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Décisions

CJCE, 20 juin 1978, n° 28-77

COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Tepea (BV)

Défendeur :

Commission des Communautés européennes

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Kutscher

Présidents de chambre :

MM. Sørensen, Bosco

Avocat général :

M. Capotorti

Juges :

MM. Donner, Mertens de Wilmars, Pescatore, Mackenzie Stuart, O'Keeffe, Touffait

Avocats :

Mes Verzijl, Wichers Hoet, Grul

CJCE n° 28-77

20 juin 1978

LA COUR,

1. Attendu que le 21 décembre 1976 la Commission a pris une décision, publiée au Journal officiel n° L 39, p. 19 du 10 février 1977, concernant les entreprises Theal NV et Cecil E. Watts, présentement Tepea BV et Cecil E. Watts Ltd (désignées par la suite dans l'arrêt sous les vocables Theal et Watts), constatant dans un article premier:

- une infraction à l'article 85, paragraphe 1, du traité constituée par un accord verbal de distribution exclusive conclu entre Theal et Watts y compris la concession du droit exclusif de faire usage de marques déposées aux Pays-Bas;

- et une autre infraction sanctionnée par l'article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 17 du 6 février 1962, constituée par la fourniture d'indications inexactes et dénaturées dans la notification datée du 24 janvier 1963 faite par Theal;

puis, dans ses articles 2 et 3, que "la demande tendant à ce que, en application de l'article 85, paragraphe 3, les dispositions du paragraphe 1 soient déclarées inapplicables à l'accord visé à l'article 1 de la décision, était rejetée" et qu'il était enjoint à ces deux entreprises de mettre fin sans délai à l'infraction à l'article 85, paragraphe 1, du traité et de s'abstenir à l'avenir de tout acte quelconque visant à empêcher l'importation ou la revente de produits Watts aux Pays-Bas;

2. Qu'enfin chacune des entreprises était frappée, pour infraction à l'article 85, paragraphe 1, d'une amende de 10 000 unités de compte, soit pour Tepea BV 36 200 florins et pour Watts 4 166 livres sterling;

3. Qu'en outre, une amende de 5 000 unités de compte, soit 18 100 florins néerlandais, était infligée à Tepea BV pour avoir fourni des indications inexactes et dénaturées dans une notification faite conformément à l'article 5 du règlement n° 17;

4. Attendu que d'après les renseignements fournis par la Commission à l'audience, Watts se serait conformée à la décision de la Commission;

5. Attendu que par requête, parvenue au greffe le 24 février 1977, Theal a demandé:

a) l'annulation de la décision,

b) l'annulation des amendes infligées par la Commission;

6. Attendu que les antécédents et faits de la cause, pour autant qu'ils ne sont pas contestés peuvent être résumés comme suit;

7. Attendu qu'après avoir créé, en 1954, l'entreprise qui devait fabriquer et vendre les appareils de nettoyage pour disques d'enregistrement de son invention, Watts a conclu avec un distributeur par pays, aux Pays-Bas, en Belgique, au Danemark, en France, en Irlande, en Italie, des accords verbaux prévoyant que celui-ci opérerait en qualité de distributeur exclusif sur le territoire national qui lui était concédé;

8. Que Watts fournissait exclusivement une vingtaine de grossistes au Royaume-Uni auxquels il interdisait - du moins depuis mai 1972 - d'exporter ses produits dont l'emballage portait le mention "Not for export";

9. Qu'en 1972, les prix à l'exportation qui avaient été identiques ou similaires aux prix du marché intérieur ont commencé à monter par rapport à ces derniers;

10. Qu'en juillet 1974, le prix à l'exportation d'un même produit dépassait jusqu'a 32 % le prix intérieur, les différences de prix étant accrues par les disparités monétaires notamment entre les monnaies du Royaume-Uni et des Pays-Bas, et incitant les commerçants néerlandais à s'approvisionner directement en Angleterre de produits Watts plutôt que de s'adresser à Theal, concessionnaire exclusif aux Pays-Bas;

