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Décisions

CJCE, 16 juin 1981, n° 126-80

COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Salonia

Défendeur :

Poidomani, Giglio

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Mertens de Wilmars

Présidents de chambre :

MM. Pescatore, Stuart

Avocat général :

M. Reischl

Juges :

MM. O'Keeffe, Bosco, Touffait, Due, Everling, Chloros

Avocat :

Me Luzzatto.

CJCE n° 126-80

16 juin 1981

LA COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTES EUROPEENNES,

1 Par ordonnance du 12 mai 1980, parvenue à la Cour le 27 mai 1980, le tribunale civile di Ragusa a posé, en vertu de l'article 177 du Traité CEE, plusieurs questions préjudicielles relatives à l'interprétation des dispositions du traité en matière de concurrence et notamment de l'article 85, en vue d'être mis en mesure d'apprécier la compatibilité avec les exigences du traité de certaines clauses contenues dans l'"accord national pour la réglementation de la revente des quotidiens et périodiques" (ci-après dénommé "accord national"), conclu le 23 octobre 1974 entre la "Federazione italiana editori giornali" et la "Federazione sindacale unitaria giornalai".

2 Ces questions ont été soulevées à l'occasion d'un litige opposant le titulaire d'une concession administrative pour la vente au détail de journaux et périodiques en général, aux propriétaires des messageries de presse à Ragusa, et portant sur le refus opposé par ces derniers audit titulaire, en 1978, de lui livrer des journaux et des périodiques.

3 A l'appui de leur refus, les propriétaires des messageries ont fait valoir qu'ils ne sont pas tenus de fournir les journaux et les périodiques aux titulaires d'une concession administrative pour la vente au détail, une telle concession n'ouvrant aux bénéficiaires qu'une simple possibilité d'être approvisionnés. Ils ont soutenu que le régime de distribution des journaux et périodiques en Italie faisait, à l'époque, l'objet de l'accord national précité et que la requérante au principal ne satisfaisait pas aux dispositions de l'article 2 dudit accord. Ils ont souligné, à cet égard, qu'aux termes de cette disposition, dans les communes où la population est supérieure à 2 500 habitants, les éditeurs ne peuvent céder leurs publications, en vue de la vente, qu'aux titulaires d'une carte professionnelle délivrée par une commission paritaire interrégionale, leur donnant droit à recevoir des messageries les publications destinées à la vente.

4 Le Tribunale civile di Ragusa, saisi en première instance du litige, a estimé, en se basant sur l'arrêt n° 2387 du 4 septembre 1962 de la Corte di cassazione, que ladite réglementation n'était pas contraire au droit interne italien, notamment aux dispositions de l'article 2598 du Code civil. Il n'a cependant pas exclu que les clauses de l'accord national comportant interdiction, aux éditeurs de journaux et périodiques, de livrer ces produits à des vendeurs qui n'ont pas obtenu la carte professionnelle, puissent s'avérer incompatibles avec les règles de concurrence du Traité CEE et, afin d'élucider ce point, il a renvoyé à la Cour les questions suivantes:

"1. L'accord (national du 23 octobre 1974 pour la réglementation de la revente des quotidiens et périodiques) présente-t-il le caractère d'une entente nationale de protection du marché de la distribution et de la vente de toute espèce de presse nationale et étrangère; constitue-t-il une infraction à l'interdiction des ententes, prévue par l'article 85 du traité, et provoque-t-il une distorsion des conditions de concurrence, eu égard à la réglementation particulière de l'accès au commerce des journaux, aux exigences minimales requises, aux obligations et aux mesures de sanction imposées aux revendeurs ?

2. L'accord cité n'est-il pas incompatible et ne tombe-t-il pas, par conséquent, sous l'interdiction de l'article 85, paragraphe 1, du traité, dans la mesure où il provoque une discrimination au détriment des revendeurs, malgré l'autorisation régulière de vente de journaux qui leur est accordée par l'autorité administrative compétente, du seul fait que ces revendeurs n'acceptent pas de se munir de la carte les autorisant à exercer l'activité de revente, dont la délivrance est laissée, par la réglementation de l'accord lui-même, au pouvoir discrétionnaire des commissions paritaires interrégionales (et actuellement de la commission nationale pour la diffusion des quotidiens et périodiques) ?

