les parts de marché suivantes aux différents producteurs : SGL : 40 %, UCAR : 31 %, C/G : 8 %, Japonais : 3 % et " autres " (c'est-à-dire Conradty et VAW Carbon) : 13 % (appendice 19). En l'absence d'autres éléments de preuve et puisque cela n'a pas été contesté par les parties dans leurs réponses à la communication des griefs, on peut considérer que ces chiffres correspondent aux quotas ayant fait l'objet d'un accord.

(72) Lors des réunions " de travail " ultérieures, les participants ont dressé le bilan de leurs ventes sur les différents marchés et échangé des informations afin de contrôler le respect des quotas attribués.

D'après UCAR, tous les participants apportaient aux réunions des données sur le volume de leurs ventes, qui étaient ensuite rassemblées et disposées en tableau de trois colonnes : SGL, UCAR et le groupe des quatre producteurs japonais. Les données étaient additionnées par région et ventilées par pays au sein de chaque région [...]*. Ces faits sont confirmés par Tokai, qui indique que ces " prévisions de la demande " fournissaient aussi les estimations pour le proche avenir (réponse de Tokai à la communication des griefs, p. 8).

En vue de formaliser les échanges d'informations sur les volumes et d'améliorer l'efficacité de la collecte de données, SGL a proposé, lors de la réunion " des patrons " à Tokyo en février 1995, d'adopter un " système central de surveillance " (central monitoring system - CMS). Le cartel a chargé Tokai de recueillir les données auprès des producteurs japonais, d'UCAR et de SGL. L'appendice 20 est un exemple de rapport de ce type. Intitulé " CMS Report-Forecast 1995 & 1996 " (rapport-prévisions CMS 1995 et 1996), il commence par donner un aperçu général du marché mondial et des positions de SGL, d'UCAR et des Japonais sur une base régionale. Les trois " piliers " de l'industrie mondiale sont comparés à un triangle au sein duquel un équilibre des parts de marché doit être maintenu :

Le rapport de force en matière de parts de marché au sein de ce triangle penche en faveur de Pinot (alias UCAR) pendant ces quatre années ...

On note une distorsion croissante dans la répartition des parts de marché au sein du triangle, ce qui pourrait entraîner chez le perdant des réactions néfastes. Bien qu'il ne soit pas facile de définir le juste équilibre, nous devons être très attentifs à cet équilibre, d'autant que nous recueillons plus ou moins les fruits de la coopération ... "

Les prochaines années jusqu'à l'an 2000 seront très importantes et seront pour nous le moment de développer une nouvelle forme de symbiose, au sein de laquelle nous pourrons tous nous assurer des bénéfices raisonnables, alors que, d'un autre point de vue, en libérant de manière désordonnée la puissance accumulée et mise en réserve dans le cadre de la coopération, ces années pourraient marquer la destruction de ce à quoi nous avons jusqu'à présent donné forme ".

Quatre tableaux sont joints en annexe (un cinquième, intitulé Sales volume and share overview - " aperçu du volume des ventes et des parts de marché " est manquant).

(73) Aux fins de la présente affaire, les tableaux pertinents sont ceux intitulés World Review of sales volume and demand as of end August 1995 (analyse mondiale du volume des ventes et de la demande à fin août 95) et World Forecast Sales Volume and Demand 1996 as of end August 1995 (prévisions du volume des ventes et de la demande mondiales pour 1996 à fin août 1995). Pour l'Europe occidentale, tous les pays producteurs d'acier, y compris la Norvège, figurent dans les tableaux : le Benelux est traité comme une seule entité et l'Irlande semble incluse dans le Royaume-Uni. Le total est ventilé pour chaque pays sous les rubriques " Japon ", " SGL ", " UCAR ", " VAW Carbon " et " autres ". (Lorsque UCAR déclare se souvenir que les informations étaient présentées seulement en trois colonnes, elle semble avoir oublié les données concernant VAW Carbon.)

Alors que dans le texte du rapport les noms de code " BMW ", " Cold ", " Pinot " et " Wave " sont utilisés, le camouflage a disparu des tableaux joints en annexe.

Bien que le tableau intitulé Sales Volume and Share Overview (aperçu général du volume et de la répartition des ventes, tableau servant de base au commentaire général sur le marché mondial) soit manquant, il couvrait apparemment chaque année entre 1993 et 1996 et se présentait probablement de la même façon que le tableau intitulé Far East Review Market as of end August 1995 (analyse du marché de l'Extrême-Orient à fin août 1995), comprenant une part de marché " indicative " pour chacun des producteurs et des " ajustements " des ventes réelles pour se conformer aux quotas.

Les prévisions en termes de parts de marché au niveau mondial pour 1995 se rapprochent des parts de marché stables mentionnées par SGL dans son document d'orientation (considérant 71) : UCAR : 32,1 % (contre 31 %), SGL : 25,7 % (25 %) et les Japonais : 23,5 % (24 %).

En ce qui concerne l'Europe occidentale, les chiffres prévoient pour 1995 41 % pour SGL, 32,7 % pour UCAR, 6,6 % pour VAW Carbon et 3,2 % pour les Japonais.

Tokai dément que des quotas détaillés en volume ou en parts de marché pour le marché européen aient fait l'objet de discussions spécifiques avec les producteurs japonais (réponse de Tokai à la communication des griefs, p. 9 à 13). Même s'il en était ainsi, il convient de noter que Tokai (comme tous les autres producteurs japonais) était informée des chiffres en question pour le marché européen et n'a pas soulevé d'objection.

SGL fait valoir que le système central de surveillance n'a jamais été mis en place (réponse de SGL à la communication des griefs, p. 12), ce qui contredit les termes de la preuve documentaire figurant à l'appendice 20. L'affirmation de SGL est également démentie par les déclarations d'autres producteurs (réponse de Tokai à la communication des griefs, p. 10 [...]*). Selon UCAR, des informations sur les volumes ont encore été échangées au cours des dernières réunions de groupe à Hong Kong en novembre 1997 et à Bangkok en février 1998 [...]* (considérants 91 et 92).

1.4.5.6. Réunions et contacts au niveau local

i) Généralités

(74) Pendant la mise en œuvre de l'entente, des contacts et des réunions avaient également lieu fréquemment entre les participants au niveau de chaque pays, afin d'appliquer et de contrôler les prix convenus à un niveau supérieur dans le cadre des réunions " de travail ".

Étant donné qu'il était demandé aux personnes concernées de prendre des précautions pour dissimuler ou camoufler leurs contacts avec les concurrents, les preuves directes des faits allégués ne sont pas très nombreuses. [...]* et [...]* font néanmoins apparaître les caractéristiques générales du comportement collusoire.

Ces contacts et ces réunions englobaient l'Allemagne, la France, l'Italie, l'Espagne et le Royaume-Uni.

ii) Allemagne

(75) SGL est le principal producteur local et le leader incontestable du marché en Allemagne, mais ce pays constitue également un des débouchés les plus importants pour UCAR. D'après UCAR, les acheteurs d'électrodes de graphite prospectaient normalement le marché deux fois par an pour obtenir des prix, et demandaient généralement des offres de prix aux producteurs à l'automne pour l'année suivante. SGL communiquait le niveau et le calendrier des hausses de prix qu'elle envisageait à UCAR, qui appliquait les mêmes prix de base (bien qu'elle affirme avoir souvent accordé des remises). D'ordinaire, les prix étaient augmentés deux fois par an.

Occasionnellement, des réunions avaient lieu au niveau " local ". Alors que SGL soutient qu'il s'agissait de contacts sporadiques, généralement imprévus, qui avaient lieu " par hasard " à l'occasion de réunions de l'association professionnelle ([...]* réponse de SGL à la communication des griefs, p. 12), la description faite par UCAR laisse entrevoir quelque chose de moins spontané : des représentants des deux sociétés se rencontraient de temps en temps pour discuter des prix et pour échanger des informations synthétiques sur leurs ventes respectives en Allemagne (UCAR affirme qu'elle sous-estimait couramment ses ventes de 15 %). Les échanges portaient parfois aussi sur des clients bien précis [...]*.

Parfois, un représentant de VAW Carbon participait à ces réunions, qui se déroulaient dans des restaurants ou des bars et à l'occasion de la journée annuelle de la sidérurgie ("Eisenhüttentag ") à Düsseldorf [...]*. VAW Carbon, pour sa part, reconnaît maintenant avoir assisté à des réunions concernant des marchés nationaux européens bien précis (déclaration, p. 3). SGL a laissé entendre, sans fournir aucune précision, que des contacts sporadiques ont eu lieu aussi avec Conradty jusqu'en 1997 [...]*, mais aucun élément de preuve indépendant ne confirme sa déclaration.

iii) France

(76) Vers la fin de 1994 ou le début de 1995, le [...]* d'UCAR France a contacté son homologue de SGL pour vérifier les prix proposés aux clients. Ces contacts ont pris la forme de conversations téléphoniques (tous les deux mois à peu près) et de réunions (quatre fois par an environ).

UCAR est le " meneur " en France (considérant 62) et c'est donc lui qui fixait les prix sur le marché. A l'occasion d'une hausse de prix concertée, le représentant d'UCAR s'assurait auprès de SGL que celle-ci appliquait les mêmes prix.

D'après UCAR, les contacts téléphoniques étaient établis à partir d'une cabine publique [...]*.

iv) Italie

(77) UCAR et SGL ne sont pas fondamentalement en désaccord sur la date à laquelle ont été fixées les règles de base de la collusion sur le marché italien, bien que chacune des deux sociétés en attribue l'initiative à l'autre.

Le 27 octobre 1992, les [...]* de SGL et d'UCAR se sont rencontrés à Milan, en présence d'autres salariés des sociétés [...]*.

A partir de cette date, les représentants d'UCAR et de SGL ont eu des contacts pour discuter des modalités d'application des prix convenus sur le marché italien. Les directeurs commerciaux se rencontraient régulièrement, parfois jusqu'à une fois par mois. Les réunions avaient lieu dans les locaux de SGL ou dans des restaurants à Milan. Les directeurs généraux des filiales italiennes d'UCAR et de SGL se rencontraient aussi périodiquement. Ces réunions avaient pour objet de coordonner les mesures d'application des augmentations de prix, ainsi que d'analyser l'évolution du marché et de veiller à ce que les parts de marché convenues soient respectées et la pratique de prix défiant la concurrence évitée. Les clients étaient ensuite informés des augmentations de prix par lettres individuelles. Vers la fin novembre, des listes de prix leur étaient adressées, indiquant les prix en vigueur à compter du 1er janvier [...]*.

(78) C/G a fourni à la Commission des documents de son agent commercial italien relatifs à une réunion entre " nos concurrents bien connus ", à savoir les quatre producteurs-fournisseurs présents sur le marché italien (appendices 21 et 22).

D'après l'agent commercial de C/G (appendice 22) :

"la réunion annoncée a eu lieu le vendredi 12 novembre (1993).

Accords et décisions comme suit :

- le 22 novembre, ils adressent à leurs clients une lettre contenant la nouvelle liste de prix officielle pour 1994, ainsi que leurs conditions commerciales,

- prix officiel tiré de la liste officielle : 5 000 lires italiennes par kilogramme,

- prix net qu'ils vont offrir : 4 350 lires italiennes par kilogramme ".

D'après C/G (réponse fournie en application de l'article 11, p. 7), les " concurrents " étaient probablement SGL, UCAR, SDK et Cova. Comme Cova était inactive depuis 1991, C/G vise probablement VAW Carbon et Conradty. Il n'existe pas d'autres preuves de la participation de SDK aux réunions locales pour l'Italie.

SGL a également indiqué (déclaration, p. 21) que les réunions relatives au marché italien se déroulaient en présence d'UCAR, de Conradty, de VAW Carbon et (au début du fonctionnement du cartel) de Pechiney : ces réunions se tenaient une ou deux fois par an dans un restaurant de Milan en vue de fixer les prix et d'analyser l'évolution du marché.

v) Espagne

(79) Les directeurs généraux et les directeurs des ventes d'UCAR et de SGL pour l'Espagne ont aussi été régulièrement (et clandestinement) en contact au cours de la période concernée [...]*. Une fois que les prix du cartel avaient été fixés au niveau européen pour le marché espagnol, les directeurs des ventes pour l'Espagne en étaient informés et prenaient contact par téléphone (en utilisant des pseudonymes), afin de décider des modalités pratiques : qui serait le premier à annoncer la hausse de prix, et quand celle-ci prendrait effet. Normalement, la date d'entrée en vigueur des augmentations de prix était fixée au 1er février, moyennant un préavis de quatre mois, de sorte que ces contacts avaient généralement lieu au cours du dernier trimestre de l'année.

Outre les conversations téléphoniques, des réunions étaient parfois organisées pour examiner le marché espagnol, peut-être une fois par an. SGL a également confirmé la tenue des réunions entre les directeurs des ventes [...]*.

En plus des réunions bilatérales (UCAR/SGL), des contacts étaient établis épisodiquement entre SGL et les deux autres producteurs allemands approvisionnant le marché espagnol. Un représentant de VAW avait l'habitude de téléphoner à SGL deux fois par an environ pour se renseigner sur la date à laquelle SGL envisageait d'annoncer une hausse de prix et sur son montant [...]*.

vi) Royaume-Uni

(80) Les responsables commerciaux d'UCAR et de SGL au Royaume-Uni ont été régulièrement en contact téléphonique entre 1995 et la mi-1997 pour confronter les prix qu'ils appliquaient à certains clients (soupçonnés de donner délibérément des informations trompeuses à leurs fournisseurs pour faire baisser le prix).

Ces appels étaient effectués à partir de téléphones publics. A deux reprises au moins en 1996-1997, de brèves réunions ont eu lieu dans un hôtel proche de l'autoroute M1 près de Derby [...]*.

