TPICE, 4e ch., 20 mars 2002, n° T-28/99
TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DES COMMUNAUTES EUROPEENNES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Sigma Tecnologie di rivestimento (Srl)
Défendeur :
Commission des Communautés européennes
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Mengozzi
Juges :
Mme Tiili, M. Moura Ramos
Avocats :
Mes Pappalardo, Merola.
LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),
Faits à l'origine du litige
1. La requérante est une société de droit italien opérant dans le secteur du chauffage urbain.
2. Dans les systèmes de chauffage urbain, l'eau chauffée dans un site central est acheminée, par des conduites souterraines, vers les locaux à chauffer. Étant donné que la température de l'eau (ou de la vapeur) transportée est très élevée, les conduites doivent être calorifugées pour assurer une distribution économique et sans risque. Les conduites utilisées sont précalorifugées et, à cette fin, sont généralement constituées d'un tube d'acier enveloppé d'un tube de plastique, avec une couche de mousse isolante entre les deux.
3. Les conduites de chauffage urbain font l'objet d'un commerce important entre les États membres. Les plus grands marchés nationaux de l'Union européenne sont l'Allemagne, avec 40 % de la consommation communautaire, et le Danemark, avec 20 %. Avec 50 % de la capacité de fabrication de l'Union européenne, le Danemark est le principal centre de production de l'Union qui approvisionne tous les États membres où est utilisé le chauffage urbain.
4. Par une plainte datée du 18 janvier 1995, l'entreprise suédoise Powerpipe AB a signalé à la Commission que les autres fabricants et fournisseurs de conduites de chauffage urbain s'étaient réparti le marché européen dans le cadre d'une entente et avaient pris des mesures concertées pour nuire à son activité, ou confiner cette activité au marché suédois, ou encore l'évincer purement et simplement du secteur.
5. Le 28 juin 1995, agissant en vertu d'une décision de la Commission du 12 juin 1995, des fonctionnaires de cette dernière et des représentants des autorités de la concurrence des États membres concernés ont procédé, simultanément et sans préavis, à des vérifications dans dix entreprises ou associations présentes dans le secteur du chauffage urbain. Une telle vérification n'a pas été effectuée chez la requérante.
6. Ensuite, la Commission a adressé des demandes de renseignements à la requérante et à la plupart des entreprises concernées par les faits litigieux, en vertu de l'article 11 du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité (JO 1962, 13, p. 204).
7. Le 20 mars 1997, la Commission a adressé une communication des griefs à la requérante et aux autres entreprises concernées. Ensuite, une audition des entreprises concernées a eu lieu les 24 et 25 novembre 1997.
8. Le 21 octobre 1998, la Commission a adopté la décision 1999-60-CE, relative à une procédure d'application de l'article 85 du traité CE (IV/35.691/E-4 - Conduites précalorifugées) (JO 1999, L. 24, p. 1), rectifiée avant sa publication par une décision du 6 novembre 1998 [C(1998) 3415 final] (ci-après la "décision" ou la "décision attaquée") constatant la participation de diverses entreprises, et, notamment, de la requérante, à un ensemble d'accords et de pratiques concertées au sens de l'article 85, paragraphe 1, du traité CE (devenu article 81, paragraphe 1, CE) (ci-après l'"entente").
9. Selon la décision, un accord a été conclu, à la fin de l'année 1990, entre les quatre producteurs danois de conduites de chauffage urbain sur le principe d'une coopération générale sur leur marché national. Cet accord aurait réuni ABB IC Moller A/S, la filiale danoise du groupe helvético-suédois ABB Asea Brown Boveri Ltd (ci-après "ABB"), Dansk Rörindustri A/S, aussi connue sous le nom de Starpipe (ci-après "Dansk Rörindustri"), Lögstör Rör A/S (ci-après "Lögstör") et Tarco Energi A/S (ci-après "Tarco") (ci-après, les quatre pris ensemble, les "producteurs danois"). L'une des premières mesures aurait consisté à coordonner une augmentation des prix tant pour le marché danois que pour les marchés à l'exportation. Aux fins de partager le marché danois, des quotas auraient été fixés puis appliqués et contrôlés par un "groupe de contact" réunissant les responsables des ventes des entreprises concernées. Pour chaque projet commercial (ci-après un "projet"), l'entreprise à laquelle le groupe de contact avait attribué le projet aurait informé les autres participants du prix qu'elle avait l'intention de proposer et ces derniers auraient alors fait une offre plus élevée de façon à protéger le fournisseur désigné par l'entente.
10. Selon la décision, deux producteurs allemands, le groupe Henss/Isoplus (ci-après "Henss/Isoplus") et Pan-Isovit GmbH, se sont joints aux réunions régulières des producteurs danois à partir de l'automne de 1991. Dans le cadre de ces réunions se seraient tenues des négociations en vue de la répartition du marché allemand. Celles-ci auraient abouti, en août 1993, à des accords fixant des quotas de vente pour chaque entreprise participante.
11. Toujours selon la décision, il a été convenu d'un accord entre tous ces producteurs, en 1994, afin de fixer des quotas pour l'ensemble du marché européen. Cette entente européenne aurait comporté une structure à deux niveaux. Le "club des directeurs", réunissant les présidents ou les directeurs généraux des entreprises participant à l'entente, aurait attribué des quotas à chacune de ces entreprises tant sur l'ensemble du marché que sur chacun des marchés nationaux, notamment l'Allemagne, l'Autriche, le Danemark, la Finlande, l'Italie, les Pays-Bas et la Suède. Pour certains marchés nationaux, un "groupe de contact" aurait été institué, composé de responsables locaux des ventes, qui se seraient vu confier la tâche de gérer les accords en attribuant les projets et en coordonnant les soumissions aux appels d'offres.
12. En ce qui concerne le marché italien, la décision mentionne qu'un groupe de contact s'est réuni en 1995 et en 1996, dans le cadre duquel des projets ont été attribués aux participants sur la base de quotas fixés pour chacun d'eux. La requérante se serait jointe à ce groupe à partir de la réunion du 12 avril 1995. À la suite des vérifications de la Commission, le groupe de contact aurait encore tenu quatre réunions, la dernière ayant eu lieu le 9 juin 1996.
13. Comme élément de l'entente, la décision cite, notamment, l'adoption et la mise en œuvre de mesures concertées visant à éliminer la seule entreprise importante à ne pas en faire partie, Powerpipe. La Commission précise que certains participants à l'entente ont recruté des "salariés-clés" de Powerpipe et ont fait comprendre à cette dernière qu'elle devait se retirer du marché allemand. À la suite de l'attribution à Powerpipe d'un important projet allemand, en mars 1995, une réunion se serait tenue à Düsseldorf, à laquelle auraient participé les six producteurs susvisés et Brugg Rohrsysteme GmbH (ci-après "Brugg"). Selon la Commission, il a été décidé, lors de cette réunion, d'instituer un boycottage collectif des clients et des fournisseurs de Powerpipe. Ce boycottage aurait ensuite été mis en œuvre.
14. Dans sa décision, la Commission expose les motifs pour lesquels non seulement l'arrangement exprès de partage des marchés conclu entre les producteurs danois à la fin de 1990, mais également les arrangements conclus à compter d'octobre 1991, visés ensemble, peuvent être considérés comme formant un "accord" prohibé par l'article 85, paragraphe 1, du traité. De plus, la Commission souligne que les ententes "danoise" et "européenne" ne constituaient que l'expression d'une seule entente qui a débuté au Danemark, mais qui avait, dès le départ, pour objectif, à plus long terme, d'étendre le contrôle des participants à tout le marché. Selon la Commission, l'accord continu entre producteurs a eu un effet sensible sur le commerce entre États membres.
15. Pour ces motifs, la décision a pour dispositif:
"Article premier
ABB Asea Brown Boveri Ltd, Brugg Rohrsysteme GmbH, Dansk Rörindustri A/S, le groupe Henss/Isoplus, KE KELIT Kunststoffwerk GmbH, Oy KWH Tech AB, Lögstör Rör A/S, Pan-Isovit GmbH, Sigma Tecnologie di rivestimento SrL et Tarco Energi A/S ont enfreint les dispositions de l'article 85, paragraphe 1, du traité, en participant, de la manière et dans la mesure indiquées dans la motivation à un ensemble d'accords et de pratiques concertées qui a été mis en place, vers novembre ou décembre 1990, entre les quatre producteurs danois, qui a ensuite été étendu à d'autres marchés nationaux, auquel se sont ralliées Pan-Isovit et Henss/Isoplus, et qui a fini par constituer, fin 1994, une entente générale couvrant l'ensemble du Marché commun.
La durée de l'infraction était la suivante:
[...]
- dans le cas de Sigma: plus ou moins à partir d'avril 1995, [jusqu'en mars ou avril 1996].
Les principales caractéristiques de l'entente étaient:
- la répartition entre producteurs des différents marchés nationaux, puis de l'ensemble du marché européen, grâce à un système de quotas,
- l'attribution de marchés nationaux à certains producteurs et l'organisation du retrait des autres producteurs,
- la fixation des prix du produit et de chaque projet,
- l'attribution de projets à des producteurs désignés à cet effet et la manipulation des procédures de soumission, afin que les marchés en question soient attribués à ces producteurs,
- pour protéger l'entente de la concurrence de la seule entreprise importante à ne pas en faire partie, Powerpipe AB, l'adoption et la mise en œuvre de mesures concertées visant à entraver son activité commerciale, à nuire à la bonne marche de ses affaires ou à l'évincer purement et simplement du marché.
[...]