3. Cet accord ne porte-t-il pas atteinte au libre jeu de la concurrence, par lequel s'exprime le choix des consommateurs déterminant le nombre des points de vente de la presse, de la même manière que la réglementation de marché, instituée par l'Association néerlandaise des revendeurs de bicyclettes et d'articles similaires, dont les principes et les limitations sont analogues à ceux de l'accord des quotidiens, et qui a été interdite par la Commission exécutive (décision du 2 décembre 1977, JO L. 20 du 25. 1. 1978) ?

4. Les clauses d'interdiction de cession, en vue de la vente, contenues dans l'article 2 de l'accord en question et l'article 1 du règlement pour le fonctionnement des commissions paritaires, peuvent-elles être considérées comme répondant à des critères objectifs permettant d'exclure tout arbitraire ou peuvent-elles être exemptées en vertu de l'article 85, paragraphe 3, même dans le cas où elles ont été insérées en vue de contribuer à une amélioration de la distribution ?

5. Le fait d'exclure des fournitures les revendeurs qui, comme Mme Salonia, ne possèdent pas la carte d'autorisation imposée par cet accord et de retirer à cette catégorie de personnes la possibilité de se procurer d'une autre manière les produits afin de les vendre, exclut-il la possibilité d'appliquer l'exemption prévue par les règlements 19 et 67 et, si cette exemption est accordée, ne présente-t-il pas le caractère d'un cas de révocation du bénéfice ?

6. Le comportement prévu et réglementé dans l'accord en question ne constitue-t-il pas un abus de position dominante ?"

Sur la compétence de la Cour

5 Les défendeurs au principal allèguent qu'en l'espèce la Cour n'est pas valablement saisie au titre de l'article 177 du traité. Ils soutiennent, tout d'abord, que les questions posées n'ont aucun rapport avec l'objet véritable du litige, ni la demanderesse ni les défendeurs n'ayant invoqué, à l'appui de leurs thèses, une quelconque norme de droit communautaire. Ils font valoir, en outre, que les questions posées ont trait à un accord auquel aucune des parties au litige ne participe. Ils relèvent, enfin, que l'interprétation du traité demandée serait dépourvue de portée utile, l'accord national du 23 octobre 1974 n'étant plus en vigueur à l'époque des faits litigieux, et ne pouvant donc, à cette époque, constituer la base juridique du refus des messageries d'approvisionner la demanderesse.

6 Ainsi que la Cour l'a affirmé dans son arrêt du 19 décembre 1968 (Salgoil, 13-68, Recueil, p. 661), l'article 177 du traité, basé sur une nette séparation des fonctions entre les juridictions nationales et la Cour, ne permet pas à celle-ci de censurer les motifs de l'ordonnance de renvoi. En conséquence, le rejet d'une demande formée par une juridiction nationale n'est possible que s'il apparaissait de manière manifeste que l'interprétation du droit communautaire ou l'examen de la validité d'une règle communautaire, demandés par cette juridiction, n'ont aucun rapport avec la réalité ou l'objet du litige principal.

7 Tel n'est cependant pas le cas en l'espèce. Tout d'abord, le fait que les parties au principal n'ont pas évoqué, devant la juridiction nationale, un problème de droit communautaire ne s'oppose pas à ce que la Cour puisse être saisie par la juridiction nationale. En prévoyant la saisine à titre préjudiciel de la Cour lorsque "une question est soulevée devant une juridiction nationale", l'article 177, alinéas 2 et 3, du traité n'entend pas limiter cette saisine aux seuls cas où l'une ou l'autre des parties au principal a pris l'initiative de soulever une question d'interprétation ou de validité du droit communautaire, mais couvre également les cas où une telle question est soulevée par la juridiction nationale elle-même, qui estime une décision de la Cour sur ce point "nécessaire pour rendre son jugement".

8 De même, la circonstance que ni la requérante ni les défendeurs au principal ne soient parties à l'accord national au sujet duquel la juridiction nationale renvoie à la Cour des questions relatives à l'interprétation du traité ne met pas en cause la compétence de la Cour, l'application de l'article 177 du traité étant liée uniquement à l'exigence de permettre aux juridictions nationales de disposer de tous les éléments utiles de droit communautaire qui leur sont nécessaires pour rendre leur jugement.