1.4.5.7. Participation au cartel de C/G et de VAW Carbon

i) C/G

(81) C/G, en tant que producteur américain commercialisant ses produits dans la Communauté par l'intermédiaire d'agents, a toujours été en position de suiveur en matière de prix : sa politique consistait à fixer ses prix légèrement au-dessous de ceux des deux grands fournisseurs du marché européen, décalage qui reflétait l'absence de soutien après-vente et la position de deuxième ou troisième fournisseur occupée par l'entreprise vis-à-vis de la plupart des clients.

C/G n'a participé ni aux réunions " des patrons " ni aux réunions " de travail " du cartel. Toutefois, la société reconnaît avoir eu connaissance de contacts entre concurrents concernant le marché des électrodes de graphite [...]*. Elle admet également avoir pris part à des réunions bilatérales et avoir eu des contacts téléphoniques avec les concurrents au sujet des prix et des marchés, principalement avec SGL, mais aussi avec UCAR, les sociétés japonaises et VAW Carbon [...]*. Les contacts ont commencé fin 1991 ou vers cette époque, lorsque [...]* SGL a pris l'initiative de rencontrer à New York celui qui était alors le président-directeur général de C/G. Selon C/G, les discussions ont porté sur la rentabilité et les prix dans le secteur, mais n'ont pas couvert de points particuliers [...]*.

La première réunion au cours de laquelle une discussion a eu lieu sur les conditions commerciales et les prix était (d'après la déclaration de C/G) celle de janvier 1993. Après un déjeuner à l'hôtel Park Lane, le [...]* de SGL a remis au [...]* de C/G une liste de prix (aujourd'hui perdue ou détruite) avec des pays, des colonnes et des dates, et lui a déclaré qu'il s'agissait des prix cibles de SGL (réponse de C/G fournie en application de l'article 11, p. 9 [...]*). Il convient cependant de noter que, dès mi-1992, des documents internes de C/G semblent indiquer que celle-ci avait connaissance d'arrangements concernant la répartition du marché (considérant 85).

C/G admet avoir eu d'autres réunions et d' autres conversations téléphoniques avec SGL concernant les volumes et les prix (réponse de C/G en application de l'article 11, p. 8 et 9).

Le 12 septembre 1995, un cadre supérieur de C/G a rencontré le [...]* de SGL (appendice 23). Le sujet abordé lors de cette réunion n'est mentionné nulle part, mais C/G avait déjà été informée, par l'intermédiaire de VAW Carbon, de la hausse de prix prévue pour le 1er janvier 1996 et a reçu ultérieurement, de la même source, la liste de prix de SGL (considérant 64).

(82) C/G est restée vague dans la description qu'elle donne de ses contacts avec ses concurrents. Toutefois, les documents suivants, qui rendent compte des contacts avec SGL pour 1996, peuvent être considérés comme représentatifs de la teneur de ces contacts pendant toute la période examinée.

Pendant l'été 1996, le [...]* de SGL a transmis par téléphone au président et président-directeur général de C/G en poste à l'époque les prix du moment et les prix cibles, dont ce dernier a alors pris note par écrit. Plusieurs contacts téléphoniques avaient déjà eu lieu sur le même sujet [...]*.

Bien que SGL tente de le nier (réponse de SGL à la communication des griefs, p. 13), il ressort du compte rendu de cette conversation rédigé par C/G (appendice 17) que SGL exerçait des pressions sur C/G pour que celle-ci limite ses ventes en Europe. On peut lire dans une note de bas de page :

"1) plus disposé à prendre des coups, garder la maîtrise du volume (2) faire preuve de modération (3) consommation de graphite en Europe- 24 000 tonnes (4) SGL prend tous les coups (5) [...] (6) [...] (7) [...] ".

[D'après C/G, les points 5 à 7 étaient des clients importants, dont elle craignait qu'ils puissent être la cible de représailles si elle ne se conformait pas aux attentes de SGL (réponse fournie par C/G en application de l'article 11 le 22 juillet 1999, p. 4.)] [...]*

SGL, qui a apparemment reproché à plusieurs reprises à C/G de vendre trop en Europe [...]*, a par la suite adressé une télécopie au président-directeur général de C/G le 25 septembre 1996 (appendice 24) énumérant ses estimations des ventes de C/G dans les différents pays et régions du monde de 1993 à 1996. En réponse à cette demande, le président-directeur général de C/G a inscrit les chiffres des ventes réelles de C/G en regard des estimations de SGL et les a renvoyés par télécopie à [...]* (réponse fournie par C/G en application de l'article 11 le 22 juillet 1999, p. 2).

Ultérieurement, lors d'une réunion entre des représentants de SGL et de C/G, qui a eu lieu à l'aéroport de Francfort le 19 novembre 1996 ou vers cette date, le directeur général de C/G responsable du secteur " électrodes " du département des ventes, a souligné que les estimations des ventes de C/G faites par SGL et transmises par télécopie le 25 septembre étaient incorrectes [...]*. Outre ses réunions et ses conversations avec SGL, C/G reconnaît à présent avoir eu des contacts à intervalles réguliers tant avec UCAR qu'avec les producteurs japonais [...]*. Aussi fragmentés ou sporadiques qu'ils aient pu être (c'est ainsi que C/G les décrit), ces contacts n'auraient laissé aux dirigeants de la société aucun doute sur les attentes nourries à leur égard par les autres producteurs.

SGL tente de minimiser ces contacts avec C/G en les justifiant par le fait que C/G souhaitait vendre du coke aciculaire à SGL (réponse de SGL à la communication des griefs, p. 13). Cette version est cependant contredite par C/G dans sa déclaration [...]* et sa réponse en application de l'article 11 du 22 juillet 1999, ainsi que par les documents susmentionnés. Il y est clairement démontré que SGL a fourni spontanément des informations concernant les prix cibles des électrodes de graphite et les dates de mise en application et qu'elle s'est plainte du volume des ventes de C/G sur certains marchés européens.

(83) C/G soutient pour sa part [...]* qu'elle " n'a utilisé aucune des informations que lui a transmises [...]* SGL pour fixer ses prix ". Au contraire, C/G a établi ses prix sur les marchés d'exportation en se fondant sur plusieurs éléments, y compris les informations fournies par les clients aux agents de C/G sur les prix qu'ils payaient pour des électrodes de graphite. C/G ne prenait pas de décision concernant les prix avant d'avoir obtenu des informations de la part des clients en question. Ce sont ces informations qui déterminaient les prix de C/G et non pas celles que lui communiquait [...]* SGL sur ce qui pouvait se passer à l'avenir.

(84) La Commission considère cependant que cette explication n'est pas sincère : C/G était informée à l'avance des augmentations de prix et des prix cibles arrêtés par UCAR et SGL sur les marchés européens et veillait à ne pas entraver ou perturber leurs projets. Elle savait bien que les prix payés par les clients et les prix cibles que SGL lui avait transmis étaient une seule et même chose. En communiquant à l'avance leurs prix cibles à C/G, les chefs de file avaient la certitude que leurs recommandations seraient suivies par C/G, qui (comme le montrent les éléments ci-dessous) adaptait de toute façon son comportement pour répondre aux souhaits du cartel et notamment de SGL.

(85) C/G fait valoir, en outre, que l'allégation, contenue dans la communication des griefs de la Commission, selon laquelle certains responsables avaient connaissance de l'existence du cartel n'est étayée par aucun fait (réponse de C/G à la communication des griefs, p. 2).

Dans ce contexte, la Commission déclare que dès le 22 juillet 1992 - deux mois après la réunion " des patrons " à Londres, le rapport hebdomadaire du président faisait observer (appendice 25) :

"(Nous) avons effectivement enregistré notre part en Allemagne pour la seconde moitié. Le tout à 4 000 DEM + /TM.

"L'expression " notre part " utilisée par C/G tend fortement à indiquer qu'une forme d'arrangement existait déjà, selon lequel elle devait restreindre ses ventes sur le marché considéré. VAW Carbon semble en tout cas avoir eu l'impression (appendice 26) que C/G avait accepté de limiter ses ventes en Allemagne. Bien que C/G ait déclaré ignorer pourquoi VAW Carbon avait eu cette impression (réponse fournie en application de l'article 11, p. 7), un tel arrangement cadrerait tout à fait avec l'insistance de SGL à répéter que C/G avait " trop " vendu en Europe.

Les salariés de C/G n'ignoraient pas non plus que les producteurs mondiaux de graphite avaient fait la " promesse non écrite " de ne pas augmenter leur capacité, comme cela avait été décidé à Londres en mai 1992 (appendice 27).

En fait, ses agents à Bruxelles ont même mentionné ouvertement le cas d'un gros client en France qui avait choisi de traiter avec C/G plutôt qu'avec SGL : " Nous avons bénéficié d'une mesure négative à l'encontre de l'un des Biggies - SGL. Il [c'est-à-dire le client en question] espère déstabiliser le cartel en mécontentant fortement l'une des parties " (appendice 28).

(86) La politique de C/G à l'égard du cartel est résumée dans une télécopie du 11 novembre 1993 adressée à ses agents allemands. Expliquant pourquoi les agents devaient immédiatement retirer une offre de remise de 100 DEM faite à des clients scandinaves (dont les factures sont libellées en marks allemands), le haut responsable de C/G écrit :

"Laissez-moi tenter de vous expliquer pourquoi nous adoptons cette position. Comme je vous l'ai déjà indiqué, nous sommes le numéro quatre mondial pour la production d'électrodes, loin derrière les trois premiers. Étant donné qu'UCAR, SGL et le groupe des Japonais contrôlent plus de 85 % de la production mondiale, nous ne sommes pas en mesure de faire quoi que ce soit pour contrecarrer leur volonté et leur capacité d'augmenter les prix dans le monde " (appendice 20).

C/G soutient que les derniers contacts avec SGL ont eu lieu en novembre 1996 [...]*. On ne dispose d'aucune information indiquant le contraire (considérant 115).

ii) VAW

(87) Dans sa réponse initiale à la demande de renseignements de la Commission du 31 mars 1999, VAW Carbon a reconnu avoir pris part à des réunions informelles avec des représentants de SGL, d'UCAR et des quatre producteurs japonais. D'aprèsVAWCarbon, les réunions auxquelles elle a participé se tenaient d'ordinaire en Suisse au rythme d'une ou deux par an. Elle n'a toutefois produit aucun document à ce sujet et a affirmé être incapable de fournir des précisions supplémentaires sur les dates, les lieux ou les participants à des réunions données. (En vérité, comme les autres participants, le représentant de VAW Carbon prenait des dispositions pour dissimuler sa participation aux réunions en s'abstenant d'établir des notes de frais.)

Par lettre du 12 juillet 1999, cependant, VAW Carbon a admis avoir participé, du 1er janvier 1992 à la fin de 1996, à des réunions régulières concernant l'organisation et la mise en œuvre d'un cartel dirigé par SGL et UCAR, qui attribuait des quotas en volume et fixait les prix des électrodes de graphite [...]*.

Selon VAW Carbon, sa position de " suiveur " en matière de prix était bien connue des deux principaux producteurs et sa participation aux réunions n'aurait même pas été indispensable au succès du cartel. Alors que SGL soutient qu'elle " ne faisait qu'informer " VAW Carbon de la date et du lieu des réunions (réponse de SGL à la communication des griefs, p. 13), VAW Carbon indique que SGL avait insisté pour que VAW prît part aux réunions régulières [...]*.

(88) VAW Carbon était présente à la première réunion " de travail " à Zurich le 25 mai 1992, qui a débouché sur la répartition des divers marchés entre les participants et l'établissement d'une liste de prix.

Le directeur général de VAW Carbon a assisté jusqu'à la fin de 1996 aux réunions multilatérales (´de travail ") organisées en Europe [...]*. Par la suite, l'entreprise n'y a plus été invitée (aucune explication n'est fournie à ce sujet).

VAW Carbon reconnaît également avoir participé à des réunions séparées du groupe européen une ou deux fois par an, ainsi qu'à des rencontres consacrées à certains marchés nationaux.

VAW Carbon a également joué le rôle de courroie de transmission entre le cartel et C/G, par le biais de ses agents de vente allemands (appendices 9 et 30) (le directeur général de VAW Carbon avait probablement obtenu les listes de prix auprès de SGL).

L'appendice 20 témoigne de la participation de VAW Carbon à la surveillance des volumes de vente (système CMS).

VAW (Carbon) prétend avoir cessé d'assister aux réunions " informelles " avec les concurrents vers la fin de 1996. Aucune information fournie par d'autres membres du cartel ne laisse supposer le contraire (considérant 115).

1.4.5.8. Poursuite des réunions du cartel après les vérifications

(89) Les vérifications auxquelles ont procédé simultanément la Commission et les autorités antitrust américaines en juin 1997 n'ont pas mis immédiatement fin au cartel.

(90) SDK affirme que lors de la réunion " de travail " tenue à Tokyo en avril 1997, elle avait déjà annoncé son intention de ne plus participer aux réunions [...]*. En fait, dès la fin de 1996, les clients aux États-Unis s'étaient fortement opposés à une augmentation de prix annoncée de 9 %, devant prendre effet au début de 1997, et avaient même déclaré publiquement qu'ils avaient saisi le ministère de la justice. Au dire de certains, la possibilité d'une enquête avait déjà été envisagée plusieurs mois avant que la Commission n'effectue ses vérifications.

(91) Immédiatement après les vérifications effectuées par la Commission le 5 juin 1997 - au sujet desquelles SGL avait mis en garde les autres producteurs - SGL et UCAR ont discuté de leurs conséquences. SGL a certifié à UCAR qu'aucun document compromettant n'avait été découvert [...]*.

Une réunion a été organisée en Malaisie à la mi-juillet 1997 en présence de représentants de SGL, de Nippon, de Tokai et de SEC. SDK et UCAR ont décliné l'invitation et la réunion s'est tenue en leur absence. On ne dispose pas de précisions sur les discussions et transactions qui ont eu lieu à cette occasion [...]*.

