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Décisions

CA Paris, 5e ch. B, 18 octobre 2001, n° 1999-10908

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Grand Café de Paris et Casino (SA)

Défendeur :

Pari Mutuel Urbain (GEI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Main

Conseillers :

M. Faucher, Mme Briottet

Avoués :

Me Baufume, SCP Regnier Bequet

Avocats :

Mes Vernet Sibel, Chain.

TGI Paris, 4e ch., 1re sect., du 27 janv…

27 janvier 1999

La Cour est saisie de l'appel interjeté par la SA Grand Café de Paris & Casino du jugement contradictoirement rendu le 27 janvier 1999 par le Tribunal de Grande Instance de Paris qui, dans le litige l'opposant au GIE Paris Mutuel Urbain en raison du non-renouvellement d'un contrat de fonctionnement d'un point courses, a dit que la convention résiliée le 10 mars 1997 à effet du 14 septembre 1997 n'était pas une convention d'agent commercial et, avant dire droit sur le moyen tiré de l'abus de dépendance économique, a ordonné une mesure d'expertise.

Dans ses dernières conclusions du 28 août 2001 l'appelante fait valoir :

- que, étant indépendante, dans la mesure où elle assumait seule les risques liés à l'exploitation d'un point courses, et chargée par son mandant de prospecter, négocier et conclure des ventes en son nom, elle était liée au PMU par un Contrat d'Agent Commercial dont la rupture doit être indemnisée,

- que, subsidiairement, l'ayant convaincue en 1991 d'abandonner son activité de restauration pour celle d'un point courses, c'est de façon abusive et de mauvaise foi que l'intimé a rompu le mandat qui la liait à lui, à un moment où son amortissement n'était pas achevé.

- que, en raison de la résiliation du contrat, elle a souffert d'un manque à gagner et d'un préjudice moral.

En conséquence la société Grand Café de Paris & Casino prie la Cour d'infirmer le jugement déféré et,

- à titre principal, de dire que la "convention de fonctionnement de point courses PMU" est un contrat d'agent commercial donnant droit, lors de sa cessation, à une indemnité compensatrice,

- à titre subsidiaire de juger abusive la rupture de son contrat,

- en tout état de cause de condamner le PMU à lui payer

* 2.250.000 F avec intérêts compensatoires au taux légal et anatocisme à compter du 14 septembre 1997, date d'effet de la rupture des relations contractuelles,

* 100.000 F de dommages-intérêts pour préjudice moral et perte d'image de marque,

* 50.000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- à titre très subsidiaire de confirmer la mesure d'expertise et de fixer un nouveau délai de consignation.

Dans ses ultimes écritures du 20 août 2001 le GIE PMU soutient pour sa part

- que, non inscrite au Registre spécial des Agents Commerciaux, l'appelante, qui ne disposait d'aucune marge de négociation, ne peut en l'espèce invoquer les dispositions de l'article 12 de la loi du 25 juin 1991,

- que, conforme aux stipulations contractuelles, le non renouvellement du contrat, lequel n'était pas lié à une politique commerciale nouvelle, n'est pas abusive et ne peut donner lieu à une indemnisation,

- que le préjudice invoqué n'est pas démontré.

Dès lors le PMU demande de déclarer mal fondé l'appel de la société Grand Café de Paris & Casino et de l'en débouter, de confirmer le jugement critiqué en ce qu'il a déclaré que la demanderesse ne pouvait revendiquer le statut d'Agent Commercial, de constater l'abandon des moyens fondés sur l'application de l'article 8 de l'Ordonnance du 1er décembre 1986, de déclarer l'appelante mal fondée en sa demande de dommages-intérêts et de la condamner à lui payer 25.000 F au titre de ses frais irrépétibles.