11. Attendu que, le 24 janvier 1963, Theal avait notifié à la Commission un accord de concession exclusive portant sur des appareils de nettoyage pour disques d'enregistrement, concernant des livraisons seulement à l'intérieur d'un Etat membre et n'ayant pas fait l'objet d'un écrit - établi avec Watts le 8 septembre 1956 - de durée indéterminée, aux termes duquel "l'usine s'engageait à ne livrer sur le territoire des Pays-Bas qu'à Theal NV et à lui transmettre toute commande provenant de ce territoire";

12. Qu'il était spécifié dans cette notification que l'accord n'excluait pas le libre jeu de la concurrence à l'intérieur de l'Etat membre, puisque cet accord ne valait que pour une seule marque;

13. Que, selon Theal, le nombre de marques concurrentes était élevé, que le consommateur conservait toute liberté à l'achat, et que l'accord avait uniquement pour but de mettre à la disposition dudit consommateur une organisation spécialisée pour lui assurer le meilleur service possible, en particulier après vente en cas de défauts éventuels des appareils livrés;

14. Que Theal avait répondu par la négative à la question de savoir si une répartition des marchés ou des sources d'approvisionnement n'était pas un des moyens prévus pour atteindre les objectifs de l'accord;

15. Qu'à la suite de cette notification, la Commission a informé Theal, par une lettre du 18 avril 1969, qu'après examen provisoire, l'accord notifié ne prévoyant pas de protection territoriale absolue, pouvait dès lors bénéficier de l'exemption prévue par le règlement n° 67-67, mais que, cependant, si l'accord ne répondait pas effectivement aux conditions d'exemption prévues dans ledit règlement, il devait être modifié en conséquence, auquel cas il ne serait exempté qu'à la date de cette modification;

16. Que Theal n'ayant pas répondu, la Commission n'avait aucune raison de mettre en doute le fait que l'accord était conforme aux dispositions de l'article 1, paragraphe 1, du règlement n° 67-67;

De l'application de l'article 85, paragraphe 1, du traité

17. Attendu que la requérante expose que s'il existait bien entre Watts et elle, depuis 1956, un accord verbal de distribution exclusive, par contre, à aucun moment, une convention relative à l'utilisation et à l'enregistrement de marques n'aurait été passée entre les deux entreprises;

18. Que c'est à tort que la Commission soutiendrait que la requérante aurait disposé des droits de marque de Watts aux Pays-Bas avec le consentement de Watts;

19. Qu'elle affirme que ce serait elle qui aurait créé les marques "Dustbug", "Disc Preener" et "Parastat" après la conclusion de l'accord de représentation exclusive des appareils de nettoyage pour disques farbriqués par Watts au Royaume-Uni;

20. Que les marques de Theal aux Pays-Bas et celles de Watts en Angleterre seraient entièrement indépendantes les unes des autres et auraient été créées de manière autonome, les marques anglaises étant nées sans que Theal en aurait eu connaissance;

21. Qu'elle aurait sur ces marques un droit exclusif en tant que droit autonome, n'appartenant à personne d'autre, mais qu'elle n'aurait jamais eu l'intention, par l'exercice de ses droits, de s'opposer ni en fait, ni juridiquement, à des importations parallèles;

22. Qu'elle n'aurait fait usage de ses droits de marque qu'à l'encontre de produits contrefaits qui ne proviendraient ni de la fabrication de Watts au Royaume-Uni, ni d'elle-même;

23. Qu'elle aurait obtenu plusieurs décisions de justice s'étageant de novembre 1972 à mai 1975, ordonnant à des commerçants néerlandais de cesser, dans les 24 heures, de vendre des articles portant ces marques, qui n'avaient pas été livrés par Theal;