En novembre 1997, une autre réunion s'est tenue à Hong Kong pendant un jour et demi. Les participants étaient SGL, UCAR, Tokai, SEC et Nippon. Ils ont fait le point sur la procédure engagée par la Commission et révisé les graphiques du CMS (système central de surveillance) sur les volumes de vente pour chaque région et chaque marché ([...]*, voir aussi la réponse de SGL à la communication des griefs, p. 13).

(92) La dernière réunion tripartite connue a été organisée à Bangkok le 13 février 1998 [...]*. SGL et UCAR y ont participé et, du côté japonais, Tokai, SEC et Nippon. Les tableaux du système central de surveillance ont été cette fois encore ajustés, selon la pratique habituelle. SGL et UCAR ont informé les sociétés japonaises des prix en vigueur à ce moment-là en Europe.

Outre les réunions " de travail " avec les Japonais, les directeurs des ventes d'UCAR et de SGL pour l'Europe ont poursuivi leurs contacts réguliers pour coordonner leurs prix sur les marchés européens.

UCAR n'avait apparemment pas appliqué, comme prévu, une hausse de prix en Europe le 1er juillet 1997. L'augmentation avait été reportée au 1er janvier 1998. Les contacts téléphoniques et les réunions ont porté entre autres sur cette question.

(93) Outre les contacts fréquents qui avaient lieu au sujet des prix entre les [...]* pour l'Europe, les [...]* d'UCAR et de SGL ont eu aussi des conversations régulières (dont une au moyen d'un téléphone mobile enregistré en Suisse).

Ces contacts bilatéraux ont été maintenus au moins jusqu'en mars 1998 [...]*.

Alors que SGL, dans sa réponse à la communication des griefs (p. 13), dément avoir donné un tel conseil, [...]* et SEC (réponse à la communication des griefs, p. 12) confirment toutes deux que les dirigeants de SGL avaient dit aux producteurs japonais de ne pas coopérer avec la Commission dans le cadre des vérifications et de ne pas répondre aux demandes de renseignements qui leur seraient adressées en application de l'article 11. Étant donné que SGL avait averti plusieurs autres membres du cartel de l'imminence des vérifications (considérant 27), que, à l'exception de SDK, aucun des producteurs japonais n'a coopéré avec la Commission au départ et que leurs réponses aux demandes de renseignements qui leur ont été adressées par la Commission en application de l'article 11 sont restées très vagues, ces déclarations semblent crédibles à la Commission.

UCAR déclare que le [...]* de SGL a continué à téléphoner au directeur des ventes d'UCAR, même après que ce dernier eut été licencié par la société. Des contacts ont eu lieu à plusieurs reprises entre avril 1998 et octobre 1998.

2. APPRÉCIATION JURIDIQUE

2.1. TRAITÉ CE ET ACCORD EEE

2.1.1. RELATION ENTRE LE TRAITÉ CE ET L'ACCORD EEE

(94) Les arrangements décrits ci-dessus s'appliquaient à tous les pays producteurs d'acier de l'EEE, c'est-à- dire à tous les États membres actuels plus la Norvège (l'Islande et le Liechtenstein ne produisent pas d'acier). Les arrangements en question s'étendaient à l'Autriche, à la Suède et à la Finlande avant leur adhésion à la Communauté, le 1er janvier 1995.

L'accord EEE, qui contient des règles de concurrence analogues à celles du traité, est entré en vigueur le 1er janvier 1994. La présente décision tient par conséquent compte de l'applicabilité de ces règles (principalement l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE) à partir de cette date aux arrangements à l'égard desquels les griefs sont formulés.

Dans la mesure où les arrangements ont affecté la concurrence et les échanges entre États membres, l'article 81 du traité est applicable. En ce qui concerne le fonctionnement du cartel en Norvège et ses effets sur le commerce entre la Communauté et les États de l'AELE qui faisaient ou font partie de l'EEE (États de l'AELE/EEE) ainsi qu'entre les États de l'AELE/EEE eux-mêmes, ils tombent sous le coup de l'article 53 de l'accord EEE.

2.1.2. COMPÉTENCE

(95) Conformément à l'article 56, paragraphe 1, point c), et paragraphe 3, de l'accord EEE, la Commission est compétente dans la présente affaire pour appliquer aussi bien l'article 81, paragraphe 1, du traité que l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE, puisque le cartel avait des effets sensibles sur le commerce entre États membres et sur la concurrence à l'intérieur de la Communauté.

2.2. APPLICATION DE L'ARTICLE 81 DU TRAITÉ ET DE L'ARTICLE 53 DE L'ACCORD EEE

2.2.1. ARTICLE 81, PARAGRAPHE 1, DU TRAITÉ ET ARTICLE 53, PARAGRAPHE 1, DE L'ACCORD EEE

(96) L'article 81, paragraphe 1, du traité frappe d'interdiction, pour incompatibilité avec le marché commun, tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun, et notamment ceux qui consistent à fixer de façon directe ou indirecte les prix d'achat ou de vente ou d'autres conditions de transaction, à limiter ou contrôler la production et les débouchés, ou à répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement.

(97) L'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE (qui est calqué sur l'article 81, paragraphe 1, du traité) prévoit la même interdiction, mais en modifiant comme suit le libellé des conditions :

a) d'affecter le commerce " entre États membres " devient " entre les parties contractantes " et

b) d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence " à l'intérieur du marché commun " devient " à l'intérieur du territoire couvert par le présent accord (EEE) ".

2.2.2. ACCORDS ET PRATIQUES CONCERTÉES

(98) L'article 81, paragraphe 1, du traité et l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE interdisent les accords, les décisions d'associations d'entreprises et les pratiques concertées.

On peut considérer qu'il y a accord dès lors que les parties s'entendent sur un plan qui limite, ou est de nature à limiter, leur liberté commerciale en déterminant les lignes de leur action ou de leur abstention réciproque sur le marché. Il n'est pas nécessaire qu'un tel accord soit établi par écrit. Aucune formalité n'est nécessaire. Ni sanctions contractuelles ni procédures d'exécution ne sont requises. Le fait de l'accord peut être exprès ou ressortir implicitement du comportement des parties.

Dans son arrêt dans les affaires jointes T-305-94 etc. Limburgse Vinyl Maatschappij NV et autres contre Commission (PVC II) (Recueil 1999, p. II-931), le Tribunal de première instance a déclaré (au point 715) que " selon une jurisprudence constante, pour qu'il y ait accord, au sens de l'article (81, paragraphe 1) du traité, il suffit que les entreprises en cause aient exprimé leur volonté commune de se comporter sur le marché d'une manière déterminée ".

(99) Si l'article 81, paragraphe 1, du traité (13) distingue la notion de " pratiques concertées " de celles d'´accords entre entreprises " et de " décisions d'associations d'entreprises ", c'est dans le dessein d'appréhender sous les interdictions de cet article une forme de coordination entre entreprises qui, sans avoir été poussée jusqu'à la réalisation d'une convention proprement dite, substitue sciemment une coopération pratique entre elles aux risques de la concurrence (affaire 48/69, Imperial Chemical Industries contre Commission, Recueil 1972, p. 619).

Les critères de " coordination " et de " coopération " établis par la jurisprudence de la Cour, loin d'exiger l'élaboration d'un véritable " plan ", doivent être compris à la lumière de la conception inhérente aux dispositions du traité relatives à la concurrence et selon laquelle tout opérateur économique doit déterminer de manière autonome la politique qu'il entend suivre sur le marché commun. S'il est exact que cette exigence d'autonomie n'exclut pas le droit des opérateurs économiques de s'adapter intelligemment au comportement constaté ou à escompter de leurs concurrents, elle s'oppose cependant rigoureusement à toute prise de contact directe ou indirecte entre de tels opérateurs ayant pour objet ou pour effet soit d'influencer le comportement sur le marché d'un concurrent actuel ou potentiel, soit de dévoiler à un tel concurrent le comportement que l'on est décidé à, ou que l'on envisage de, tenir soi-même sur le marché (affaires jointes 40- 48-73, etc. Suiker Unie et autres contre Commission, Recueil 1975, p. 1663).

(100) Un tel comportement peut donc relever du champ d'application de l'article 81, paragraphe 1, du traité en tant que " pratique concertée " même lorsque les parties ne se sont pas expressément entendues sur un plan définissant leur action sur le marché mais recourent sciemment à des mécanismes collusoires qui facilitent la coordination de leur comportement commercial. (Voir aussi l'arrêt du Tribunal de première instance dans l'affaire T-7-89, Hercules contre Commission, Recueil 1991, p. II-1711, point 256).

Bien que la notion de pratique concertée au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité implique, outre la concertation entre les entreprises, un comportement sur le marché faisant suite à cette concertation et un lien de cause à effet entre ces deux éléments, il y a lieu de présumer, sous réserve de la preuve contraire, que les entreprises participant à la concertation et qui demeurent actives sur le marché tiennent compte des informations échangées avec leurs concurrents pour déterminer leur comportement sur ce marché. Il en sera d'autant plus ainsi lorsque la concertation a lieu sur une base régulière au cours d'une longue période (arrêt de la Cour de justice dans l'affaire C-199-92, Hüls contre Commission, Recueil 1999, p. I-4287, points 158 à 166).

(101) La Commission n'est pas nécessairement tenue, en particulier dans le cas d'une infraction complexe de longue durée, de qualifier l'infraction exclusivement de l'une ou l'autre de ces formes de comportement illicite. Les notions d'accords et de pratique concertée sont fluides et peuvent se chevaucher. Souvent même, il ne serait pas réaliste d'opérer une telle distinction, car l'infraction peut présenter simultanément les caractéristiques de ces deux types de comportement interdit alors que, prises individuellement, certaines de ses manifestations peuvent s'assimiler davantage à l'un qu'à l'autre. Il serait artificiel de subdiviser ce qui est manifestement une entreprise commune durable, caractérisée par une seule et même finalité, en y voyant plusieurs infractions distinctes. Un cartel peut par conséquent être à la fois un accord et une pratique concertée. L'article 81 du traité ne prévoit pas de qualification spécifique pour ce type d'infraction complexe. (Voir à nouveau l'arrêt du Tribunal de première instance dans l'affaire T-7-89, Hercules contre Commission, point 264.)

Dans son arrêt PVC II (considérant 98), le Tribunal de première instance (point 696) déclare que " dans le cadre d'une infraction complexe, qui a impliqué plusieurs producteurs pendant plusieurs années poursuivant un objectif de régulation en commun du marché, on ne saurait exiger de la Commission qu'elle qualifie précisément l'infraction, pour chaque entreprise et à chaque instant donné, d'accord ou de pratique concertée, dès lors que, en toute hypothèse, l'une et l'autre de ces formes d'infraction sont visées à l'article (81) du traité ".

(102) Un " accord " au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité peut aussi ne pas présenter le degré de sécurité requis pour l'exécution d'un contrat commercial de droit civil. En outre, dans le cas d'un cartel complexe de longue durée, le terme " accord " convient donc non seulement pour désigner un plan global ou les conditions expresses convenues, mais aussi la mise en œuvre de ce qui a été convenu sur la base des mêmes mécanismes et dans la poursuite du même objectif commun.

(103) Comme la Cour de justice (confirmant l'arrêt du Tribunal de première instance) l'a souligné dans l'affaire C-49-92P, Commission contre Anic Partecipazioni SpA (Recueil 1999, p. I-4125, point 81), il découle des termes de l'article 81, paragraphe 1, du traité que cet accord peut consister non seulement en un acte isolé, mais également en une série d'actes ou bien encore en un comportement continu.

Un cartel complexe peut donc être considéré comme une seule infraction se poursuivant pendant toute la durée de son existence. L'accord peut, dans certaines circonstances, être modifié, ou ses mécanismes peuvent être adaptés ou renforcés pour tenir compte de faits nouveaux. La validité de la présente appréciation n'est en rien affectée par la possibilité qu'un ou plusieurs éléments d'une série d'actes ou d'un comportement continu puissent, individuellement et intrinsèquement, constituer une infraction à l'article 81, paragraphe 1, du traité.

(104) Bien qu'un cartel soit une entreprise commune, chaque partie à l'accord peut jouer son propre rôle particulier. Une ou plusieurs d'entre elles peuvent jouer un rôle dominant en tant que chef(s) de file. Des conflits et des rivalités internes, voire des " tricheries ", ne sont pas exclus, mais ils n'empêcheront pas l'arrangement de constituer un accord et/ou une pratique concertée au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité dès lors qu'il existe un seul objectif commun et continu.

Le simple fait que chaque participant à l'entente puisse jouer un rôle adapté à sa situation particulière ne l'empêche pas d'être responsable de l'infraction dans son ensemble, y compris des actes commis par d'autres participants mais qui partagent le même objectif illicite et les mêmes effets anticoncurrentiels. Une entreprise qui participe à l'entreprise illicite commune par des actes qui contribuent à la réalisation de l'objectif commun est également responsable, pour toute la période de sa participation au projet commun, des actes commis par les autres participants dans le cadre de la même infraction. Tel est certainement le cas lorsqu'il est établi que l'entreprise en question connaissait les comportements illicites des autres participants, ou qu'elle pouvait raisonnablement les prévoir ou en être informée et qu'elle était prête à en accepter le risque (arrêt de la Cour de justice dans l'affaire Anic, point 83).

2.2.3. NATURE DE L'INFRACTION DANS LA PRÉSENTE AFFAIRE

(105) Il est établi que la collusion entre les producteurs d'électrodes de graphite sur le marché communautaire a commencé par des contacts établis dès 1990 et s'est développée fin 1991 et début 1992.