Article 3
Les amendes suivantes sont infligées aux entreprises énumérées à l'article 1er, en raison de l'infraction constatée audit article:
[...].
i) Sigma Tecnologie di rivestimento SrL, une amende de 400 000 écus
[...]"
16. La décision a été notifiée à la requérante par lettre du 12 novembre 1998, reçue par celle-ci le lendemain.
Procédure et conclusions des parties
17. Par requête déposée au greffe du Tribunal le 25 janvier 1999, la requérante a introduit le présent recours.
18. Sept des neuf autres entreprises tenues pour responsables de l'infraction ont également introduit un recours contre la décision (affaires T-9-99, T-15-99, T-16-99, T-17-99, T-21-99, T-23-99 et T-31-99).
19. Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale et, au titre des mesures d'organisation de la procédure, a demandé aux parties de répondre à des questions écrites et de produire certains documents. Les parties ont déféré à ces demandes.
20. Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales du Tribunal lors de l'audience publique qui s'est déroulée le 26 octobre 2000.
21. La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:
- annuler l'article 1er de la décision attaquée dans la mesure où il lui reproche d'avoir participé à l'entente;
- subsidiairement, réduire le montant de l'amende;
- condamner la défenderesse aux dépens.
22.
La défenderesse conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:
- rejeter le recours;
- condamner la requérante aux dépens.
Sur le fond
23. La requérante invoque, en substance, trois moyens. Le premier moyen est tiré d'erreurs de fait dans l'application de l'article 85, paragraphe 1, du traité. Le deuxième moyen est tiré d'une violation de l'obligation de motivation. Le troisième moyen est tiré de la violation de principes généraux et d'erreurs d'appréciation dans la détermination du montant de l'amende.
Sur le premier moyen, tiré d'erreurs de fait dans l'application de l'article 85, paragraphe 1, du traité
Arguments des parties
24. La requérante soutient que la décision est viciée en raison de l'absence de preuves quant à sa participation à l'ensemble des accords et des pratiques concertées réalisés au niveau européen par les principaux producteurs de conduites de chauffage urbain.
25. La Commission aurait déclaré à tort, au considérant 134 de sa décision, qu'"il n'est pas nécessaire, pour établir la matérialité d'un accord, que chaque participant présumé ait pris part à tous les aspects et à toutes les manifestations de l'entente, y ait consenti de manière expresse ou même ait eu connaissance de leur existence, pendant toute la durée de son adhésion au système commun". En effet, une entreprise n'ayant pas participé à tous les éléments constitutifs d'une entente globale ne pourrait être tenue pour responsable de cette entente globale que si elle savait ou devait nécessairement savoir que la collusion à laquelle elle a participé s'inscrivait dans un plan global et que ce plan global recouvrait l'ensemble des éléments constitutifs de l'entente. Même si la participation à une entente globale peut donc être partielle, la connaissance de cette entente devrait concerner l'ensemble de ses éléments constitutifs.
26. Or, il ne ressortirait nullement du dossier que la requérante savait, ou devait savoir, que l'infraction à laquelle elle participait s'inscrivait dans un plan global. Opérant exclusivement sur le marché italien, elle n'aurait eu aucune raison de s'intéresser à d'éventuelles activités illicites d'autres entreprises en dehors de l'Italie. Elle n'aurait été consciente que du fait qu'elle subissait des tentatives de répartition des projets menées par les principaux participants à l'entente. Il ne ressortirait d'aucun document qu'au cours des réunions auxquelles la requérante a participé il a été fait référence à l'existence d'un plan de collusion plus large ni même que ces réunions ont été qualifiées de "réunions du groupe de contact".
27. En ce qui concerne les documents figurant en annexes 112 et 187 de la communication des griefs, il n'en ressortirait aucunement que la requérante a su que les réunions relatives au marché italien s'inséraient dans un plan plus vaste. Une telle conclusion ne pourrait être déduite du compte rendu de la réunion du 12 mai 1995, figurant en annexe 112 de la communication des griefs, selon lequel M. Molinari de Pan-Isovit a informé les autres entreprises que le directeur des ventes de Pan-Isovit en Allemagne avait été nommé "coordinateur du marché italien". En effet, ce document n'indiquerait pas que Pan-Isovit se soit déclarée responsable du marché allemand. L'interprétation selon laquelle il s'agissait d'une nomination interne à Pan-Isovit concernant uniquement le marché italien, sans aucun intérêt pour prouver l'entente globale, serait corroborée par la réponse de Pan-Isovit du 17 juin 1996 à la demande de renseignements du 13 mars 1996. Le fait que ce soit M. Molinari qui a informé les autres entreprises que ce directeur des ventes avait été nommé "coordinateur du marché italien" laisserait plutôt supposer que les concurrents n'avaient pas connaissance de cette nomination. De plus, il conviendrait d'observer que, selon la même réponse de Pan-Isovit, les réunions concernant le marché italien étaient organisées et menées par ABB. Quant à la déclaration de M. Molinari du 20 février 1997, figurant en annexe 187 de la communication des griefs, il n'en ressortirait pas qu'il existait un coordinateur pour le marché italien, que celui-ci était un salarié de Pan-Isovit et que Pan-Isovit était également responsable du marché allemand.
28. Quant au nombre de réunions auxquelles la requérante a assisté, celle-ci précise, dans sa réplique, qu'elle a mentionné, dans sa requête, les seules réunions au cours desquelles a été abordées des questions de caractère commercial, étant donné qu'au cours d'autres réunions des questions de caractère technique ont été discutées. La possibilité que la requérante ait participé à une ou à toutes les réunions mentionnées par la Commission ne serait d'ailleurs pas significative étant donné que celles-ci n'auraient concerné, en tout cas, que le marché italien.
29. La Commission n'aurait pas mentionné, dans sa décision, des circonstances particulières sur la base desquelles la requérante pourrait se voir reprocher une participation à l'entente globale, contrairement à ce qui a été le cas pour d'autres entreprises opérant également quasi exclusivement sur leurs marchés nationaux respectifs. En effet, contrairement à Oy KWH Tech AB (ci-après "KWH"), la requérante n'aurait jamais fait partie du "club des directeurs", enceinte où avait lieu la concertation au niveau européen. Contrairement à Brugg, la requérante n'aurait pas participé à la réunion de Düsseldorf du 24 mai 1995. Enfin, contrairement à KE KELIT Kunststoffwerk GmbH (ci-après "KE KELIT"), la requérante aurait toujours soutenu qu'elle n'avait pas eu connaissance d'un plan global.
30. En outre, la circonstance selon laquelle elle était étrangère à l'entente globale serait également prouvée par le fait qu'elle n'a pas non plus participé aux activités de l'association professionnelle "European District Heating Pipe Manufacturers Association" (ci-après l'"EuHP"). En effet, cette association aurait été l'un des principaux instruments de l'entente globale, même si ses membres avaient maintenu une distinction entre les réunions officielles de l'EuHP et les réunions portant sur les activités illégales. À la suite des pressions exercées par l'EuHP sur de nombreux maîtres d'ouvrage, l'adhésion à cette association serait généralement devenue une exigence lors de la présentation d'offres et de l'adjudication de marchés.
31. La Commission aurait dû s'assurer, avant d'imputer à la requérante l'entente globale visée à l'article 1er de la décision, qu'elle avait connaissance de tous les éléments constitutifs de l'entente énumérés audit article. Or, la Commission n'aurait pas apporté de preuves selon lesquelles la requérante avait connaissance, ou devait avoir connaissance, desdits éléments constitutifs. De plus, la Commission aurait admis que la requérante n'avait pas eu connaissance de la campagne destinée à éliminer Powerpipe, cet élément étant pourtant un des éléments constitutifs de l'entente globale dont la requérante aurait donc dû avoir connaissance afin de se voir imputer la responsabilité de l'entente globale. Cela démontrerait qu'elle était étrangère à l'objet de l'infraction en cause. En effet, le fait qu'elle n'a pas été au courant de l'action concertée à l'encontre de Powerpipe démontrerait que sa participation au groupe de contact italien n'impliquait pas automatiquement une connaissance de sa part du fait qu'une entente globale était en cours sur différents marchés européens, totalement étrangers à ses objectifs commerciaux.
32. La défenderesse soutient qu'elle a apporté suffisamment de preuves pour imputer à la requérante une participation à l'entente globale.
33. À cette fin, il ne serait pas nécessaire que la requérante ait participé à, ou ait eu connaissance de, tous les éléments collusoires de l'entente. Il suffirait qu'elle ait su que sa participation faisait partie d'un plan global plus vaste visant à restreindre la concurrence et recouvrant l'ensemble des éléments constitutifs de l'entente. Or, la Commission aurait clairement indiqué, dans la communication des griefs, que la requérante a participé à l'entente au niveau de son marché national, sachant que les réunions du groupe de contact pour ce marché faisaient partie d'un régime plus vaste, étant donné que les quotas qui lui ont été attribués étaient fixés par le club des directeurs. Cette constatation n'aurait pas été réfutée par la requérante dans ses observations sur la communication des griefs, où elle se serait contentée d'affirmer qu'elle était étrangère à l'entente et non pas qu'elle n'en avait pas eu connaissance.
34. Selon la Commission, il n'était pas nécessaire d'indiquer tous les éléments de l'entente dont la requérante avait éventuellement eu connaissance, étant donné que la Commission a, en tout état de cause, circonscrit la participation de la requérante à un seul élément de l'entente, à savoir la répartition des quotas pour le seul marché italien, élément qui serait suffisant pour lui imputer la responsabilité de l'entente globale. En effet, une entreprise ayant participé à une infraction unique par ses propres actions serait également responsable, pour toute la période de sa participation, des comportements mis en œuvre par d'autres entreprises, dans la mesure où l'entreprise en question connaissait les comportements infractionnels des autres participants ou pouvait raisonnablement les prévoir et était prête à en accepter le risque.