24. Que, dans ces conditions, la requérante ne verrait pas "clairement" sur la base de quels faits ou de quelles déclarations la Commission serait parvenue à la conclusion qu'elle avait enfreint l'article 85, paragraphe 1, du traité et que la notification de l'accord du 24 janvier 1963 contiendrait des indications inexactes et dénaturées:

25. Attendu que la Commission a sanctionné Theal, entre autres pour ne pas lui avoir notifié que l'accord conclu avec Watts "comprenait la concession du droit exclusif de faire usage de marques déposées aux Pays-Bas", clause de l'accord qu'elle n'aurait découverte que le 11 juillet 1975, lors d'une réunion avec Theal et Watts;

26. Qu'au soutien de cette thèse, elle fait remarquer que c'est Watts qui, le premier, aurait employé les expressions "Dustbug", "Parastat" et "Disc Preener", qu'il aurait d'ailleurs fait enregistrer au Royaume-Uni les deux premières en qualité de marques, le 11 février 1958, la dernière quelque temps après;

27. Que Watts aurait donné son accord à Theal, à la demande de celui-ci, d'utiliser l'appellation "Dustbug" en son nom aux Pays-Bas, sous la forme "Do as you like";

28. Que l'accord donné expressément pour Dustbug se serait également appliqué aux marques Disc Preener et Parastat;

29. Que, dans une lettre, datée du 10 octobre 1973, signée par les deux directeurs de la requérante, celle-ci écrivait à Watts: "nous reconnaissons que votre société est propriétaire des marques "Dustbug, Disc Preener, Parastat et Watts", si vous consentez à renoncer à l'inscription de ces marques à votre nom au registre du Benelux ou, selon le cas, à votre demande d'inscription, nous nous engageons à entreprendre à tout moment, sur votre demande, les démarches nécessaires en vue de céder tout droit que nous pourrions détenir à votre société, à la société... qui sera désignée par vous...;"

30. Que la Commission considère que les termes de cette lettre, conformes à l'historique des relations des parties, à leurs déclarations et à leur comportement, représenteraient exactement la situation juridique née de leurs accords;

31. Que celle-ci aurait d'ailleurs été concrétisée quand Watts, ayant fait inscrire ses marques au registre Benelux le 23 décembre 1971, les en a fait radier le 23 octobre 1973, à la demande de Theal, pour favoriser le déroulement des procès intentés par celui-ci aux importateurs parallèles;

32. Qu'elle déclare sans pertinence les déclarations de la requérante disant qu'une nouvelle lettre du 18 octobre 1973 aurait annulé les termes de celle du 10 octobre 1973, alors que Watts affirme n'avoir jamais reçu le texte de cette abrogation et qu'en outre, il résulte d'un compte rendu d'un mandataire de Watts et d'une correspondance versée au dossier que la lettre du 10 octobre 1973, écrite à la suite de discussions approfondies entre les intéressés et leurs conseillers, devait notamment servir la cause de Theal dans le procès qui l'opposait à l'intervenant Wilkes;

33. Qu'en réalité, selon la Commission, ces accords de distribution exclusive et de concession du droit exclusif de faire usage des marques Watts auraient eu pour but d'assurer à Theal une protection territoriale absolue excluant toute importation parallèle de produits authentiques et, par ce fait, seraient justiciables de l'article 85, paragraphe 1;

34. Attendu qu'il résulte de l'ensemble des éléments du dossier que la requérante a effectivement eu, sur le marché des appareils de nettoyage pour disques d'enregistrement aux Pays-Bas, le comportement relaté par la Commission;

35. Qu'en ce qui concerne la concession du droit exclusif de faire usage des marques aux Pays-Bas, il peut être ajouté que le caractère distinctif du vocable "Dustbug" né du rapprochement original des deux mots "Dust" et "Bug" est dû - sans conteste - à l'inventeur de l'appareil de nettoyage pour disques;