Il n'est pas nécessaire, pour qu'il y ait infraction à l'article 81, paragraphe 1, du traité, que les participants se soient préalablement entendus sur un plan global. La notion d' "accord" au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité s'appliquerait aux amorces d'entente et aux accords partiels et conditionnels conclus dans le cadre du processus de négociation conduisant à l'accord définitif. En outre, le processus de négociation et de préparation aboutissant à l'adoption d'un plan global de régulation du marché peut aussi (selon les circonstances) être qualifié à juste titre de pratique concertée.

Aux fins de la présente affaire, la Commission appréciera cependant les comportements en cause à partir de l'adoption définitive et de la mise en œuvre du projet d'entente par les producteurs.

(106) Lors de la première réunion " des patrons " qui s'est tenue à Londres le 21 mai 1992, les grands producteurs - SGL, UCAR et le " groupe " japonais - ont arrêté les principes de base qui devaient présider à la cartellisation du marché mondial des électrodes de graphite. Ils sont convenus de fixer les prix et de mettre en œuvre un mécanisme d'augmentation des prix, de répartir les marchés nationaux et d'attribuer des quotas de parts de marché. En outre, ils ont décidé d'un commun accord de ne pas augmenter les capacités de production et de ne pas transférer de technologies en dehors du cercle des participants au cartel. Un système de surveillance et de mise en application a été mis en place (description aux considérants 71 à 73).

Ce plan, auquel ils ont tous souscrit, et auquel VAW Carbon a également adhéré, a été mis en œuvre sur une période de plusieurs années à l'aide des mêmes mécanismes et dans la poursuite du même objectif commun d'élimination de la concurrence.

L'exécution du plan sous forme de réunions régulières n'implique pas qu'il soit question d' " accords " distincts mais constitue la mise en œuvre d'un seul et même projet global et illégal.

Étant donné que les producteurs ont participé de façon continue à un projet commun ayant pour objectif commun d'éliminer la concurrence dans le secteur des électrodes de graphite, la Commission considère que, pour ce qui concerne le marché de l'EEE, le comportement en cause a constitué une seule infraction continue à l'article 81, paragraphe 1, du traité et à l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE, dont chaque participant doit assumer la responsabilité pour la période pendant laquelle il a adhéré au projet commun.

(107) Bien que l'on soit fondé à considérer que les arrangements entre producteurs présentent toutes les caractéristiques d'un " accord " à part entière, certains éléments factuels de l'entreprise illicite pourraient à juste titre être qualifiés (le cas échéant) de pratique concertée.

C/G a participé de façon marginale au cartel, n'ayant assisté elle-même à aucune réunion de groupe. Bien que se tenant à la lisière, elle n'en a pas moins coopéré et sciemment adhéré aux objectifs globaux de l'entente. Ses contacts avec le cartel par l'intermédiaire de SGL et d'autres lui ont permis d'aligner sciemment son comportement commercial sur celui des autres producteurs et ont permis à ceux-ci de partir du principe qu'elle suivrait le mouvement et ne perturberait pas les initiatives prévues en matière de prix.

Bien qu'il ne soit pas nécessaire, dans le cas de C/G, de qualifier l'infraction de façon précise (arrêt PVC II, point 696), sa participation pourrait bien être considérée comme s'assimilant davantage à une pratique concertée. Il n'en reste pas moins que, quelle que soit la qualification exacte de son comportement au regard de l'article 81, paragraphe 1, du traité, C/G ne peut prétendre se dissocier du projet global auquel elle a sciemment participé.

2.2.4. RESTRICTION DE CONCURRENCE

(108) Le tissu d'accords en cause avait pour objet et pour effet de restreindre la concurrence dans la Communauté et l'EEE.

L'article 81, paragraphe 1, du traité et l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE mentionnent expressément comme restrictifs de la concurrence les accords et les pratiques concertées qui consistent à :

- fixer de façon directe ou indirecte les prix ou d'autres conditions de transaction,

- limiter ou contrôler la production, les débouchés ou le développement technique,

- répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement.

(109) Tels sont les objectifs essentiels des accords horizontaux examinés dans la présente affaire. Le prix étant le principal instrument de concurrence, en recourant à divers arrangements et mécanismes collusoires, les producteurs avaient tous pour objectif ultime de gonfler les prix à leur avantage et de les porter à un niveau supérieur à celui qui résulterait du jeu de la libre concurrence. Les accords de répartition des marchés et de fixation des prix sont de nature à restreindre la concurrence au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité et de l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE.

(110) Le présent cartel doit être considéré dans sa globalité et en tenant compte du contexte général, mais les principaux éléments du tissu d'accords et d'arrangements qui peuvent être qualifiés de restrictions de concurrence sont les suivants :

- fixation des prix,

- répartition des marchés et attribution de quotas de parts de marché,

- obligation faite aux producteurs " non domestiques " de se retirer de certains marchés ou de ne pas y livrer une concurrence agressive,

- gel/restriction/fermeture de capacités de production,

- limitation du transfert de technologie en dehors du cartel.

Ces principaux éléments ont été mis en œuvre par les membres du cartel essentiellement en :

- procédant à des augmentations concertées des prix,

- désignant le producteur chargé de prendre l'initiative des augmentations de prix sur chaque marché national,

- diffusant des listes de prix cibles actuels et futurs en vue de coordonner les augmentations de prix,

- concevant et mettant en œuvre un système d'information et de contrôle destiné à garantir la mise en application des accords restrictifs,

- participant à des réunions régulières et d'autres prises de contact en vue de convenir des restrictions susmentionnées et de les mettre en œuvre et/ou de les modifier si nécessaire.

2.2.5. EFFETS SUR LE COMMERCE ENTRE ÉTATS MEMBRES ET ENTRE PARTIES CONTRACTANTES DE L'EEE

(111) L'accord durable entre les producteurs a eu un effet sensible sur le commerce entre les États membres et entre les parties contractantes de l'EEE.

L'article 81, paragraphe 1, du traité vise les accords qui pourraient nuire à la réalisation d'un marché unique entre les États membres de l'Union européenne, que ce soit en cloisonnant les marchés nationaux ou en affectant la structure de la concurrence à l'intérieur du marché commun. De même, l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE vise les accords qui nuisent à la réalisation d'un Espace économique européen homogène.

Comme il est démontré dans la section " Commerce entre États " (considérant 19), le marché des électrodes de graphite se caractérise par un volume substantiel d'échanges entre États membres. Le volume des échanges entre la Communauté et l'AELE est également considérable : la Norvège s'approvisionne exclusivement à l'étranger, principalement auprès de SGL, UCAR et VAW Carbon, et avant l'adhésion de l'Autriche, de la Finlande et de la Suède, le premier de ces pays importait une part importante et les deux autres la totalité de leurs besoins d'électrodes de graphite.

L'application de l'article 81, paragraphe 1, du traité et de l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE à une entente ne se limite cependant pas à la partie des ventes des parties à l'entente qui impliquent effectivement un transfert de marchandises d'un pays à l'autre. Il n'est pas non plus nécessaire, pour que ces dispositions soient applicables, de démontrer que le comportement individuel de chaque participant, par opposition au cartel dans son ensemble, a affecté le commerce entre États membres (arrêt du Tribunal de première instance dans l'affaire T-13-89, Imperial Chemical Industries contre Commission, Recueil 1992, p. II-1021, point 304).

En l'espèce, les arrangements du cartel couvraient la quasi-totalité des échanges sur tout le territoire de la Communauté et de l'EEE dans ce secteur industriel important. Le retrait de certains marchés des fournisseurs " non domestiques " ainsi que l'existence d'un mécanisme de fixation des prix et d'attribution de quotas doivent avoir eu pour effet, ou étaient susceptibles d'avoir pour effet, de détourner systématiquement les courants commerciaux de l'orientation qu'ils auraient autrement connue (arrêt de la Cour de justice dans les affaires jointes 209 à 215 et 218/78, Van Landewyck et autres contre Commission, Recueil 1980, p. 3125, point 170).

Dans la mesure où les activités du cartel concernaient les ventes dans des pays qui ne sont pas membres de la Communauté ou de l'EEE, elles ne sont pas couvertes par la présente décision.

2.2.6. REGLES DE CONCURRENCE APPLICABLES A L'AUTRICHE, A LA FINLANDE, A LA NORVEGE ET A LA SUEDE

(112) L'accord EEE est entré en vigueur le 1er janvier 1994. Pour la période de fonctionnement du cartel antérieure à cette date, la seule disposition à prendre en considération aux fins de la présente procédure est l'article 81 du traité. Dans la mesure où les arrangements du cartel couvraient l'Autriche, la Finlande, la Norvège et la Suède (qui étaient alors membres de l'AELE) avant cette date, ils ne seront pas considérés comme constituant une violation de l'article 81, paragraphe 1, du traité.

Au cours de la période du 1er janvier au 31 décembre 1994, les dispositions de l'accord EEE étaient applicables aux quatre États de l'AELE qui avaient adhéré à l'EEE. Le cartel constituait par conséquent une violation de l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE, ainsi que de l'article 81, paragraphe 1, du traité, et la Commission est compétente pour appliquer ces deux dispositions. Le fonctionnement du cartel dans ces quatre États membres de l'AELE pendant cette période d'un an relève du champ d'application de l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE.

Après l'adhésion de l'Autriche, de la Finlande et de la Suède à la Communauté le 1er janvier 1995, l'article 81, paragraphe 1, du traité est devenu applicable à l'entente dans la mesure où elle affectait ces marchés. Le fonctionnement du cartel en Norvège a continué de constituer une violation de l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE.

Dans la pratique, il ressort de ce qui précède que, dans la mesure où l'entente a été mise en œuvre en Autriche, en Finlande, en Norvège et en Suède, elle a constitué une violation des règles de concurrence de l'EEE et/ou de la Communauté à partir du 1er janvier 1994.

2.2.7. DURÉE DE L'INFRACTION

(113) Bien qu'il ressorte des déclarations faites par SDK et UCAR que des contacts avaient eu lieu entre UCAR, Sigri et les producteurs japonais dès 1991, la Commission limitera en l'espèce son appréciation au regard des règles de concurrence, ainsi que la durée prise en considération, le cas échéant, pour le calcul des amendes, à la période commençant en mai 1992, date de la première réunion " des patrons " à Londres, au cours de laquelle ont été adoptés les principes de base qui devaient présider à la cartellisation du marché.

Il convient de préciser que, dans la mesure où l'entente couvrait l'Autriche, la Finlande, la Norvège et la Suède, cela ne constitue pas une infraction aux règles de concurrence avant le 1er janvier 1994, date de l'entrée en vigueur de l'accord EEE.

La participation à l'infraction d'UCAR, de SGL et des producteurs japonais à partir du 21 mai 1992 est prouvée par la participation de leurs présidents/directeurs généraux respectifs ou (dans le cas de Nippon et de SEC) d'une autre entreprise représentant leurs intérêts à la première réunion " des patrons ".

En tout état de cause, le fait que Nippon et SEC n'ont pas participé à la première réunion " des patrons " du 21 mai 1992 importe peu étant donné qu'elles étaient toutes deux représentées par Tokai et qu'elles étaient elles-mêmes présentes, de même que VAW Carbon, à la première réunion " de travail " qui n'a eu lieu que quatre jours plus tard.

La participation de C/G à la collusion sera considérée comme remontant à janvier 1993, lorsque la collusion sur les prix a été discutée ouvertement pour la première fois (considérant 81).

(114) Malgré les enquêtes menées par le Federal Bureau of Investigation et par la Commission, le cartel a continué de se réunir au moins jusqu'au 13 février 1998, la dernière réunion " de travail " connue ayant eu lieu à cette date, avec la participation de représentants de SGL, d'UCAR et de trois des producteurs japonais, à savoir SEC, Nippon et Tokai. En fait, les contacts illégaux se sont poursuivis entre SGL et UCAR pendant encore au moins un mois (considérant 93).

Bien qu'UCAR ait déclaré (considérant 93) que SGL a encore pris l'initiative de contacts pendant les six mois qui ont suivi, en l'absence de confirmation, la Commission considérera, aux fins du calcul des amendes, que la participation de SGL et d'UCAR au cartel a pris fin en mars 1998. Pour les trois producteurs japonais - SEC, Nippon et Tokai - la date retenue sera mi-février.

SDK avait déjà cessé de participer aux réunions à cette date. Bien qu'elle déclare que la nouvelle direction en place à Tokyo avait indiqué dès janvier 1997 que la participation à des pratiques anticoncurrentielles ne serait pas tolérée, un représentant de SDK s'est en fait rendu à la réunion de Tokyo les 9 et 10 avril 1997, apparemment pour informer les autres membres du cartel que l'entreprise n'y participerait plus. Cela est confirmé (indirectement) par d'autres membres du cartel, qui ne mentionnent pas SDK parmi les participants aux réunions ultérieures [...]*. Le mois d'avril 1997 peut donc être considéré comme la date à laquelle SDK s'est retirée des accords (réponse de Showa Denko à la communication des griefs, p. 8).

(115) VAW Carbon soutient avoir cessé d'assister aux réunions à la fin de 1996. En l'absence de preuve du contraire, la Commission retiendra cette date pour déterminer la durée de l'infraction dans son cas. C/G déclare qu'en 1996 son directeur général a demandé au [...]* de SGL de cesser de téléphoner à C/G (réponse en application de l'article 11, p. 9). La dernière réunion à laquelle elle admet avoir assisté est celle qui s'est tenue à Francfort en novembre 1996, date qui sera retenue comme étant celle à laquelle C/G s'est retirée du cartel [...]*.

2.2.8. DESTINATAIRES DE LA PRÉSENTE DÉCISION

(116) Il est établi par les faits décrits dans la première partie de la présente décision que SGL, UCAR, Showa Denko, Tokai, Nippon, SEC et C/G ont participé directement au cartel. En conséquence, chacune de ces sociétés est appelée à assumer la responsabilité de l'infraction et est par conséquent destinataire de la présente décision.