35. Il serait suffisamment établi que la requérante, en participant aux réunions concernant le marché italien, savait ou pouvait, en tout état de cause, raisonnablement présumer que celles-ci s'inscrivaient dans un plan global plus vaste. Il ressortirait des annexes de la communication des griefs que la requérante a participé à plus de quatre réunions ayant pour objet la fixation des quotas sur le marché italien. La déclaration de M. Molinari figurant en annexe 187 de la communication des griefs démontrerait que la requérante participait aux réunions en sachant précisément quels étaient leur objet commun. De plus, il ressortirait de l'annexe 112 de la communication des griefs que Pan-Isovit, l'entreprise représentée par M. Molinari, le responsable et le coordinateur de l'entente en Italie, était en même temps responsable du marché allemand. Or, étant donné que les réunions pour la répartition des quotas sur le marché italien rassemblaient des représentants des principaux concurrents de la requérante au niveau européen et que ceux-ci se déclaraient responsables d'un autre marché et en même temps coordinateurs du marché italien, la requérante n'aurait pu être ignorante du fait que la répartition des quotas sur le marché italien faisait partie d'un plan global plus vaste. Le fait que ce soit ABB qui ait joué le rôle de coordinateur pour le marché italien en non pas Pan-Isovit ne modifierait en rien cette conclusion.
36. D'ailleurs, il n'y aurait aucun élément permettant de considérer que la requérante a pris ses distances par rapport à l'objet des réunions auxquelles elle a participé, sachant que les quotas pour le marché italien étaient fixés à un niveau supérieur. Au contraire, à défaut d'une opposition aux quotas qui étaient attribués à la requérante, la présence de celle-ci aux réunions aurait donné à ses concurrents l'impression qu'elle tenait compte de ces quotas pour déterminer la politique à suivre sur le marché et aurait ainsi favorisé le concours de volontés intervenu lors de ces réunions.
37. Quant au rôle joué par l'EuHP, l'argumentation de la requérante se fonderait sur une erreur de perspective quant à la portée de l'infraction déterminée par le dispositif de la décision. En effet, l'article 1er du dispositif de la décision démontrerait que la participation à l'EuHP n'est pas considérée comme un élément constitutif de l'entente en cause. Bien que les activités de l'EuHP constituent, certes, un des aspects de l'entente, on ne saurait faire coïncider la participation à l'EuHP avec la participation à l'entente.
38. Contrairement à ce que prétend la requérante, on ne pourrait déduire de son ignorance des actions concertées à l'encontre de Powerpipe la conclusion selon laquelle elle aurait été étrangère à l'objet de l'infraction examinée en l'espèce. Le boycottage de Powerpipe n'aurait été qu'un des multiples éléments de l'infraction identifiés dans le considérant 147 de la décision. Il n'aurait en tout état de cause pas été nécessaire, pour déterminer la responsabilité de la requérante, qu'elle ait eu connaissance de cet élément.
39. En outre, le fait qu'une entreprise n'a pas participé à tous les éléments constitutifs d'une entente, ou qu'elle a joué un rôle mineur dans les aspects auxquels elle a participé, devrait être pris en considération lors de l'appréciation de la gravité de l'infraction et, le cas échéant, lors de la détermination du montant de l'amende. En l'espèce, la décision aurait indiqué, à plusieurs reprises, que la participation à l'entente de la requérante était limitée au marché italien, sans pour autant mettre en cause le principe de l'infraction unique. Le rôle mineur joué par la requérante aurait été dûment pris en compte lors de la fixation du montant de l'amende, si bien que celle-ci aurait été réduite de deux tiers.
Appréciation du Tribunal
40. Selon la jurisprudence, une entreprise ayant participé à une infraction multiforme aux règles de la concurrence par des comportements qui lui sont propres, qui relèvent des notions d'accord ou de pratique concertée ayant un objet anticoncurrentiel au sens de l'article 85, paragraphe 1, du traité et qui visent à contribuer à la réalisation de l'infraction dans son ensemble peut être également responsable des comportements mis en œuvre par d'autres entreprises dans le cadre de la même infraction pour toute la période de sa participation à ladite infraction, lorsqu'il est établi que l'entreprise en question connaît les comportements infractionnels des autres participants, ou qu'elle peut raisonnablement les prévoir et qu'elle est prête à en accepter le risque (arrêt de la Cour du 8 juillet 1999, Commission/Anic Partecipazioni, C-49-92 P, Rec. p. I-4125, point 203).
41. Dans ce contexte, il y a lieu d'observer que, dans la décision, la Commission reproche à la requérante, d'une part, d'avoir participé à l'entente couvrant l'ensemble du Marché commun, telle que décrite dans l'article 1er, premier alinéa, de la décision.
42. D'autre part, la Commission a considéré, au considérant 124 de la décision, que la participation de la requérante a été limitée aux "arrangements concernant le marché italien", qu'elle a régulièrement participé aux réunions consacrées au marché italien ainsi qu'à l'attribution de projets, même s'il se peut qu'elle ait été considérée comme un "trouble-fête" et qu'elle n'ait pas été invitée à toutes ces réunions. La Commission a admis, au même endroit, que la requérante n'a pas eu connaissance de la campagne destinée à éliminer Powerpipe.
43. Il convient de constater que la répartition du marché italien par le biais d'une fixation de quotas et d'une attribution des projets ressort des déclarations concordantes d'ABB (réponses d'ABB du 4 juin 1996 et du 13 août 1996 à la demande de renseignements du 13 mars 1996) et de M. Molinari (annexe 187 de la communication des griefs), confirmées par le compte rendu de la réunion du 12 mai 1995 (annexe 112 de la communication des griefs), ainsi que de la mention des quotas pour le marché italien dans la note figurant en annexe 64 de la communication des griefs et du tableau relatif à la répartition de projets sur le marché italien figurant en annexe 188 de la communication des griefs. Étant donné que la requérante reconnaît avoir participé, au moins, aux réunions des 12 avril, 12 mai et 9 juin 1995 et du 27 février 1996, il y a lieu de conclure que la Commission a correctement établi les allégations formulées, aux considérants 85, 86 et 124 de la décision, en ce qui concerne la participation de la requérante à un accord sur le marché italien.
44. Toutefois, force est de constater que la Commission n'a pas démontré que la requérante, lors de sa participation à l'accord sur le marché italien, connaissait les activités anticoncurrentielles à l'échelle européenne des autres entreprises, ou qu'elle pouvait raisonnablement les prévoir.
45. Il y a lieu de relever que la seule identité d'objet entre un accord auquel a participé une entreprise et une entente globale ne suffit pas pour imputer à cette entreprise la participation à l'entente globale. En effet, ce n'est que si l'entreprise, lorsqu'elle participe à cet accord, a su ou aurait dû savoir que, ce faisant, elle s'intégrait dans l'entente globale que sa participation à l'accord concerné peut constituer l'expression de son adhésion à cette entente globale.
46. D'abord, il convient d'observer qu'il est constant que la requérante, contrairement à d'autres entreprises participant à l'entente sur le marché italien, n'était pas représentée dans le club des directeurs et n'opérait pas, dans le secteur du chauffage urbain, sur d'autres marchés que le marché italien. De plus, il est également constant que, au sein de l'entente italienne, les autres participants n'ont pas impliqué la requérante dans toutes leurs activités, étant donné que celle-ci n'était pas invitée à toutes les réunions. Il y a lieu de remarquer, notamment, que la requérante n'a pas participé à la première réunion, le 21 mars 1995, lors de laquelle, selon les dires de la Commission au considérant 85 de la décision, plusieurs grands projets ont déjà été attribués à d'autres entreprises présentes sur le marché italien. Or, dans ces circonstances, le fait que les entreprises participant à l'attribution de projets sur le marché italien ne faisaient qu'appliquer des quotas qui leur étaient attribués par le club des directeurs ne conduit pas nécessairement à la conclusion selon laquelle la requérante était ou devait être au courant de l'intégration de l'accord italien dans une entente européenne.
47. Ensuite, il y a lieu de constater que la Commission n'a apporté, en ce qui concerne la requérante, aucun élément en mesure de confirmer sa supposition selon laquelle celle-ci avait ou devait avoir connaissance de l'intégration de l'accord italien dans une entente européenne. Quant au fait que la requérante, au moment où elle envisageait de demander son adhésion à l'EuHP, a été informée d'activités anticoncurrentielles entreprises au sein de l'EuHP, il est impossible d'en tirer une indication de ce que la requérante était au courant de l'entente générale telle que décrite dans l'article 1er de la décision, faute d'indices précis sur l'objet des activités dont la requérante a été informée. En effet, dans la mesure où la seule suspicion de la Commission relative à une violation des règles de la concurrence communautaires au sein de l'EuHP portait sur la coopération relative aux normes de qualité, cette information est la seule susceptible d'avoir été obtenue de façon crédible par la requérante. Or, il s'agit d'un élément qui n'a pas été retenu par la Commission, dans l'article 1er de la décision, comme étant un aspect de l'entente.
48. Par ailleurs, il y a lieu de constater que la Commission n'a pas repris, dans sa décision, l'affirmation figurant à la page 59 de la communication des griefs, selon laquelle la requérante, tout comme KE KELIT, savait que les réunions du groupe de contact relatif à son marché s'inséraient dans un cadre plus vaste, affirmation qui a pourtant été reprise, au considérant 124 de la décision en ce qui concerne KE KELIT.