36. Qu'il résulte même d'un article paru dans un journal anglais que ce terme a été employé par Watts dès 1955;

37. Que l'enregistrement, comme marque, aux Pays-Bas de cette appellation spécifiquement anglaise n'a donc pu être réalisée par Theal qu'avec l'autorisation de son inventeur, comme le dépôt de cette marque a été autorisé par Watts, par la suite en Belgique, au Luxembourg, en France, en Italie, en Allemagne;

38. Que cette autorisation donnée à Theal de la façon la plus générale sous la forme "Do as you like" portait nécessairement sur l'utilisation de toutes marques Watts;

39. Que les relations anciennes, la confiance commerciale, l'aide apportée au début de ses inventions à Watts par Theal, distributeur disposant d'une importante infrastructure, expliquent que leurs rapports soient nés, puis se soient développés, sans que les deux partenaires aient jugé nécessaire de les consigner par écrit;

40. Qu'il y a lieu de tenir pour acquis que les deux entreprises Watts et Theal étaient liées dès 1956 par deux accords verbaux, l'un reconnaissant à Theal la qualité de distributeur exclusif des produits Watts aux Pays-Bas et par lequel Watts s'engageait à approvisionner exclusivement Theal aux Pays-Bas et à lui remettre toutes les commandes reçues par Watts à destination des Pays-Bas, l'autre consistant en la concession du droit exclusif d'utiliser les marques attachées à ces produits aux Pays-Bas;

41. Que ces conventions verbales liant réciproquement deux entreprises constituaient des accords au sens de l'article 85, paragraphe 1, ayant pour conséquence de conférer à Theal aux Pays-Bas une protection territoriale absolue;

42. Que celle-ci était en outre, en 1956, assurée par le droit national applicable et renforcée plus tard par l'interdiction d'exporter imposée par Watts aux grossistes du Royaume-Uni et l'apposition d'une étiquette "een Theal produkt" sur les produits fournis par Watts à Theal qui permettait à celui-ci de s'assurer si des produits Watts ne provenant pas de son entreprise étaient offerts à la vente aux Pays-Bas;

43. Que l'ensemble de ce système fournissait à Theal le moyen de s'opposer à toutes importations parallèles du Royaume-Uni ou de tout autre Etat à destination des Pays-Bas et ainsi d'empêcher toute concurrence et, partant, de lui laisser toute liberté de fixer aux Pays-Bas, pour ces produits, des prix à l'abri de toute concurrence effective de la part des produits de la même marque;

44. Que l'utilisation habile du droit des marques a ainsi conforté la protection territoriale résultant de l'accord avoué de distribution exclusive, les deux techniques conjuguant leurs effets pour assurer une protection absolue et constante;

45. Que l'accord primitif ne peut donc être examiné sans tenir compte de la pratique concertée qui en assurait l'efficacité;

46. Attendu que pour être incompatible avec le Marché commun et interdit aux termes de l'article 85, un accord doit, en premier lieu, être "susceptible d'affecter le commerce entre Etats membres";

47. Que s'il résulte de la jurisprudence de la Cour (arrêt du 25 novembre 1971, affaire 22/71, Béguelin Import Co/SAGL Import-Export, Recueil 1971, p. 959) que le fait par l'une des entreprises participant à l'accord d'être située dans un pays tiers ne fait pas obstacle à l'application de l'article 85, dès lors que l'accord produit ses effets sur le territoire du Marché commun, encore faut-il considérer que cet accord échappe à la prohibition de l'article 85 lorsqu'il n'affecte le commerce intra-communautaire que d'une manière non sensible;

48. Que, tant que le Royaume-Uni est demeuré un pays tiers, les restrictions de concurrence nées de l'application des accords Watts/Theal n'ont eu d'effets réels que sur le commerce à l'intérieur des Pays-Bas et aucun élément dans le dossier ne permet de soutenir que le cloisonnement de ce marché national a entravé d'une manière sensible des courants d'échange entre Etats membres portant sur les produits Watts avant le 1er janvier 1973, date de l'adhésion du Royaume-Uni au Marché commun;