(117) Dans la présente procédure, la question de savoir qui doit être le destinataire ne se pose que dans un cas, où il convient d'examiner la question de l'imputation du comportement de la filiale à sa société mère. Ce cas est celui de VAW Carbon.

La société originelle VAW Carbon GmbH (inscrite à Grevenbroich) a fait fonction, jusqu'au 31 décembre 1995, de " simple société de vente " ("reine Vertriebsgesellschaft") pour les produits de carbone et de graphite fabriqués par VAW Aluminium AG. Selon la réponse de VAW Carbon du 9 juillet 1999 à la demande de renseignements de la Commission du 28 juin 1999 (point 2), elle était une filiale à 100 % de VAW Aluminium AG.

VAW Aluminium AG est un grand groupe industriel aux activités diversifiées et qui possède un réseau de filiales. Son secteur du carbone (et des électrodes de graphite) a été restructuré à deux reprises pendant la durée de l'entente.

(118) A partir du 1er janvier 1996, la totalité des activités liées au carbone et au graphite (y compris la production et les ventes) de VAW Aluminium AG ont été transférées à sa filiale à 100 % Ingal GmbH (Bonn), qui a été rebaptisée (d'où un risque de confusion) VAW Carbon GmbH (la " nouvelle " VAW Carbon GmbH). En janvier 1996, cette société a absorbé l'ancienne VAW Carbon GmbH (Grevenbroich), qui a été rayée du registre des sociétés.

En septembre 1998, dans le cadre d'une opération de rachat de l'entreprise par ses cadres [financée principalement par NatWest Ventures (Nominees) Ltd de Londres (´NatWest ")], les actifs de la " nouvelle " VAW Carbon GmbH ont été acquis, avec l'accord de VAW, par une société constituée à cet effet, Erftcarbon GmbH & Co KG, dont le capital social est détenu à 85 % par NatWest et à 15 % par les cadres.

En vertu de l'article 14 du contrat d'achat, toute amende ou sanction que la " nouvelle " VAW Carbon GmbH aurait pu encourir à la suite de l'enquête menée par la Commission dans la présente affaire demeurait cependant de la responsabilité de cette société. La " nouvelle " VAW Carbon GmbH existe toujours, mais seulement en tant que société dormante, sans activité commerciale. Son seul actif consiste dans le produit de la vente.

(119) La Commission a adressé la communication des griefs à VAW Aluminium AG, la société mère de VAW Carbon GmbH.

(120) Au cours de la procédure administrative, VAW Aluminium AG a fait valoir que la communication des griefs et toute décision concernant la présente affaire devaient être adressées, non pas à elle-même, mais à VAW Carbon GmbH. Selon VAW Aluminium AG, sa filiale était entièrement responsable de la vente et de la commercialisation du produit; VAW Aluminium AG n'a jamais participé au cartel (réponse de VAW à la communication des griefs, p. 1 et 2).

(121) La Commission réfute les arguments de VAW Aluminium AG. Dans l'arrêt qu'elle a rendu récemment dans l'affaire C-286-98 P, Stora Kopparbergs Bergslags SG contre Commission (Recueil 2000, p. I-9925, point 28), la Cour de justice a confirmé la conclusion du Tribunal de première instance selon laquelle une société mère peut être tenue responsable du comportement de sa filiale, en déclarant que " en présence d'une détention de la totalité du capital de celle-ci [la filiale], le Tribunal pouvait légitimement supposer [...] que la société mère exerçait effectivement une influence déterminante sur le comportement de sa filiale [...] ".

Cette présomption n'a pas été réfutée dans la présente affaire. VAW Aluminium AG n'a fourni aucune preuve attestant que VAW Carbon GmbH avait agi de manière autonome.

En outre, l'allégation de VAW Aluminium AG selon laquelle elle ignorait tout du comportement anticoncurrentiel de sa filiale à 100 % est contredite par le fait que la Commission a trouvé, lors des vérifications effectuées dans les locaux de VAW Aluminium AG, une note selon laquelle M. Müller de VAW Carbon GmbH avait informé VAW Aluminium AG de l'intention de la Commission de procédér à des vérifications concernant l'entente (considérant 33; appendice 1 : procès-verbal de notification du 6 juin 1997).

(122)La Commission considère par conséquent que VAW Aluminium AG peut être tenue pour responsable du comportement de VAW Carbon.

(123) La Commission note que jusqu'au 1er janvier 1996, VAW Aluminium AG s'occupait elle-même principalement et directement de la production des produits de carbone et de graphite; l'"ancienne" VAW Carbon GmbH (dont elle était de toute façon propriétaire à 100 %) servait simplement d'identité sociale à sa structure de vente. Le fait que par la suite, pendant à peu près un an, les activités de production de carbone et de graphite de VAW Aluminium AG ont été regroupées dans une filiale à 100 % ne modifie pas l'appréciation de la Commission sur ce point.

Enfin, la Commission considère que le recouvrement d'une amende éventuelle auprès d'une société dormante n'exerçant aucune activité commerciale et dont le maintien en vie dépend entièrement des avantages fiscaux qu'elle procure à VAW Aluminium AG pourrait poser des problèmes.

Pour toutes ces raisons, c'est VAW Aluminium AG qui figure parmi les destinataires de la présente décision.

2.3. MESURES CORRECTIVES

2.3.1. ARTICLE 3 DU REGLEMENT N° 17

(124) Si la Commission constate une infraction aux dispositions de l'article 81, paragraphe 1, du traité ou de l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE, elle peut exiger des entreprises concernées qu'elles y mettent fin, conformément à l'article 3 du règlement n° 17.

L'infraction s'est poursuivie longtemps après les enquêtes menées simultanément par la Commission et les autorités américaines. Des documents ont été détruits en prévision de l'enquête. En janvier 1998, SGL avait aussi tenté de persuader les producteurs japonais de ne pas coopérer avec la Commission. Il est impossible, en l'occurrence, d'affirmer avec certitude que l'infraction a cessé; en fait, certains éléments tendraient même à indiquer le contraire.

(125) Il incombe, par conséquent, à la Commission d'exiger des entreprises qui sont destinataires de la présente décision qu'elles mettent fin à l'infraction (si elles ne l'ont pas déjà fait) et qu'elles s'abstiennent désormais de tout accord, de toute pratique concertée ou de toute décision d'association d'entreprises qui pourrait avoir un objet ou un effet similaire.

2.3.2. ARTICLE 15, PARAGRAPHE 2, DU REGLEMENT N° 17

2.3.2.1. Considérations générales

(126) Conformément à l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 (14), la Commission peut, par voie de décision, infliger aux entreprises des amendes d'un montant de mille à un million d'euros, ou d'un montant supérieur mais n'excédant pas 10 % du chiffre d'affaires réalisé au cours de l'exercice social précédent par chacune des entreprises ayant participé à l'infraction lorsque, de propos délibéré ou par négligence, elles commettent une infraction aux dispositions de l'article 81, paragraphe 1, du traité et/ou de l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE.

(127) Pour déterminer le montant de l'amende, la Commission doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, et en particulier de la gravité et de la durée de l'infraction, qui sont les deux critères explicitement visés à l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17.

(128) Le rôle joué par chaque entreprise partie à l'infraction sera apprécié cas par cas. La Commission tiendra notamment compte, dans le montant de l'amende infligée, des éventuelles circonstances aggravantes ou atténuantes, et elle appliquera, le cas échéant, la communication concernant la non-imposition d'amendes ou la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (la " communication sur la clémence ") (15).

2.3.2.2. Montant de base des amendes

(129) Le montant de base est déterminé en fonction de la gravité et de la durée de l'infraction.

i) Gravité

(130) Pour apprécier la gravité de l'infraction, la Commission tiendra compte de sa nature, de son incidence réelle sur le marché et de l'étendue du marché géographique en cause.

- Nature de l'infraction

(131) Il ressort de ce qui précède que la présente infraction a principalement consisté en des pratiques de répartition des marchés et de fixation des prix, qui sont par leur nature même des violations très graves de l'article 81, paragraphe 1, du traité et de l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE.

(132) Le cartel a constitué une infraction délibérée à l'article 81, paragraphe 1, du traité et à l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE. Tout en étant parfaitement au courant du caractère illicite de leurs actes, les principaux producteurs ont ouvré de concert à l'instauration d'un système secret et institutionnalisé visant à restreindre le jeu de la concurrence dans un important secteur de l'industrie.

(133) Les arrangements du cartel ont infiltré l'ensemble du secteur. Ils étaient principalement conçus, dirigés et encouragés dans les sphères les plus élevées des entreprises concernées et étaient mis en œuvre pour le seul profit des producteurs participants, au détriment de leurs clients et, en dernière analyse, du grand public.

(134) La Commission estime donc que la présente infraction constitue par sa nature une violation très grave de l'article 81, paragraphe 1, du traité et de l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE.

- Incidence réelle de l'infraction sur le marché des électrodes de graphite dans l'EEE

(135) La Commission considère que l'infraction commise par les producteurs - qui, pendant la période à prendre en considération aux fins de la présente décision, représentaient près de 90 % du marché mondial et de l'EEE des électrodes de graphite - a eu une incidence réelle sur ce marché dans l'EEE. Les prix étaient non seulement convenus, mais aussi annoncés et mis en œuvre de concert.

(136) Le cartel se caractérisait par le souci constant de fixer des prix cibles (considérants 60 à 65). Une fois que les deux principaux producteurs, SGL et UCAR, s'étaient entendus sur les prix, ils décidaient lequel des deux annoncerait l'augmentation aux clients. A partir du moment où les clients acceptaient la hausse, les producteurs plus petits emboîtaient le pas aux grands et appliquaient les nouveaux prix. Bien qu'à l'occasion, certaines hausses convenues aient été retardées ou n'aient pas été appliquées, les prix pratiqués sur le marché ont suivi dans une très large mesure ceux décidés par le cartel pendant une période de six ans (considérants 66 à 69).

(137) Les prix des électrodes de graphite en Europe ont chuté à la suite de la baisse sensible de la demande et du processus de restructuration qu'a connu l'ensemble du secteur au cours des années 80. C'est ainsi que les prix pratiqués en 1990/1991 étaient inférieurs d'environ 50 % au niveau enregistré à la fin de 1996. Les arrangements du cartel ont été mis en œuvre sous la forme d'une série de hausses opérées par " paliers " entre 1992 et 1996. Pendant cette période, les prix ont quasiment doublé. Ce n'est qu'en 1997, du fait de l'imminence de l'enquête sur l'entente, que les augmentations déjà planifiées ont été reportées et que les prix ont stagné (considérant 70). Les hausses de prix ont donc eu une incidence évidente sur le marché, tout au moins en ce que les prix convenus étaient non seulement annoncés, mais aussi mis en œuvre.

(138) Selon UCAR, le cartel n'a produit qu'un effet limité sur l'industrie sidérurgique. Comme les prix pratiqués au début des années 90 étaient inférieurs au seuil de rentabilité, les hausses étaient nécessaires pour permettre la poursuite de l'activité de production d'électrodes de graphite. Ces hausses ont aussi entraîné des améliorations de qualité qui ont bénéficié au secteur de la sidérurgie (réponse d'UCAR à la communication des griefs, p. 18).

(139) Contrairement à l'allégation d'UCAR, la Commission estime qu'il convient d'interpréter l'augmentation sensible du prix des électrodes de graphite entre 1992 et 1996/1997 (considérant 70) en tenant compte du fait que les membres du cartel étaient convenus de prix cibles, d'une répartition des marchés et de l'instauration d'un système d'information et de surveillance (considérant 135). Même s'il est difficile de savoir si, et dans quelle mesure, les prix auraient été différents en l'absence d'entente, la mise en œuvre consciente des accords du cartel a entraîné un risque sérieux que les prix se situent à un niveau plus élevé que dans un contexte caractérisé par des conditions normales de concurrence.

(140) La Commission rejette également l'idée que des avantages sur le plan industriel et commercial tels que les améliorations de qualité ou l'emploi puissent être invoqués comme contrepartie aux effets négatifs produits par les violations des règles de concurrence. En tout état de cause, UCAR n'a pas établi l'existence d'un lien clair entre les prétendues améliorations de qualité et le cartel.

(141) C/G infère de sa faible présence en Europe et de la circonstance qu'elle a toujours été un suiveur en matière de prix que son comportement n'aurait pu avoir la moindre incidence négative sur la concurrence. Les contacts noués avec ses concurrents n'ont en rien influencé sa politique en matière de fixation de prix; cette dernière aurait été exactement la même sans lesdits contacts (réponse de C/G à la communication des griefs, p. 12 et étude économique présentée lors de l'audition).

(142) La Commission reconnaît que C/G s'est contentée de suivre les prix pratiqués sur le marché. Il est toutefois évident que la société, grâce à sa participation à l'entente, a obtenu des informations fondamentales sur les prix et les ventes. Elle se trouvait donc dans une situation totalement différente de celle d'autres opérateurs marginaux, qui ne disposaient pas de ces " informations de première main ". On ne peut donc accorder crédit ni donner suite à l'affirmation de C/G selon laquelle elle aurait continué de mener une politique indépendante de fixation des prix.

(143) En conclusion, la Commission estime que les parties concernées par la présente décision ne sont pas parvenues à réfuter ses conclusions concernant l'incidence réelle de l'infraction sur le marché des électrodes de graphite dans l'EEE.

- Taille du marché géographique en cause

(144) Aux fins de la détermination de la gravité de l'infraction, il est important de noter que le cartel couvrait l'ensemble du marché commun et, après sa création, l'ensemble de l'EEE.

- Conclusion de la Commission sur la gravité

(145) Eu égard à tous ces facteurs, la Commission considère que les entreprises concernées par la présente décision ont commis une infraction très grave.