49. Enfin, il ne ressort aucunement des déclarations susmentionnées d'ABB, ni de celle de M. Molinari du 20 février 1997, ni des documents susmentionnés figurant en annexes 64, 112 et 188 de la communication des griefs que la requérante, en participant à l'attribution de projets sur le marché italien, aurait eu connaissance du fait que cette coopération faisait partie d'une entente dépassant le marché italien. À cet égard, il y a lieu de préciser que la seule référence, dans le compte rendu de la réunion du 12 mai 1995, au fait que M. Molinari de Pan-Isovit a informé les autres entreprises que le directeur des ventes de Pan-Isovit en Allemagne avait été nommé "coordinateur du marché italien" (annexe 112 de la communication des griefs) n'est pas à même d'établir un lien entre la participation à l'accord italien et l'existence d'une entente plus vaste. En effet, indépendamment du fait de savoir si Pan-Isovit a joué le rôle de coordinateur de l'entente sur le marché italien, il suffit d'observer qu'il n'y a, dans ce compte rendu, aucune référence à une coopération entre concurrents sur le marché européen ni à une coopération sur d'autres marchés nationaux.
50. De toute évidence, la défenderesse ne saurait tirer argument, afin d'établir la participation de la requérante à l'entente européenne, du fait que celle-ci n'a jamais pris ses distances à l'égard de l'utilisation de quotas sur le marché italien.
51. Il résulte de tout ce qui précède que la Commission n'a pas réuni des éléments de preuve suffisamment précis et concordants pour fonder la ferme conviction que la requérante a su ou aurait dû savoir que, en participant à l'accord sur le marché italien, elle s'intégrait dans l'entente européenne.
52. Par conséquent, la décision doit être annulée en ce qu'il y est reproché à la requérante, outre sa participation à un accord sur le marché italien, d'avoir participé à l'entente couvrant l'ensemble du Marché commun.
Sur le deuxième moyen, tiré d'une violation de l'obligation de motivation
Arguments des parties
53. La requérante estime que la décision attaquée est entachée d'un défaut de motivation en ce qui concerne la thèse de l'"entente générale" à laquelle auraient participé toutes les entreprises destinataires de la décision, en particulier en ce qui concerne les comportements illicites auxquels la requérante aurait participé ou desquels elle aurait eu ou aurait dû avoir connaissance.
54. Il y aurait également une incohérence entre la motivation et le dispositif, dans la mesure où, en ayant explicitement soutenu que la requérante n'avait jamais eu connaissance du boycottage de Powerpipe, la Commission lui a cependant imputé la participation à l'entente générale.
55. La défenderesse fait observer que la décision a indiqué à plusieurs reprises qu'il y avait lieu de constater la nature unique de l'infraction même si chacun des destinataires de la décision n'a pas participé à tous les aspects de l'entente.
56. En ce qui concerne la connaissance par la requérante du plan global de l'entente, il ressortirait du considérant 68 de la décision que la participation aux groupes de contact qui avaient pour fonction de gérer les accords sous la supervision du club des directeurs, impliquait que les responsables locaux savaient que la répartition des parts de marché au niveau local faisait partie d'un plan plus vaste. De même, en ce qui concerne KWH, Brugg et KE KELIT, la décision ferait ressortir dans ses considérants 123 et 124 que la participation aux réunions des groupes de contact impliquait la connaissance de ce que la répartition des quotas de marché au niveau local s'inscrivait dans un plan global plus vaste. De toute évidence, le même raisonnement aurait été appliqué à la requérante. En effet, en précisant, dans son considérant 124, que la requérante n'avait pas connaissance de la campagne destinée à évincer Powerpipe, la décision aurait estimé "a contrario" que la requérante était au courant de l'entente dans son ensemble et, en particulier, de l'aspect relatif à la répartition des quotas décidée dans le cadre plus vaste.
57. À ce propos, la décision devrait être considérée comme motivée même si elle n'a pas repris l'affirmation contenue à la page 59 de la communication des griefs, suivant laquelle la participation au groupe de contact signifiait que la requérante devait savoir qu'il s'agissait d'un aspect d'un plan global plus vaste. En effet, le préambule d'une décision devrait être interprété à la lumière de l'économie générale de la décision et de la communication des griefs.
58. En ce qui concerne la prétendue contradiction entre la motivation et le dispositif de la décision, la Commission réitère que le boycottage de Powerpipe n'a été qu'un des multiples éléments de l'infraction identifiés dans le considérant 147 de la décision. Or, on ne saurait conclure du fait que la requérante ignorait l'activité collusoire exercée au détriment de Powerpipe qu'elle était nécessairement étrangère à l'objet de l'entente.
Appréciation du Tribunal
59. Il convient d'observer que la requérante invoque un défaut de motivation en ce qui concerne le reproche selon lequel elle a participé à l'entente européenne telle que décrite à l'article 1er de la décision.
60. Ainsi que cela est constaté aux points 40 à 52 ci-dessus, la décision doit être annulée dans la mesure où il y est reproché à la requérante d'avoir participé, de par sa participation à l'accord sur le marché italien, à une entente couvrant l'ensemble du Marché commun. Par conséquent, il n'y a plus lieu de statuer sur le moyen tiré d'une violation de l'obligation de motivation sur cette question.
Sur le troisième moyen, tiré de la violation de principes généraux et d'erreurs d'appréciation dans la détermination du montant de l'amende
Sur la violation des principes de proportionnalité et d'égalité de traitement
- Arguments des parties
61. La requérante fait observer que la Commission a dépassé les limites de son pouvoir d'appréciation, en fixant une amende disproportionnée par rapport à la taille de la requérante et au rôle joué par celle-ci dans l'entente.
62. D'abord, la Commission aurait considéré à tort que la requérante pouvait être tenue pour responsable de l'entente générale, bien qu'elle n'ait pas participé à toutes les pratiques restrictives autres que le système de quotas sur le marché italien ni eu connaissance de celles-ci. Même s'il est vrai que la Commission a réduit de deux tiers l'amende de la requérante, pour tenir compte du rôle mineur exercé par cette dernière et du fait que sa participation a été limitée au marché national, l'hypothèse de départ aurait pourtant été celle de la participation à l'entente générale.
63. Ensuite, la requérante conteste la façon dont la Commission a fixé, pour elle ainsi que pour KWH, Brugg et KE KELIT, un point de départ de 1 million d'écus pour le calcul du montant de l'amende (ci-après le "point de départ"), en raison de la position relativement moins importante de ces quatre entreprises sur le marché du chauffage urbain. La Commission n'aurait pas pu assimiler la requérante à KWH, à Brugg et à KE KELIT sans vérifier si l'impact, en termes de chiffre d'affaires, du point de départ était similaire. La requérante conteste la méthode consistant à fixer le point de départ à un certain montant absolu, plutôt qu'en termes de pourcentages du chiffre d'affaires. En outre, la Commission aurait dû tenir compte du fait que le chiffre d'affaires de la requérante réalisé avec les produits concernés était relativement faible par rapport à celui résultant de l'ensemble de ses ventes.
64. En outre, la Commission se serait fondée sur le chiffre d'affaires de la requérante concernant l'ensemble des conduites précalorifugées, alors que l'enquête concerne exclusivement les conduites précalorifugées pour le chauffage urbain, à l'exclusion des conduites flexibles. Sur le segment intéressé, son chiffre d'affaires aurait été d'environ 60 % du chiffre d'affaires global des conduites précalorifugées pris en considération par la Commission. De cette manière, le point de départ et l'amende finale représenteraient, respectivement, environ 50 % et 18 % de son chiffre d'affaires réalisé en 1997 sur le marché des conduites précalorifugées.
65. À cet égard, la requérante fait remarquer que la Commission a toujours cherché, dans son application de l'article 15 du règlement n° 17, à limiter le montant final à 10 % du chiffre d'affaires réalisé sur le marché concerné par l'infraction. Une amende n'aurait dépassé la limite de 10 % du chiffre d'affaires dudit produit que dans le cas où elle n'aurait autrement pas eu l'effet dissuasif recherché par la Commission. Ainsi, la Commission aurait encore affirmé, dans la communication des griefs, que, en calculant l'amende à infliger à chaque entreprise, elle tiendrait compte du chiffre d'affaires dans le secteur du chauffage urbain et "éventuellement [du] chiffre d'affaires total pour tenir compte de la taille et de la puissance économique de chaque entreprise et pour obtenir l'effet dissuasif nécessaire". De même, le membre de la Commission en charge de la politique de concurrence aurait déclaré, dans le communiqué de presse accompagnant l'adoption de la décision, en ce qui concerne "les grands groupes industriels qui prennent part à des cartels secrets", que ceux-ci "ne peuvent s'attendre à ce que les amendes se limitent à 10 % de leur chiffre d'affaires dans le secteur en question".
66. Contrairement à ce que prétend la Commission, la réduction de l'amende de deux tiers, en application des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 et de l'article 65, paragraphe 5, du traité CECA (JO 1998, C 9, p. 3) (ci-après les "nouvelles lignes directrices" ou les "lignes directrices"), en reconnaissance, en tant que circonstance atténuante, du rôle marginal joué dans l'infraction par la requérante, serait insuffisante. En revanche, la Commission, une fois l'amende fixée en suivant les critères visés aux points 1 à 4 des lignes directrices et compte tenu du rôle marginal exercé par certaines entreprises par rapport à d'autres, aurait encore dû vérifier la conformité de ces critères en fonction du chiffre d'affaires de chacune d'entre elles. Ainsi, la Commission aurait réduit l'amende à infliger à certaines entreprises, en ayant vérifié que l'amende établie dépassait le plafond de 10 % deleurs chiffres d'affaires, afin de ne pas dépasser la limite en cause. Néanmoins, elle aurait négligé de tenir compte du fait que l'amende fixée pour la requérante dépassait de loin la limite de 10 % de son chiffre d'affaires sur le marché concerné. En vertu du point 5, sous b), des lignes directrices, une telle adaptation pourrait encore être effectuée indépendamment de, et donc après, l'appréciation de la gravité de l'infraction.