49. Que Theal a continué à faire jouer ces accords à son profit après cette date, puisqu'il a obtenu des jugements, les 16 janvier et 5 juin 1973 et 30 mai 1975, contre trois firmes qui se virent interdire l'importation directe aux Pays-Bas de produits Watts et qu'il a continué d'écrire aux revendeurs des Pays-Bas qui avaient achété des produits Watts directement ou indirectement auprès des grossistes du Royaume-Uni en leur indiquant que ces agissements constituaient une infraction à ses droits de marque aux Pays-Bas,

50. Que la prise en considération des effets concrets de ces accords montre qu'ils restreignaient les échanges intra-communautaires de façon sensible puisque la vente des appareils de marque Watts aux Pays-Bas représentait 15 % du marché des appareils de nettoyage de disques;

51. Qu'au vu de ces constatations, il est établi que, depuis le 1er janvier 1973, les accords entre Theal et Watts affectaient le commerce entre Etats membres;

52. Attendu que la prohibition de l'article 85, paragraphe 1, réclame, en deuxième lieu, pour s'appliquer une deuxième condition: que l'accord en cause ait pour objet ou pour effet de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du Marché commun;

53. Que les accords entre Theal et Watts avaient pour but et pour effet essentiels d'empêcher le jeu de la concurrence dans la zone protégée à l'intérieur du Marché commun;

54. Qu'il apparaît des pratiques des importateurs parallèles et des risques qu'ils encouraient en s'y livrant, qu'il y avait une demande spécifique de produits Watts aux Pays-Bas;

55. Que le comportement de Theal montre que celui-ci redoutait la concurrence de commerçants s'approvisionnant en dehors de ses magasins alors que les produits Watts représentaient plus de 25 % de son chiffre d'affaires;

56. Qu'il résulte de l'ensemble de ces constatations que les accords en cause, depuis le 1er janvier 1973, affectant le commerce entre Etats membres des appareils de nettoyage de disques d'enregistrement et ayant pour effet de priver les utilisateurs des avantages découlant d'une concurrence effective entre produits d'une même marque pouvant résulter de débouchés et de sources d'approvisionnement plus nombreux et de prix plus bas sont incompatibles avec le Marché commun et tombent sous l'interdiction de l'article 85, paragraphe 1;

57. Attendu qu'au surplus ces accords qui assuraient à Theal une protection territoriale absolue en empêchant les importations parallèles, protection encore renforcée par l'interdiction d'exporter imposée par Watts, ne contribuaient pas à améliorer la production ou la distribution des produits, ni à promouvoir le progrès technique ou économique, qu'ils ne pouvaient donc - même s'ils avaient été notifiés régulièrement ou avaient été exemptés de la notification - bénéficier de l'exemption prévue par l'article 85, paragraphe 3, les conditions requises pour l'application de cet article n'étant pas réunies;

De l'application de l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17

58. Attendu qu'aux termes de l'article 15, paragraphe 2, la Commission peut infliger des amendes de mille unités de compte ou plus, montant pouvant être porté à 10 % du chiffre d'affaires réalisé au cours de l'exercice social précédent par l'entreprise ayant commis l'infraction, lorsque, de propos délibéré ou par négligence, elle commet une infraction aux dispositions de l'article 85, paragraphe 1;

59. Attendu que les agissements reprochés à Theal sont justiciables de l'article 85, paragraphe 1;

60. Que, pour déterminer le montant de l'amende qui doit lui être infligée, il y a lieu de prendre en considération la durée et la gravité de l'infraction;

61. Attendu, en ce qui concerne la durée, que la Commission, dans les motifs de la décision, a déclaré qu'elle "n'avait pas l'intention de tenir compte des infractions antérieures à mai 1972, date à laquelle l'interdiction d'exporter était incontestablement en vigueur et portait ses effets" et qu'en ce qui concerne plus particulièrement Theal, elle retenait la date de septembre 1972, époque où, pour la première fois, le requérant avait exercé ses droits de marque pour empêcher des importations parallèles;