- Traitement différencié

(146) Au sein de la catégorie des infractions très graves, l'éventail des amendes qui est prévu permet d'infliger aux entreprises un traitement différencié afin de tenir compte de la capacité économique effective de chacune de provoquer un préjudice significatif à la concurrence et pour fixer le montant à un niveau suffisamment dissuasif. La Commission observe qu'un tel exercice s'impose tout particulièrement lorsque, comme en l'espèce, il existe une grande disparité de taille entre les entreprises ayant participé à l'infraction.

(147) Du fait des circonstances de l'espèce, qui voit la participation de plusieurs entreprises, il est nécessaire, pour déterminer le montant de base des amendes, de prendre en considération le poids spécifique de chacune d'entre elles et, partant, l'incidence réelle de son comportement illicite sur la concurrence.

(148) A cette fin, il est en principe possible de répartir les entreprises concernées en trois catégories selon leur importance relative sur le marché en cause, compte tenu, le cas échéant, d'autres facteurs tels que la nécessité d'assurer un effet dissuasif.

(149) Pour comparer l'importance relative des différentes entreprises sur le marché en cause, la Commission estime approprié de s'appuyer en l'espèce sur le chiffre d'affaires mondial tiré par chacune de la vente du produit concerné, d'autant qu'il s'agissait d'un cartel mondial dont l'objet était entre autres de répartir les marchés au niveau de la planète et donc d'empêcher les forces concurrentielles de se déployer dans l'EEE. De surcroît, le chiffre d'affaires mondial d'un membre donné du cartel permet aussi de se faire une idée de sa contribution à l'efficacité du cartel dans son ensemble ou, à l'inverse, de l'instabilité qu'aurait connue le cartel s'il n'y avait pas participé. Cette comparaison repose sur les données relatives au chiffre d'affaires imputable au produit en question portant sur la dernière année de l'infraction, à savoir 1998.

(150) Il ressort très clairement du tableau figurant au considérant 30 que SGL et UCAR étaient les deux principaux producteurs d'électrodes de graphite au niveau mondial et au niveau de l'EEE. Elles se retrouvent donc dans la première catégorie. C/G, SDK et Tokai, dont les parts de marché étaient beaucoup plus faibles à l'échelle mondiale (entre 5 et 10 %), relèvent de la deuxième catégorie. VAW, SEC et Nippon, dont les parts de marché mondiales étaient inférieures à 5 %, sont placées dans la troisième catégorie.

(151) Eu égard aux considérations qui précèdent, le montant de départ de l'amende calculé sur la base du critère de l'importance relative sur le marché concerné s'établit comme suit pour les différentes catégories :

- SGL et UCAR : 40 millions d'euros,

- C/G, SDK et Tokai : 16 millions d'euros,

- VAW, SEC et Nippon : 8 millions d'euros,

(152) Pour

a) faire en sorte que l'amende ait un effet suffisamment dissuasif, et

b) prendre en considération le fait que les grandes entreprises disposent de connaissances et d'infrastructures juridico-économiques qui leur permettent de mieux apprécier le caractère infractionnel de leur comportement et les conséquences qui en découlent du point de vue du droit de la concurrence, la Commission détermine s'il convient d'adapter ce point de départ pour l'une quelconque des entreprises concernées.

(153) Dans le cas de VAW Aluminium AG (16) et de SDK, la Commission est d'avis qu'il y a lieu de majorer le montant de départ de l'amende calculé sur la base du critère de l'importance relative sur le marché concerné afin de tenir compte de la taille et des ressources globales de ces deux entreprises.

(154) Eu égard à ce qui précède, la Commission estime que dans le cas de VAW Aluminium AG, il est nécessaire, afin d'assurer l'effet dissuasif, d'affecter le montant de départ de l'amende mentionné au considérant 151 d'un coefficient de 1,25 pour atteindre 10 millions d'euros. Dans le cas de SDK, qui est de loin la plus grande des entreprises concernées par la présente décision, le montant de départ de l'amende mentionné au considérant 151 devrait être affecté d'un coefficient de 2,5 pour atteindre 40 millions d'euros.

ii) Durée de l'infraction

(155) Comme indiqué plus haut, la Commission considère que SGL, UCAR, Tokai, Nippon et SEC ont enfreint l'article 81, paragraphe 1, du traité et l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE entre mai 1992 et février/mars 1998. Elles ont commis une infraction de longue durée de cinq ans et neuf à dix mois. Les montants de départ des amendes calculés sur la base de la gravité sont par conséquent majorés de 55 %.

(156) SDK et VAW ont commis une infraction de moyenne durée de quatre ans et sept à onze mois. Le montant de départ de l'amende qui leur est infligée calculé sur la base de la gravité est par conséquent majoré de 45 %.

(157) C/G a commis une infraction de moyenne durée de trois ans et dix mois. Le montant de départ de l'amende calculé sur la base de la gravité est par conséquent augmenté de 35 %.

iii) Conclusion sur les montants de base

(158) En conséquence, la Commission fixe les montants de base des amendes à 62 millions d'euros pour SGL et UCAR, à 14,5 millions d'euros pour VAW Aluminium AG, à 58 millions d'euros pour SDK, à 24,8 millions d'euros pour Tokai, à 21,6 millions d'euros pour C/G et 12,4 millions d'euros pour à SEC et Nippon.

2.3.2.3. Amendes individuelles

(159) Eu égard à ses conclusions relatives au montant de base des amendes, la Commission doit maintenant apprécier s'il existe des circonstances atténuantes ou aggravantes pour chacune des entreprises prises individuellement et, le cas échéant, appliquer la communication sur la clémence.

i) SGL

- Circonstances aggravantes

(160) Dans le cas de SGL, la gravité de l'infraction est renforcée par les circonstances suivantes :

- le fait que SGL ait été l'un des chefs de file et des instigateurs du cartel,

- les tentatives de la société d'entraver la procédure de la Commission en avertissant les autres entreprises de l'imminence des vérifications,

- la poursuite de cette infraction flagrante et indiscutable après les vérifications.

- Arguments de SGL

(161) SGL conteste la conclusion de la Commission selon laquelle elle aurait été l'un des chefs de fil et instigateurs du cartel. Selon elle, c'est UCAR et ses anciennes sociétés mères Union Carbide et Mitsubishi Corporation qui ont noué les premiers contacts et joué le rôle de meneurs (réponse de SGL à la communication des griefs, p. 14 à 16).

- Arguments de la Commission

(162) Il ressort des faits tels que décrits dans la première partie de la présente décision que SGL a été le pilier " européen " du cartel (considérant 47). C'est SGL, de pair avec UCAR, qui a pris les principales décisions concernant les prix cibles et la répartition des marchés dans les États membres et avait des contacts réguliers avec VAW Carbon et C/G.

(163) Enfin, le fait qu'UCAR ait aussi joué le rôle de meneur dans l'infraction ne peut excuser, même en partie, le comportement de SGL. Les deux entreprises étaient de loin les membres les plus puissants du cartel et partageaient la même ambition, à savoir être le numéro un sur le marché mondial du graphite.

- Conclusion

(164) Les circonstances aggravantes substantielles présentées ci-dessus justifient une majoration de 85 % du montant de base de l'amende.

- Circonstances atténuantes

(165) Aucune circonstance atténuante relative à l'infraction ne justifie une réduction du montant de base dans le cas de SGL.

(166) Le montant approprié de l'amende est donc fixé à 114,7 millions d'euros.

- Application de la communication sur la clémence

(167) Sur la base de la communication sur la clémence, la Commission accordera à SGL, en reconnaissance de sa coopération, une réduction du montant de l'amende jugé approprié.

(168) Selon le titre D de la communication, une entreprise qui ne satisfait pas à toutes les conditions exposées aux titres B ou C peut néanmoins bénéficier d'une réduction significative de 10 à 50 % du montant de l'amende qui lui aurait été infligée en l'absence de coopération lorsque (par exemple) :

- avant l'envoi d'une communication des griefs, elle fournit à la Commission des informations, des documents ou d'autres éléments de preuve qui contribuent à confirmer l'existence de l'infraction commise,

- après avoir reçu la communication des griefs, elle informe la Commission qu'elle ne conteste pas la matérialité des faits sur lesquels la Commission fonde ses accusations.

(169) Même si l'infraction s'est poursuivie plusieurs mois après l'enquête, SGL a coopéré à un stade précoce et il conviendrait d'en tenir dûment compte dans la réduction de l'amende.

- Arguments de SGL

(170) SGL affirme que sa coopération est allée beaucoup plus loin sur le fond que celle d'autres entreprises et qu'elle a commencé à un stade précoce. Des premiers contacts ont été noués avec la Commission dès avril 1998, lorsque la société a annoncé sa volonté de coopérer. Toutefois, c'est l'existence, en parallèle, d'une procédure pénale et civile aux États-Unis et l'incompatibilité entre les différents systèmes de poursuites judiciaires qui ont empêché SGL de fournir toute information pertinente.

(171) SGL prétend en outre que dès qu'elle a pu aboutir à une transaction (plea agreement) avec le ministère américain de la justice, elle a envoyé spontanément une déclaration détaillée à la Commission en date du 8 juin 1999 (réponse de SGL à la communication des griefs, p. 2 et 5 à 8).

- Arguments de la Commission

(172) La communication sur la clémence définit clairement les conditions dans lesquelles une réduction du montant de l'amende peut être accordée à une entreprise souhaitant coopérer avec la Commission. Il incombe à chaque société d'étudier avec soin les avantages qu'elle peut tirer d'une coopération avec la Commission et les difficultés susceptibles d'en découler dans d'autres procédures, en particulier aux États-Unis. Comme la coopération visée dans la communication doit être spontanée, il revient à chaque entreprise de choisir individuellement le mode et le moment qui lui conviennent. La Commission ne peut cependant tenir compte que des contributions réelles et effectives.

(173) SGL n'ayant pas réellement coopéré après les premiers contacts noués en avril 1998, la Commission lui a envoyé une demande formelle de renseignements le 31 mars 1999 en application de l'article 11 du règlement n° 17. Contrairement aux allégations de SGL, la Commission était parfaitement en droit de poser les questions formulées dans ladite demande. SGL n'a cependant répondu que partiellement. Ce n'est qu'après l'envoi d'un rappel le 31 mai 1999, dans lequel la Commission se réservait le droit d'adopter une décision formelle en application de l'article 11, paragraphe 5, du règlement n° 17, que SGL a transmis une déclaration relative à sa participation au cartel en date du 8 juin 1999.

(174) Étant donné que la coopération visée dans la communication sur la clémence doit être spontanée et ne pas s'inscrire dans le cadre de l'exercice d'un pouvoir d'investigation, la Commission estime qu'une partie substantielle des informations fournies dans la déclaration constitue en fait la réponse de SGL à la demande formelle de renseignements de la Commission. Seules seront considérées comme une contribution spontanée au sens de la communication les informations contenues dans la déclaration qui allaient au-delà de ce qui était demandé au titre de l'article 11, notamment en ce qui concerne les modalités de certaines réunions dont la Commission n'était pas informée et la mise en œuvre nationale du cartel en Europe.

(175) En tenant dûment compte de toutes ces circonstances, la Commission réduira l'amende qui aurait sans cela été infligée à SGL de 30 % en application du titre D, paragraphe 2, premier tiret, de la communication sur la clémence.

(176) SGL devra donc payer une amende d'un montant de 80,29 millions d'euros.

- Responsabilité au titre de l'infraction au regard du principe ne bis in idem

(177) Lors de la procédure, SGL a avancé plusieurs arguments visant à contester le bien-fondé d'une amende à son égard en application du principe ne bis in idem (voir réponse écrite de SGL à la communication des griefs, p. 17 à 21, et étude juridique sur le principe ne bis in idem présentée lors de l'audition).

(178) SGL a ainsi fait valoir ce qui suit à plusieurs reprises (et sans toujours faire preuve d'une totale cohérence) :

a) selon le principe général de droit pénal ne bis in idem, SGL ne peut pas être poursuivie ni sanctionnée une seconde fois pour les mêmes faits sur la base du droit communautaire de la concurrence, car la condamnation et l'amende infligées aux États-Unis ont déjà effacé en totalité sa culpabilité;

b) les États-Unis lui ont infligé une amende dont le montant a été calculé en fonction de son chiffre d'affaires mondial;

c) en vertu des principes généraux de justice et d'équité, la Commission devrait, dans son calcul, déduire du montant approprié de l'amende le montant de l'amende infligée aux États-Unis ainsi que l'élément punitif éventuel des réparations civiles.

- Arguments de la Commission

(179) La Commission rejette tous les arguments de SGL. Elle ne considère pas que les amendes infligées ailleurs, notamment aux États-Unis, doivent être prises en compte dans le calcul du montant des amendes infligées pour une infraction aux règles communautaires de la concurrence. L'exercice par les États-Unis (ou par tout autre pays tiers) de leur compétence (pénale) à l'encontre d'ententes illicites ne peut en aucun cas limiter ou exclure la compétence de la Commission en application du droit communautaire de la concurrence.

(180) Qui plus est, il est en toute hypothèse inexact de prétendre (comme le fait SGL) que la Commission avait l'intention de sanctionner la société pour les mêmes faits que les juridictions américaines. En vertu du principe de territorialité, l'article 81 du traité se limite aux restrictions de concurrence à l'intérieur du marché commun et l'article 53 de l'accord EEE se limite aux restrictions de concurrence sur le marché de l'EEE. De la même façon, les autorités de concurrence américaines ne sont compétentes que pour autant que le comportement en question a un effet direct et délibéré sur le commerce aux États-Unis.

(181) Dans un souci d'exhaustivité, la Commission entend aussi faire état de la réduction du montant de l'amende pénale infligée aux États-Unis. Comme elle l'a montré au cours de l'audition en produisant l'acte de condamnation et le détail du calcul de l'amende relatifs aux procédures américaines (tous deux étant des documents publics), l'amende de base aux États-Unis avait été calculée uniquement par référence au chiffre d'affaires réalisé par SGL dans ce pays et son montant avait été accepté par SGL. En fait, comme le montrent les calculs, SGL avait obtenu que le montant de l'amende pénale aux États-Unis soit réduit très substantiellement et fixé à un niveau inférieur au minimum normal de manière à tenir compte, au titre du critère de la " capacité de payer ", de la probabilité que l'entreprise fasse l'objet de sanctions dans la Communauté et au Canada et soit tenue de verser des réparations civiles.