67. La requérante soutient encore, dans son mémoire en réplique, que même si on doit admettre que la Commission n'a pas l'obligation de prendre en compte la relation entre le chiffre d'affaires global et le chiffre d'affaires relatif aux produits en cause, cela ne porterait pas atteinte à la validité du principe selon lequel la Commission est tenue d'expliquer précisément les raisons qui l'amènent, dans un cas déterminé, à s'écarter de la pratique consistant à tenir compte du chiffre d'affaires sur le marché pertinent. En l'espèce, le raisonnement qui a été suivi à l'égard d'ABB, à savoir que la Commission ne pourrait se limiter au chiffre d'affaires sur le marché pertinent pour assurer l'effet dissuasif de l'amende, ne pourrait valoir pour un petit producteur comme la requérante, dont le rôle a été marginal dans le cadre de l'entente.
68. Ensuite, la requérante reproche à la Commission le fait de retenir le même point de départ à son égard que celui retenu à l'égard de Brugg, de KE KELIT et de KWH, en se basant sur la constatation que "la position de ces quatre entreprises sur le marché du chauffage urbain est relativement moins importante". La Commission aurait ainsi omis de différencier la responsabilité de la requérante de celle de ces trois autres entreprises et aurait ainsi violé le principe d'égalité de traitement.
69. En effet, il y aurait lieu de relever que Brugg était active principalement sur le marché allemand, lequel représentait, à l'époque, 40 % du marché européen, tandis que le marché italien, sur lequel opérait la requérante, ne représentait que 6,65 % du marché européen. Même en supposant que la requérante ait obtenu 10 % du marché italien, cela n'aurait correspondu qu'à 0,65 % du marché européen, alors que tant Brugg que KWH auraient pu compter sur une part de 2 % du marché européen. Par conséquent, l'influence que la requérante a pu avoir sur le marché européen n'aurait pas été comparable à celle qu'ont pu exercer des entreprises de la taille de Brugg et de KWH. Sous l'angle de la durée de l'infraction, enfin, la position de la requérante se distinguerait de celle de KE KELIT.
70. Selon la requérante, la Commission devrait tenir compte, lors de la détermination du point de départ, de sa position sur le marché, de la possibilité d'affecter gravement la concurrence et de la durée de son infraction. La Commission ne saurait affirmer qu'elle a tenu compte des différences existant entre les positions sur le marché des quatre entreprises susvisées en raison du seul fait qu'elle a tenu compte de la durée différente de leur participation à l'infraction.
71. La défenderesse soutient, d'abord, que, même si elle a imputé à la requérante la responsabilité de l'entente générale, elle a toujours circonscrit la participation active de la requérante au marché italien et pour une durée limitée et a réduit son amende, pour ces raisons, de deux tiers.
72. En ce qui concerne l'argument selon lequel un même point de départ a été fixé pour les entreprises de la quatrième catégorie sans vérifier si un tel point de départ eût été proportionnel à leur chiffre d'affaires, la Commission fait remarquer que l'amende a été calculée conformément à la méthode exposée dans les lignes directrices. Suivant cette nouvelle méthode, les amendes ne représenteraient pas un pourcentage du chiffre d'affaires global des entreprises intéressées, mais seraient calculées sur la base d'un montant absolu, choisi en fonction de la gravité globale de l'infraction. La Commission aurait bien tenu compte de la taille sur le marché des entreprises concernées par rapport à ABB en répartissant les entreprises en quatre catégories. En imposant un point de départ de 1 million d'écus à toutes les entreprises de la quatrième catégorie, à pondérer ensuite en fonction de la durée de leur participation, la Commission aurait imposé à toutes les entreprises la même charge financière. Un impact différent sur chaque entreprise pourrait uniquement se produire dans le cas où l'application de ce montant mettrait en cause la survie de l'une d'entre elles, ce qui serait en tout état de cause improbable compte tenu de la limite supérieure prévue par l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17.
73. Ensuite, la Commission n'aurait pas l'obligation juridique de tenir compte du chiffre d'affaires des entreprises sur le marché en question pour fixer le montant de l'amende. En effet, la Commission devrait prendre en considération une série de facteurs parmi lesquels il lui est possible de faire figurer le chiffre d'affaires global ou la part du chiffre d'affaires pour le secteur des produits où l'infraction a été commise. En effet, le chiffre d'affaires d'une entreprise ne serait pas nécessairement lié au rôle de l'entreprise concernée dans l'infraction et aux éventuels bénéfices que celle-ci en tire.
74. De même, la méthode de calcul annoncée dans la communication des griefs, bien que faisant expressément référence à la possibilité de prendre en compte le chiffre d'affaires sur le marché concerné, n'aurait pas non plus indiqué qu'il s'agissait de l'unique critère de référence de la Commission. Dans les observations de la requérante sur la communication des griefs, celle-ci n'aurait d'ailleurs formulé aucune considération relative aux modalités selon lesquelles la Commission comptait infliger les amendes.
75. S'agissant de la limite de 10 % du chiffre d'affaires imposée par l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17, celle-ci s'appliquerait au chiffre d'affaires global de l'entreprise et non à celui du secteur dans lequel l'infraction a été commise. Contrairement aux cas des autres entreprises, où le montant final de l'amende a été réduit en raison du fait que, autrement, l'amende aurait dépassé le plafond de 10 % de leur chiffre d'affaires global, l'amende finale infligée à la requérante, égale à 400 000 écus, aurait été largement inférieure à ce plafond.
76. Quant à l'argument selon lequel la Commission aurait été tenue d'expliquer les raisons qui, dans un cas déterminé, l'amènent à s'écarter de la pratique consistant à tenir compte du chiffre d'affaires sur le marché pertinent, il faudrait observer qu'un tel argument a été avancé pour la première fois dans la réplique et qu'il doit dès lors être déclaré irrecevable. De toute façon, même si le Tribunal venait à l'examiner, il y aurait lieu de relever qu'il n'existait en réalité aucune pratique de la Commission en ce sens. Bien que la Commission ait pu, dans des cas déterminés, prendre le chiffre d'affaires sur le marché où l'infraction a été commise comme point de départ pour calculer le montant des amendes, cela n'aurait pas été le seul critère utilisé et on ne pourrait dès lors prétendre qu'il existait une pratique allant dans ce sens.
77. Ensuite, la Commission n'aurait pas à différencier le point de départ pour les entreprises de la quatrième catégorie en raison de leur taille ou de leur position différente sur le marché. En effet, selon les lignes directrices, la Commission peut, lors de la fixation du point de départ concernant les entreprises d'une catégorie, effectuer une pondération à l'intérieur de cette catégorie au cas où il y a des disparités considérables quant à la taille des entreprises concernées. En l'espèce, toutefois, on ne pourrait prétendre que les entreprises appartenant à la quatrième catégorie présentent des différences de taille de nature à justifier une nouvelle pondération de l'amende.
78. En ce qui concerne la durée de l'infraction, la Commission aurait modulé le point de départ de l'amende en imposant une majoration à Brugg et à KE KELIT dans la mesure où la participation de la première avait duré 20 mois et celle de la seconde 15 mois.
- Appréciation du Tribunal
79. Il convient d'exposer, d'abord, que la Commission a estimé qu'il s'agissait, en l'espèce, d'une infraction très grave, pour laquelle l'amende normalement imposable est de 20 millions d'écus (considérant 165 de la décision). Selon le considérant 166 de la décision, la Commission a ensuite différencié ce montant en tenant compte de la capacité économique effective des auteurs de l'infraction à créer un dommage important à la concurrence et afin d'assurer à l'amende un caractère suffisamment dissuasif.
80. Il ressort du considérant 181 de la décision que, afin de déterminer un point de départ pour le calcul du montant de l'amende, la Commission a retenu, tant pour l'amende à imposer à la requérante que pour celles à imposer à Brugg, à KE KELIT et à KWH, que la position de ces entreprises sur le marché du chauffage urbain est relativement moins importante que celles des autres participants, que leur participation doit être qualifiée d'infraction très grave à l'article 85 du traité, mais qu'il convient de moduler le montant de leurs amendes en fonction des effets produits par leur comportement et suivant leur taille au regard de celle d'ABB. La Commission a retenu un point de départ d'un million d'écus en énonçant que, pour ces quatre entreprises, la gravité de l'infraction justifie que le point de départ ainsi ajusté ne soit pas inférieur à ce montant.
81. À cet égard, il y a lieu de constater que, dès lors que la Commission n'a pas établi que la requérante a participé à une entente couvrant l'ensemble du Marché commun et qu'elle ne saurait, par conséquent, la rendre responsable que d'une participation à l'accord sur le marché italien, la Commission n'est pas non plus en droit d'imposer à la requérante une amende basée sur une participation à une infraction très grave constituée par cette entente.
82. Par conséquent, la décision doit être annulée dans la mesure où elle impose à la requérante une amende dont le montant est calculé en fonction d'une participation à l'entente couvrant l'ensemble du Marché commun.
83. Toutefois, contrairement à ce que prétend la requérante, on ne saurait soutenir que la Commission aurait dû calculer le montant de son amende sur la base d'un pourcentage de son chiffre d'affaires relatif au produit en cause.