62. Que, s'il est vrai que les faits existaient à partir du 24 janvier 1963, l'infraction ne s'est matérialisée qu'à partir du 1er janvier 1973, date d'adhésion du Royaume-Uni au Marché commun;

63. Que le faible décalage dans la durée entre la date retenue par la Commission - septembre 1972 - et la date réelle du début de commission de l'infraction - 1er janvier 1973 - conduit à considérer qu'il ne doit pas avoir d'influence sur l'appréciation du montant de l'amende;

64. Attendu qu'en ce qui concerne la gravité, il faut noter que la requérante a ensuite persisté dans cette voie en s'adressant à trois autres reprises aux tribunaux néerlandais, alors que son attention avait été attirée sur les règles de concurrence établies par le Traité de Rome;

65. Que, par ailleurs, les agissements de Theal ont entraîné des restrictions évidentes de la concurrence qui contreviennent à l'un des objectifs fondamentaux du traité qui est d'établir dans la Communauté un marché unique;

66. Qu'il y a cependant lieu de tenir compte que, de par leur nature, les produits en cause ne pèsent que marginalement sur les dépenses des utilisateurs;

67. Que, si le comportement de Theal a contribué à éliminer la concurrence entre produits de la même marque, la perte pour l'utilisateur n'a pas été sévère, étant donné le prix du produit en cause et son importance relativement minime pour l'utilisateur habituel;

68. Qu'au vu de l'ensemble de ces considérations, l'amende le 10 000 unités de compte infligée par la Commission pour l'infraction à l'article 85, paragraphe 1, commise par Theal ne paraît pas disproportionnée par rapport à sa gravité et à sa durée;

De l'application de l'article 15, paragraphe 1, a), du règlement n° 17

69. Attendu qu'aux termes de l'article 15, paragraphe 1, du règlement n° 17, la Commission peut, par voie de décision, infliger aux entreprises des amendes d'un montant de cent à cinq mille unités de compte lorsque, de propos délibéré ou par négligence, elles donnent des indications inexactes ou dénaturées à l'occasion d'une notification en application des articles 4 et 5 dudit règlement;

70. Que l'infraction commise par Theal en fournissant des indications inexactes et dénaturées l'a été, sinon de propos délibéré, à tout le moins par négligence, puisque son attention était clairement attirée dans le formulaire de notification sur l'obligation d'informer la Commission du contenu de l'accord et d'indiquer s'il comportait une répartition des marchés ou une restriction de la liberté d'acheter ou de revendre à des tiers ou pouvait, de toute autre manière, avoir pour objet ou pour effet de restreindre ou de fausser la concurrence et alors que, dans la notification que la requérante a adressée à la Commission, elle n'avait pas déclaré l'accord sur la concession du droit exclusif de faire usage de marques déposées aux Pays-Bas et des effets de protection absolue de ce territoire, la combinaison de ces deux accords empêchant les importations parallèles et faussant la concurrence à l'intérieur du Marché commun;

71. Attendu qu'il en résulte que la Commission a été abusée sur le contenu réel des accords qui liaient Watts et Theal, du 24 janvier 1963, date de la notification, jusqu'à ce que Wilkes ait attiré son attention sur ceux-ci dans sa demande du 30 janvier 1974;

72. Qu'en raison de la gravité de cette infraction, caractérisée par l'erreur dans laquelle a été entretenue la Commission pendant 11 années, l'amende de 5 000 unités de compte infligée à Tepea BV paraît entièrement justifiée;

Sur les dépens

73. Attendu qu'aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens;

74. Que la requérante a succombé sur tous les chefs de sa demande;

75. Qu'il convient de la condamner aux dépens, y compris ceux de l'intervention.

Par ces motifs,

LA COUR

déclare et arrête:

1) Le recours est rejeté;

2) La requérante supportera les entiers dépens, y compris ceux des intervenants.