9 Enfin, s'il est vrai que l'accord en question a été dénoncé par l'une des parties à compter du 31 mars 1976, de sorte qu'il n'était plus en vigueur à la date des faits litigieux ni à celle de l'ouverture de la procédure principale, soit les 21 et 22 septembre 1978, il n'en reste pas moins que les défendeurs au principal eux-mêmes n'ont pas exclu, dans leurs observations orales, la possibilité d'une application de fait de certaines clauses de l'accord à partir du 31 mars 1977. Au surplus, il ressort de l'ordonnance de renvoi qu'au cours de la procédure principale les défendeurs avaient invoqué les dispositions de l'accord national susdit, et plus particulièrement celles de l'article 2, afin d'obtenir le rejet de la demande.

10 Pour ces motifs, il y a lieu de rejeter l'exception soulevée par les défendeurs au principal.

Sur le fond

11 Il ressort des première et troisième questions que la juridiction nationale vise, en premier lieu, à savoir si les clauses d'un accord de portée nationale, limitant la livraison de journaux et périodiques aux seuls vendeurs agréés par un organisme professionnel où siègent les représentants des organisations nationales des éditeurs de journaux et des vendeurs, ne constituent pas une infraction aux règles de concurrence, visée à l'article 85 du Traité CEE.

12 Aux termes de l'article 85 du traité, est incompatible avec le Marché commun et interdit un accord qui est "susceptible d'affecter le commerce entre Etats membres" et qui a "pour objet ou pour effet" de porter atteinte au "jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun". Tel est le cas d'un accord qui, ainsi que la Cour l'a affirmé dans son arrêt du 6 mai 1971 (Cadillon, 1-71, Recueil, p. 351), permet d'envisager, sur la base d'un ensemble d'éléments objectifs de droit ou de fait, avec un degré de probabilité suffisant, qu'il puisse exercer une influence directe ou indirecte, actuelle ou potentielle, sur les courants d'échanges entre Etats membres dans un sens qui pourrait nuire à la réalisation des objectifs d'un marché unique entre Etats membres, et qui a pour objet ou pour effet de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du Marché commun.

13 En l'espèce, l'accord auquel se réfère la juridiction nationale prévoit la distribution exclusive en Italie de journaux et périodiques italiens, et comporte entre autres, à son article 2, l'application d'une clause de distribution sélective, en vertu de laquelle seuls les vendeurs agréés ont accès à la fourniture de journaux et périodiques.

14 Un pareil accord, s'étendant à l'ensemble du territoire d'un Etat membre, peut, de par sa nature même, avoir pour effet de consolider un cloisonnement de caractère national, entravant l'interpénétration économique voulue par le traité et assurant une protection à la production nationale.

15 S'il est vrai qu'en l'espèce l'accord dont il s'agit a uniquement pour objet la distribution des journaux et périodiques nationaux et ne vise pas celle des journaux et périodiques provenant des autres Etats membres, il n'en reste pas moins qu'un système de distribution par circuit fermé, s'appliquant à la plupart des points de vente de journaux et périodiques sur le territoire national, peut avoir des répercussions également sur la distribution des journaux et périodiques provenant des autres Etats membres.

16 Au vu de ces éléments, on ne saurait dès lors exclure, en principe, qu'un accord tel que celui visé par la juridiction nationale soit, compte tenu de son contenu et de sa portée, susceptible d'affecter, pour ce qui concerne la distribution des journaux et périodiques, le commerce entre Etats membres, au sens de l'article 85, paragraphe 1, du traité.

17 Il convient toutefois de rappeler qu'un tel accord échappe à la prohibition de l'article 85 lorsqu'il n'affecte pas le commerce entre Etats membres d'une manière sensible. S'il est vrai qu'en matière de presse l'appréciation du caractère sensible des effets qu'un accord de distribution peut exercer sur le marché est plus rigoureuse que dans le cas d'autres produits, il y a cependant lieu de prendre en considération, pour apprécier si un accord est susceptible d'affecter d'une manière sensible le marché des journaux et périodiques provenant des autres Etats membres, la circonstance, d'une part, que ce marché peut emprunter, pour la mise en vente dans la zone territoriale considérée, d'autres canaux de distribution que ceux réglés par l'accord et, d'autre part, que la demande portant sur lesdits produits s'avère rigide, en ce sens qu'elle ne présenterait pas de variations substantielles en raison de la mise en vigueur et de la cessation de l'accord dont il s'agit.

18 A cet égard, la circonstance qu'il ressort, des données chiffrées fournies par la Commission au cours de la procédure écrite et complétées lors de l'audience, que la demande de journaux et périodiques provenant d'autres Etats membres n'aurait pas connu de variations substantielles au cours des années 1972 à 1979 constitue un des éléments d'appréciation.