84. Il convient d'observer que la Commission n'est pas tenue, lors de la détermination du montant des amendes en fonction de la gravité et de la durée de l'infraction en question, d'effectuer le calcul de ce montant à partir de montants basés sur le chiffre d'affaires des entreprises concernées, ni d'assurer, au cas où des amendes sont imposées à plusieurs entreprises impliquées dans une même infraction, que les montants finals des amendes auxquels son calcul aboutit pour les entreprises concernées traduisent toute différence entre celles-ci quant à leur chiffre d'affaires global ou leur chiffre d'affaires sur le marché du produit en cause.
85. À cet égard, il convient de rappeler la jurisprudence bien établie selon laquelle la gravité des infractions doit être établie en fonction de nombreux éléments tels que, notamment, les circonstances particulières de l'affaire, son contexte et la portée dissuasive des amendes, et ce sans qu'ait été établie une liste contraignante ou exhaustive de critères devant obligatoirement être pris en compte (ordonnance de la Cour du 25 mars 1996, SPO ea/Commission, C-137-95 P, Rec. p. I-1611, point 54; arrêt de la Cour du 17 juillet 1997, Ferriere Nord/Commission, C-219-95 P, Rec. p. I-4411, point 33; arrêt du Tribunal du 14 mai 1998, Buchmann/Commission, T-295-94, Rec. p. II-813, point 163).
86. Parmi les éléments d'appréciation de la gravité d'une infraction, peuvent, selon le cas, figurer le volume et la valeur des produits faisant l'objet de l'infraction ainsi que la taille et la puissance économique de l'entreprise et, partant, l'influence que celle-ci a pu exercer sur le marché. Il s'ensuit, d'une part, qu'il est loisible, en vue de la détermination du montant de l'amende, de tenir compte aussi bien du chiffre d'affaires global de l'entreprise qui constitue une indication, fût-elle approximative et imparfaite, de la taille de celle-ci et de sa puissance économique que de la part de ce chiffre qui provient des produits faisant l'objet de l'infraction et qui est donc de nature à donner une indication de l'ampleur de celle-ci. Il en résulte, d'autre part, qu'il ne faut attribuer ni à l'un ni à l'autre de ces chiffres une importance disproportionnée par rapport aux autres éléments d'appréciation (arrêt de la Cour du 7 juin 1983, Musique diffusion française ea/Commission, 100-80 à 103-80, Rec. p. 1825, points 120 et 121; arrêts du Tribunal du 14 juillet 1994, Parker Pen/Commission, T-77-92, Rec. p. II-549, point 94, et du 14 mai 1998, SCA Holding/Commission, T-327-94, Rec. p. II-1373, point 176).
87. En effet, il ressort de la jurisprudence que la Commission est en droit de calculer le montant d'une amende en fonction de la gravité de l'infraction et sans tenir compte des divers chiffres d'affaires des entreprises concernées. Ainsi, le juge communautaire a constaté la licéité d'une méthode de calcul selon laquelle la Commission détermine d'abord le montant global des amendes à imposer, pour répartir ensuite ce total entre les entreprises concernées, selon leurs activités dans le secteur concerné (arrêt de la Cour du 8 novembre 1983, IAZ ea/Commission, 96-82 à 102-82, 104-82, 105-82, 108-82 et 110-82, Rec. p. 3369, points 48 à 53) ou selon leur niveau de participation, leur rôle dans l'entente et leur importance respective sur le marché, calculée sur la base de la part de marché moyenne au cours d'une période de référence.
88. Étant donné que la Commission n'est pas tenue de calculer le montant de l'amende à imposer à une entreprise sur la base de son chiffre d'affaires relatif au produit concerné, il ne saurait lui être reproché, contrairement à ce que prétend la requérante, de n'avoir pas indiqué les motifs pour lesquels elle ne s'est pas servie de ce facteur pour calculer le montant de l'amende à lui infliger.
89. Par ailleurs, la Commission n'a pas annoncé, dans la communication des griefs, qu'elle baserait le calcul du montant de l'amende à infliger à la requérante sur le seul chiffre d'affaires relatif au produit concerné. En effet, dans sa communication des griefs, la Commission a mentionné le chiffre d'affaires dans le secteur du chauffage urbain, tant pour la requérante que pour les autres entreprises concernées, parmi une série d'éléments dont elle tiendrait compte pour déterminer le montant des amendes à imposer aux entreprises concernées, notamment, le rôle joué par chacune dans les pratiques anticoncurrentielles, toutes les différences substantielles en ce qui concerne la durée de leur participation, leur importance dans l'industrie du chauffage urbain, leur chiffre d'affaires global, le cas échéant, pour tenir compte de la taille et du pouvoir économique de l'entreprise en question et afin d'assurer un effet suffisamment dissuasif, et, enfin, de toutes les circonstances atténuantes.
90. Il y a lieu de souligner, encore, que la Commission, en adoptant la méthode de calcul exposée dans les lignes directrices, ne s'est pas privée de la possibilité de tenir dûment compte du chiffre d'affaires relatif au marché concerné.
91. De plus, la requérante soutient à tort que la Commission devrait prendre en considération son chiffre d'affaires sur le marché pertinent eu égard à la limite de 10 % du chiffre d'affaires prévue par l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17. En effet, selon une jurisprudence constante, le chiffre d'affaires visé à l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 s'entend comme étant relatif au chiffre d'affaires global de l'entreprise concernée, qui donne seul une indication approximative de l'importance et de l'influence de celle-ci sur le marché (arrêt Musique diffusion française ea/Commission, précité, point 119; arrêts du Tribunal du 6 avril 1995, Cockerill-Sambre/Commission, T-144-89, Rec. p. II-947, point 98, et du 7 juillet 1994, Dunlop Slazenger/Commission, T-43-92, Rec. p. II-441, point 160). Dans le respect de la limite fixée par la disposition susvisée du règlement n° 17, la Commission peut fixer l'amende à partir du chiffre d'affaires de son choix, en termes d'assiette géographique et de produits concernés.
92. Dans ce contexte, la requérante ne saurait se prévaloir de la circonstance selon laquelle, pour certaines entreprises, le point de départ retenu par la Commission a abouti à des amendes qui devaient être réduites, pour prendre en considération la limite de 10 % du chiffre d'affaires prévue par l'article 15 du règlement n° 17, tandis que, pour la requérante, une telle réduction n'a pas été nécessaire. En effet, cette différence de traitement est la conséquence directe de la limite maximale imposée aux montants des amendes par le règlement n° 17, dont la légalité n'a pas été mise en cause et qui ne s'applique, à l'évidence, que dans ces cas où le montant de l'amende envisagé aurait dépassé le 10 % du chiffre d'affaires de l'entreprise concernée.
93. Même si la Commission a commis une erreur en retenant, à l'égard de la requérante, une participation à l'entente couvrant l'ensemble du Marché commun, il n'en reste pas moins qu'elle a correctement établi la participation de la requérante à l'accord sur le marché italien.
94. Compte tenu du rôle limité de la requérante au sein de l'accord italien et de la taille relativement restreinte du marché italien, le Tribunal, statuant dans l'exercice de sa compétence de pleine juridiction au sens des articles 172 du traité CE (devenu article 229 CE) et 17 du règlement n° 17, estime justifié de déterminer, en fonction de la gravité de l'infraction, le point de départ pour le calcul du montant de l'amende à infliger à la requérante, libellé en euros par application de l'article 2, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1103-97 du Conseil, du 17 juin 1997, fixant certaines dispositions relatives à l'introduction de l'euro (JO L. 162, p. 1), à 300 000 euros.
95. Quant à la durée de l'infraction, autre facteur à prendre en considération pour fixer le montant de base d'une amende, il suffit de constater que la requérante ne conteste pas la détermination par la Commission de la période de sa participation aux activités anticoncurrentielles, qui n'a conduit à aucune augmentation de son point de départ. Dès lors, il convient de fixer le montant de base pour l'amende à infliger à la requérante à 300 000 euros.
Sur l'appréciation erronée des circonstances aggravantes
- Arguments des parties
96. La requérante soutient que la Commission, en augmentant de 20 % le montant de base de son amende en raison de la poursuite de l'infraction pendant neuf mois après les vérifications, effectuées en juin 1995, a omis de considérer que, dès lors qu'aucune vérification n'a été effectuée au siège de la requérante, celle-ci n'a pas pu prendre connaissance, en juin 1995, de l'enquête de la Commission. En effet, ce n'aurait été qu'en juillet 1996, lorsque la première demande de renseignements a été adressée à la requérante au titre de l'article 11 du règlement n° 17, qu'elle a eu connaissance de la situation, c'est-à-dire à un moment où l'infraction avait déjà pris fin.
97. Cette conclusion ne serait pas mise en cause par le passage de l'annexe 187 de la communication des griefs, selon lequel, au cours d'une réunion du 9 juin 1995, une nouvelle rencontre a été fixée pour le 5 juillet, rencontre qui n'a pas eu lieu en raison de l'intervention de la Commission. S'agissant d'une déclaration d'un ancien salarié de Pan-Isovit et non pas d'une déclaration de la requérante, on ne pourrait déduire de cette phrase, non corroborée par d'autres preuves ou indices, que la requérante a été informée de l'ouverture de la procédure.