(182) SGL agit donc de manière incohérente en obtenant une réduction du montant normal de l'amende aux États-Unis au motif qu'elle est susceptible de faire l'objet de sanctions dans la Communauté et en soutenant ensuite qu'aucune amende ne devrait lui être infligée par cette dernière.

(183) Enfin, il ne pourrait être tenu compte de la possibilité que des entreprises soient condamnées à payer des réparations civiles. Le versement, à la suite d'une action au civil, de dommages et intérêts destinés à remédier au préjudice causé par un cartel à des entreprises ou à des consommateurs ne pourrait être comparé à des sanctions de droit public pour comportement illicite.

- Capacité de payer

- Arguments de SGL

(184) SGL prétend que sa situation financière a été affaiblie par le montant élevé des amendes qui lui ont été infligées par d'autres autorités de la concurrence et le versement de réparations civiles. L'imposition d'autres sanctions par la Commission pourrait l'acculer à la faillite.

- Arguments de la Commission

(185) Eu égard à cet argument, la Commission a demandé des informations détaillées sur la situation financière de l'entreprise (17). Après avoir examiné la réponse de la société datée du 6 juin 2001, la Commission conclut qu'il n'y a pas lieu de modifier le montant de l'amende en l'espèce. Prendre en considération le simple fait qu'une société accuse des pertes en raison des conditions générales du marché ou de changements intervenus dans sa structure équivaudrait à conférer un avantage concurrentiel injustifié aux entreprises les moins bien adaptées aux conditions du marché. Enfin, rien ne justifie, en l'espèce, que l'on déduise le montant des amendes infligées par d'autres autorités de la concurrence ou celui des réparations civiles (considérants 179 à 183).

(186) Le montant total de l'amende infligée à SGL est donc de 80,29 millions d'euros.

ii) UCAR

- Circonstances aggravantes

(187) Dans le cas d'UCAR, la gravité de l'infraction est renforcée par les circonstances suivantes :

- le fait qu'UCAR ait été l'un des chefs de file et des instigateurs du cartel,

- la poursuite de cette infraction flagrante et indiscutable après les vérifications.

- Arguments d'UCAR

(188) UCAR prétend que SGL a joué le rôle de meneur sur le marché de l'EEE (réponse d'UCAR à la communication des griefs, p. 4). SGL prenait l'initiative des hausses de prix et détenait une part de marché supérieure à celle d'UCAR.

- Arguments de la Commission

(189) UCAR et SGL étaient les moteurs du cartel. Elles ont été à l'origine des premiers contacts en 1991. Elles ont conçu l'ensemble du plan visant à former un cartel et ont organisé les premières réunions " des patrons " en mai 1992, au cours desquelles elles adoptaient " une position commune " vis-à-vis des autres producteurs.

(190) En ce qui concerne le marché de l'EEE, il ressort des faits qu'UCAR et SGL s'entendaient sur de nouveaux prix cibles pour chaque marché national, sur le respect des marchés domestiques et sur la conservation des " gros clients ". UCAR a elle-même reconnu que, en général, elle prenait l'initiative des augmentations de prix en France et au Royaume-Uni (considérant 66; [...]*). Pour plusieurs autres marchés de l'EEE, il était décidé au cas par cas qui d'UCAR ou de SGL prendrait l'initiative.

(191) Le fait que SGL ait aussi joué un rôle de meneur dans l'infraction n'excuse pas le comportement d'UCAR. Les deux entreprises étaient de loin les membres les plus puissants du cartel et partageaient la même ambition, à savoir être le numéro un sur le marché.

(192) Eu égard à ce qui précède, il convient de majorer le montant de base de l'amende infligée à UCAR de 60 %. Le montant approprié de l'amende s'élève donc à 99,2 millions d'euros.

- Circonstances atténuantes

- Programme de mise en conformité

- Arguments d'UCAR

(193) UCAR affirme être la seule société ayant participé à l'infraction à avoir pris des mesures spécifiques à l'encontre de ceux de ses employés qui étaient responsables de ladite infraction et à avoir élaboré un programme complet de mise en conformité (réponse d'UCAR à la communication des griefs, p. 14 à 16).

- Arguments de la Commission

(194) La Commission se félicite du fait que, à l'issue de ses investigations relatives au cartel, UCAR ait entrepris une enquête interne et élaboré un programme de mise en conformité. Cette initiative ne peut cependant dispenser la Commission de son devoir de sanctionner la très grave infraction aux règles de la concurrence commise par UCAR dans le passé.

- Difficultés économiques rencontrées par l'ensemble du secteur des électrodes de graphite

- Arguments d'UCAR

(195) Selon UCAR, la Commission devrait considérer comme une circonstance atténuante le fait que le secteur des électrodes de graphite, dans son ensemble, et UCAR, en particulier, connaissaient des difficultés économiques au début des années 90 (réponse d'UCAR à la communication des griefs, p. 17).

- Arguments de la Commission

(196) La Commission n'estime pas que la situation invoquée par UCAR puisse constituer une circonstance atténuante.

(197) Il doit être bien entendu que, pour faire face à des conditions de marché difficiles ou à des baisses de la demande, les entreprises ne peuvent recourir qu'à des moyens compatibles avec le droit de la concurrence. La fixation des prix et la répartition des marchés ne sont à l'évidence pas des moyens licites pour lutter contre de telles difficultés. Les entreprises ne sont pas davantage autorisées à méconnaître les règles communautaires de la concurrence en prétextant des surcapacités.

- Conclusion

(198) La Commission conclut qu'aucune circonstance atténuante relative à l'infraction ne justifie une réduction du montant de base dans le cas d'UCAR.

(199) L'amende calculée pour UCAR s'élève à 99,2 millions d'euros. Toutefois, comme le montant final calculé selon la méthode décrite ci-dessus ne peut en aucun cas excéder 10 % du chiffre d'affaires de l'entreprise à l'échelle mondiale (comme le prévoit l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17), l'amende sera fixée à 84,1 millions d'euros, de manière à ne pas dépasser la limite admissible.

- Application de la communication sur la clémence

(200) La communication sur la clémence sera appliquée à UCAR. Bien qu'elle n'ait pas été la première société à fournir à la Commission des éléments de preuve déterminants, UCAR a largement contribué à l'établissement de certains aspects importants de l'affaire.

(201) UCAR a pris contact avec la Commission en mars 1998 et lui a indiqué son intention de coopérer. En juin 1998, elle a transmis plusieurs documents, notamment un barème des prix qui était identique à celui que la Commission avait trouvé lors des vérifications qu'elle avait effectuées dans les locaux de SGL. UCAR a été la première société à reconnaître l'existence de " contacts illicites avec des concurrents ", en réponse à une demande formelle de renseignements. En mars et en avril 1999, elle a envoyé à la Commission deux déclarations rédigées par d'anciens employés, qui donnaient des éclaircissements sur l'organisation et la structure du cartel tant au niveau international qu'à l'échelon européen. En juin 1999, UCAR a communiqué en son nom une déclaration détaillée.

(202) En conséquence, en application du titre D, paragraphe 2, premier tiret, de la communication sur la clémence, la Commission accorde à UCAR une réduction de 40 %.

- Capacité de payer

- Arguments d'UCAR

(203) D'après UCAR, la récente baisse des prix et des ventes sur le marché des électrodes de graphite a détérioré sa situation financière au point de réduire sensiblement sa capacité de payer une amende. Comme les électrodes de graphite représentent environ 70 % de son activité, UCAR est particulièrement affectée par cette situation (réponse d'UCAR à la communication des griefs, p. 27 à 34).

(204) UCAR prétend aussi que ses anciennes sociétés mères, Union Carbide et Mitsubishi, ont bénéficié du cartel par l'entreprise des dividendes et d'autres opérations, dont une recapitalisation financée par l'emprunt en janvier 1995.

(205) Enfin, UCAR fait valoir que sa situation financière a encore été affaiblie par les amendes d'un montant élevé qui lui ont été infligées par les autorités américaines et canadiennes de la concurrence et par le versement de réparations civiles.

- Arguments de la Commission

(206) En ce qui concerne le premier argument d'UCAR, la Commission a demandé des informations détaillées sur la situation financière de l'entreprise (18). Après avoir examiné la réponse de la société datée du 25 mai 2001, la Commission conclut qu'il n'y a pas lieu de modifier le montant de l'amende en l'espèce. Prendre en considération, dans le calcul de l'amende, le fait qu'une société accuse des pertes en raison des conditions générales du marché ou de changements intervenus dans sa structure équivaudrait à conférer un avantage concurrentiel injustifié aux entreprises les moins bien adaptées aux conditions du marché.

(207) Le second argument d'UCAR ne change en rien la gravité de la participation de la société au cartel ni la nécessité de garantir un effet dissuasif. Enfin, rien ne justifie, en l'espèce, que l'on déduise le montant des amendes infligées par d'autres autorités de la concurrence ou celui des réparations civiles (considérants 179 à 183).

(208) Le montant total de l'amende infligée à UCAR est donc de 50,4 millions d'euros.

iii) SDK, Tokai, SEC et Nippon

- Circonstances aggravantes

(209) En ce qui concerne Tokai, SEC et Nippon, la Commission doit tenir compte d'une circonstance aggravante, à savoir la poursuite par ces sociétés de l'infraction flagrante et indiscutable après les vérifications effectuées par la Commission.

(210) Le montant des amendes infligées à Tokai, à SEC et à Nippon est donc majoré de 10 %.

- Circonstances atténuantes

(211) Selon Tokai et SEC, la Commission devrait considérer comme une circonstance atténuante le fait qu'elles n'aient joué qu'un rôle passif dans les arrangements relatifs au marché de l'EEE. De même, Nippon Carbon fait valoir que son rôle a été très limité (réponse de SEC à la communication des griefs, p. 16 et 17; réponse de Nippon Carbon du 17 mai 2000 à la communication des griefs, p. 2). Tokai affirme aussi que le fait qu'elle n'ait pas pour partie appliqué le principe du " producteur domestique " en augmentant ses ventes à destination de la Communauté pendant la période considérée devrait aussi constituer une circonstance atténuante (réponse de Tokai à la communication des griefs, p. 12 et 13).

(212) La Commission est d'avis qu'il convient de considérer les producteurs japonais, de par le rôle qu'ils ont joué, comme des membres actifs. En effet, ces entreprises ont non seulement participé aux réunions des " patrons " et aux réunions " de travail " pendant une longue période, mais elles ont aussi, lors de ces réunions, pris une part active aux discussions. Cela vaut particulièrement pour Tokai et SDK, les deux principaux producteurs japonais.

(213) Même si les producteurs japonais n'ont pas participé aux réunions du groupe européen, ils étaient tenus informés par SGL et UCAR des prix cibles. En outre, il est établi que l'un des principes directeurs du cartel, à savoir l'interdiction pour les producteurs non domestiques d'exercer une concurrence agressive, s'appliquait aussi au marché de l'EEE. La non-intervention des producteurs japonais sur le marché de l'EEE s'inscrit donc dans le contexte de leur adhésion aux principes directeurs du cartel et n'est pas le signe d'un comportement passif.

(214) Il convient d'en tenir compte également dans l'appréciation du second argument présenté par Tokai, c'est-à-dire la non-application partielle du principe du producteur domestique. A supposer même que Tokai ait légèrement augmenté ses ventes entre 1992 et 1996, la société a respecté les principes directeurs du cartel.

(215) La Commission conclut donc qu'aucune circonstance atténuante ne peut s'appliquer à Tokai, à SEC ou à Nippon.

(216) Elle juge par conséquent approprié d'infliger auxdites entreprises les amendes suivantes (avant une éventuelle réduction au titre de la communication sur la clémence) :

- SDK : 58 millions d'euros,

- Tokai : 27,28 millions d'euros,

- SEC : 13,64 millions d'euros,

- Nippon : 13,64 millions d'euros.

- Application de la communication sur la clémence

- SDK

(217) Au titre de la communication sur la clémence, la Commission tiendra compte du fait que SDK a été la première société à lui fournir réellement des éléments de preuve déterminants sur l'entente. SDK a communiqué plusieurs documents cruciaux à la Commission en mars 1998 (en particulier le " rapport du CMS " et plusieurs listes de prix), [...]*. Ces éléments ont grandement aidé la Commission à établir les faits sur lesquels se fonde la présente décision.

(218) Conformément au titre C de la communication sur la clémence, le montant de l'amende infligée à SDK est réduit de 70 %.

- Tokai, SEC et Nippon

(219) Tokai, SEC et Nippon Carbon n'ont pas contesté les faits rapportés dans la communication des griefs. SEC a aussi transmis une liste de réunions et de participants à ces réunions (annexe 7 de la réponse à la communication des griefs).

(220) La Commission rejette toutefois l'argument de SEC et de Nippon Carbon selon lequel ces deux sociétés auraient maintenu une coopération permanente et totale tout au long de l'enquête (réponse de SEC à la communication des griefs, p. 12 et 13; lettre de Nippon Carbon du 17 mai 2000). On ne peut considérer que les réponses très vagues qu'elles ont apportées à plusieurs des demandes de renseignements de la Commission en application de l'article 11 du règlement n° 17 constituent une coopération spontanée au sens de la communication sur la clémence.

(221) La Commission rejette aussi la tentative de SEC de justifier son comportement par le fait que SGL et une autre entreprise japonaise lui auraient recommandé de ne pas coopérer. Tel est peut-être le cas, mais il revenait à SEC de décider en toute responsabilité de coopérer à l'enquête de la Commission.