19 Il appartient à la juridiction nationale, sur la base de toutes les données pertinentes dont elle peut disposer, de déterminer si l'accord remplit, en fait, les conditions précitées pour tomber sous l'interdiction de l'article 85, paragraphe 1.

20 Compte tenu de ces éléments, il convient donc de répondre aux première et troisième questions qu'un accord de distribution exclusive de journaux et périodiques, tel que celui visé par la juridiction nationale, n'encourt l'interdiction de l'article 85, paragraphe 1, du traité que s'il s'avère susceptible d'affecter d'une manière sensible le commerce entre les Etats membres.

Sur les deuxième et sixième questions

21 Par sa deuxième question, la juridiction nationale demande si la clause de l'accord litigieux, selon laquelle seuls les revendeurs munis d'une carte professionnelle, délivrée par les commissions paritaires interrégionales, peuvent être admis à la vente de journaux et périodiques italiens, est source de discriminations contraires au traité.

22 Par sa sixième question, elle demande encore si une telle réglementation est de nature à constituer un abus de position dominante interdit par l'article 86, paragraphe 1, du traité.

23 Ces deux questions tendent essentiellement à savoir si l'accord auquel la juridiction nationale se réfère est compatible avec les dispositions du traité relatives à la concurrence, en ce que cet accord contient, à son article 2, une clause comportant l'application d'un critère de distribution sélective.

24 Ainsi qu'il résulte notamment de l'arrêt de la Cour du 25 octobre 1977 (Metro, 25-76, Recueil, p. 1875), les systèmes de distribution sélective constituent un élément de concurrence conforme à l'article 85, paragraphe 1, à condition que le choix des revendeurs s'opère en fonction de critères objectifs de caractère qualitatif, relatifs à la capacité du revendeur, de son personnel et de ses installations, en rapport avec les exigences de la distribution du produit, et que ces critères soient fixés de manière uniforme à l'égard de tous les revendeurs potentiels et appliqués de façon non discriminatoire.

25 Dans le cas d'un accord tel que celui visé par la juridiction nationale, il convient de tenir compte des dispositions de l'accord définissant les critères qui président au choix des vendeurs agréés telles que les dispositions de l'article 3, alinéa 10, et de l'article 4 de l'accord national litigieux, d'où il ressort que la carte professionnelle est concédée d'une manière générale aux personnes "professionnellement aptes à exercer l'activité de vendeurs de journaux".

26 En l'espèce, il appartient à la juridiction nationale d'apprécier, au vu de tous ces éléments, la réalité des conditions susceptibles de justifier l'application, dans le cadre de l'accord dont elle est saisie, du critère de distribution sélective litigieux.

27 Il y a donc lieu de répondre aux deuxième et sixième questions qu'une clause de distribution sélective, telle que celle contenue dans l'accord national visé par la juridiction nationale, limitant aux seuls vendeurs agréés munis d'une carte professionnelle la fourniture des produits relevant dudit accord, n'enfreint ni l'article 85, paragraphe 1, ni l'article 86, paragraphe 1, du traité, s'il apparaît que le choix des vendeurs agréés s'opère en fonction de critères objectifs, tenant à la capacité du revendeur, de son personnel et de ses installations, en rapport avec les exigences de la distribution du produit, et que ces critères sont fixés de manière uniforme à l'égard de tous les revendeurs potentiels et appliqués de façon non discriminatoire.

Sur la quatrième question

28 Par sa quatrième question, la juridiction nationale demande si les clauses de l'accord national litigieux, et notamment celles contenues dans le règlement relatif au fonctionnement des commissions paritaires interrégionales, peuvent bénéficier éventuellement de l'exemption prévue à l'article 85, paragraphe 3, du traité, au cas où il serait constaté qu'elles ont pour objet de contribuer à une amélioration de la distribution.

29 L'article 4, paragraphe 1, du règlement n° 17 du Conseil du 4 février 1962 (JO L. 13) prévoit que "les accords, décisions et pratiques concertées visés à l'article 85, paragraphe 1, du traité, intervenus après l'entrée en vigueur du présent règlement et en faveur desquels les intéressés désirent se prévaloir des dispositions de l'article 85, paragraphe 3, doivent être notifiés à la Commission. Aussi longtemps qu'ils n'ont pas été notifiés, une décision d'application de l'article 85, paragraphe 3, ne peut être rendue".