98. En outre, si le motif pour lequel la réunion du 5 juillet 1995 a été annulée réside dans l'intervention de la Commission, il ne ressortirait d'aucun document du dossier qu'une telle justification a été communiquée à la requérante. En effet, il serait plus plausible de considérer que les entreprises les plus gravement impliquées ont voulu tenir la requérante dans l'ignorance des faits qui ne la concernaient pas directement, étant donné que cette dernière, n'étant pas membre du club des directeurs, n'a pas non plus été invitée à toutes les réunions qui se sont tenues en Italie après le 12 avril 1995 et n'a jamais été informée de ce qui se passait.
99. En appliquant à tous les "producteurs" sans distinction la majoration de 20 %, la Commission aurait violé le principe d'égalité de traitement ou se serait exposée, à tout le moins, au grief du défaut de motivation, étant donné qu'elle aurait dû expliquer pourquoi elle a considéré que tous les "producteurs" avaient une connaissance précise de l'intervention de la Commission.
100. La défenderesse fait remarquer que rien ne l'a empêchée de considérer la poursuite de l'infraction comme une circonstance aggravante. Le seul élément qui importe, abstraction faite de ce que l'infraction se serait poursuivie pendant un certain nombre de mois, aurait été la circonstance selon laquelle les entreprises n'ont pas immédiatement mis fin à l'infraction une fois que la Commission a effectué ses vérifications, à savoir après le 29 juin 1995.
101. Selon la défenderesse, l'affirmation de la requérante selon laquelle elle n'aurait eu connaissance de telles vérifications qu'après de nombreux mois et ne les aurait apprises, en tout cas officiellement, que le 9 juillet 1996 serait démentie par l'annexe 187 de la communication des griefs. En effet, de par sa présence lors de la réunion du 9 juin 1995 à Zurich, la requérante aurait dû savoir que la Commission procédait à des vérifications.
- Appréciation du Tribunal
102. Il y a lieu d'observer que, afin d'apprécier la poursuite délibérée de l'accord sur le marché italien en tant que circonstance aggravante, il doit être vérifié si l'entreprise en question a poursuivi l'infraction en sachant que celle-ci faisait l'objet d'une enquête par la Commission.
103. Il est constant que le 28 juin 1995, la Commission a effectué des vérifications chez la majorité des entreprises présentes dans le secteur du chauffage urbain, mais pas dans les locaux de la requérante.
104. Il convient d'observer que le seul élément apporté par la Commission pour démontrer que la requérante, lors de sa poursuite de l'infraction, avait connaissance du fait que la Commission était en train de mener une enquête est le passage dans la déclaration de M. Molinari du 20 février 1997, figurant en annexe 187 de la communication des griefs, selon lequel, lors de la réunion du 9 juin 1995, à laquelle la requérante était présente, "une nouvelle rencontre [avait été] prévue à Milan pour le 5 juillet" mais que "cette rencontre [avait sauté] en raison de l'intervention des services anti-trust de la Commission".
105. Il y a lieu de noter que la requérante, même si elle reconnaît, d'une part, qu'elle a participé, le 9 juin 1995, à une réunion lors de laquelle il a été décidé de tenir une prochaine réunion, le 5 juillet 1995 et, d'autre part, que cette dernière réunion n'a pas eu lieu, elle conteste tout de même avoir été informée de ce que cette dernière réunion avait été supprimée à cause des vérifications effectuées par la Commission dans certaines entreprises.
106. Or, sans qu'il y ait besoin de statuer sur la crédibilité de la déclaration de M. Molinari, il suffit d'observer qu'il n'en ressort aucunement que les autres entreprises aient informé la requérante du fait que la Commission menait une enquête. Contrairement à ce que prétend la Commission, les raisons pour lesquelles la réunion du 5 juillet 1995 ne pouvait pas avoir lieu n'ont pas pu être communiquées à la requérante lors de la réunion du 9 juin 1995, étant donné qu'il ressort de ladite déclaration, d'une part, que la réunion du 9 juin 1995 a précisément été la réunion lors de laquelle la réunion du 5 juillet 1995 a été fixée et, d'autre part, que l'annulation de cette dernière réunion a été faite plus tard. Étant donné qu'il est avéré que la requérante, au sein de l'accord italien, n'a pas toujours été informée par les autres participants de leurs activités, il ne saurait être présumé, sans aucun indice susceptible d'étayer cette présomption, que la requérante a dû déduire du seul fait que la réunion du 5 juillet 1995 n'a pas eu lieu que ses activités au sein de l'accord faisaient l'objet d'une enquête par la Commission.
107. Par conséquent, la décision doit être annulée dans la mesure où le montant de base de l'amende à infliger à la requérante a été augmenté de 20 % en raison du caractère délibéré de la poursuite de l'infraction.
Sur l'appréciation erronée des circonstances atténuantes
- Arguments des parties
108. La requérante soutient que la Commission a effectué une appréciation erronée des circonstances atténuantes.
109. Premièrement, la requérante expose que la Commission a violé le principe d'égalité dans la mesure où elle lui a accordé la même réduction de deux tiers de l'amende que celle accordée à KE KELIT, en raison d'un rôle mineur dans l'entente, alors que la participation de la requérante a été plus brève que celle de cette entreprise et n'a pas concerné l'appartenance à un organe de l'entente générale.
110. Deuxièmement, la requérante aurait droit à une réduction de son amende en raison du fait qu'elle n'a pas participé au boycottage de Powerpipe et n'en avait même pas eu connaissance, étant donné que KWH s'est vu réduire son amende pour ne pas avoir participé à ce boycottage, même si cette entreprise a été membre du club des directeurs et acteur principal de la détermination des orientations de l'entente. En effet, le résultat du comportement de la requérante aurait été identique à celui de KWH. Un traitement différent n'aurait été justifié que dans le cas où l'une de ces deux entreprises se serait bornée à s'abstenir de participer à ce boycottage alors que l'autre aurait adopté un comportement actif d'opposition à cette action.
111. Par ailleurs, si la Commission avait voulu faire une distinction entre le comportement passif et le comportement actif à cet égard, elle aurait dû tenir compte du fait que la requérante n'a jamais été informée du plan de boycottage en raison de ses tentatives persistantes de distanciation par rapport aux comportements de ses concurrents et, en particulier, en raison de son refus d'accéder aux demandes provenant de certains concurrents d'adhérer à l'EuHP. Si la requérante avait été impliquée dans les activités de l'EuHP, elle aurait très probablement eu connaissance dudit boycottage. Par conséquent, le fait que la requérante, bien qu'ayant été invitée à plusieurs reprises à participer à l'EuHP, a toujours refusé d'y adhérer aurait dû être considéré comme tout aussi significatif, en tant que circonstance atténuante, que l'absence de participation au boycottage de Powerpipe. En effet, si la Commission a tenu compte du refus de KWH de participer à une pratique illicite considérée comme l'expression de l'entente générale, un critère similaire aurait dû s'appliquer également au refus de participer à d'autres pratiques restrictives.
112. À cet égard, il serait dépourvu de pertinence d'avancer que l'adhésion à l'EuHP n'a pas été considérée, dans le dispositif de la décision, comme un élément principal de l'infraction. Il ne découlerait ni de la pratique de la Commission ni de la jurisprudence qu'une amende ne puisse être augmentée ou réduite pour tenir compte de circonstances aggravantes ou atténuantes uniquement par rapport à un élément de l'entente résultant du dispositif de la décision. De même, il n'y aurait pas de sens d'affirmer que, s'il avait fallu accorder de l'importance à l'adhésion à l'EuHP, celle-ci aurait dû être considérée comme une circonstance aggravante pour tous les participants. En effet, l'application d'une seule circonstance atténuante aurait suffi à différencier la position de la requérante de celle des autres destinataires de la décision ayant adhéré à l'EuHP.
113. La requérante précise que, à l'égard des circonstances susmentionnées, elle ne se prévaut pas d'une illégalité commise en faveur d'autrui. Elle affirme que la Commission devait réduire davantage l'amende qu'elle lui a infligée et non pas que la Commission n'avait pas le droit de réduire celle de KWH ou de KE KELIT.
114. Troisièmement, la requérante invoque la circonstance atténuante, non prise en compte par la Commission bien qu'elle-même l'ait expressément invoquée dans ses observations sur la communication des griefs, consistant dans le fait que ses nouveaux propriétaires, succédant à l'actionnaire public à l'occasion de la privatisation de sa société-mère Ilva, peu après l'ouverture de l'enquête, auraient été totalement étrangers à l'infraction et auraient réagi, lorsqu'ils en étaient avisés, en licenciant tous les responsables. Le cas d'ABB démontrerait que la Commission, en principe, est disposée à attribuer, lors de l'appréciation des circonstances atténuantes, une certaine importance au fait qu'une entreprise démet de leurs fonctions les hauts dirigeants de la société qui étaient responsables de l'infraction. Or, la requérante aurait dû se voir reconnaître, à ce titre, une circonstance atténuante. En effet, les éléments qui, selon le considérant 182 de la décision, ont empêché la Commission, en l'espèce, de reconnaître une telle circonstance atténuante à ABB ne s'appliqueraient pas au cas de la requérante, où tout le personnel responsable de l'infraction a été licencié rapidement, et cela en présentant le licenciement, à tous les niveaux de l'entreprise, comme une sanction de la participation à des réunions anticoncurrentielles.
115. La défenderesse rétorque que, dans la mesure où elle a réduit l'amende à infliger à la requérante en raison de son rôle mineur dans l'infraction et de la limitation de sa participation à l'Italie, elle n'a commis aucune erreur dans l'appréciation des circonstances atténuantes à son égard.