(222) Chacune des trois sociétés bénéficiera donc d'une réduction de 10 % en application du titre D, paragraphe 2, second tiret, de la communication sur la clémence.

- Conclusion

(223) Ces quatre entreprises se voient donc infliger les amendes totales suivantes :

- SDK : 17,4 millions d'euros,

- Tokai : 24,5 millions d'euros,

- SEC : 12,2 millions d'euros,

- Nippon : 12,2 millions d'euros.

iv) VAW

- Circonstances atténuantes

(224) VAW Carbon affirme n'avoir joué qu'un rôle passif dans le cartel. A l'instar de C/G, la société s'est contentée de suivre les prix et sa participation dans les réunions n'était pas nécessaire au succès du cartel [...]*.

(225) VAW Carbon doit être considérée comme un membre actif du cartel. Ses représentants ont participé à plusieurs réunions " de travail " en Europe et à des réunions séparées du groupe européen. La société prenait part aux discussions sur les prix et le contrôle des volumes de vente (considérant 88). La participation active de la société aux discussions relatives aux prix contredit également l'argument de VAW Carbon selon lequel elle se limitait à un rôle de suiveur. Enfin, la Commission ne peut accueillir le dernier argument de VAW Carbon. La participation de VAW Carbon au cartel s'inscrivait dans la stratégie générale de ce dernier de contrôler le marché mondial et d'inclure les producteurs les plus importants.

(226) VAW Carbon affirme aussi avoir subi des pressions de la part de SGL. La Commission note cependant que cela ne peut dédouaner VAW de sa propre responsabilité d'entreprise. Elle aurait pu notamment dénoncer l'affaire à la Commission.

(227) La Commission conclut qu'aucune circonstance atténuante ne s'applique à VAW.

- Application de la communication sur la clémence

(228) Dans sa réponse du 10 mai 1999 à la demande détaillée de renseignements qui lui a été adressée par la Commission le 31 mars 1999 en application de l'article 11 du règlement n° 17, VAW Carbon a initialement soutenu ne pas être tenue de répondre à certaines questions et, en toute hypothèse, ne pas être en mesure de fournir des documents ou des informations.

(229) Ce n'est que par lettre du 12 juillet 1999 que VAW Carbon a annoncé son intention de coopérer et qu'elle a communiqué une déclaration relative à sa participation. La Commission estime cependant qu'une partie substantielle des informations contenues dans cette déclaration constitue en fait la réponse de VAW Carbon à sa demande formelle de renseignements du 31 mars 1999.

(230) Seuls pouvaient être considérés comme une contribution au sens de la communication sur la clémence les passages de la déclaration qui allaient au-delà de ce qui était demandé au titre de l'article 11 et des informations dont la Commission était déjà en possession.

(231) Comme la coopération de VAW Carbon a commencé avant que la Commission n'adopte sa communication des griefs et s'est poursuivie ensuite, VAW Aluminium AG bénéficiera d'une réduction de 20 % en application du titre D, paragraphe 2, premier tiret, de la communication sur la clémence.

(232) Comme indiqué aux considérants 117 à 123, la Commission estime que VAW Aluminium AG, en tant que société mère de VAW Carbon GmbH, est responsable du comportement anticoncurrentiel de sa filiale à 100 %.

(233) Le montant total de l'amende infligée à VAW Aluminium AG est donc de 11,6 millions d'euros.

v) C/G

- Circonstances atténuantes

(234) Comme circonstance atténuante, la Commission tiendra compte du rôle exclusivement passif joué par C/G dans l'infraction. Cette dernière n'a pas participé aux réunions " des patrons " ni aux réunions " de travail " et elle s'est contentée de suivre les prix (considérant 81).

(235) Une réduction supplémentaire sera accordée à C/G au motif de sa non-application partielle des accords illicites. Entre 1993 et 1996, C/G a en effet augmenté ses ventes en Europe, violant ainsi le principe de base du cartel qui consistait à restreindre les ventes sur les marchés " non domestiques ".

(236) Le montant de l'amende infligée à C/G est donc réduit de 40 %, ce qui ramène le montant approprié à 12,96 millions d'euros.

(237) La Commission n'accepte toutefois pas l'argument de C/G selon lequel cette dernière a agi sous l'effet d'une pression économique. Même s'il se peut que d'autres producteurs aient exercé une pression sur C/G, il n'en reste pas moins que C/G a décidé en toute responsabilité de prendre part à l'infraction.

(238) En ce qui concerne la surcapacité structurelle du secteur, il a déjà été indiqué plus haut (considérant 197) que les entreprises ne peuvent recourir qu'à des moyens compatibles avec les règles communautaires de la concurrence pour faire face à des conditions de marché difficiles.

- Application de la communication sur la clémence

(239) Conformément au titre D, paragraphe 2, premier tiret, de la communication sur la clémence, l'amende infligée à C/G sera réduite de 20 %, au motif que l'entreprise a fourni certaines informations à la Commission.

(240) Contrairement à ce qu'elle prétend, C/G n'a cependant pas droit à une réduction d'au moins 50 %. Bien qu'elle ait fourni à la Commission dès juillet 1998 certains documents relatifs aux contacts entre concurrents, ce n'est qu'en octobre 1999 qu'elle a transmis une déclaration d'entreprise, dans laquelle elle reste cependant ambiguë sur son rôle dans le cartel. On ne peut considérer que la réponse de l'entreprise en date du 21 juillet 1999 à la demande formelle de renseignements de la Commission en application de l'article 11 du règlement n° 17 constitue une contribution spontanée au sens de la communication sur la clémence.

- Capacité de payer

(241) C/G affirme que sa situation financière actuelle est très préoccupante. En raison d'un fléchissement de l'activité sur le marché des électrodes de graphite, de la crise de la sidérurgie, des prix élevés du pétrole et de la force de la monnaie américaine, la société est aujourd'hui fortement endettée. Le paiement de réparations civiles élevées à la suite de poursuites intentées aux États-Unis l'ont encore affaiblie.

(242) Eu égard à cet argument, la Commission a demandé des informations détaillées sur la situation financière de l'entreprise (19). Après avoir examiné la réponse de la société datée du 25 mai 2001, la Commission conclut qu'il n'y a pas lieu de modifier le montant de l'amende en l'espèce. Prendre en considération le simple fait qu'une société accuse des pertes en raison des conditions générales du marché ou de changements intervenus dans sa structure équivaudrait à conférer un avantage concurrentiel injustifié aux entreprises les moins bien adaptées aux conditions du marché. Enfin, rien ne justifie, en l'espèce, que l'on déduise le montant des amendes infligées par d'autres autorités de la concurrence ou celui des réparations civiles (considérants 179 à 183).

(243) Le montant total de l'amende infligée à C/G est donc de 10,3 millions d'euros.

2.3.2.4. Montant des amendes infligées dans le cadre de la présente procédure

(244) En conclusion, la Commission fixe comme suit le montant des amendes infligées en application de l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 :

- SGL Carbon AG : 80,2 millions d'euros,

- UCAR International Inc. : 50,4 millions d'euros,

- VAW Aluminium AG : 11,6 millions d'euros,

- Showa Denko KK : 17,4 millions d'euros,

- Tokai Carbon Co. Ltd : 24,5 millions d'euros,

- Nippon Carbon Co. Ltd : 12,2 millions d'euros,

- SEC Corporation : 12,2 millions d'euros,

- The Carbide Graphite Group : 10,3 millions d'euros,

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION :

Article premier

Les entreprises suivantes ont enfreint les dispositions de l'article 81, paragraphe 1, du traité et de l'article 53, paragraphe 1, de l'accord EEE en participant à une série d'accords et de pratiques concertées dans le secteur des électrodes de graphite :

SGL Carbon AG : de mai 1992 à mars 1998,

UCAR International Inc. : de mai 1992 à mars 1998,

VAW Aluminium AG : de mai 1992 à fin 1996,

Showa Denko KK : de mai 1992 à avril 1997,

Tokai Carbon Co. Ltd : de mai 1992 à février 1998,

Nippon Carbon Co. Ltd : de mai 1992 à février 1998,

SEC Corporation : de mai 1992 à février 1998,

The Carbide Graphite Group Inc. : de janvier 1993 à novembre 1996.

Article 2

Les entreprises mentionnées à l'article 1er mettent immédiatement fin, si elles ne l'ont pas déjà fait, aux infractions visées à ce même article. Elles s'abstiennent désormais de tout accord ou de toute pratique visés à l'article 1er, ainsi que de toute mesure ayant un objet ou un effet équivalent.

Article 3

Les amendes suivantes sont infligées pour les infractions visées à l'article 1er :

a) SGL Carbon AG : 80,2 millions d'euros;

b) UCAR International Inc. : 50,4 millions d'euros;

c) VAW Aluminium AG : 11,6 millions d'euros;

d) Showa Denko KK : 17,4 millions d'euros;

e) Tokai Carbon Co. Ltd : 24,5 millions d'euros;

f) Nippon Carbon Co. Ltd : 12,2 millions d'euros;

g) SEC Corporation : 12,2 millions d'euros;

h) The Carbide Graphite Group Inc. : 10,3 millions d'euros.

Article 4

Les amendes infligées à l'article 3 seront versées, dans un délai de trois mois à compter de la date de notification de la présente décision, sur le compte bancaire suivant :

Compte n° 642-0029000-95

Commission européenne

Banco Bilbao Vizcaya Argentaria (BBVA)

Code SWIFT : BBVABEBB - IBAN Code : BE 76 6420 0290

0095

Avenue des Arts 43

B-1040 Bruxelles

A l'expiration dudit délai, des intérêts seront automatiquement dus au taux appliqué par la Banque centrale européenne à ses principales opérations de refinancement au premier jour ouvrable au cours duquel la présente décision est adoptée, majoré de 3,5 points de pourcentage, soit un taux de 8,04 %.

Article 5

Sont destinataires de la présente décision :

1. SGL Carbon AG Rheingaustraße 182 D-65203 Wiesbaden

2. UCAR International Inc. 3102 West End Avenue, Suite 1100 Nashville, Tennessee 37203 USA

3. VAW Aluminium AG Georg-von-Boeselager Straße 25 D-53117 Bonn

4. Showa Denko KK 13-9, Shiba Daimon 1 - Chome Minato-ku Tokyo 105-8517 Japon

5. Tokai Carbon Co. Ltd Aoyama Building 2-3, Kita - Aoyama, 1 - Chome Minato-ku Tokyo 107 Japon

6. Nippon Carbon Co. Ltd 6-1, Hatchobori, 2 - Chome Chuo-ku Tokyo 1047-0032 Japon

7. SEC Corporation Doi Building 5, Misonomachi Amagasaki Hyogo HY 660 Japon

8. The Carbide Graphite Group Inc. One Gateway Center, 19th Floor Pittsburgh, PA 15222-1416 USA

La présente décision forme titre exécutoire conformément à l'article 256 du traité.

(1) JO 13 du 21.2.1962, p. 204.

(2) JO L 148 du 15.6.1999, p. 5.

(3) JO L 354 du 30.12.1998, p. 18.

(4) Tous les renvois à des appendices numérotés figurant dans la présente décision se rapportent aux appendices de la communication des griefs.

(5) Les chiffres de VAW Carbon pour les pays du Benelux sont inclus sous " Belgique ", pour le Portugal sous " Espagne " et pour l'Irlande sous " Royaume-Uni ".

(6) Selon la déclaration faite à la Commission en réponse aux demandes de renseignements en application de l'article 11 du règlement n° 17. Il semble que, pour certains producteurs, les volumes soient sous-estimés.

(7) Pour le calcul des chiffres d'affaires respectifs, les taux de conversion annuels moyens suivants entre les monnaies nationales et l'euro ont été utilisés : [Source : Eurostat] : 1 euro = 1,96913 DEM; 1 euro = 1,12109 USD, 1 euro = 146,415 JPY.

(8) Les chiffres fournis se fondent sur les réponses des sociétés aux demandes de renseignements adressées par la Commission en application de l'article 11.

(9) Pour le calcul des chiffres d'affaires respectifs, les taux de conversion annuels moyens suivants entre les monnaies nationales et l'euro ont été utilisés [Source : Eurostat] : 1 euro = 1,95583 DEM; 1 euro = 0,921937 USD, 1 euro = 99,4748 JPY.

(10) Les activités de VAW Carbon dans le domaine des électrodes de graphite ayant été vendues à Erftcarbon GmbH avec effet au 1er juillet 1998, la Commission prendra comme base le chiffre d'affaires de 1997.

(11) JO 13 du 21.2.1962, p. 204/62.

(12) Les " pays nordiques " comprennent le Danemark, la Suède, la Finlande et la Norvège (appendice 4).

(13) La jurisprudence de la Cour de justice et du Tribunal de première instance concernant l'interprétation de l'article 81 du traité vaut aussi pour l'article 53 de l'accord EEE.

(14) En application de l'article 5 du règlement (CE) n° 2894-94 du Conseil du 28 novembre 1994 relatif à certaines modalités d'application de l'accord sur l'Espace économique européen " les règles communautaires donnant effet aux principes énoncés aux articles 85 et 86 (à présent les articles 81 et 82) du traité CE s'appliquent mutatis mutandis ".

(15) JO C 207 du 18.7.1996, p. 4.

(16) Comme indiqué plus haut (considérants 117 à 123), la Commission tient la société mère VAW Aluminium AG pour responsable du comportement anticoncurrentiel de VAW Carbon GmbH, sa filiale à 100 %.

(17) Demande de renseignements de la Commission du 23 mai 2001 en application de l'article 11 du règlement n° 17.

(18) Demande de renseignements de la Commission du 10 mai 2001 en application de l'article 11 du règlement n° 17.

(19) Demande de renseignements de la Commission du 10 mai 2001 en application de l'article 11 du règlement n° 17.

(*) Les informations confidentielles ont été supprimées; les passages manquants sont signalés par des crochets marqués d'un astérisque.