30 Il est constant que l'accord litigieux, intervenu après l'entrée en vigueur dudit règlement, n'a pas été, jusqu'à présent, notifié à la Commission. Dans ces conditions, aucune décision d'application de l'article 85, paragraphe 3, n'a pu être rendue à son sujet.

31 Il y a donc lieu de conclure que l'accord visé par la juridiction nationale ne pouvait, en l'absence de notification à la Commission, conformément à l'article 4, paragraphe 1, du règlement n° 17 du Conseil du 6 février 1962, faire l'objet de la déclaration d'inapplicabilité prévue à l'article 85, paragraphe 3, du traité.

Sur la cinquième question

32 Par la cinquième question, il est enfin demandé si l'accord litigieux peut éventuellement bénéficier de l'exemption par catégories prévue par le règlement n° 19-65 du Conseil du 2 mars 1965 et par le règlement n° 67-67 de la Commission du 22 mars 1967.

33 Le règlement n° 19-65 du Conseil (JO L. 36) prévoit, à son article 1, paragraphe 1, que, conformément à l'article 85, paragraphe 3, du traité, l'article 85, paragraphe 1, n'est pas applicable à des catégories d'accords "auxquels ne participent que deux entreprises" et qui présentent des caractéristiques déterminées.

34 La même disposition se retrouve à l'article 1, paragraphe 1, du règlement n° 67-67 de la Commission (JO L. 57). Il découle donc de ces dispositions qu'un accord ne peut bénéficier de l'exemption par catégories prévue par les règlements n° 19-65 et n° 67-67 susdits, qu'à la condition qu'il s'agisse d'un accord "auquel ne participent que deux entreprises".

35 Il est constant que l'accord national visé par la juridiction de renvoi a été conclu entre l'association des éditeurs italiens et l'association des revendeurs italiens de journaux. Les parties à l'accord étant des associations syndicales regroupant chacune de nombreux affiliés, elles ne sauraient être considérées comme "deux entreprises" au sens des règlements n° 19-65 et n° 67-67 précités, si bien que la condition prévue à l'article 1, paragraphe 1, de ces règlements n'apparaît pas en l'espèce remplie.

36 Il convient dès lors de répondre à la cinquième question que l'accord visé par la juridiction nationale, n'étant pas un accord "auquel ne participent que deux entreprises", au sens de l'article 1, paragraphe 1, du règlement n° 19-65 du Conseil du 2 mars 1965 et du règlement n° 67-67 de la Commission du 22 mars 1967, ne relève pas des catégories d'accords qui, en vertu desdits règlements, peuvent être exemptés de l'application de l'article 85, paragraphe 1, du traité.

Sur les dépens

37 Les frais exposés par la Commission des Communautés européennes, qui a soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet de remboursement; la procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs, LA COUR, statuant sur les questions à elles soumises par le Tribunale civile di Ragusa par ordonnance du 27 mai 1980, dit pour droit:

1) Un accord de distribution exclusive de journaux et périodiques, tel que celui visé par la juridiction nationale, n'encourt l'interdiction de l'article 85, paragraphe 1, du traité que s'il s'avère susceptible d'affecter d'une manière sensible le commerce entre Etats membres.

2) Une clause de distribution sélective, telle que celle contenue dans l'accord national visé par la juridiction nationale, limitant aux seuls vendeurs agréés munis d'une carte professionnelle la fourniture des produits relevant dudit accord, n'enfreint ni l'article 85, paragraphe 1, ni l'article 86, paragraphe 1, du traité, s'il apparaît que le choix des vendeurs agréés s'opère en fonction de critères objectifs, tenant à la capacité du revendeur, de son personnel et de ses installations, en rapport avec les exigences de la distribution du produit, et que ces critères sont fixés de manière uniforme à l'égard de tous les revendeurs potentiels et appliqués de façon non discriminatoire.

3) L'accord visé par la juridiction nationale ne pouvait, en l'absence de notification à la Commission, conformément à l'article 4, paragraphe 1, du règlement n° 17 du Conseil du 6 février 1962, faire l'objet de la déclaration d'inapplicabilité prévue à l'article 85, paragraphe 3, du traité.

4) L'accord visé par la juridiction nationale, n'étant pas un accord "auquel ne participent que deux entreprises", au sens de l'article 1, paragraphe 1, du règlement n° 19-65 du Conseil du 2 mars 1965 et du règlement n° 67-67 de la Commission du 22 mars 1967, ne relève pas des catégories d'accords qui, en vertu desdits règlements, peuvent être exemptés de l'application de l'article 85, paragraphe 1, du traité.