116. Premièrement, la mise sur le même pied, à cet égard, de la requérante et de KE KELIT découlerait de l'imputation de l'entente globale à toutes les entreprises appartenant à la quatrième catégorie, étant donné qu'elles savaient toutes que leur participation aux réunions relatives à la répartition des quotas sur un marché national s'inscrivait dans le cadre d'un plan commun plus vaste. La requérante et KE KELIT auraient bénéficié d'une réduction importante de leur amende du fait que leur participation était limitée, respectivement, aux seuls marchés italien et autrichien.
117. En tout état de cause, même à supposer que la Commission ait commis une erreur dans la fixation de l'amende à imposer à la requérante et à KE KELIT, cette erreur aurait éventuellement été d'avoir infligé une amende trop basse à KE KELIT, mais non pas trop élevée à la requérante. Or, la requérante ne pourrait se prévaloir d'une éventuelle illégalité de l'amende infligée à KE KELIT. En effet, le respect du principe d'égalité de traitement devrait se concilier avec le respect du principe de légalité, selon lequel nul ne peut invoquer, à son profit, une illégalité commise en faveur d'autrui.
118. Deuxièmement, en ce qui concerne la réduction accordée à KWH, la Commission souligne que KWH a expressément renoncé à un comportement actif à l'égard du boycottage de Powerpipe, assumant ainsi tous les risques éventuels de rétorsion de la part des autres entreprises participant à l'entente. En revanche, la requérante n'aurait pas du tout participé à cet aspect de l'entente, n'ayant pas été au courant dudit boycottage. Or, elle ne pourrait évoquer en sa propre faveur une circonstance atténuante résultant d'un fait dont elle n'avait même pas eu connaissance.
119. À ce propos, la Commission estime avoir pleinement respecté le principe d'égalité de traitement. En effet, la situation de KWH et de la requérante ne pourrait être considérée comme identique en ce qui concerne leur comportement à l'égard du boycottage de Powerpipe, dans la mesure où la première en avait eu connaissance et ne l'avait pas accepté, tandis que la seconde l'avait ignoré. En ce qui concerne leur comportement vis-à-vis de l'entente, la participation plus durable de KWH se serait traduite par un montant plus important de l'amende que celui qui a été infligé à la requérante.
120. En ce qui concerne l'absence d'adhésion de la requérante à l'EuHP, la Commission rappelle que l'adhésion à l'EuHP ne figure pas, suivant le dispositif de la décision, parmi les caractéristiques principales de l'infraction, tandis que le boycottage de Powerpipe y est expressément mentionné. La Commission n'aurait attribué aucune importance déterminante à l'adhésion, en soi, d'une entreprise à l'EuHP, en ne la considérant pas non plus comme une circonstance aggravante. En effet, si l'adhésion à l'EuHP avait été considérée comme une circonstance aggravante, la Commission aurait dû majorer l'amende infligée à KWH. Dans ce cas, la requérante ne pourrait en aucun cas invoquer à son profit une illégalité commise en faveur d'autrui.
121. Troisièmement, pour ce qui est du licenciement des directeurs de la requérante, la Commission n'aurait disposé d'aucun document faisant apparaître que le nouveau propriétaire était entièrement étranger à l'infraction et qu'il aurait licencié les principaux responsables de celle-ci. Contrairement à ce que la requérante veut faire croire, cet élément n'aurait pas été invoqué au cours de la procédure administrative. De plus, même si la requérante l'avait invoqué, la Commission n'aurait pas été tenue de le prendre en considération. Quant au cas d'ABB, on ne pourrait aucunement déduire du considérant 172 de la décision concernant le refus de retenir les licenciements du personnel de la requérante en tant que circonstance atténuante que la Commission les aurait pris en considération si la situation avait été différente.
- Appréciation du Tribunal
122. En ce qui concerne l'appréciation de la situation particulière de la requérante par rapport à KE KELIT et à KWH et en ce qui concerne le fait que la requérante n'a pas adhéré à l'EuHP et n'a pas participé aux mesures prises à l'encontre de Powerpipe, il y a lieu de rappeler, ainsi que cela a été constaté, aux points 40 à 52 ci-dessus, que la Commission n'était pas en droit de reprocher à la requérante d'avoir participé à l'entente couvrant l'ensemble du Marché commun.
123.
Eu égard au fait qu'il convient de fixer un point de départ spécifique du calcul du montant de l'amende à infliger à la requérante, sur la base du rôle limité de la requérante au sein de l'accord italien et de la taille relativement restreinte du marché italien, à 300 000 euros, il n'y a plus lieu de prendre en considération, en tant que circonstance atténuante, le "rôle mineur" de la requérante dans l'infraction et la "limitation de sa participation à [...] l'Italie", tels que retenus, au considérant 182 de la décision, en tant que circonstance atténuante.
124. Dans la mesure où l'on ne saurait, dès lors, reprocher à la requérante d'avoir participé à la même infraction que celle reprochée à KE KELIT et à KWH, la requérante n'est plus en mesure de tirer argument d'une simple comparaison de son cas avec les situations particulières de ces deux autres entreprises, étant donné que les réductions accordées à ces dernières, en tant que circonstances atténuantes, portent sur le montant d'une amende calculé en fonction de leur participation à l'entente couvrant l'ensemble du Marché commun.
125. Ensuite, en ce qui concerne les licenciements par le nouveau propriétaire de la requérante du personnel responsable de la commission de l'infraction, il convient d'observer que la requérante n'a pas démontré qu'elle en a informé la Commission avant l'adoption de la décision. Tout comme l'avance la Commission, le seul document mentionnant le changement dans l'actionnariat de la requérante est la lettre de la requérante du 21 avril 1995 à l'EuHP, concernant la question d'une éventuelle adhésion à l'EuHP, jointe à ses observations sur la communication des griefs, dont il ressort uniquement que, à cette époque, la requérante venait d'être rachetée par le groupe RIVA. On ne saurait déduire de cette lettre ni d'un autre document du dossier que le nouveau propriétaire de la requérante aurait été étranger à l'affaire, ni qu'il aurait licencié les membres du personnel responsables de l'infraction.
126. Dès lors que la requérante n'a pas informé la Commission, au cours de la procédure administrative, des licenciements effectués par le nouveau propriétaire, elle ne saurait reprocher à la Commission de n'en avoir pas tenu compte, en tant que circonstance atténuante.
127. Par ailleurs, même si la Commission avait été au courant des licenciements de personnes responsables de l'infraction et même si ces licenciements avaient manifestement eu le caractère d'une sanction de la participation de membres du personnel à une infraction, la Commission n'aurait pas été tenue de prendre ce fait en considération pour réduire le montant de l'amende à imposer à la requérante. En effet, s'il est, certes, important que la requérante ait pris des mesures pour empêcher que de nouvelles infractions au droit communautaire de la concurrence soient commises à l'avenir par des membres de son personnel, ce fait ne change rien à la réalité de l'infraction qui a été constatée en l'espèce (arrêt du Tribunal du 17 décembre 1991, Hercules Chemicals/Commission, T-7-89, Rec. p. II-1711, point 357). En outre, si la mise en œuvre d'une telle politique de licenciements démontre la volonté de l'entreprise en cause de prévenir les infractions futures et constitue donc un élément permettant à la Commission de mieux accomplir sa mission consistant, notamment, à appliquer en matière de concurrence les principes fixés par le traité et à orienter en ce sens les entreprises, la Commission n'est pas obligée d'en tenir compte, en tant que circonstance atténuante, d'autant plus lorsque l'infraction en cause constitue une violation manifeste de l'article 85 du traité.
128. Il découle de ce qui précède qu'aucune circonstance atténuante ne peut être retenue par rapport à l'infraction commise par la requérante.
Conclusions
129. Il résulte des considérations qui précèdent que la décision doit être annulée en ce qu'il y est reproché à la requérante, outre sa participation à un accord sur le marché italien, d'avoir participé à une entente couvrant l'ensemble du Marché commun. Ainsi qu'il a été statué, au point 95 ci-dessus, il convient de déterminer le montant de base du calcul de l'amende à infliger à la requérante, en fonction de la gravité et de la durée de son infraction, à 300 000 euros.
130. Étant donné qu'aucune circonstance aggravante ou atténuante ne peut être retenue à l'égard de la requérante et qu'il n'est pas contesté que la requérante n'a droit à aucune réduction de son amende en vertu de la communication concernant la non-imposition d'amendes ou la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 1996, C 207, p. 4), il convient de ramener l'amende infligée par l'article 3, sous i), de la décision à 300 000 euros.
Sur les dépens
131. Aux termes de l'article 87, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, ce dernier peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs. En l'espèce, chacune des parties ayant succombé partiellement, le Tribunal estime qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de la cause en décidant que la requérante supportera ses propres dépens ainsi qu'un tiers des dépens de la Commission.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (quatrième chambre)
déclare et arrête:
1) L'article 1er de la décision 1999-60-CE de la Commission, du 21 octobre 1998, relative à une procédure d'application de l'article 85 du traité CE (IV/35.691/E-4 - Conduites précalorifugées), est annulé en ce qu'il constate que la requérante a enfreint les dispositions de l'article 85, paragraphe 1, du traité en participant, outre à une infraction desdites dispositions sur le marché italien, à une entente couvrant l'ensemble du Marché commun.
2) L'article 3, sous i), de la décision est annulé en ce qu'il impose à la requérante une amende dont le montant a été calculé sur la base d'une participation à l'entente couvrant l'ensemble du Marché commun et au regard du caractère délibéré de sa poursuite de l'infraction.
3) Le montant de l'amende infligée à la requérante par l'article 3, sous i), de la décision est ramené à 300 000 euros.
4) Le recours est rejeté pour le surplus.
5) La requérante supportera ses propres dépens et un tiers des dépens exposés par la Commission.
6) La Commission supportera deux tiers de ses propres dépens.