SUR CE : Considérant qu'après avoir conclu pour un an, avec le PMU, le 18 octobre 1991, une "convention de fonctionnement de point courses" renouvelable d'année en année par tacite reconduction, la société Grand Café de Paris & Casino en a signé une seconde avec l'intimée le 16 novembre 1993:

Que cette nouvelle convention, elle aussi conclue pour une durée d'un an, renouvelable d'année en année par tacite reconduction et résiliable annuellement par l'une ou l'autre des parties moyennant un préavis donné par lettre recommandée avec demande d'avis de réception 6 mois au moins avant l'expiration d'une période annuelle en cours, était définie comme un mandat et donnait lieu au versement de commissions, le PMU prenant en outre note "qu'en contrepartie des frais que le titulaire a exposés pour la mise à disposition d'un service spécifique au public, il percevra un droit d'entrée qu'il a fixé à 15 F";

Considérant que le 1er octobre 1996 l'intimé a adressé une lettre à la société Grand Café de Paris & Casino dans laquelle, après lui avoir rappelé l'existence, depuis 1995, d'une "chute du chiffre d'affaires" de son point de vente, il la remerciait de la décision par elle prise de "mettre en œuvre certaines actions";

Que le 12 février le PMU informait l'appelante de ce que, à défaut d'une amélioration constatée, l'accord conclu le 16 novembre 1993 allait être remis en cause ;

Que le 10 mars 1997 le mandant informait son mandataire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception qu'il avait décidé de ne pas renouveler son contrat au-delà du 14 septembre 1997, à savoir la veille de la date anniversaire de sa prise d'effet, le 15 septembre 1991;

Considérant que, se prévalant du statut d'agent commercial et, subsidiairement d'une rupture abusive du contrat, l'appelante, qui ne reprend pas devant la Cour son argumentation relative à l'application de l'article 8 de l'Ordonnance du 1er décembre 1986 (article L. 420-2 du Nouveau Code de Commerce), de sorte que l'expertise ordonnée en première instance devient sans objet, sollicite la condamnation du PMU à lui payer l'indemnité prévue par l'article 12 de la loi n° 91-593 du 25 juin 1991 (article L. 134-12 du Nouveau Code de Commerce);

Considérant qu'aux termes de l'article L. 134-1 de ce Code "L'agent commercial est un mandataire qui, à titre de profession indépendante, sans être lié à un contrat de louage de services, est chargé, de façon permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, d'achat, de location ou de prestations de services, au nom et pour le compte de producteurs, d'industriels, de commerçants ou d'autres agents commerciaux. Il peut être une personne physique ou une personne morale";

Mais considérant que, comme l'a jugé le Tribunal, la société Grand Café de Paris & Casino, qui avait reçu mandat d'effectuer "les opérations afférentes à l'enregistrement et au paiement de paris", puis de restituer les fonds ainsi perçus, n'a pas exercé une activité d'agent commercial;

Qu'à cet égard, en effet, comme l'ont retenu les premiers juges, l'appelante, qui au demeurant n'avait reçu mission de démarcher la clientèle, était soumise, d'une part à un contrôle prégnant de son mandant sur les conditions d'exploitation du pont de vente, en particulier sur l'aménagement des lieux qui devaient répondre à des normes précises, d'autre part à des consignes législatives réglementaires très strictes lui ôtant toute marge de négociation (article 13.3 du contrat);

Considérant que, en ce qui concerne le non-renouvellement du contrat, force est de constater :

- que celui-ci respecte les normes contractuellement prévues et, en application de son article 7.1, ne peut donner lieu à indemnisation,

- que l'attitude du mandant est exclusive de toute déloyauté dans la mesure ou, avant même sa notification, il avait informé l'appelante de l'éventualité de ce non-renouvellement consécutif à une baisse de chiffre d'affaires, non sérieusement contestée par le mandataire dans sa lettre du 11 mars 1997, dont la cause ne peut être déterminée avec certitude;

Qu'en conséquence l'appelante, qui ne peut faire supporter au PMU le risque par elle pris en 1991 de fermer son restaurant et d'installer dans ses locaux son point de vente, doit être déboutée de ses demandes;

Considérant qu'il est équitable d'allouer au GIE PMU une indemnité de 8.000 F sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile;

Considérant que l'appelante, partie perdante, ne peut obtenir le remboursement de ses frais irrépétibles;

Par ces motifs : Confirme le jugement déféré en ses dispositions non contraires au présent arrêt et, y ajoutant, déboute la société Grand Café de Paris & Casino de ses demandes, y compris celle d'expertise.